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Critiques en vrac

Page mise à jour le 06/11/2024

 

1895-1949 - 1950-1967 - 1968-1977 - 1978-1989 - 1990-2002 - 2003-2010 - 2011-2024 - Séries

Les amants du Capricorne 

Un film d'Alfred Hitchcock (1949) avec Ingrid Bergman et Joseph Cotten. On a je pense, parfaitement le droit d'être le maître du suspense mais de s'essayer à autre chose. Au commencement on ne sait pas où on s'embarque ! Une histoire d'adultère, un ménage à trois, un vague remake de Rebecca ? Ben, non ce n'est pas ça du tout, c'est le triomphe de l'amour fou ! Et c'est réalisé de façon splendide avec des acteurs au top (Cotten, et Bergman bien sûr mais aussi l'étonnant Michael Wilding, peu célèbre mais qui fut 5 ans le mari d'Elisabeth Taylor) dans un rôle étonnant. C'est beau, c'est flamboyant, c'est émouvant, c'est un chef d'œuvre… Et même si ce ne n'est pas un film de suspense la tension est par moment bel et bien là. Un mot sur la très belle musique, elle est de Richard Addinsell, l'auteur du Concerto de Varsovie.

Mission à Tanger 

Un film d'André Hunebelle (1949). Un petit film d'espionnage sans réelles surprises, avec son lot de situations téléphonées, de facilités de scénario et d'invraisemblances. La touche d'humour qui saupoudre le film ne fonctionne pas, Raymond Rouleau est à la limite du supportable, mais la présence magique de la délicieuse Gaby Sylvia éclaire le film. Sinon la vraie/fausse révélation finale rend le film encore plus invraisemblable si elle est vraie et ne sert à rien si elle est fausse. Pas terrible.

Branquignol  

Un film de Robert Dhery (1949). C'est toujours un vrai plaisir de voir du non-sens parfaitement maîtrisé, et ici Dhery a mis le paquet. Les situations absurdes s'enchaînent à un rythme effréné. Tout le monde à l'air de bien s'amuser et les filles sont mignonnes. Dommage qu'à la fin Dhery en cow-boy tue le rythme avec un gag raté et interminable. C'est très bon même si on peut préférer "A nous les belles bacchantes" ou encore mieux "Hellzzpoppin".

Nous avons gagné ce soir   

Un film de Robert Wise (1949) avec Robert Ryan. Si le scénario est minimaliste, le traitement est prodigieux, ce film de 72 minutes est en temps réel à la minute près. Une contrainte folle proche de l'exercice de style, mais réussi car grâce à un montage très nerveux, on n'en a conscience (et encore !) que quand apparaissent des pendules à l'écran. C'est très noir, sans concession et assez briseur de rêves mais passionnant.

Monsieur Joe  

Un film de Ernest B. Schoedsack (1949) Considéré par certains comme un sous King Kong, il convient de le réévaluer à sa juste valeur. Certes le produit est familial, exit donc l'érotisme sous-jacent de King Kong, mais il se garde de toute niaiserie, certes le scénario n'est qu'in fil rouge prétexte aux effets spéciaux, mais ces effets spéciaux là sont bluffants et parfaitement intégrés à l'histoire. Quant à la scène de l'incendie de l'orphelinat, en bistre, si elle arrive dans le récit comme un cheveu sur la soupe, elle reste néanmoins saisissante. Finalement c'est un très bon film de genre, bien réalisé et attachant.

Aux deux colombes  

Un film de Sacha Guitry (1949) On se demande au début si Sacha Guitry ne se moque pas du monde. Après un générique très original nous expliquant bien comme il faut que ce qui va suivre est bien du cinéma, nous nous retrouvons au théâtre dans une mise en scène quasi statique et une exagération verbale. Heureusement après une première demi-heure peu intéressante, le propos s'envole et Guitry sait à nouveau nous ravir de son talent. On remarquera l'éblouissante prestation de Marguerite Pierry (la première épouse un peu dingue) et la beauté de Lana Marconi (qui était Madame Guitry à l'époque du film)

Le troisième homme 

Un film de Carol Reed (1949) avec Joseph Cotten, Alida Valli, Orson Welles. Ce film à sa légende et ne vaudrait que par son exceptionnelle musique et par la participation d'Orson Welles. Ben non, ce film prend le prétexte d'une enquête policière (qui n'a rien d'exceptionnelle) pour nous décrire la quête d'un anti héros (J. Cotten) plongé dans l'univers glauque de la Vienne d'après guerre. C'est traité tambour battant, avec une photographie impressionniste saisissante. Certaines scènes sont à couper le souffle, on reste scotché sur son fauteuil. Chef d'œuvre !

L'homme de la Tour Eiffel 

Un film de Burgess Meredith (1949). Charles Laughton joue un étonnant et débonnaire Commissaire Maigret dans ce film qui souffre de l'inconsistance du scénario et perd complètement son intérêt à mi-film. La fin nous réveille un peu avec une amusante (à défaut d'être crédible) scène de poursuite sur les poutrelles de Tour Eiffel. Pas terrible, tout ça !

Occupe-toi d'Amélie ! 

Un  film de Claude Autant-Lara (1949) avec Danielle Darrieux, Jean Dessailly, Carette. Réalisé d'après la pièce de Georges Feydeau (1908). Le moins qu'on puise dire c'est que ça déménage ! Ça entre, ça sort, ça défile, ça hurle, ça se croise et les spectateurs quittent leur loge pour entrer dans la pièce (on a même droit à un entracte avec des encarts publicitaires et autres). D'une fantaisie entraînante et d'un amoralisme réjouissant, le scénario se moque de l'institution du mariage et choisit comme héroïne une "cocotte" remarquablement interprétée à la fois avec charme et pétulance par une Danielle Darrieux en pleine forme. La distribution et la direction d'acteur est très bonne, (à noter la présence dans le générique de Grégoire Aslan, dit Coco Aslan, dans le rôle du prince Nicolas de Palestrie, qui fut chanteur et batteur dans l'orchestre de Ray Ventura). La mise en scène est impeccable et souvent très inventive, la musique est bonne, les décors, les éclairages, tout est bon. Bref un chef d'œuvre méconnu.

Le Mystérieux Docteur Korvo  

Un film d'Otto Preminger (1949) avec Gene Tierney. Comme dans beaucoup de polars, l'installation de l'intrigue est passionnante et plutôt bien menée, ici le souci vient avec la seconde partie, qui non seulement est assez convenue sans surprise, ni suspense mais  lorgne du côté de la série Z. Au niveau distribution si Gene Tierney est bien (quoiqu'un peu figée) ainsi que José Ferrer, en revanche l'interprétation du mari (Richard Conte) est catastrophique. Un peu frustrant car on ne peut s'empêcher de penser que ça aurait pu (que ça aurait dû !) être bien mieux.

Une femme par jour  

Un film de Jean Boyer (1949) avec Jacques Pills et Denise Grey. La réalisation est bonne et avec une idée de départ farfelue et un panel de huit jeunes femmes adorables il y avait de quoi faire quelque chose. Mais ce n'est pas la faute de Boyer si le film est plombé par un moralisme poussif qui en devient pénible et par Denise Grey qui en fait des tonnes au point qu'elle en devient insupportable. Reste quelques numéros musicaux (mais pas tous) et le charme de ces demoiselles, mais ça ne fait pas le compte.

Le signal rouge 

Un film de Ernest Neubach (1949) avec Eric Von Stroheim. Excellente surprise que ce film qui ne ressemble à aucun autre et où se mélange folie, jalousie, passion, meurtre. C'est parfaitement maîtrisé avec un Erich Von Stroheim encore une fois magistral et ici inquiétant au possible et une étonnante Denise Vernac (la compagne de Von Stroheim à la ville) qui joue à la perfection. Les retournements de situations sont très bien gérés et la fin du film joue avec nos nerfs. Bien qu'anecdotique le rôle de la sémillante danseuse joué par la chanteuse d'operette Claude Chenard n'est vraiment pas mal du tout. Yves Deniaud n'a qu'un petit rôle mais c'est toujours un plaisir de e voir jouer. La photographie est très soignée, certaines scènes sont directement inspirées par l'expressionnisme allemand. Loin d'être un film mineur, il s'agit d'une oeuvre solide qu'il convient de réévaluer d'urgence !

Monseigneur 

Un film de Roger Richebé (1949) avec Bernard Blier et Fernand Ledoux. Quand on croit que le film est fini, il n'est pas terminé, et alors qu'on avait un film léger au scénario inepte mais dont le côté farfelu n'avait rien de déplaisant, le film lève son voile avec cette scène d'un ridicule consternant au square Louis XVI. Sous la farce laborieuse mais sauvé par les deux acteurs vedettes se cachait donc un film de propagande royaliste. Le sachant, ça peut néanmoins se regarder comme un film purement anecdotique.

L'éventail de Lady Windermere 

Un film d'Otto Preminger.(1949) avec George Sanders et Madeleine Carroll. Bien sûr le film est d'une belle élégance, la photo et les cadrages sont parfaits, Georges Sanders est toujours aussi raffiné, les femmes sont splendides. Mais c'est au niveau du scénario que ça ne va pas, le début est confus, quand on commence à comprendre on se dit "tout ça pour ça ?". A l'origine il s'agissait d'une pièce d'Oscar Wilde contre le mariage. Le film lui n'a rien de subversif, et se résume à un brillant drame mondain dont on se fout un peu..

Scandale aux Champs-Élysées 

Un film de Roger Blanc (1949) avec Pierre Renoir. Une bonne surprise et une façon de raconter qui surprend agréablement. Ce n'est pas tous les jours que l'on voit un commissaire de police patauger dans la choucroute et son adjoint perdre complètement les pédales. La réalisation est efficace, la direction d'acteurs est étonnamment bonne, l'intrigue tient la route et toutes ces dames sont charmantes. Un régal !

La brigade des stupéfiants 

Un film de Lazlo Benedel (1949) avec Yul Brynner. Un petit polar très nerveux et bien photographié.. La première partie se contente de nous narrer une enquête policière de façon quasi documentaire avec voix off, c'est assez bien fait mais sans originalité, Ça s'anime un peu plus en milieu de film et ça devient plus intéressant avec un bon suspense en dernière partie. L'interprétation est dominée par la présence de Yul Brynner qui joue un personnage un peu dandy et très inquiétant (avec ses cheveux, en plus) A remarquer que l'histoire se moque pas mal des codes du genre, parfois ça fait du bien !

Je n'aime que toi 

Un film de Pierre Montazel (1949) avec Luis Mariano, Martine Carol, Robert Dhery. Une comédie gentillette et ratée prenant le parti de défendre la fidélité conjugale avec des gros sabots. La mise en scène est hystérique, on pourrait même dire fatigante. Côté acteurs : Mariano est mauvais mais la scène où il chante en petit tutu de Tarzan mérite de figurer dans l'anthologie du grand n'importe quoi, Martine Carol est bien photographiée mais son rôle est idiot, Robert Dhéry lui est assez surprenant, beaucoup d'acteurs secondaires qu'on ne voit pas beaucoup… Allez on oublie !

Valse brillante 

Un film de Jean Boyer (1949) avec Martha Eggerth, Jan Kiepura, Lucien Baroux. Martha Eggerth et Jan Kiepura ? Qui se souvient de ce couple de chanteurs d'opérettes viennoises. Pourtant ce ne serait que justice de les redécouvrir. Jean Boyer qui quand le sujet l'intéresse filme plutôt bien, a réussi à mettre le couple en valeur malgré un scénario assez puéril. Et si Kiepura est très bon, Martha Egerth crève littéralement l'écran de son charme et son talent, passant allégrement de la mazurka aux rythmes latinos. Mais le clou du spectacle reste l'interprétation délirante en duo du couple de la Marche turque de Mozart ! A tomber !

Portrait d'un assassin 

Un film de Bernard-Rolland (1949) avec Maria Montez, Arletty, Pierre Brasseur, Dalio, Jules Berry, Eric Von Stroheim. Une réalisation assez molle sur un scénario assez simpliste quoi que s'efforçant de nous surprendre, en fait avec une telle distribution nous avons essentiellement affaire à un film d'acteurs et là il faut dire qu'on est gâté par ses messieurs qui cabotinent à cœur joie (il faut voir Jules Berry dialoguant avec Brasseur dans sa loge), La belle Maria Montez, peu faite pour les rôles de composition s'en sort avec les honneur, quand à Arletty il faut bien avouer qu'elle a du mal à retrouver sa forme d'avant-guerre. On va dire que c'est un bon petit film

Cinq tulipes rouges 

Un film de Jean Stelli (1949) avec Suzanne Dehelly, Pierre Louis, Annette Poivre, Raymond Bussière. Un polar à égimes ayant pour cadre le Tour de France cycliste, voilà une idée originale, mais le film s'avère sans grand interet, on regarde parce qu'on veut savoir qui est le coupable…. Et on est déçu. Réalisé très mollement, avec certains acteurs à la ramasse (René Dary), d'autres n'étant là que pour l'affiche (Bussière et Poivre). Reste Suzanne Dehelly attifée à la garçonne et s'efforçant de faire le boulot et Jean Brochard en inspecteur dans un rôle particulièrement mal écrit. C'est vraiment mauvais

La Maison des étrangers 

Un film de Joseph L. Mankiewicz (1949) avec Edward G. Robinson et Susan Hayward. Le film souffre de deux gros handicaps, Richard Conte qui n'est pas bon, et le final absurde. Et c'est dommage car sinon le film est intéressant et parfaitement réalisé avec un Edward G. Robinson en pleine possession de son talent, (et il ne cabotine pas contrairement à ce qu'écrivaient certains, il est en plein dans le rôle) et une bien jolie Susan Hayward. On notera quelques scènes grandioses comme celle du repas de famille, ou dans un autre genre celle ou Robinson est à deux doigts de se faire lyncher.


L'héritage de la chair 

Un film d'Elia Kazan (1949). Un film intéressant traitant du racisme avec mesure sans en faire des tonnes. La distribution d'acteurs est excellente et contrairement à ce qu'on peut ire ça et là, Jeanne Crain assure très bien son rôle principal. Ethel Waters, la chanteuse de Stromy Weather est un peu figée, mais la prestation d'Ethel Barrymore est remarquable. La montée dramatique gagne en puissance au fur et à mesure du film et atteint son paroxysme dans la scène de procès… pour hélas retomber comme un soufflé dans un final très bisounours, mais c'est  un bon film bien maitrisé qui ne tombe pas dans le piège du mélo.

Au grand balcon 

Un film d'Henri Decoin (1949) avec Pierre Fresnay, Georges Marchal, Suzanne Dehelly. Confirme l'aphorisme selon lequel même les meilleurs se plantent un jour. Déjà le scénario n'a rien de très intéressant se concentrant sur l'ascendance tyrannique de Fresnay sur ses pilotes, c'est répétitif, sans surprises ni tension. En ce qui concerne les acteurs Fresnay est excellent, Suzanne Dehelly toujours impeccable, mais les autres ? Marchal se contente de nous la jouer "beau gosse" quant au reste c'est une catastrophe. A ce titre la longue et bruyante scène de la fête des pilotes au début est tout simplement grotesque où l'on voit une bande d'ahuris cabotinant et gesticulant n'importe comment comme s'ils étaient livrés à eux-mêmes devant le chef opérateur, le réalisateur étant parti manger un casse-croûte.

Cagliostro 

Un film de Gregory Ratoff (1949). Avec Orson Welles. Je ne connais rien de ce Ratoff, mais il parait évident qu'Orson Welles a imposé son style sur le tournage, en influençant largement et le réalisateur et le directeur de la photographie. Certains plans sont d'ailleurs fabuleux. Et en tant qu'acteur Orson est parfait, ce rôle de beau ténébreux mégalomane et manipulateur lui collant à la peau à merveille. Maintenant l'histoire, c'est du Dumas, de l'histoire à recettes avec complot, trahison, coups de théâtre, amours contrariés…, mais ça fonctionne plutôt bien. Petit bémol avec la confrontation avec Mesmer qui tourne au ridicule. Mais c'est un bon "cape et d'épée"

La tigresse 

Un film de Byron Haskin (1949). Un excellent film noir qui nous scotche avec son lot de rebondissement et de suspense. Lizabeth Scott.qui nous la joue femme fatale est absolument parfaite dans ce rôle. Dan Duryea campe une petite frappe qui le fait bien, alors que Don DeFore déçoit., On pourra juste déplorer quelques bizarreries narratives probablement du probablement à un montage désinvolte, ainsi que la fin expédiée et décevante, mais tout ça reste très bon.

Un certain monsieur 

Un film d'Yves Ciampi (1949) avec Louis Seigner, Hélène Perdrière, Junie Astor. Devant ce genre de film on peut avoir deux attitudes : La première c'est de s'intéresser à l'énigme policière, or c'est impossible, trop embrouillée, quasiment incompréhensible, sans aucun suspense et dont on relèvera deux scènes ratées, une partie de poker qui ne sert à rien, et une bagarre dans l'escalier d'un ridicule achevé. La seconde est de regarder ça comme une comédie policière en négligeant l'énigme, or ça ne marche pas non plus, on ne rit jamais et certains rôles à l'instar de celui de René Dary agacent. Alors que sauver : Louis Seigner, Hélène Perdrière, Junie Astor font ce qu'ils peuvent mais échouent à sauver le film de la médiocrité.

Histoires extraordinaires

Un film de Jean Faurez (1949) avec Fernand Ledoux, Jules Berry, Paul Frankeur. Netflix a ressorti ce film que tout le monde avait oublié ainsi que son réalisateur. Il n'y a vraiment pas de quoi s'affoler, un premier sketchs horriblement mal raconté notamment sa chute, un second assez terne. On se réveille un peu avec le troisième dans lequel Jule Berry en roue libre cabotine allégrement. Quand au quatrième, c'est une histoire policière assez mauvaise mais qui peut se regarder comme une farce macabre. Ajoutons-y des dialogues impossibles, ces messieurs dames utilisant imparfait du subjonctif, double négation et forme interrogative littéraire… comme tout un chacun, n'est-ce pas ? Bref tout cela est très moyen. :

Mademoiselle s'amuse  

Un film de Jean Boyer (1948) Avec Gisèle Pascal et l'orchestre de Ray Ventura. Du très bon Jean Boyer que cette comédie musicale jouée à 100 à l'heure avec l'orchestre de Ray Ventura totalement déchainé et une Gisèle Pascal complétement barré. C'est délirant, c'est amusant, c'est joyeux, c'est pétillant, c'est inventif, c'est n'importe quoi et la musique de Paul Misraki est fabuleuse (Ah ! Maria de Bahia !). Que du bonheur !

Key Largo 

Un film de John Huston (1948) avec Humphrey Bogart, Lauren Bacall, Valire Trevor, Lionel Barrymore et Edward G. Robinson. Un quasi huit-clos étouffant, un climat d'angoisse qui s'installe rapidement et qui reste omniprésent pendant toute la durée du film. Le personnage de Rocco campé par un Edgar G. Robinson en plein forme est excellement décrit, un loubard semi-déchu et d'une intelligence très moyenne. Quant à Bogart, il est parfait jouant un anti-héros nonchalant. En revanche Lauren Bacall reste assez terne et se contente de presque de sa seule présence. Côté second rôle si Lionel Barrymore est assez pénible, en revanche Claire Trevor en pocharde est excellente. La mise en scène est au cordeau, la photographie magnifique, la musique de Max Steiner superbe. Rien que du bon nonobstant quelques longueurs et une scène ratée (celle ou Claire Trévor pousse la chansonnette) .Le dénouement, prévisible est remarquablement mis en scène sans longueurs inutiles. Un très bon film noir.

La scandaleuse de Berlin  

Un film de Billy Wilder (1948) avec Jean Arthur et Marlene Dietrich. Ce très bon film de Billy Wilder souffre de deux défauts assez étranges. Le premier c'est que Wilder entrainé par le côté dramatique du fond de son récit a du mal à rester sur les rails de la comédie (c'est notamment très flagrant à la fin), le second c'est que Marlene semble assez peu concerné par son rôle, elle est lointaine, absente, y compris quand elle chante comme si le rôle qu'on lui avait attribué l'écrasait. Sinon, le film nous offre un véritable festival des talents de Jean Arthur dont la beauté est magnifiquement photographiée et qui crève l'écran. Le film peut aussi se voir comme un documentaire sur les ruines de Berlin et l'état de l'Allemagne après la défaite (un peu comme Berlin express de Jacques Tourneur, tournée la même année et qui lui est supérieur. )Très bon film malgré les réserves.

Le secret derrière la porte  

Un film de Fritz Lang (1948) avec Joan Bennett.(1948). Malgré quelques indices qui préparent la suite, la première partie est inquiétante à souhait et semble orienter le film vers une affaire de coureur de dot… Ben non, ce n'était pas ça du tout, Monsieur est dérangé et a subi un "traumatisme dans son enfance" le fameux traumatisme qui explique tout mais qui reste planqué dans un coin du cerveau !" (cf "Freud pour les nuls" en lecture rapide). La psychanalyse au cinéma est un sujet casse-gueule, et Lang se prend les pieds dans le tapis à ce point que le film finit, à partir de ce moment-là, par perdre tout son intérêt. Sinon la réalisation est un modèle d'école : soignée, bien cadrée, superbement photographiée et avec une Joan Bennett qui crève l'écran, mais que peut-on faire avec un scénario absurde et une dénouement final tellement tiré par les cheveux qu'il en devient ridicule ? A la fin, les amoureux rabibochés sont tout contents, ils ne disputeront plus jamais… mais on ne nous explique pas comment ils font pour continuer à buller dans la grande propriété alors qu'ils sont ruinés (cf la première partie) et qu'en plus la baraque a fini dans les flammes

Mystère à Mexico  

Un film de Robert Wise (1948) avec Jacqueline White. Ça ne dure qu'un peu plus d'une heure, mais c'est très bien fait, bonne direction d'acteurs, belle photographie, un peu d'humour, Jacqueline White est adorable, du thriller bien mené et plutôt efficace, du bon Robert Wise.

La dame au manteau d'hermine 

Un film d'Ernst Lubitsch et Otto Preminger (1948) avec Betty Grable, Douglas Fairbanks Jr, Cesar Romero. D'une opérette viennoise à la fois niaise, nunuche et compliquée, Lubitsch a su éviter le kitch et la guimauve, mais ça reste très mineur en raison d'une intrigue abracadabrante et d'une interprétation masculine juste passable. Betty Grable assure très bien. C'est une comédie musicale avec quelques chorégraphies qui vont du sublime (les pirouettes de Betty Grable dévoilant ses jambes) au ridicule (les personnages exécutant une farandole digne d'une cour de patronage)

Berlin express 

Un film de Jacques Tourneur (1948). Le film d'espionnage possède ses codes et perdre pied à un moment dans les explications, ou accepter les facilités de scénarios font partie du genre. De ce point de vue Berlin-Express ne déroge pas à la règle tout en nous présentant une histoire plutôt bien enlevé et sans aucun temps morts. Mais comme toujours Tourner est aussi un cinéaste d'ambiance. Et quelle ambiance puisque ce sont les vraies ruines de Francfort et de Berlin qui constitue les décors naturels du film. La dernière scène d'action tournée dans les caves d'une brasserie en ruine est remarquable. La direction d'acteurs est très correcte, Robert Ryan et Merle Oberon en vedettes. Un très grand film, malgré l'optimisme un peu naïf (mais vu le contexte…)

La corde 

Un film d'Alfred Hitchcock (1948) avec James Stewart. On a à juste titre loué la forme, époustouflante, il faut bien le dire. On a dit grand bien de la direction d'acteurs (même si Farley Granger surjoue). Mais si nous parlions du fond ? Dans ce dîner de cons macabre, tous les personnages sont antipathiques à l'exception de Joan Chandler (trop mignonne) et de Miss Wilson. Passons les têtes à claques de Mrs Atwater (volontaire) et de Douglas Dick (involontaire), passons aussi sur les deux assassins. James Stewart développe ouvertement des théories que l'on qualifiera soit de nietzschéennes soit de fachos suivant son humeur, Cedric Hardwicke est un lâche (certes il proteste quand il entend des propos inacceptables, mais il reste courtois alors que n'importe qui aurait foutu le camp…) Car dans cette histoire s'il faut chercher le vrai coupable, c'est bien Stewart ! Car c'est bien lui qui a inculqué des idées nauséabondes aux deux abrutis. Son personnage agace aussi par son côté fouille-merde (mais c'est voulu par le pitch). Le suspense du film se résume à deviner comment Stewart va démêler l'affaire… Or la résolution est faible, mais que dire de la scène finale… Un suicide de Stewart après avoir confondu les deux cinglés aurait eu de la gueule; mais il fallait que la fin soit morale, alors on nous montre James Stewart passer en trente secondes de Nietzsche à Voltaire, faut pas pousser non plus ! Un exercice de style assez malsain et atypique dans la carrière du grand Alfred.

Il marchait dans la nuit 

Un film d'Alfred Werker et d'Anthony Mann (1948). Une série B assez plate. D'un manichéisme assez affligeant, le film se veut une glorification de la police (on a même droit à une justification des rafles de masse !) ces braves gens sont courageux, malins comme des singes, trouvent toujours les méchants et évidemment n'ont aucune brebis galeuse dans leur rangs. Les acteurs policiers n'ont dans ce film ni charisme ni intérêt. Le film s'enfonce parfois dans la lourdeur (la scène du portrait-robot). Reste le personnage du tueur à propos duquel on aurait aimé en savoir davantage. La scène finale dans les égouts est peut-être bien filmée mais manque cruellement de suspense, puisqu'on sait pertinemment comment tout cela va se terminer. A sauver la bonne idée de la voiture bloquant la sortie des égouts et le rôle du petit chien.

Le trésor de la Sierra Madre  

Un film de John Huston (1948) avec Humphrey Bogart et Walter Huston. Le film brille par son ambiance anxiogène, par son regard cynique et lucide sur la nature humaine ("Dans les même circonstances j'aurais peut-être fait pareil", avoue Walter Huston), par la tension dramatique qui s'empare du groupe quand Bogart devient parano et par le jeu de ses acteurs (Bogart et Walter Huston sont excellents),. Certaines scènes sont remarquables (la guérison du gosse, Bogart se désaltérant et apercevant des mexicains dans le reflet de l'eau), il y a même un doigt d'humour macabre (le mexicain qui réclame son sombrero avant d'être fusillé), une excellente musique (Max Steiner), mais aucune femme au générique ! La conclusion est davantage désabusée que morale genre : il faut mieux en rire quant au tout dernier plan, il fait un peu rustine, mais est-ce si grave ?

La Valse de l'empereur 

Un film de Billly Wilder (1948) avec Joan Fontaine et Bing Crosby. Dans ce splendide technicolor Billy Wilder opte pour la légèreté ce qui ne l'émèche pas au milieu d'une loufoquerie assumée de se faire le défenseur discret du métissage culturel et social (mais aussi de l'américan way of life). Le pitch est excentrique ; un voyageur de commerce accompagné de son chien veut vendre un gramophone à l'empereur François Joseph, le chien lui s'embrouillera avec le caniche royal de Joan Fontaine… Toute l'astuce consiste à faire faire aux chiens ce que la bienséance (et le code Hayes) ne permet pas ouvertement aux humains. On le droit suivant son humeur de trouver le procédé astucieux, génial, osé… ou lourd ! En fait il est un peu tout ça à la fois. Le personnage de Smith joué par Bing Crosby est complexe, il peut parfois agacer étant souvent proche de la suffisance, mais Wilder a eu l'intelligence de montrer sa faiblesse, quand il devra choisir entre l'amour et l'argent, ce n'est pas l'amour qu'il choisira, (quitte à le regretter plus tard, il fallait bien un happy end). Joan Fontaine est rayonnante de beauté mais il faut bien avouer qu'elle est loin de ses meilleurs rôles. Si la bande son n'a rien d'original elle accomplit l'exploit de mélanger habilement, la Valse de l'Empereur, le siffleur et son chien, "I kiss your hand, Madame" et quelques tyroliennes. Malgré quelques défauts le film se déguste comme une friandise, une friandise intelligente

Dédée d'Anvers  

Un film d'Yves Allegret (1948) avec Simone Signoret, Marcel Dalio, Bernard Blier. Un film noir à la française, on pourrait même dire un film brumeux. L'intrigue est simple, d'ailleurs on croit en deviner l'issue mais on se trompe, c'est aussi un film d'ambiance, ça parle de prostitution et ça a le mérite de ne tomber ni dans le misérabilisme, ni dans l'angélisme. Blier à un rôle très complexe, il trafique, il est le patron et veut que ça se sache mais il est humain, un rôle difficile mais parfaitement assumé, pour Dalio c'est plus simple, c'est le vilain maquereau mais il fallait qu'il le soit ainsi pour l'intrigue, quant à Signoret, elle crève l'écran. Les trafics dont il est questions restent évasifs, on ne saura jamais de quoi il est question, parce que le savoir n'aurait rien apporté au film, Signoret l'ignore donc nous aussi. La scène finale tire le film vers le chef d'œuvre, ça nous cloue sur place, on savait grosso modo ce qui allait arriver, mais on ne pouvait pas deviner cette fin qui a quelque chose de grandiose dans sa futilité macabre. Quasi chef d'œuvre, quasi parce que on ne comprend pas grand-chose de ce que raconte Pagliero qu'on aurait sans doute mieux fait de post synchroniser. Un très très grand film

Bagarres 

Un film d'Henri Calef (1948) avec Maria Casares et Mouloudji. Maria Casarés a beau avoir été auréolée de gloire, elle est franchement mauvaise dans ce film, inexpressive, monolithique et sans charme. A la limite Orane Demasis joue mieux qu'elle (un comble !) Mouloudji cabotine et nous saoule. Ce drame paysan avait pourtant du potentiel mais après un assez bon démarrage, il s'enlise et sombre dans une certaine confusion (certaines scènes ne sont pas claires du tout). Cependant le film n'est pas nul, il est raté ce qui n'est pas la même chose et peut se regarder ne serait-ce que pour ce regard sans concession porté sur le monde paysan.

Ciel rouge 

Un film de Robert Wise (1948) avec Robert Mitchum. Des westerns bien meilleurs, il y en a des paquets, pourtant ça se regarde volontiers, le scénario est un peu primaire, mais Wise se permet quelques libertés réjouissantes avec les codes, notamment cette bagarre de saloon où Mitchum ressort groggy et ensanglanté, ou le combat final où Mitchum abat deux de ses adversaires en les surprenant par derrière.

L'assassin est à l'écoute 

Un film de Raoul André (1948) avec Francis Blanche, Jean-Roger Caussimon, Rober Dalban. Raoul André, d'habitude, ce n'est pas mal, et ici ça commence super bien avec un quart d'heure de folie en forme de satyre de ce que la radio nous offrait de pire (la chanteuse réaliste est impayable), puis commence l'enquête policière et le film pédale dans la semoule pendant 75 minutes en ne nous offrant qu'une enquête incompréhensible et les gesticulations à l'humour raté des principaux protagonistes. Que c'est triste de vouloir être drôle sans y parvenir !

Blanc comme neige 

Un film d'André Berthomieu (1948) avec Bourvil. On prend les même et on recommence. Et si la première partie du film tente de voler un peu plus haut que le lamentable "Pas si bête" réalisé 2 ans plus tôt, on tombe dans la seconde partie dans une accumulation de facilités de scénarios assez lamentables puis comme si ça ne suffisait pas on a droit à un procès ridicule agrémenté d'un moralisme neuneu et déplacé. (le pire étant atteint quand Bourvil se permet d'insulter Mona Goya alors que cette dernière ne le charge pas). Mona Goya n'a aucun mal à survoler une distribution globalement niaise (Paulette Dubost, Pauline Carton)

Le secret de Mayerling 

Un film de Jean Delannoy (1948) avec Jean Marais. L'interprétation n'a rien d'extraordinaire mais est cependant illuminée par la présence de la trop rare et très belle Claude Farell dans le rôle de la comtesse Larish. Les premiers plans étaient prometteurs, mais l'histoire se révèle très vite inintéressante et filmée sans aucun rythme, c'est ennuyeux et vraiment pas terrible.

3 000 $ mort ou vif (Four Faces West) 

Un film d'Alfred E. Green (1948) avec Joel McCrea. Déjà un western sans coup de feu c'est un oxymore, mais s'il y avait que ça ! Nous trouvons : un cowboy illettré qui sait soigner la diphtérie, une infirmière venue de l'Est qui devient une cavalière émérite du jour au lendemain, un mexicain ténébreux qui se révèle être un ange gardien, et quand le cowboy ne trouve plus de cheval, il selle un taureau. Pat Garret est très fort et il peut retrouver un suspect avec la moitié du quart d'un indice, mais il est aussi très gentil. On aura compris qu'on est chez les bisounours mais au premier degré, quant à McCréa il suffit qu'on lui dise "pour l'amour de Dieu" et le voilà en train de jouer à docteur Schweitzer alors qu'il à la milice au cul. Si la première partie est plutôt regardable (belle photographie, jolies chevauchées et beaux paysage, présence de Frances Dee) la seconde moitié plonge le film dans le ridicule, le grotesque et la mièvrerie. Un film pour après-midi de patronage qui aurait pu s'intituler "Saint Joël au pays des cowboys".

Appelez Nord 777 

Un film d'Henry Hathaway (1948) avec James Stewart. Certes c'est sans surprise, l'intérêt du film n'est donc pas dans le "Va-t-il y arriver ?", mais "Comment va-t-il y arriver ?" Or force est de constater qu'Hathaway nous livre un récit intéressant ; dans lequel James Stewart nous fait un véritable sans-faute. En s'en tenant dans ses grandes lignes aux faits réels, on est proche du documentaire, pas de romances ou de sous-intrigue, mais pas non plus de rebondissement ce qui fait qu'à la fin on reste un peu sur sa faim, d'autant qu'on a pas les réponses à toutes les questions. A noter un zeste de propagande, mais ça reste anodin. C'est un bon film

L'impasse des Deux-Anges 

Un film de Maurice Tourneur (1948) avec Simone Signoret, Paul Meurisse. Si l'on excepte cette scène incongrue où l'on voit un type aller chez le notaire pour ne rien signer du tout, ça commençait plutôt bien, jusqu'à ce que Paul Meurisse se plante en jouant la romance. Quant à la fin, où comme par enchantement Marcel Herrand se transforme, plus improbable, tu meurs, il y avait pourtant tellement mieux à faire ! Signoret réussit malgré tout, à sauver le film grâce à son jeu naturel et sa beauté..

Le barrage de Burlington (River Lady)   

Un film de George Sherman (1948) avec Yvonne de Carlo. Joli est sans doute le mot qui convient le mieux pour qualifier ce faux western. La photo en technicolor est absolument magnifique, certains ont relevé à juste raison quelques transparences malheureuses, elle n'entachent cependant pas le film. Quant à ces dames, elles sont splendides. Paradoxalement ce film de bucherons est avant tout un film de femmes, dont les deux portraits étonnent dans cet univers viril. D'abord Yvonne de Carlo, fabuleuse et éblouissante en manipulatrice assez complexe, femme libre et fière de l'être et qui sera noble dans la défaite, mais aussi l'étonnante Helena Carter, en jeune fille mutine et pugnace. La psychologie masculine dans ce film est beaucoup plus schématique, l'action est simple sans vrais rebondissements, on déplore juste une facilité de scénario assez grosse dans le retournement des ouvriers de Corrigan, La fin est très belle, on sauve la morale mais sans en faire des tonnes, Yvonne de Carlo restant digne et repartant vers de nouvelles aventures. Un joli petit bijou !

Les amoureux sont seuls au monde 

Un film de Henri Decoin (1948) avec Louis Jouvet, Renée Devillers, Dany Robin. Juste un triangle amoureux de plus qu'Henri Jeanson dont le scénariste n'a pas su finir le récit (puisqu'il propose même deux fins), normal il manque le souffre, et n'est pas Buñuel qui veut… D'ailleurs Jeanson est loin d'être parfait dans les dialogues de ce film car si certains font mouches, d'autres sont mauvais et d'autres trop théâtraux. Et puis certains éléments scénaristiques sont complètement laissés en route (le vol de l'argenterie, il sert à quoi ?) Par ailleurs on peut se demander si la présence de Dany Robin, n'est pas une erreur de casting au milieu d'une direction d'acteurs éblouissante. Eh, bien, malgré toutes ces remarques, ce film reste agréable à regarder parce qu'Henri Decoin est aux commandes (même s'il a fait bien mieux) et parce que le couple Jouvet-Devillers fonctionne à merveille.

Blonde ice 

Un film de Jack Bernhard (1948).Un petit thriller fauché où il est question d'une jolie femme ambitieuse et manipulatrice, Leslie Brooks, l'actrice tenant ce rôle se débrouille très bien. Pour le reste c'est bien mou et horriblement bavard et surtout on n'a pas la réponse à toutes les questions: Comment Claire a-t-elle tué son mari ? Comment la police peut parler d'aller-retour la nuit du meurtre alors que l'aviateur n'a rien dit, et surtout pourquoi ces aveux dans la scène finale couchés sur le papier avant que le psy qui prétend la piéger arrive. Les rôles secondaires ne sont pas terrible, à sauver, outre Leslie Brooks, la scène avec le maître chanteur.

56 rue Pigalle 

Un film de Willy Rozier (1948) avec Marie Dea. Voici un film à réhabiliter d'urgence. Willy Rozier n'est pas toujours bon, mais ce polar très noir est intéressant. Certes l'intrigue peut paraître classique, mais on s'aperçoit qu'elle est bien plus fine qu'elle en à l'air. La dernière partie, en Afrique semble d'abord comme une rustine morale sur le film, mais là encore Rozier nous surprend, car ce n'est pas ça du tout. L'interprétation sans être géniale reste correct de même que la réalisation… un peu fauchée quand même. Et puis la voix de Marie-José qui nous chante le "Pigalle" de Georges Ulmer, c'est quand même quelque chose.

La ruée vers l'or noir   

Un film de Lesley Selander (1948) . Un faux western puisque ça se passe ne 1930. Une escroquerie aux concessions pétrolières, lourde, bavarde, sans aucun rythme et inintéressante avec des bagarres débiles, et des tentatives d'humour qui la plupart tombent à plat. Il faut un certain courage pour avaler le film en son entier.

Le dessous des cartes 

Un film d'André Cayatte (1948) avec Paul Meurisse, Serge Reggiani, Madeleine Sologne. Les films sur l'arnaque à l'assurance vie sont légions à commencer par le fabuleux "assurance sur la mort " de Billy Wilder en 1944. On est ici loin de ce niveau, mais le film reste tout à fait estimable. L'action est bien menée sans temps morts avec son lot de rebondissements et de coups tordus. Le climat est très noir (cela deviendra une constance chez Cayatte), chacun ayant quelque chose à se reprocher. Le cadre alpestre est bien joli. Niveau interprétation le très inégal Meurisse est ici assez bon, Reggiani nous fait du Reggiani mais il le fait bien, Sologne n'est pas si mal mais j'avoue un faible pour la trop rare Jeanne Darcey. Un bon petit polar malgré une fin un peu rapide.

Behind Locked Doors 

Un film de Budd Boetticher (1948). A cette époque Budd Boetticher usait de son vrai prénom Oscar ! Ce petit film noir de 62 minutes est à la fois original de par son scénario et classique dans son déroulé. Le format court empêche tout questionnement psychologique et la fin est quelque peu brouillonne, mais tout cela se regarde sans déplaisir. Bonne photo, mise en scène et direction d'acteurs correctes. Une bonne petite série B, dira-t-on.

L'Impitoyable

Un film de Edgar G. Ulmer (1948) avec Zachary Scott, Sydney Greenstreet, Diana Lynn , Lucille Bremer,  Martha Vickers. Un portrait se voulant au vitriol d'un rapace sans scrupule de la finance. Contrairement à ce que j'ai lu çà et là, j'ai trouvé Zachary Scott figé et monolithique. En revanche Sydney Greenstreet est très bon, Le casting féminin est particulièrement soigné, il faut voir le maquillage et les tenues de ce dames ! Sur le fond on est un peu largué, toutes ces opérations financières restent très opaques pour les spectateur lambda rendant le suivi narratif peu évident. Sinon simple question à deux euros, le premier flash-back nous montre que Horace avait une enfance malheureuse. Il serait donc devenu un financier pourri à cause de son enfance malheureuse ? Quant à Diana Lynn qui à la fin veut absolument accompagner Horace sur la jetée, il faudrait qu'on m'explique pourquoi ? Sinon force est de constater que c'est bien mis en scène et bien photographié, mais ça ne saurait suffire.

Pitfall

Un film de André De Toth (1948) avec Dick Powell, Lizabeth Scott. Certes le scénario ne casse pas des briques même en ce replaçant dans le contexte de l'époque (une sombre histoire d'adultère) mais il est transcendé par un détournement du code Hayes (un peu à la Lubitsch) par le jeu des acteurs, Dick Powell prouvant qu'il peut faire autre chose que de la chanson de charme, et par Lizabeth Scott. De plus la photo est magnifique. Le scénario détourne les codes du film noir en refusant de décrire la "femme fatale" comme une peste et en refusant de considérer l'adultère comme un motif de rupture. Et tout cela est fait de façon intelligente. On en arrive même à supporter le sale gosse

Les passagers de la nuit  

Un film de Delmer Daves (1947) avec Humphrey Bogart et Lauren Baccall. Que le scénario de David Goodis soit abracadabrant n'a que peu d'importance (après tout nous sommes au cinéma) qu'il soit par moment incompréhensible est en revanche plus gênant car sans cela nous aurions tenu un chef d'œuvre. L'histoire est prenante, bien filmée, avec son lot de rebondissements, la photo est superbe et Lauren Bacall particulièrement bien mis en valeur. Le film est aussi une réflexion morale sur les conséquences de l'individualisme

La seconde Madame Carroll 

Un film de Peter Godfrey (1947) avec Humphrey Bogart et Barbara Stanwyck. Le gros défaut de ce film réside dans sa prévisibilité, puisque le déroulé est contenu dans le prologue. Ça reste néanmoins très intéressant grâce à une progression narratrice efficace.  Barbara Stanwyck est éblouissante, Bogart en contre-emploi est très bon et la gamine passe plutôt bien. La musique est un peu trop démonstrative. Il y a une scène hallucinante, celle ou Bogart entre complètement halluciné, tel Dracula, par la fenêtre dans le chambre de sa femme On appréciera également l'humour noir surprenant qui conclut le film.

Né pour tuer   

Un film de Robert Wise (1947) avec Claire Trevor. Pas mal la performance consistant à prendre pour protagonistes principaux deux manipulateurs sans scrupules dont un tueur psychopathe. La belle Claire Trevor est véritablement excellente dans son rôle, la non moins belle Audrey Long qui elle a un rôle de gentille (ou de naïve) apporte une note de fraîcheur à ce film baigné de noirceur mais à la mise en scène élégante, très agréable et passionnant à visionner.

Quai des Orfèvres 

Un film d'Henri-Georges Clouzot (1947) avec Louis Jouvet, Bernard Blier, Suzy Delair, Simone Renant. Tout est excellent, la mise en scène, le montage, le jeu des acteurs, la gouaille de Suzy Delair qui nous chante "mon petit tralala", Jouvet qui domine le film, Blier en jaloux obsessionnel, Simone Renant en lesbienne refoulée et même Charles Dulin en vieux cochon. L'intrigue policière est habile (en fait on est bluffé jusqu'au dénouement).  Deux critiques cependant : La musique un peu envahissante de Francis Lopez et le côté "Défense de la police" un peu trop appuyé (le coup du bébé barbu, une fois suffisait, mais deux fois…) On n'est pas passé loin du chef d'œuvre.

Un mariage à Boston 

Un film de Joseph L. Mankiewicz (1947) Un peu théâtral mais remarquablement réalisé et interprété ce film qui nous dépeint une aristocratie bostonienne autiste aurait pu être un vrai petit bijou si la dernière partie avait été aussi acerbe que le reste. La nunuche qui se figure qu'il suffit de belles robes pour être moins nunuche, ça a du mal à passer, et le happy-end sucré avec la réconciliation entre le beau-père et le prétendant de la fille est vraiment de trop. Ça reste quand même du grand cinéma mais on a le sentiment qu'on est passé à côté de quelque chose de grandiose.

La dame de Shanghai  

Un film d'Orson Welles (1947) avec Rita Hayworth et Orson Welles. Une utilisation magistrale du langage cinématographique. Rita Hayworth est sans doute la plus belles de toutes les femmes fatales du cinéma (et pourtant il y en a eu). L'intrigue est certes (un peu) compliqué mais qu'importe. Le chassé-croisé entre les différents personnages est magique… et puis comme d'habitude chez Welles, certaines scènes restent gravés à jamais en mémoire comme la scène du tribunal (ou les gens se croient au spectacle) le théâtre chinois et surtout le labyrinthe au miroir. Chef d'œuvre !

Le printemps 

Un film de Grigori Aleksandrov  (1947)) avec Nikolai Tcherkassov. Comment le réalisateur du génial "les joyeux garçons" en 1934 a-t-il pu commettre quelque chose d'aussi mauvais. Car si on met de côté la photographie et les éclairages ainsi que quelques chorégraphies, que sauver ? Le scénario tente en vain de nous intéresser à une très confuse  histoire de substitution de personnages avec une Lioubov Orlova ben fatiguée, c'est long, lourd, ponctué d'inserts de propagande absolument gratuit genre (je peux voir ce qu'il y a sur le plateau d'à côté , - Je vous en prie ! Et hop une scène de propagande !) Bref c'est consternant ce qui n'a pas empêché le film d'obtenir le prix du meilleur scénario à la Mostra de Venise en 1947 (mort de rire)

L'aventure de Madame Muir 

Un film de Joseph Mankiewicz (1947) avec Gene Tierney, Rex Harrisson, George Sanders. Ce qui frappe d'emblée dans ce film c'est la présence de Gene Tierney, non seulement elle est splendide, mais elle joue magnifiquement et son rôle de "femme de tête moderne au sourire désarmant lui convient à merveille". Le réalisateur fait semblant d'hésiter entre jouer la carte du rêve ou celle du surnaturel, il choisit le seconde, il n'est pas alors interdit d'imaginer que le film eut été encore meilleur s'il avait choisi la première. Une scène est particulièrement forte et étonnante pour l'époque, celle où Gene Tierney découvre que Sanders est marié est se retrouve face son épouse. Cette dernière semble à la fois adorer son mari et n'être point dupe de sa conduite. (dommage que le dialoguiste  se cru obligé d'ajouter plus loin que ce couple a fini par éclater… le code Hays sans doute…) Ce film d'amour, car c'est bien de ça qu'il s'agit est un éblouissement pour les yeux et pour l'esprit, il est simplement dommage qu'il y ait quelques petites longueurs et quelques tirades par trop théâtrales.

La Maison rouge 

Un film de Delmer Daves (1947) avec Edward G. Robinson. Un polar campagnard qui commence assez bien, puis qui patauge pas mal et qui finit en eau de boudin. Il faut dire que le scénario essaie de compenser sa pauvreté en mélangeant tout, l'angoisse psychologique, "le secret du bois maudit", et les romances adolescentes (assez peu convaincantes)Delmer Daves a réussi à poser un climat angoissant mais n'a pas su tenir la distance. Edward G. Robinson joue très bien mais c'est bien le seul. Ça se regarde quand même mais c'est bien mineur tout ça !

Les anneaux d'or 

Un film de Mitchell Leisen (1947) avec Marlene Dietrich et Ray Miland. Il y a des films dont il est aisé de constater qu'ils n'ont rien de géniaux, mais qu'on ne peut s'empêcher d'aimer tellement ils attirent la sympathie. C'est le cas de ce film qui nous raconte une histoire complétement farfelue, dans laquelle Marlene Dietrich grimée en gitane à l'air de s'amuser comme une folle et nous démontre une nouvelle fois son immense talent. Ray Miland n'est pas en reste et joue parfaitement le jeu. Un film qui fait plaisir à voir.

Le procès Paradine 

Un film d'Alfred Hitchcock (1947) avec Gregory Peck, Charles Laughton, Alida Valli, Louis Jourdan. Une déception, surtout après coup, parce que jusqu'à la fin on croit qu'il va se passer quelque choses, un retournement de situation, un truc, une astuce… non rien, tout cela est à la fois plat et compliqué (qu'on m'explique cette histoire de va-et-vient dans le couloir des chambres où a eu lieu le crime). Et puis la psychologie et le comportement des personnages frôlent l'incompréhensible. Que Peck se comporte de façon surprenante passe encore puisque c'est le sujet du film, mais ici tous les personnages principaux sont totalement imprévisibles que ce soit l'accusée, Jourdan ou la femme de Peck, le pompon étant atteint par Laughton dans une scène [spoiler]où il drague lourdement la femme de Peck dans le dos de celui-ci, [/spoiler]faut pas déconner non plus, on aurait aimé un peu plus de subtilité ! La direction d'acteurs est moyenne et si Peck et Laughton sont bons, Alida Valli est transparente et Jourdan carrément mauvais. Cela dit c'est de l'Hitchcock, techniquement c'est superbe et il sait nous éviter l'ennui, mais la technique à elle seul n'a jamais suffit à faire un bon film.

Sinbad le marin 

Un film de Richard Wallace (1947) avec Douglas Fairbanks Jr, Maureen O'Hara, Anthony Quinn. C'est très mauvais, le film est plombé dès le départ par le jeu outrancier de Douglas Fairbanks Jr qui non content d'avoir autant de charisme qu'une sardines à l'huile, ne sait pas faire une scène sans gesticuler dans tous les sens en faisant des sourires idiots. Quant à Maureen O'Hara, elle a l'air de se demander ce qu'elle fait dans cette galère. Sinon ça blablate beaucoup et pour ne pas dire grand-chose. Le scénario arrive à être à la fois simpliste et confus (faut le faire) et rempli d'incohérences (il y a des moments ou Sinbad use de pouvoirs magiques, mais d'autres où il les a oublié à la maison, on ne fait pas avancer un bateau en fouettant les galériens avec une telle brutalité, et Quinn qui voit arriver une boule de feu vers lui et qui reste là comme une andouille…) Un beau gâchis dans des décors de carton pâtes.

Le café du cadran 

Un film d'Henri Decoin (1947) signé Jean Gehret avec Bernard Blier. L'histoire est minimale mais ne sert que de prétexte à nous présenter une galerie de portraits et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il serait vain d'y chercher un personnage positif. Entre Blier, beauf, faible et jaloux, sa femme d'une naïveté touchante, le journaliste véreux, le violoniste vieux beau, égocentriste et irresponsable, l'alcoolique redresseur de tort, l'amoureuse transie…. Tout le monde en prend pour son grade et on ne s'ennuie pas une seconde dans ce quasi-hui-clos parfaitement réalisé et à la direction d'acteurs impeccable (fabuleuse Blanchette Brunoy). On n'est pas loin du chef d'œuvre !

The Man I love 

Un film de Raoul Walsh (1947) avec Ida Lupino. Ça commence dans la confusion et ça finit dans le mélodrame et la guimauve. Ça tourne en rond, c'est ennuyeux, les personnages ont des psychologies rudimentaires. Bref tout cela n'a pas grand intérêt si ce n'est de revoir Ida Lupino, ainsi que le très belle est trop rare Dolores Moran dans un rôle idiot, hélas.

Les Chouans 

Un film d'Henri Calef (1947) avec Jena Marais, Madeleine Lebeau, Madeleine Robinson. La réalisation est sans faute malgré la fin trop emphatique La direction d'acteurs est impeccable, Jean Marais est bien dans son rôle (mais ce n'est pas le plus difficile) Madeleine Robinson est excellente en fanatique jalouse, Madeleine Lebeau, plus chatte que jamais crève l'écran, Louis Seigner en curé de choc n'est pas mal non plus et puis il y a tous ces petits rôles excusez du peu Marcel Herrand, Pierre Dux et même Howard Vernon. Quant au scénario, il n'a rien d'invraisemblable, parfois l'amour rend idiot, et les romans d'espionnage parmi les meilleurs sont coutumiers de ces situations., mais surtout remercions les scénaristes (et Honoré de Balzac au passage) de remettre à leurs places les chouans à propos desquels certains nous bassinent encore aujourd'hui les oreilles

Antoine et Antoinette 

Un film de Jacques Becker (1947). Il y a deux choses remarquables dans ce film la façon dont Becker film des petits riens de la vie quotidienne en rendant le film "vrai, l'autre est la façon avec laquelle il filme les femmes, et dans ce film Claude Maffei est superbe, mais Annette Poivre n'est pas mal non plus. Le film est lent à démarrer mais on ne s'ennuie pas ensuite tout est téléphoné mais ça n'a aucune importance, on se régale. Quelques défauts cependant, si on peut faire avec la caricature sociale trop manichéiste et la naïveté finale, il est cependant difficile d'adhérer à ce combat de boxe ridicule et bien trop long. Mais cela reste un très bon film !

La brune de mes rêves 

Un film d'Elliott Nugent (1947). Bop Hope n'est pas drôle, Peter Lorre et Lon Chaney cachetonnent mollement, Dorothy Lamour n'est pas mise ne valeur, et non seulement l'histoire n'est pas drôle mais elle est inintéressante et ennuyeuse.

Boomerang 

Un film d'Elia Kazan (1947) avec Dana Andrew et Arthur Kennedy. C'est un film de procès, bien réalisé (certaines scènes sont excellentes) et bien dirigé, le scénario plein de très bonnes intentions est malheureusement trop manichéiste (trop didactique même) et trop prévisible pour qu'on y adhère totalement. Et le "chantage au vécu".n'est en rien une excuse, la réalité est toujours infiniment plus complexe que son résumé cinématographique. Pas mal dira-t-on mais sans plus..

Le pirate 

Un film de Vincente Minnelli (1947) avec Judy Garland et Gene Kelly. Une comédie musicale survitaminée bénéficiant d'un Gene Kelly en superforme et d'une excellente musique de Cole Porter. Le scénario est simpliste mais sympathique. Et puis le message final chanté et dansé à 100 à l'heure "Soyez clown" ne peut que plaire. Bonne réalisation le carton-pâte étant nettement assumé avec des couleurs splendides. Deux petites réserves, on aurait aimé davantage de chorégraphie et puis Judy Garland ne parait pas toujours vraiment motivée, mais ne boudons pas notre plaisir, on est très près du chef d'œuvre.

Fantomas 

Un film de Jean Sacha (1947) avec Simone Signoret. Quel dommage que la réalisation soit si fade parce que si on est amateur de cette ambiance de film où un type veut devenir le maître du monde, on est servi : base secrète, savant fou, serviteurs obséquieux, inventions diaboliques, cadavres à la pelle, belle traitresse ! La totale quoi ! Mais ici Marcel Herrand dans le rôle de Fantomas n'est pas à la hauteur, Signoret à l'air un peu paumée et si le commissaire et Yves Deniaud sont bons, le journaliste est ridicule. Mais soyons indulgent ce film pas si loin de la série Z n'est pas désagréable à regarder si on aime le genre.

Le carrefour de la mort 

Un film d'Henry Hathaway (1947) avec Richard Widmark et Victor Mature. Du bon et du moins bon. Côté bon, Hathaway sait parfaitement filmer l'angoisse (la scène de l'ascenseur au début ou celle où Widmark est derrière les rideaux à la fin), Le meurtre de la vielle dame reste anthologique, et puis, il y a la tronche de Widmark et son ricanement sadique qui hante longtemps la mémoire. Le moins bon c'est la scène bien gnangnan à l'orphelinat (à la limite du supportable), le jeu monolithique de Mature, un abus d'ellipses nuisant à la linéarité du récit et une fin complètement ratée (avec un commentaire en voix off nous racontant le contraire de ce que l'on vient de voir). Quant à Coleen Gray, elle entre dans le film comme un cheveu dans la soupe, mais on lui pardonnera, elle est bien mignonne. Le remake westernien de Gordon Douglas en 1958 le surpasse aisément.

Le Charlatan 

Un film d'Edmund Goulding (1947) avec Tyrone Power, Joan Blondell. Voilà un film qui sans démériter est néanmoins largement surestimé et à propos duquel on peut lire pas mal de bêtises. Ainsi ceux qui y voit de analogies avec "Freaks" feraient mieux de s'acheter des lunettes (pourquoi pas avec "Winnie l'ourson", pendant qu'on y est ?). Du point de vue du scénario, celui souffre d'une contradiction fâcheuse : on vilipende la crédulité et en même temps on tire des tarots dans des scènes prédictives (et très lourdes). La scène ou le magicien est confondu est mauvaise, il y avait mille autres façons bien plus subtiles de faire ça ! Du point de vue de la réalisation, le film est trop souvent bavard, abusant d'éclipses et rendant le récit parfois peu compréhensible (le mariage forcé) et nuisant à sa fluidité. Côté positif Tyrone Power ne s'en sort pas mal, mais sans être transcendant non plus, la distribution féminine est sans faute, ces demoiselles jouent à merveille et sont magnifiquement photographiées (sublime Collen Gray). Une bonne photo, une bonne ambiance, maïs on ne peut s'empêcher de se dire qu'avec un sujet pareil cela aurait pu être beaucoup mieux.

Femme ou Maîtresse 

Un film d'Otto Preminger, (1947) avec Joan Crawford, Dana Andrews, Henry Fonda. On a envie de dire : "Heureusement qu'il y a Crawford" tellement le film est froid et sans une once d'humour malgré une bonne réalisation. La passion est tellement retenue qu'on ne la sent jamais (à une exception près). Certes il est curieux de voir que ce triangle amoureux fonctionne entre gens civilisés, mais en même temps c'est quand même mieux que de se foutre des baffes. Tout cela ronronne gentiment, le scénario n'est pas folichon mais on se demande comment ça va finir, mais Preminger n'ira pas aussi loin que Lubitsch (sérénade à trois) et finira d'une façon étonnamment conservatrice contredisant tous ce qui avait été montré avant… Un film moyen mais qui se regarde sans ennui.

Monsieur Chasse 

Un film de Willy Rozier (1947) avec Paul Meurisse, Duvalles, Noëlle Norman. La pièce de Georges Feydeau dont est tiré ce film est un des chefs d'œuvre du vaudeville, ça pétille et c'est parfaitement huilé. L'adaptation de Rozier est très inégale à l'image d'un Paul Meurisse ne parvenant pas à trouver toujours le bon ton. L'écueil du théâtre filmé est néanmoins évité notamment avec une amusante scène d'extérieur. Signalons le bon rôle joué par Noëlle Norman qui illumine le film et celui de Duvalles en grande forme. Tout cela se regarde avec un certain plaisir mais Rozier semble être passé à côté de l'esprit de Feydeau, sans doute à cause de Meurisse et de cette fin modifiée dont on se demande l'utilité.

Scared to Death 

Un film de Christy Cabanne (1947) avec Bela Lugosi, Ou l'on découvre dans ce film en couleur que Bela Lugosi a les yeux bleus, Sinon l'énigme de cette comédie policière est quasi-incompréhensible, heureusement Nat Pendleton nous amuse en policier idiot et les filles sont rigolotes. A voir comme une curiosité, mais ne vous attendez pas à des miracles.

L'Engrenage fatal (Railroaded!) 

Un film de Anthony Mann (1947). Un scénario d'une banalité et d'une prévisibilité consternante. Un personnage de méchant rudimentaire, un flic qui change d'avis dans que l'on sache pourquoi, une certaine confusion, des invraisemblances impardonnables (genre la fille qui se sait menacée mais qui attend tranquillement chez elle en laissant la porte ouverte !). Ça fait beaucoup de casseroles, d'autant que l'interprétation n'a rien d'extraordinaire, sauf sans doute celle de la très belle Sheila Ryan qui nous aide à supporter ce ratage.

The fabulous Dorseys 

Un film d'Alfred E. Green (1947) avec Tommy et Jimmy Dorsey et Janet Blair. Oh que ça commençait mal avec l'enfance des frères interprétés par deux gosses têtes à claques à la limite du supportable et encadrés par des parents peu doués pour jouer la comédie. Heureusement après ça va mieux, le film possédant deux atouts indéniables, le premier étant la présence des frères Dorsey jouant leur propre rôle et nous régalant de leur musique, le sommet étant atteint lors d'un jazzband dans une boite de nuit autour du piano d'Art Tatum en personne. Le second atout est la présence magique de la très belle et très talentueuse Janet Blair qui illumine le film et dont on se demande pourquoi elle n'a pas fait une carrière plus importante.

Monsieur Verdoux 

Un film de Charlie Chaplin (1947). Quelle claque ! Il fallait vraiment tout le talent de Charlie Chaplin pour arriver à provoquer de l'empathie pour un tueur en série ! D'ailleurs on ne voit jamais les crimes, le film préférant insister sur ses ratages et ses gaffes verbales ou gestuelles, et à ce propos la scène du bateau est un peu moment de bonheur, la scène du mariage qui tourne au burlesque ("j'ai perdu mon sandwich") en est une autre. Et puis il y a ces scènes très fortes et intelligentes avec la très belle Marilyn Nash magnifiquement photographie, Chaplin dirige bien ses acteurs, mais c'est surtout avec les femmes qu'il atteint la perfection, que ce soit l'extravagante et farfelue Martha Raye , la belle mature Isolbel Elsom ou encore la jolie fleuriste et son sourire désarmant. Alors évidemment il y a le message (je n'aime pas les films à messages) qui à l'intérêt de pointer du doigt les fauteurs et les profiteurs de guerre, mais fallait-il l'énoncer de cette façon. Non, Charlie, on ne justifie rien par le pire sinon c'est le bordel !. Cette réserve étant dite, Monsieur Verdoux reste un très grand film sans aucun temps mort et dont on se délecte de sa vision

La Femme sans visage 

Un film suédois de Gustaf Molander (1947) avec Gunn Wållgren. Un très beau noir et blanc à la photographie splendide et servi par le jeu magistral de la très belle Gunn Wållgren. Ça commence de façon très énigmatique puisqu'on croit d'abord que Rut est quelque chose comme un aventurière ou une semi mondaine, mais en fait c'est beaucoup plus compliqué que ça, à ce point que son attitude en début de film colle assez mal avec ce qu'on apprend par la suite, scénario un peu tordu donc (écrit par Ingmar Bergman), mais très joli film qui se conclue de façon plutôt intelligente.

La Vallée de la peur

Un film de Raoul Walsh (1947) avec Teresa Wright et Robert Mitchum. On ne s'en aperçoit évidemment pas de suite mais le film monté en flash-back contient dès le début une belle erreur de narration, puisque la scène d'intro retire tout suspense à la scène de la chambre nuptiale. Le film est long à démarrer et ne s'active qu'après que Mitchum soit revenu de la guerre, Toute la fin est absurde, le retournement de veste de Teresa, l'explication psychanalytique, et le final abracadabrantesque. Le pari affirmé des auteurs de vouloir faire un western psychanalytique ne m'a pas paru réussi, reste quelques scènes mémorables comme la scène du bal et ce qui s'en suivit, une magnifique photographie, l'interprétation habité de Robert Mitchum ou la présence de Teresa Wright dont la beauté crève l'écran.

Légitime défense (The Shop at Sly Corner)

Un film de George King (1947) avec Oscar Homolka. Une excellente série B doté d'un scénario convenablement travaillé laissant la tension et le suspense s'installer efficacement, Oscar Homolka tient le rôle principal avec talent, on pourra cependant regretter que les personnages secondaires soient si peu écrits. Un bon petit polar qui mérite amplement d'être redécouvert.

Un invité va venir

Un film de suédois de Arne Mattsson (1947) C'est un whodunit assez bien photographié mais qui accumule pas mal de défauts, déjà, la longue exposition des personnages est trop longue et n'est pas très intéressante, la seconde partie en mode thriller est embrouillée à souhait, on ne n'accroche a aucun personnage et on finit par se désintéresser de la résolution de cette sombre histoire.

Gilda 

Un film de Charles Vidor (1946) avec Rita Hayworth et Glenn Ford. Le scénario est quand même tiré par les cheveux et pas trop évident (d'autant qu'on apprendra qu'il est basé sur une coïncidence assez farfelue). On se dit peu importe, le puzzle va bien finir par se reconstituer, et en attendant on est pris par le tourbillon crée par le personnage de Rita Hayworth, véritable phénomène dans ce film, qui pique (mais ce devait être prévu) la vedette à Glenn Ford et qui nous émerveille de son jeu et de sa beauté. On n'est pas sûr de bien suivre ce curieux mouvement d'aller et retour haine/amour entre Hayworth et Ford, mais qu'importe ! La fin fait un peu bisounours mais on ne peut s'empêcher de penser que ce couple-là n'est pas trop bien parti… Si ce film a des défauts, on finit par ne plus les voir tellement on est ébloui… et puis, avoir pris comme héros du film une fille facile et un tricheur professionnel, il fallait le faire quand même !

Le criminel 

Un film d'Orson Welles (1946) avec Orson Welles, Edward G. Robinson et Lauretta Lynn. Ce film souffre d'une légende à propos de laquelle certains ne peuvent s'empêcher de gloser, à ce point qu'elle leur sert de filtre pour critiquer le film.. .Mais doit-on juger un film sur sa légende ou sur son résultat ? Or le résultat saute aux yeux, le film est bon ! Certes on a au départ un scénario plutôt linéaire, manichéisme (mais étant donné le sujet…) au suspense faible et ne faisant pas l'économie de quelques touches de naïveté (le contact entre Robinson et Noah) mais qui tient néanmoins parfaitement la route. Mais surtout il faut voir ce que Orson Welles en fait dans deux domaines, d'abord la direction d'acteurs, Welles paraît complètement hanté par son rôle, presque halluciné, à ce point que c'en est troublant, Loretta Young très en beauté est parfaite dans un rôle parfaitement écrit, et Robinson s'en tire avec énormément de professionnalisme. Quant à la mise en scène, elle donne le tournis, ne nous laisse aucun répit, multiplie les angles du vues, les mouvements de caméra, la photographie, les éclairages… pour finir de la plus belle manière avec cette conclusion d'anthologie. Ne vous occupez pas de la légende du film, regardez-le, vous ne le regretterez pas, ce film n'est rien d'autre qu'une magistrale leçon de cinéma !

Les enchaînés 

Un film d'Alfred Hitchcock (1946) avec Cary Grant, Ingrid Bergman et Claude Rains. Sans doute le plus beau noir et blanc du maître (quoi que Rebecca…) C'est Bergman qui porte le film, Grant étant réduit à jouer les faire valoir. Son rôle n'était pas évident, une aventurière pocharde très habilement manipulée par les services secrets qui s'en sort merveilleuse bien, du moins au début. Hitchcock doit faire preuve d'ingéniosité pour détourner les contraintes puritaines du code Hayes, ainsi il nous fait comprendre sans le dire qu'Alicia s'est prostituée, de même qu'il nous fait comprendre que pour qu'elle puisse réussir sa mission, il faudra coucher ! Tout l'art de dire les choses sans les dire ! Et il fera encore plus fort, en ce temps-là, le Code Hayes dans son infini bêtise avait décidé qu'un baiser ne devait pas excéder 3 secondes ! Que fait Hitchcock ? Il fait faire à ses acteurs toutes une série de baisers de 3 secondes… et ça dure plus de deux minutes. La force du film est dans la montée du suspense, pratiquement inexistant au début, on se demande ensuite comment l'engrenage va se gripper, et quand il grippe, ça n'arrête plus jusqu'à ce plan final d'une efficacité et d'une cruauté prodigieuse. L'intrique d'espionnage est par ailleurs enrichie par les rapports compliqués entre Grant et Bergman, entre l'amour et le devoir et Hitchcock dans ce difficile exercice d'équilibriste s'en sort à merveille sans fard et sans niaiserie. Parmi les acteurs secondaires, si Claude Raims fait le boulot avec efficacité, il faut souligner la prestation fabuleuse de Léopoldine Konstantin en mère abusive, une vrai teigne qu'on a envie de sortir de l'écran pour la baffer ! .Bref, ce film est un chef d'œuvre !

Bedlam 

Un film de Mark Robson avec Boris Karlov (1946). Plein de bonnes choses, ne serait-ce que l'ambiance très influencé par l’expressionnisme allemand, le sujet puisqu'il s'agit de la dénonciation des conditions de l'internement psychiatrique au XVIIème siècle en Angleterre, la qualité de l'interprétation : Karlov incarne magistralement un personnage infect, et la surprenante et très jolie Anna Lee . Côté négatif, tout cela fait un peu conte de fée et puis surtout le blabla du quaker de service est assez peu supportable. Au final un film intéressant mais sans doute surestimé.

L'Emprise du crime 

Un film de Lewis Milestone (1946) avec Barbara Stanwick et Kirk Douglas. Un grand film noir dont l'objectif est de montrer que certaines motivations des protagonistes trouvent leur origine dans leur passé. Le déroulement de l'histoire est intéressant puisqu'il faut attendre un bon moment pour comprendre les motivations des uns et des autres (d'autant qu'il faut faire avec les retournements de situation) . Quelque part le film anticipe sur les obsessions de Woody Allen sur ce fameux sens du destin (qui justement n'existe pas) et qui n'est qu'un enchaînement de circonstances. L'ambiance polar est fort bien rendue (avec parfois un zeste d'autodérision). C'est très bien joué, Stanwick en tête, Kirk Douglas dont c'est le premier film est bon, quant au personnage très bien interprété par Lizabeth Scott, on ne saura jamais exactement qui elle est, sinon une inconnue liant son destin à celui de Van Helfin, le véritable héros de ce film qui n'omet pas une certaine critique sociale (la corruption des puissants, la manipulation de la justice).

Une nuit à Casablanca 

Un film d'Archie Mayo (1946) avec les Marx Brothers. C'est très bon et complètement loufoque. Ça commence par l'un des gags visuels les plus célèbres de l'histoire du cinéma (Harpo qui soutient le mur d'une maison...) Le film contient deux scènes d'un délire absolu, celle de la préparation des valises et celle de la poursuite avec l'avion. les Marx sont toujours bien dans leurs rôles respectifs,toujours aussi foldingues, et les morceaux de piano (Chico) et de Harpe (Harpo) sont toujours aussi bien. On notera la présence au générique de Lisette Verea dont on se demande pourquoi elle n'a pas fait carrière dans le cinéma, avec son physique à la Ava Gardner.

Nuit et jour  

Un film de Michael Curtiz (1946) avec Cary Grant. Passons sur l'absurdité du sujet, puisqu'on est en 1946 et faire un "vrai" biopic de Cole Porter et donc aborder sa bisexualité était à l'époque impossible. Alors pourquoi le faire d'autant que Porter était toujours bien vivant en cette année-là et que quelques uns de ces meilleurs succès ne sont pas encore créées (Kiss me Kate…). Mystère ! On va donc dire qu'on est dans un monde parallèle dans lequel Porter a eu un destin plus conforme avec le politiquement correct hollywoodien. Alors le résultat ? Sachant ce qui précède on peut être un peu mitigée, il n'y a absolument aucune tension et Cary Grant n'est qu'à demi convainquant. Mais à côté de ça l'image est superbe, les femmes sont plus belles les unes que les autres et puis il y a la musique de Cole Porter qui nous enchante tout au long du film.

Sylvie et le fantôme 

Un film de Claude Autant-Lara (1946) avec Odette Joyeux, Jacques Tati, Pierre Larquey, Jean Dessailly, François Perrier. Carette, Le film démarre avec un gros handicap, celui d'avoir un scénario aussi impossible que farfelu puisqu'on est dans le registre de ce qu'il est convenu d'appeler la poésie fantastique, genre difficile s'il est. Pourtant le pari est presque réussi, le film parvient à nous enchanter et à nous étonner (les scènes où Tati doit apprendre à se balader avec son suaire sont savoureuses) On pourra néanmoins regretter certains dialogues décidemment trop théâtraux. En ce qui concerne l'interprétation elle est dominée par Odette Joyeux, impeccable, à ce point que l'on oublie qu'on lui fait jouer le rôle d'une gamine de 16 ans, alors qu'à l'époque en avait 32 ! Le reste de la distribution est très correct (Larquey, Carette, Perier, Desailly, Tati et même l'inconnue Claude Marcy qui nous joue une étonnante comtesse. En revanche les gosses sont très mal dirigés, Lise Topart en tête, véritable tête à claques. A regarder d'un œil naïf, un peu comme quand on lit les contes d'Andersen.

Le Train de la mort 

Un film de Roy William Neill (1946) avec Basil Rathbone. Dans ce genre d'histoire, l'intérêt est d'essayer de deviner qui est le coupable. Un scénariste talentueux parsèmera son film d'imperceptibles indices rendant la solution difficile mais trouvable. Or ici c'est impossible, c'est totalement introuvable. De plus le métrage du film (60 mn) ne permet pas de s'appesantir sur les personnages, on est trimbalé de fausses pistes en fausses pistes et on est largué. Quant à la fin c'est carrément bâclé. Bref c'est pas terrible.

La clé 

Un film de Roy William Neill (1946) avec Basil Rathbone. Mou, mal fichu, inintéressant, ridicule. De plus le sous-titrage est déficient.

Les tueurs 

Un film de Robert Siodmak (1946) avec Burt Lancaster et Ava Gardner. Un film noir avec une narration complètement chamboulé (mais on s'y fait très vite). L'intrigue est assez banale, mais est illustré par quelques scènes assez fabuleuses (le hold-up, la fusillade dans le bar). Burt Lancaster (très bon) et Ava Gardner (trop belle) domine une distribution assez inégale. Très bonne musique de Miklos Rozsa. Un bon film noir, sans doute légèrement surestimé.

L'impasse tragique 

Un film d'Henry Hathaway (1946) avec Lucille Ball. Un film noir dans la grande tradition, avec un détective qui tête de la bouteille, des belles nanas (mais pas de femmes fatales dans celui-ci) et des extérieurs nuits. Une touche d'humour (la conclusion de la course de voiture est bien trouvée), des personnages bien typés, de l'ambiance, des fausses pistes, c'est bien filmé, bien cadré et bien éclairé. On peut juste regretter les facilités de scénario du dénouement. Un excellent polar qui en vaut bien d'autres pourtant mieux côtés.

Scandale à Paris 

Un film de Douglas Sirk (1946) avec George Sanders. Un biopic complètement fantaisiste de Vidocq. L'histoire nous est conté avec une si belle élégance dans le ton (George Sanders y est parfait) et dans la mise en scène qu'on en oublie le coté farfelu. Un petit bijou à redécouvrir !

Le dahlia bleu  

Un film de George Marshall avec Alan Ladd et Veronica Lake (1946). Un film à ranger au rayon des impostures policières. Certes le film se regarde en raison d'un assez bon rythme et à l'absence de temps morts, mais côté empathie on repassera, avec un Alan Ladd sans aucun charisme jouant au roi du coup de poing en costume cravate et un William Bendix horripilant. Quant à la très belle Veronica Lake, elle ne joue pas, elle minaude. Ces défauts auraient sans doute été atténuées si la fin avait su nous surprendre, mais nous avons au contraire un final en forme de gloubi-boulga aussi inepte d'incompréhensive et en plus décevant. Rétrospectivement après ce final lamentable on se demande à quoi on servi pendant tout le film ces rencontres, ces sous-intrigues, ces fausses pistes et ces morts inutiles, sinon à faire de l'esbroufe à bon marché.

Un revenant  

Un film de Christian-Jaque (1946) avec Louis Jouvet, Gaby Morlaix, Ludmilia Tcherina, François Perrier. Le film n'a qu'un seul défaut ce sont ses dialogues trop théâtraux, attention, ce ne sont les dialogues qui sont mauvais (c'est du Jeanson quand même) mais la façon dont ils sont dits n'est pas toujours très naturelle. Jouvet est impérial, Perrier surprenant, Tcherina moyenne mais très mignonne. Sinon le film taille une veste au mythe de l'amour éternel, l'histoire est noire, féroce, machiavélique, sans concession, mais elle n'est pas triste, c'est une leçon de vie.

Les portes de la nuit  

Un film de Marcel Carné (1946) avec Yves Montant, Raymond Bussière, Serge Reggiani. Que d'ennui ! A quoi se raccrocher ? L'intrigue ? Son intérêt est quasi nul puisque tout est dit d'avance par le personnage du Destin (incarné avec une lourdeur agaçante par Jean Vilar), quant aux scènes secondaires (la gitane) on se demande leur utilité. Le contexte ? Force est de constater qu'il est maladroit dans son manichéisme ? Les acteurs ? Ça manque considérablement de pointure, Montand n'est pas très bon, Reggiani fait ce qu'il peut mais est prisonnier d'un personnage trop chargé, Carette cabotine et Saturnin Fabre se croit au théâtre, quant à ces dames elles sont transparentes. Les dialogues ? Trop ampoulés, trop écrits, trop bavards, Prévert commettant les mêmes erreurs que pour "les Visiteurs du soir". L'ambiance ? Ben oui, il y a une ambiance, c'est indéniable, mais ça ne suffit pas à faire un film (idem pour la musique). Il faudra attendre "La Marie du port" pour retrouver le grand Carné.

La fille du diable 

Un film d'Henri Decoin (1946) avec Pierre Fresnay et Fernand Ledoux. Un film d'une richesse remarquable, derrière le thriller sur le thème classique de l'usurpation d'identité se cache une peinture au vitriol de la vie de province avec ses notables véreux, ses faux bienfaiteurs et ses laisser pour compte. La force du film est d'éviter tout manichéisme, les crapules n'étant pas forcément ceux qui en ont plus l'air. Noir mais beau et excellente interprétation de Fresnay et de Ledoux.

L'affaire du collier de la reine 

Un film de Marcel l'Herbier (1946) avec Vivianne Romance. Enorme succès au box-office à sa sortie, le film est aujourd'hui complétement oublié. On comprend pourquoi : Le film a eu des moyens (costumes figurants…) mais souffre de son académisme, voire même au début d'une certaine confusion. Le réalisateur dans la première partie préfère insister sur l'ambiance de la cour (il ay a d'ailleurs de fort jolis plans) plutôt que sur la précision de l'intrigue. De plus le rôle de Cagliostro joué par Pierre Dux frise le ridicule. Néanmoins la première heure du film reste tout à fait regardable d'autant que le charme de Viviane Romance fonctionne fort bien. Quand commence le procès, le film fait naufrage, la longue scène du procès est ratée tant sur la forme (il n'est qu'à comparer ce que font les américains en la matière) que sur le fond (on est jamais obligé de respecter la vérité historique mais il y a des limites tout de même…) quant aux dernières scènes : L'herbier en fait trop tirant son film vers la tragédie avec une lourdeur d'hippopotame. Sur le sujet on regardera les film "l'affaire du collier" de Charles Shyer (2001) qui raconte la même histoire de façon bien plus intéressante.

My darling Clémentine (la poursuite infernale) 

Un film de John Ford (1946) avec Henry Fonda et Victor Mature. Bonne mise en scène, les cadrages et la photographie sont magnifiques, il y a un doigt d'humour. Et puis il y a Linda Darnell, ça c'est pour les côtés positifs, sinon il faut bien avouer que ça se traîne un peu, que le film est encombré de scènes inutiles (la séquence "théâtrale") et que le final est expédié de chez expédié.

Monsieur Grégoire s'évade 

Un film de Jacques Daniel-Norman (1946) avec Bernard Blier, Jules Berry, Yvette Lebon. Le début de ce vaudeville policier démarre sur les chapeaux de roue et se regarde avec un vrai plaisir d'autant que Jules Berry y est très bon. Hélas dans la seconde partie le film ne tient plus la distance jusqu'au final grotesque en forme de "victoire" de la morale alors qu'il fallait jouer la carte du cynisme (on meuble même avec une chorégraphie médiocre des Folies Bergère et avec un chanteur de bistrot catastrophique). Allez 4,5  pour la première partie, 1,5 pour la seconde, ce qui nous fera 3 de moyenne.

Tragique rendez-vous 

Un film de Leonid Moguy (1946) avec Ava Gardner, Georges Raft. Difficile de faire plus mauvais. Un couple sort d'un bistrot mais est encore là le plan suivant, une fille se retrouve à l'hôpital sans qu'on sache pourquoi, un hold-up n'a pas lieu mais a lieu quand même, bref on n'y comprend rien, ça n'a aucun intérêt et même Ava Gardner n'est pas mise en valeur.

Le pays sans étoile 

Un film de Georges Lacombe (1946) avec Gérard Philippe. Incroyable : la bande son recouvre parfois tellement les dialogues qu'on ne comprend pas ces derniers. Gérard Philippe est mou comme un chamallow. Jenny Holt était bien mignonne mais Lacombe n'a pas sur rendre cette histoire intéressante.

Pas si bête 

Un film d'André Berthomieu (1946) avec Bourvil. On regarde jusqu'au bout parce qu'on espère un peu de finesse, une surprise. Et bien non, le film se traine pour nous raconter une histoire sans intérêt, sans nuances, souvent niaise et, osons le dire, sans intelligence. Bourvil n'est pas très bon et se croit au cabaret nous gratifiant de longs monologues bien poussifs, le reste de la distribution est quelconque malgré Yves Deniaud et Mona Goya. Vraiment pas terrible...

Le capitan 

Un film de Robert Vernay (1946). Si la mise en scène de cette production à gros budget est fort correcte, le film souffre de la disparité de sa distribution qui va du sublime au ridicule. La distribution féminine est un sans-faute dominée par Lise Delamare interprétant le rôle difficile de Léonora Galigaï, Huguette Duflos en Marie de Médicis, Claude Génia en Gisèle d'Angoulême et Sophie Desmarest en Marion Delorme sont excellentes. Coté masculin, c'est plus compliqué, Jean Tissier comme souvent nous ravit, mais Pierre Renoir semble en service minimum et le freluquet jouant le Capitan est passablement agaçant. Mais le pire c'est le rôle du jeune Louis XIII joué par un môme tête à claques, qui non content de mal jouer atteint les sommets du grotesque. Sur le fond c'est de l'Histoire romancée et on aurait sans doute préféré un Louis XIII un peu moins "gentil garçon". Le personnage du Capitan n'a lui aucune profondeur, et se contente de faire le fier à bras, inutile de dire que dans ces conditions, l'empathie ne fonctionne pas. Quand aux duels, les perroquets pourront toujours dire que ça obéit aux codes du genre, pourquoi ne pas appeler les choses par leur nom, eux appellent ça des codes, moi des clichés. Bon en résumé ça se regarde sans ennui malgré ses défauts et même si on a envie de sortir le jeune Louis XIII de l'écran pour lui distribuer des baffes.

Histoire de chanter 

Un film de Gilles Grangier (1946) avec Luis Mariano, Julien Carette, Noël Roquevert. Une farce musicale assez réussie, Mariano s'en tire plutôt bien (y compris dans Rigoletto) dans un numéro d'auto-dérision même s'il n'est pas un acteur, alors que Carette qui lui en est un énerve son monde, Noël Roquevert en savant fou et cocu constitue une petite curiosité. Et puis il y a plein de femmes partout (dont la très belle Arlette Merry) à ce point qu'on finit par les confondre, mais elles sont toutes absolument charmantes. Bref rien de génial, mais on passe un agréable moment.

The Harvey Girls 

Un film de George Sidney (1946) avec Judy Garland. La première scène fait peur : Judy Garland attifée comme l'as de pique et coiffée en pétard chante une sucrerie en minaudant tandis que défilent d'infâmes surimpressions. Déjà ça met en forme, ensuite le fond qui n'est rien d'autre que la lutte de la vertu contre le vice (version biblique) est d'un passionnant, Nos deux chanteuses vedettes, Judy Garland et Angéla Lansbury rivalisent de laideur, et la musique, qui est quand même fondamentale dans une comédie musicale a été confié à d'obscurs tacherons qui a une exception près ne nous délivrent que la guimauve soporifique. A oublier d'urgence sous peine de faire des cauchemars.

La tentation de Barbizon 

Un film de Jean Stelli (1946) avec Simone Renant, Daniel Gélin, François Perrier, Pierre Larquay. Vu le pitch, on pouvait s'attendre à un nanar. En fait non, c'est une comédie plutôt plaisante à suivre, malgré quelques niaiseries. La réalisation et correcte et les acteurs sont bons, Simone Renant e son charme fou domine la distribution malgré le rôle idiot qu'elle doit jouer (mais la dernière scène avec Gélin est vraiment très bonne). La morale semble surprenante vu le thème du film puisqu'elle semble dire que les humains n'ont besoin ni d'anges ni de démon pour se débrouiller. On ne saurait dire le contraire. PS : Quant à ceux qui vouent une admiration au film au titre qu'il contient la première apparition de De Funès, s'ils savaient comme je m'en fiche.

Quelque part dans la nuit 

Un film de Joseph L. Mankiewicz (1946).  Malgré tout le respect que je porte à Mankiewicz et à son œuvre, ce film de ses débuts ne convainc pas. On a beau louer, et à raison, la mise en scène, les éclairages, la photo, quelques plans à la Fritz Lang, la beauté des actrices (je n'ai pas dit leur talent)…  quand le scénario n'est pas bon, le film ne l'est pas. Pas bon pourquoi ? D'abord la clé de l'énigme est tellement mal protégée qu'on s'en doute rapidement, c'est quand même ennuyeux d'être ainsi en avance sur le personnage principal, ensuite c'est confus et surtout ponctué de facilités de scénario n'en veut-tu, en voilà. Ajoutons à cela un humour qui tombe à plat (un inspecteur sans chapeau, ça vous donne le fou rire, vous ?) un personnage principal peu crédible et assez terne et une fin encore plus n'importnawak que le reste…

Le Sexe fort 

Un film mexicain de Emilio Gómez Muriel (1946). Une petite perle dégotée sur Youtube. C'est de l'anticipation et ça nous parle d'une communauté d'amazones dont les habitudes vont être chamboulés par l'arrivé de deux bellâtres. Au premier degré, c'est complètement antiféministe, d'ailleurs le séducteur de service ne fait pas dans la dentelle. Mais il s'agit d'une comédie et les quelques lourdeurs sont compensées par l'interprétation de ces dames, Mapy Cortès en tête dans le rôle de la reine, de très agréables morceaux musicaux et quelques scènes amusantes. On ne s'ennuie pas une seconde et la conclusion trouve le moyen d'être bien plus intelligente que celle de la mégère apprivoisée de Shakespeare, j'ose le dire !

L'Incroyable Monsieur X 

Un film de Bernard Vorhaus (1946).C'est long à démarrer, ça se traîne, le récit est mal maîtrisé, reste l'étrange beauté de Lynn Bari et quelques séquences quasi-documentaire sur les pratiques du mage, ce qui ne fait pas vraiment le compte

Shock 

Un film de Alfred L. Werker (1946) avec Vincent Price. Dès que Price se présente comme psychiatre on se dit que l'affaire est empaquetée, à moins que… Ben justement à moins que rien du tout, le scénar reste dans les clous du convenu et se conclue de façon grotesque. Ajoutons-y le rôle énervant et ridicule du militaire en tenue et le tableau sera complet. Vincent Price est en petite forme, mais Lynn Bari nous campe une Elaine tout à fait correcte. Un polar bien décevant.

Duel au soleil 

Un film de King Vidor (1946) avec Jennifer Jones, Gregory Peck, Joseph Cotten, Lionel Barrymore, Lillian Gish et produit par David Selznick. Deux préalables : Si le film est attribué à King Vidor, c'est d'abord un film de producteur comme l'était "Autant en emporte le vent", la paternité du film appartient donc David O. Selznick, et je ne vois pas bien pourquoi ce serait une tare ! Autre chose : Ils me font bien marrer ceux qui critiquent non pas le film mais son scénario en se gaussant de l'inconsistance de son héroïne ! Faut peut-être leur expliquer que c'est justement le sujet du film (et que par ailleurs, mais ce n'est qu'un détail, ce genre de comportement dans la vraie vie, ça existe !) Alors oui nous avons un film hybride, pas tout à fait western, pas tout à fait mélodrame, mais transcendé par le personnage de Pearl, qui nous subjugue de sa beauté. C'est une histoire d'amour fou, de folie et le dernier plan dont certains se moquent est pourtant d'une force époustouflante (il se chuchote que cette scène aurait été tourné par Sternberg). Certains plans sont fabuleux comme ce face à face dément entre la cavalerie et les sbires du sénateurs, ou celle avec le troupeau de vaches. A contrario on peut déplorer certaines scènes complètement gratuites (le dressage du cheval noir) ainsi que le manichéisme avec lequel sont décrit les deux frères. Le rôle de la servante, sans être raciste, n'est pas très heureux, quant à cette scène où le vieux sénateur fait son examen de conscience, non merci… Ah, j'avais oublié le pasteur absolument ridicule. Des défauts mais qui ne doivent pas nous priver de la vison de ce film troublant ce serait-ce que pour Jennifer Jones et ce technicolor somptueux..

L'Evadée

Un film de Arthur Ripley (1946) avec Robert Cummings, Michèle Morgan, Peter Lorre. Bon commencement malgré le rythme lent, belle photographie (Morgan est bien mise en valeur) et réalisation correcte; Bref c'était parti pour un petit polar sympa ,jusqu'à ce qu'on constate qu'en plein milieu d'une scène la robe de Michelle Morgan passe du blanc au noir !. On fait avec, et à la moitié du film notre Robert se réveille on ne sait où et on refait le film autrement, inutile de dire qu'on est perdu, qu'il n'y a plus ni tension ni suspense, Quant à la fin, plus téléphoné tu meurs. L'interprétation est moyenne mais dominé par un Peter Lorre très pro !

Medan porten var stängd

Un film suédois de Hesse Ekman (1946) avec Tollie Zellman, Marianne Löfgrent. Un film choral qui nous présente les habitants d'une maison de Stockholm durant une seule nuit. Voilà qui aurait pu être intéressant, hélas le film se focalise trop longtemps sur la rôle de Tollie Zellman qui joue une actrice déchue, or cette personne est littéralement horripilante à tout point de vue et plombe le film, la caractérisation de la plupart des autres personnages n'a pas grand intérêt sauf sans doute celui joué par Marianne Löfgrent jouant le rôle d'une prostituée. A cette époque la Suède avait un tout autre regard que maintenant sur la prostitution et le personnage est aussi sympathique qu'intéressant

Rome, ville ouverte

Un film de Roberto Rossellini (1946) avec Anna Magnani, Marcello Pagliero. Il y a au moins deux façon de regarder ce film, la première est de visionner en raison de son importance supposée dans l'histoire du cinéma et c'est apparemment le choix majoritaire. L'autre est de le regarder à l'état but et dans ce cas nous avons une série B avec ses faiblesses et ses quelques moment forts. Des faiblesses ais-je dit ? Oui parce que la première heure est tout sauf passionnante, parce qu'il y a des ellipses impardonnables (et qu'on ne vienne pas me dire que c'est à cause du manque de moyens, par exemple lors de scène de la rafle, les allemands cherche Manfredi, on ne trouve pas, on fouille partout, on ne trouve toujours pas et plan suivant voilà Manfredi qui sort de la baraque encadré par deux allemands, en quelles circonstances-a-t-il été capturé, mystère et boule de gomme ! Et puis bon, ce curé, Rossellini n'en fait pas un résistant, mais un saint ! son seul défaut est d'être mal à l'aise avec une statuette callipyge. (la scène est d'ailleurs amusante). On pourrait aussi parler de cet officier allemand qui se met à débiter, sans que personne ne lui demande quoi que ce soit, sa haine des nazis (certains on été jugé pour haute trahison pour moins que ça) Reste quelques scènes fortes comme Anna Magnani courant derrière son mari qu'on emporte et tuée par les allemands, ou ce plan atroce de quelques petites secondes ou l'on voit Manfredi torturé au fer a souder. Et puis question subsidiaire ? Où sont donc passés les fascistes italiens ? Ils avaient piscine ?

Les Dollys Sisters 

Un film d'Irving Cummings (1945) avec Betty Grable. On voudrait bien aimer davantage ce joli technicolor d'autant que ces demoiselles sont charmantes et ont de belles gambettes, mais si les numéros musicaux sont bien vus côté costumes et montage, on ne peut en dire autant sur la qualité de la musique et de la chorégraphie. Quant à l'histoire amoureuse qui sous-tend tout ça, elle devient vite gavante (et même grotesque à la fin). Dommage, vraiment dommage !

Détour   

Un film d'Edgard G. Ulmer (1945). Un film fauché (ça se voit) et réalisé à la Corman (trois semaines ?) Et pourtant le résultat est bluffant. Nous avons là un portrait de femme fatale version teigne assez rarement vu au cinéma et remarquablement interprété par la troublante Ann Savage. L'histoire est simple mais fonctionne parfaitement, la photographie est très correcte et même très belle par instants. Si le film n'avait pas été brimé par son faible budget et par quelques débilités imposées par la censure on aurait tenu là un chef d'œuvre. On en est là néanmoins tout près.

Le roman de Mildred Pierce 

Un film de Michael Curtiz (1945) avec Joan Crawford. Ça commence comme un film noir, puis ça surfe à la limite du mélodrame dans lequel Curtiz à l'intelligence de ne pas s'enfoncer. Le côté cruel, dérangeant voire éprouvant de l'intrigue est remarquablement porté à l'écran. Joan Crawford, magnifiquement photographié y est sublime mais Ann Blyth ne démérite pas (Pourquoi avec ce talent, cette actrice n'a-t-elle pas fait une grande carrière ?), bien loin de là, dans un rôle on ne peut plus ingrat. Mise en scène d'une efficacité redoutable, photo somptueuse, bonne musique, scénario parfaitement maîtrisé. Chef d'œuvre !

Aventures en Birmanie 

Un film de Raoul Walsh (1945) avec Errol Flynn. Si l'on enlève l'aspect "le chef a toujours raison", ce film de guerre (Objectif Burma, puisque le titre français est débile) est un chef d'œuvre. La progression de l'action est menée de façon magistrale magnifiquement photographiée, découpée, cadrée, dosée. Walsh réussit à diriger Errol Flynn de main de maître (on n'est pas dans Capitaine Blood) et il ne transforme pas les personnages secondaires en stéréotypes. Le film est spectaculaire au sens premier du terme, les scènes de combats, les scènes de progression dans la jungle prennent une dimension quasi-documentaire, le sommet étant atteint avec l'attaque de la colline à la fin. Un grand film de guerre.

Boule de suif 

Un film de Christian-Jaque (1945) avec Micheline Presle. Le scénariste Henri Jeanson a fait un mix de deux nouvelles de Guy de Maupassant (Boule de suif et Mademoiselle Fifi). La réussite est complète malgré la posture très théâtrale des scènes de dialogues. C'est bien joué, bien réalisé et surtout bien vu. Micheline Presle dans le rôle d'une prostituée au grand cœur est sublime. Le choix de la musique, criarde et martiale n'est peut-être pas une très bonne idée, mais sinon nous avons là un chef d'œuvre !

La maison de la 92ème rue 

Un film d'Henry Hathaway (1945). La couleur est affichée dès le début, le film sera à la gloire du FBI, un éloge sans nuances. Mais il faut croire que le FBI n'a pas eu les moyens de se payer un casting de premier choix, car ici la direction d'acteur est faible, souvent impersonnelle. Pourtant le film reste attachant d'une part par son côté rétro-documentaire (les méthodes d'observations et d'investigations de 1945), son ambiance et puis par l'intrigue qui ne manque pas d'intérêt. Pas de quoi s'affoler mais ça se regarde bien.

Le portrait de Dorian Gray  

Un film de Albert Lewin (1945) avec Georges Sanders. Le film est fascinant de par son sujet, de par son traitement et de par la présence de Sanders (qui incarne les idées d'Oscar Wilde et qu'on aurait tort de réduire à ses attitudes les plus cyniques) de plus il est esthétiquement superbe. Le fond est plus discutable puisque la lecture du film au premier degré est morale, il s'agit là d'une dérive par rapport au roman de Wilde qui lui est amoral (et non pas immoral). Le personnage de Lord Henry (joué par Sanders) est ambiguë, d'un côté on apprécie ses vannes propres à effrayer la bien pensance, de l'autre il est présenté comme une sorte de "pousse-au-crime". Si le roman s'achève sur la mort de Gray, le film y ajoute une scène où ses proches viennent constater le décès, tout ça afin d'entendre Sanders marmonner un "Mon Dieu, pardonnez-moi !" absolument déplacé. En fait Wilde expliquait que l'hédonisme n'était sans doute pas à la portée de tout un chacun et que la seule erreur de Sir Henry était d'avoir influencé Dorian qui n'était pas prêt pour ça ! Alors que dans le film on semble nous dire que l'hédonisme est une pente qui conduit à la déloyauté, à l'égoïsme et même au crime. Malgré ces réserves (il est probable que la dernière scène ait été imposé par la prod) le film reste remarquable.

Le récupérateur de cadavres  

Un film de Robert Wise (1945) avec Boris Karloff et Bela Lugosi. Ce film a été produit par Val Lewton et comme dans La Féline (Tourneur 1942), l'angoisse nait de la suggestion et non de la démonstration. On retiendra notamment ce chat qui miaule de peur tandis que Karloff et Lugosi en viennent aux mains. Le scénario est original et nous baignons dans une ambiance feutrée et volontairement malsaine avec une interprétation magistrale de Boris Karloff et un final d'anthologie. Une seule scène est ratée, celle de la guérison de la fillette, sinon nous avons là une perle du cinéma fantastique.

La cible vivante 

Un film d'Anthony Mann (1945) avec Eric Von Strohem. Le problème de ce film c'est que le suspense fonctionne de travers, le "Que va-t-il se passer ?" n'ayant plus aucune raison d'être posé, est remplacé par "Ça va se passer quand ?". La chose se regarde néanmoins grâce à une mise en scène élégante, une prise de vue soignée, un Eric Von Strohem parfait et aussi une Mary Beth Hughes qui ne démérite pas dans son rôle de garce pourtant trop abrupte.

La maison du Docteur Edwardes 

Un film d'Alfred Hitchcock (1945) avec Ingrid Bergman, Gregory Peck et Michael Chekhov. Si l'interprétation des rêves était aussi simple que ça, n'importe quel bonimenteur de foire pourrait se déclarer psychanalyste. Ceux qui ont essayé de se frotter aux œuvres de Freud savent que les choses sont autrement compliquées et semées d'embûches. Et c'est bien le gros défaut du film de rabaisser la psychanalyse au niveau de la page "spécial jeu" de votre magasine préféré. En plus c'est bavard, et la fin est malhabile. C'est très dommage car le film à d'autres atout et principalement celui de nous offrir l'un des couples les plus glamour de l'histoire du cinéma, magnifiquement photographié. il faut aussi noter l'excellente et étonnante prestation de Michael Chekhov en Docteur Brulov Et aussi l'excellente musique de Miklos Rozsa. Mais que voulez-vous quand le scénario n'y est pas, le film n'y est pas non plus.

La rue Rouge 

Un film de Fritz Lang (1945). Avec Edward G. Robinson et Joan Bennett. Un an après le succès du fabuleux "La femme au portrait", Fritz Lang en reprend les deux acteurs vedettes pour une nouvelle histoire de femme fatale mais en beaucoup plus noir (c'est le moins que l'on puisse dire) et sans atteindre la perfection de ce dernier film, celui-ci n'en constitue pas moins une fabuleuse réussite. Le thème du "brave mec" qui se laisse manipuler par une femme jusqu'à tomber dans la déchéance n'est pas nouveau mais là il est vraiment transcendé par les acteurs, la mise en scène méticuleuse, la musique, les plans, l'éclairage. Tout simplement parfait.

Le mystère Saint-Val 

Un film de René Le Hénaff (1945) avec Fernandel et Pierre Renoir. Il est arrivé que certains scénarios absurdes soient transcendés par le jeu des acteurs et/ou la réalisation. Rien de tel ici, ça se traîne lamentablement, Fernandel n'est pas très bon et Pierre Renoir transparent. On s'intéresse malgré tout un petit peu à cette histoire bizarre avant que le soufflé retombe, le film se perd alors dans une série de twists absurdes qui finissent par nous faire demander ce qu'on est en train de regarder. Très mauvais.

Falbalas 

Un film de Jacques Becker (1945) avec Micheline Presle et Raymond Rouleau. Avec un tel scénario on aurait pu avoir une bluette insipide digne d'un roman photo de "Nous deux". Et bien Becker parvient à nous transcender tout ça et en faire un chef d'œuvre. La direction d'acteurs est impeccable, Raymond Rouleau est exceptionnel, Micheline Presle magnifique, et Jeanne Fusier-Gir n'a jamais été aussi bonne. Le milieu de la haute couture (que Becker connait bien) est particulièrement bien rendu sous tous ces aspects. Les personnages et leurs interactions sont intéressants et beaucoup plus complexes qu'on ne pourrait l'imaginer. Le personnage incarné par Rouleau est à cet égard très bien vu, on a d'abord de l'empathie pour ce dandy décontracté avant de s'apercevoir que c'est un mufle (et pas qu'un peu), puis de s'émouvoir de sa folie.

Les enfants du Paradis 

Un film de Marcel Carné (1945) avec Arletty, Jean-Louis Barrault, Pierre Brasseur, Marcel Herrand. C'est avec une grande appréhension que j'entamais la vision de ce film, je n'apprécie pas spécialement Barrault ni la pantomime, et les "Visiteurs du soir" m'avaient terriblement déçu. Mais mes craintes se sont vite envolées devant tant de talents conjugués et de maestria, Le mise en scène donne le tournis, les dialogues sont parfaitement maitrisés évitant les péroraisons, l'interprétation est fabuleuse, Brasseur et Arletty jouent avec un naturel saisissant, Barrault est stupéfiant en mime, Herrand fabuleux en ange noir. L'histoire est à la fois simple et complexe, elle tourbillonne et on ne s'ennuie jamais, la musique de Kosma est excellente. Le fond est intéressant : six histoires d'amour fou mais jamais partagés sauf en de rares instants, reste à savoir comment les personnages le gère, c'est le sujet principal du film, et à ce jeu qui voit Herrand sombrer dans la machination criminelle et suicidaire, le comte qui se figure que son titre lui permet tout dans l'abjection, Casares dans le déni et Barrault dans la folie. seuls les personnages joués par Brasseur et Arletty s'en sortent avec intelligence et dignité. Le personnage interprété par Arletty est particulièrement fort, une femme restée maîtresse de son destin mais qui sait rester lucide… et amoureuse. Un sans faute, Le chef d'œuvre de Carné et une perle dans l'histoire du cinéma.

Capitaine Kidd 

Un film de Rowland V. Lee (1945) avec Charles Laughton, John Carradine et Randolph Scott. Rowland V. Lee qui nous avait ravi en 1940 avec "le fils de Monté Cristo" nous pond ici un ragout maritime assez fade. Alors bien sûr tout cela est construit autour de la personnalité de Charles Laughton qui crève l'écran, s'amuse comme un fou et s'en sort à merveille. Mais sinon : Une histoire sans rythme ni enjeu, un film de pirate sans un seul abordage (un comble !) un Randolph Scott. mauvais (faut dire aussi que le rôle débile qu'on lui fait jouer…)  Ça fait vraiment film pour ados (de l'époque)

La femme en vert 

Un film de Roy W. Neill (1945) avec Basil Rathbone. Nous revoilà avec Sherlock holme. Ça commence bien avant de devenir aussi soporifique qu'inconsistant. Il y a Hillary Brooke une jolie femme, seul maigre intérêt de ce film complètement désuet. Qu'une série aussi insipide ait pu avoir un tel succès sans cesse renouvelé. (14 films entre 1939 et 1946) reste pour moi un mystère.

Du sang dans le soleil 

Un film de Frank Llyod (1945) avec James Cagney. Une catastrophe : Cagney en mode "m'as-tu vu ?" énerve son monde au milieu d'une histoire incompréhensible où invraisemblances, confusions, bavardages, ellipses, et situations ridicules se succèdent sans arriver à nous intéresser. Autant relire le Lotus bleu, c'est plus rigolo !

Fog Island 

Un film de Terry O. Morse (1945) avec Lionel Atwill. Un ratage dans les grande largeurs, Le scénario est aberrant et confus, les personnages ont des réactions absurdes, c'est réalisé platement, mal monté, ennuyeux, on se désintéresse vite de cette intrigue mal construite et sans surprise, on ne se raccroche à rien. La totale, quoi !

Le poison

Un film de Billy Wilder (1945) avec Ray Milland. Ce n'est pas un film sur l'alcoolisme mais un film sur un alcoolique. Et à ce titre la performance de Ray Milland est hallucinante, tout en devant énormément au travail de mise en scène de Billy Wilder, qui évitant le piège du faux documentaire parvient à nous décrire l'addiction à la bouteille de Milland et tout y passe, des trucs de dingue pour cacher ses bouteilles, sa quête désespéré pour trouver de l'argent, ses délires. ses hallucinations, Et puis nous avons droit à quelques images très inventives comme les marques de rond de verres sur le zinc du comptoir. Le problème c'est la fin, certes rien n'est réglé, Milland va essayer de ne plus boire, mais le patron du bistrot qui rapporte la machine à écrire… j'ai trouvé ça un peu limite, mais bon on est au cinéma.

La falaise mystérieuse   

Un film de Lewis Allen (1944) avec Ray Milland. Ça commençait plutôt bien (quoi qu'un frère et une sœur célibataires qui achètent un manoir ensemble…) mais au bout d'une demi-heure tout part en vrille, ça devient d'abord très compliqué avant de sombrer dans l'absurde et le ridicule à la fin. Même si on peut retenir l'excellence de la photo, la bonne interprétation de Ray Milland, la présence de la jeune et sémillante Gail Russell, ainsi que la beauté mature de l'envoûtante Cornelia Otis Skinner, ce film de fantômes au premier degré n'a vraiment rien de terrible !

L'imposteur 

Un film de Julien Duvivier (1944) avec Jean Gabin. Sortis de leur contexte les films de propagande sont rarement bons er celui-ci ne l'est pas. Le début est vraiment pas mal, l'évasion miraculeuse de Gabin, l'obus sur le camion… Après on redescend d'un étage et ça se gâte complètement dès que Gabin renonce définitivement à la vie civile, le film devenant un enfilement de clichés, de facilités de scénario, de patriotisme poussif, le tout joué par des acteurs caricaturaux parmi lesquels Gabin, qui déjugera le film sort à peine du lot. Tout cela n'est ni passionnant, ni intéressant, ni brillement réalisé et on ne souhaite qu'une chose c'est que ça finisse. Et histoire d'en ajouter un peu signalons que le film contient une réplique ouvertement raciste aussi stupide que déplacée.

La femme au portrait 

Un film de Fritz Lang (1944) avec Edward G. Robinson et Joan Bennett. Quelle maestria ! Avec Fritz Lang, rien ne traîne, on est tout de suite dans le ton et tout de suite dans le vif du sujet. Ça commence par un jeu subtil de séduction, Robinson sait qu'il a affaire à une prostituée mais joue le jeu. Joan Bennet sait qu'il est déjà tombé dans ses filets et l'aguiche avec une tenue dont le haut est quasi transparent (scène magique !). Puis ce sulfureux tête à tête est troublé par l'arrivée impromptue d'un troisième larron… Et le film bascule dans un suspense haletant qui ne nous quittera qu'à la fin ou presque. On est pris d'empathie pour les deux personnages alors que l'étau policier se referme sur eux, alors qu'un maître chanteur s'en mêle… Magnifiquement réalisé et interprété, photographie impeccable, musique de circonstance… Certains ont regretté la fin, oubliant que le cinéma reste de l'imaginaire, quelles que soient les formes qu'il prend. Un grand film noir. Un grand Fritz Lang. Un chef d'oeuvre

Le port de l'angoisse 

Un film de Howard Hawks (1944) avec Humphrey Bogart et Lauren Bacall. Hawks avait fait le pari avec Hemingway d'adapter son plus mauvais roman.  Nous voilà donc avec un résultat hybride, un film dominé par l'interprétation de Bogart et de Bacall, (un film d'acteur, donc) dirigé par un réalisateur qui connaît bien son métier. Mais sinon ? L'intrigue est d'une pauvreté à peine croyable, il n'y a pratiquement pas de suspense, il y a beaucoup de blablas, Walter Brennan est insupportable, les intermèdes musicaux sont mauvais et inutiles, et puis (revenons à l'intrigue) on se demande comment le patron de l'hôtel (Dialo) va gérer la suite des événements… Mais Hawks s'en fout, Bacall suit Bogart en tortillant des hanches et le mot fin intervient alors qu'on ne l'attendait pas si tôt, nous laissant là, avec nos questions !

Ivan le terrible 

Un film de Serge Eisenstein (1944) Il faut toujours relativiser les choses. Ce film contient des choses admirables, le montage, la photo, les jeux d'ombres et de lumières, des scènes inoubliables (le couronnement, la fête avec l'apparition de la couleur) des plans de folie (mais pas toujours logiques à l'instar de ces soldats qui zigzaguent pour aller tout droit), la musique sublime de Serge Prokoviev. Mais à côté de ça, il y a la façon de typer les acteurs qui non seulement surjouent jusqu'à l'excès mais sont tous caricaturaux tellement ils ont la gueule de l'emploi  (les méchants ont des tronches de méchants, les traîtres ont des tronches et des posture de traîtres, les gentils des bouilles de bisounours, quand à Ivan, il nous prend des poses genre "attention l'Histoire me regarde". Certes, on comprend rapidement que ces postures résultent d'un parti pris, mais on a le droit de ne pas le trouver judicieux (un film n'est pas un opéra) Tout cela est au service d'une l'histoire qui n'est que moyennement intéressante. Eisenstein est un maître du cinéma, mais n'est pas Shakespeare qui veut pour transcender un tel sujet. L'impression globale est donc mitigé.

Assurance sur la mort 

Un film de Billy Wilder (1944) avec Fred McMurray, Barbara Stanwick, Edward G. Robinson. Sublime ! Tout est sublime, le scénario, la réalisation, le montage, la photo, la musique (Miklos Rosza) les acteurs. Barbara Stanwick est fabuleuse, c'est palpitant, le suspense et l'angoisse sont au rendez-vous, malgré le fait que l'on sache (volontairement) dès le début comment tout cela va se conclure. On déplore toutefois quelques bémols : le personnage de Nino n'a rien d'attachant et sa liaison avec Stanwick manque de crédibilité, de plus la courte scène, presque à la fin où McMurray donne un jeton de téléphone à Nino est assez puérile. Dommage car on n'est passé très près du chef d'œuvre.

La malédiction des hommes-chats 

Un film de Robert Wise (1944) avec Simone Simon. Le titre est trompeur puisqu'il n'y a ni homme chat ni malédiction. Ce n'est pas non plus un film d'épouvante, ni un film sur les hallucinations d'une fillette mais bien un conte fantastique. Le film qui ne dure que 70 minutes semble avoir eu des soucis au montage parce que l'histoire secondaire des deux étranges femmes dans leur vieille maison n'est pas vraiment très claire. La direction d'acteurs est correcte d'autant que Wise a fait avec ce qu'il avait, mais Simone Simon est très bien et la petite fille s'en sort sans que l'on tombe dans la mièvrerie, c'est déjà énorme. Ajoutons-y une très belle photographie et nous avons là un petit Wise tout à fait regardable quoique vraiment mineur.

Laura  

Un film d'Otto Preminger (1944) avec Gene Tierney. Il faut toujours se méfier de ces films qui trimbalent une réputation de chef d'œuvre éternel. Certes, c'est très bon et les rebondissements fonctionnent bien malgré une intrigue policière assez faible (Clifton Webb, par ailleurs particulièrement agaçant, apparaît très tôt comme le coupable possible).  Gene Tierney est superbe, mais son rôle n'a rien d'un rôle de composition, Dana Andrews fait juste ce qu'il faut et Vincent Price n'est pas trop convainquant. Se laisse regarder avec grand plaisir mais surestimé.

Angoisse 

Un film de Jacques Tourneur (1944) avec Hedy Lamarr. Ça commence vraiment très bien avec cette étrange rencontre dans le train. Mais les longueurs et les mondanités ne tardent pas à pointer le bout de leur nez, heureusement la beauté éclatante d'Hedy Lamarr va nous réveiller et tenter de nous tenir en haleine. Pas longtemps, puis que le film va faire trainer son intrigue poussive sans arriver à nous passionner. Avec un tel sujet Hitchcock aurait probablement pondu un chef d'œuvre, ici on en est loin, très loin.

Pin up Girl 

Un film de Bruce Humberstone (1944) avec Betty Grable. Soyons clair le scénario n'est qu'une petite histoire sans aucune importance destinée à mettre en scène les numéros musicaux de Betty Grable de Martha Raye et de deux joueurs de claquettes et de ce point de vue c'est vraiment très réussi. C'est très alimentaire mais on n'a pas à rougir du résultat, la musique est bonne, la chorégraphie inventive, et puis voir Betty Grable en secrétaire à lunettes en train de loucher, c'est tout même quelque chose, non ?

Lifeboat 

Un film d'Alfred Hitchcock (1944). Un Hitchcock atypique puisqu'il s'agit d'un film de propagande pour l'entrée en guerre des Etats-Unis. En ce qui concerne le déroulement dramatique, on regrettera une ellipse assez peu claire (avant que l'allemands se mette à ramer); quelques lourdeurs (le coup de la boussole cachée, une seule fois suffisait, ou le bracelet dont on se doute bien qu'il va rester dans l'eau) ainsi qu'une fin qui nous laisse sur notre faim. Quant à la galerie de personnages, le réalisateur peine à éviter la caricature, Malgré ses défauts ça reste intéressant et le jeu désabusé de Tallulah Bankhead est assez remarquable. Un Hitchcock mineur, on va dire, mais tout à fait consommable.

Mademoiselle Fifi  

Un film de Robert Wise avec Simone Simon (1944). Il y a deux façons de juger le film. Ou bien on ne connait pas les deux nouvelles de Maupassant dont est tiré la trame, et à ce moment-là on peut l'apprécier pour ce qu'il est, malgré ses défauts : un manichéisme trop prononcé, le jeune curé limite ridicule, l'invraisemblance des situations (on ne couche pas, on dîne ensemble !) et le "deus ex machina" finale. Disons que ça se regarde grâce à une mise en scène nerveuse mais sans plus. Maintenant si on a en tête les textes de Maupassant, c'est une trahison, n'ayons pas peur des mots, dans les deux récits de l'auteur, ce n'est pas une lingère qu'il met en scène mais une prostituée, et si Maupassant a voulu faire de la prostituée un personnage positif, ce n'est pas par hasard. Alors je sais on était en 1944, il y avait le code Hays ! Et alors ils manquaient à ce point de scénario à Hollywood au point d'aller dénaturer deux trésors de la littérature française ? L'année suivante Christian-Jaques reprendra le thème en lui rendant toute sa véracité et en faisant un chef d'œuvre (Boule de suif) Note : 3 pour la première option en tenant compte de la bonne interprétation de Simone Simon, 0 pour la seconde ce qui fait une moyenne de 1,5.

Vacances de Noël  

Un film de Robert Siodmak (1944) avec Gene Kelly. Qu'est-il arrivé à Robert Siodmak pour nous livrer pareille cuterie ? Certes, c'est bien filmé, mais ce scénario tient en trois lignes, alors on rallonge,  on traîne,  on bavarde, on filme des trucs inutiles (on a même droit à une messe de minuit bien gonflante), on ajoute des chansonnettes et un peu de Richard Wagner…  Ajoutons à cela une actrice principale médiocre qui a l'air de penser à autre chose et un jeune premier qui ne sait pas jouer. Reste Gene Kelly… à la limite. Et comme si ça ne suffisait pas, on a droit à un tissu d'absurdités imposées par le code Hays.  Raté, le film !

Les petites du quai au fleurs 

Un film de Marc Allegret (1944) avec Odette Joyeux, Bernard Blier. Une catastrophe : scénario inepte se situant quelque part entre "Bibliothèque rose" et "Collection Arlequin", dialogues mal fichus, scènes ridicules, longueurs, bavardages, guimauve, acteurs souvent approximatifs (Louis Jourdan nous tape sur les nerfs) On pourra sauver la photographie, et la mise en valeur de ces demoiselles qui sont bien jolies mais sans remettre en cause la médiocrité et la mièvrerie du film.

Le bossu 

Un film de Jean Delannoy (1944) avec Pierre Blanchar. Une version bien sympathique de ce récit, d'autant qu'elle monte en puissance. Pierre Blanchar est très bon en Lagardère, bien moins fanfaron que Jean Marais. Quelques ratages vers la fin (le faux envoûtement, les retrouvailles de la mère et de la fille) et on déplorera le manque de réalisme de certains dialogues, (J'avais grand besoin que ce fut vous !) mais ce ne sont là que défauts mineurs, le film est bien et se regarde bien.

Les caves du Majestic 

Un film de Richard Pottier (1944) avec Albert Préjean. Evidemment Albert Préjean nous campe un drôle de Maigret, disons même carrément que ce n'est pas Maigret, mais on peut en faire abstraction et il ne se débrouille pas si mal. La réalisation est banale mais correcte, la direction d'acteurs est bonne sauf le personnage du juge d'instruction à la limite du grotesque, et celle de Petersen trop caricaturale. On a droit sinon à des personnages haut en couleur comme l'argentin, ou Gabriello qui nous fait l'adjoint de Maigret, ces dames sont charmantes, et on a la surprise de voir Denise Grey qui n'avait pas encore 50 ans, quant à Jacques Baumer il se révèle excellent. L'intrigue est bien menée avec quelques scènes excellentes comme le dialogue avec Ginette, en revanche la scène des deux papas est aussi lourde que ridicule. Quant à la résolution elle est astucieuse et ne nous arrive pas comme un cheveu sur la soupe comme trop souvent dans les polars à énigmes.

Barbe-Bleue 

Un film d'Edgar George Ulmer (1944) avec John Carradine On a frôlé le chef d'œuvre, mais hélas la scène de témoignage avec la scène de la prostituée (obligatoirement vulgaire et nunuche ?) est ratée. Alors effectivement si on regarde ça comme un polar, c'est très faible, mais ce n'est pas un polar, c'est l'histoire d'un psychopathe complètement timbré magnifiquement habité par John Carradine. Ces demoiselles (Jean Parker et Teala Loring) sont ravissantes. Ulmer n'oublie pas ses influences expressionnistes en soignant ses décors, pourtant fauchés ou en exagérant le jeu de Ludwig Stossel. Quant à la bande son, loin d'être envahissante elle se moule dans le film.

Opération Torch

Un film de George King (1944) avec James Mason. Une série B d'espionnage peu inspirée et débutant avec une énorme facilité de scénario, la première de toute une série… Par ailleurs on attend d'un film d'espionnage des retournements de situations, des trahisons, du double jeu. Non là on a droit à nouveau genre, le film d'espionnage lisse, tellement lisse que les rares scènes de violences sont toutes exécutées hors champ ! Ajoutons à cela que James Mason est là-dedans très loin du grand acteur qu'il deviendra, qu'on ne saura jamais ce qu'il advient de certains protagonistes et que quelques répliques grandiloquences prêtent à sourire, vous aurez une idée du désastre. Il manquait juste un dernier plan ridicule… ils ont osé le tourner. A contrario on ne peut pas dire que l'on s'ennui, c'est court et miss Carla Lehmann a un joli soutire.

Quand il fera jour

Un film suédois de Hasse Ekman (1944) Un improbable mélodrame sur fond de la guerre entre la Finlande et l'URSS. Le moins qu'on puisse dire c'est que ça ne fonctionne pas, on n'éprouve aucune empathie pour les personnages et ça n'a rien de passionnant. Par contre au niveau bons sentiments on est servi.

Le fantôme de l'Opéra 

Un film d'Arthur Lubin (1943) avec Susanna Foster. Une excellente surprise. Le réalisateur a pris le parti d'accorder une grande place aux excellents numéros musicaux composés par Edward Ward (avec des arrangements sur la 4ème symphonie de Tchaïkovski). Et sans doute faut-il apprécier l'ambiance de l'Opéra (et un certain kitch)  pour les apprécier et donner ainsi toute sa saveur à la grande scène du lustre (une performance remarquable) Les décors sont très travaillés, l'interprétation est bonne, Susanna Foster tout à fait charmante et on ne s'ennuie pas une seconde. On remarquera que le réalisateur s'amuse à narguer les censeurs du code Hayes : le film est à deux doigts de se terminer par un ménage à trois, mais finalement les deux messieurs s'en vont sans la dame, bras dessus, bras dessous… Ce n'est ni un film d'action, ni un film d'horreur, c'est… le fantôme de l'Opéra, un drame humain, romantique et musical et c'est un enchantement.

L'homme léopard 

Un film de Jacques Tourneur (1943). Le travail technique autour de ce film est remarquable, les plans, les éclairages, l'ambiance de certaines scènes… Côté acteurs si les femmes sont bien choisies (notamment Jean Brooks) en ce qui concerne les hommes, ce nettement moins bien. Mais le gros problème du film est la faiblesse du scénario, absurde, incohérent, téléphoné et encombré de pénibles scènes de  cartomancie. A voir comme un film d'ambiance.

L'ombre d'un doute  

Un film d'Alfred Hitchcock (1943) avec Joseph Cotten. Certes le mystère s'installe tout de suite avec ses questions : Cotten est-il coupable et si oui de quoi ? Qui sont les individus qui le filent ? Et puis Hitchcock joue avec nos nerfs, on n'arrive pas à savoir si les soupçons qui finissent de peser sur Cotten sont des coïncidences ou pas. Le thème principal est l'évolution du regard de la nièce vers ce "bel oncle providentiel qui va venir basculer le trantran de sa petite famille", il est simplement dommage que toute la première partie soit si planplan. Et puis il y a au moins deux choses qui ne vont pas : La façon dont la jeune Charlie réalise que Jack est un policier nous arrive comme un cheveu sur la soupe à ce point qu'on se demande s'il n'y a pas eu un problème au montage. L'autre bizarrerie est la conclusion de l'affaire policière, elle se clôt avec la mort de l'un des suspects. Depuis quand, la mort d'un suspects blanchirait-elle les soupçons sur un autre suspect ? Et quand est-il de la photo de Cotten que la police doit présenter au témoin.? Quant au final, il devient vite trop prévisible. Parlons de l'interprétation : Cotten y est très bon, c'est même un modèle d'élégance, mais c'est la jeune et jolie Teresa Wright qui domine une distribution très inégale, dans laquelle nous trouvons la très jeune Edna May Wonacott étonnamment bien dirigée, Macdonald Carey complètement transparent, et Patricia Collinge dont le jeu est particulièrement agaçant . Bref ce n'est pas mauvais, mais c'est loin d'être un grand Hitchcock.

Le ciel peut attendre  

Un film d'Ernst Lubitsch (1943) avec Gene Tierney. Ça commençait pourtant très bien avec la mémé qui passe à la trappe... Mais au final ce film auquel on a du mal à vraiment s'intéresser est une vraie déception (l'ennui finit même par pointer ce qui est un comble pour un Lubitsch.). Les dialogues sont parfois interminables et en deviennent lourds (la scène de la librairie), le rôle du grand-père est agaçant au possible et en arrive à gâcher certaines scènes (l'épisode de la bonne française, le deuxième enlèvement). Pourtant les intentions étaient bonnes mais elles ne sont vraiment explicites qu'à la fin. Reste Gene Tierney magnifiquement photographiée.... ça fait bien peu.  "Haute Pègre" ou "Ninotchka " (pour ne prendre que ces deux exemples) sont quand même d'un autre niveau !

Les bourreaux meurent aussi 

Un film de Fritz Lang (1943). C'est du Fritz Lang et c'est techniquement impeccable. C'est du côté du scénario que le film a deux gros problèmes, le premier, de taille, est l'accumulation d'invraisemblances en tous genres (principalement dans le dernier tiers du film où on se demande malgré la gravité du sujet si on est pas en train de regarder une pochade), le second c'est l'absence de toute profondeur psychologique chez les personnages qui agissent comme des pantins déshumanisés (je ne parle pas des nazis mais bien des tchèques). Ajoutons y quelques lourdeurs (la façon dont on piège le traître qui comprend l'allemand) et on conclura vite qu'on est très loin du chef d'œuvre clamé par certains. Tant d'incohérences et de facilités de scénario peuvent surprendre (sauf quand on refuse de les voir), ils s'expliquent néanmoins par le contexte (on est en 1943) mais surtout par la participation de Brecht au scénario qui y a transposé ici certaines de ses théories sur le théâtre qui voudraient que l'identification aux personnages parasite la réflexion ou que le message prime sur la vraisemblance. Ça laisse pantois parce qu'un tel sujet méritait autre chose.

The outlaw 

Un film de Howard Hugues (1943) avec Jane Russel. Ce film ne jouit pas d'une bonne réputation et on se demande bien pourquoi ? C'est vrai que la réalisation est molle, abusant des plans-contreplans et que c'est un peu longuet, mais sinon ? Le film a la particularité de s'organiser autour du personnage secondaire de Rio incarné par Jane Russel, laquelle y est magnifiée (ah, cette scène où elle galope devant les indiens qui la poursuive !). Le personnage de Doc Holliday est absolument parfait, et si Pat Garret est plutôt falot, Billy the Kid crève l'écran. Là où on aurait pu s'attendre à un bellâtre sans consistance on a droit à un éphèbe sulfureux parfaitement campé mettant en évidence l'homosexualité refoulée des personnages masculins et révélant la complexité de leurs rapports. Le scénario est intelligent ne sombrant jamais dans le manichéisme. A (re)découvrir d'urgence.

Ghosts on the Loose 

Un film de William Beaudine (1943) Contrairement à ce qu'annonce l'affiche, les personnages principaux ne sont ni Lugosi ni Ava Gardner que l'on doit voir moins de 5 minutes chacun, mais une bande d'ados incroyablement mal dirigés et se livrant à de lamentables et affligeantes pitreries. Ce n'est pas non plus un film fantastique et il n'y a strictement rien à sauver là-dedans. On touche le fond ! 

Goupi mains rouges   

Un film de Jacques Becker (1943) avec Fernand Ledoux, Robert Le Vigan, Blanchette Brunoy. Aucun temps mort, on est tout de suite dans le vif du sujet, les protagonistes, tous très typés, nous sont présentés de façon à ce qu'on s'y retrouve (il y en a 12 quand même !). La direction d'acteurs est exceptionnelle dominée par un Ledoux malicieux et par un Le Vigan halluciné, mais Germaine Kerviel en matrone acariâtre nous fait un numéro qui fait froid dans le dos., l'histoire est menée de main de maître, avec quelques morceaux d'anthologie (la scène dans les arbres est hallucinante ) mais c'est aussi un film d'ambiance, très noire malgré quelques très rares touches d'humour et nous délivrant une description sans concession de la vie de province. Que peut-on reprocher à ce film, un doigt de théâtralité ? Pas grave ! Un dénouement "bisounours" ? Certainement pas, il s'agit au contraire d'un renversement des valeurs, celui qui au début paraissait le plus louche l'est en fait le moins, n'étant rejeté que parce qu'il refusait la loi du clan. Chef d'œuvre !

La septième victime 

Un film de Mark Robson (1943) avec Kim Hunter. D'accord c'est magnifiquement photographié et le rendu du visage de Kim Hunter (la future partenaire de Brando dans le Tramway) y est sublime. Mais sinon ? Une intrigue très mal gérée, un rythme mollasson, une pléthore de seconds rôles masculins créant une inénarrable confusion et surtout une collection de scènes absurdes : Quand on recherche quelqu'un, la moindre des choses est d'avoir une photo sur soi, mais le scénariste n'y a pas pensé !  La scène du métro, assez jolie visuellement est absurde. Et le pire : l'échange philosophique entre les démoniaques et les deux bons chrétiens qui dissertent sur les vertus du "Notre père". On pourrait perler aussi de cette scène où le couple déjeunant, la patronne va demander à un autre client qui mangeait tranquilou tout seul dans son coin : "ces jeunes gens sont tristes, allez à leur table les amuser", évidemment le type accepte, le couple aussi ! Mais qui a pondu un scénario aussi débile ? Et qu'on ne vienne pas nous raconter que c'est de la faute des vilains producteurs qui ont charcuté ce film au montage : la post production peut "excuser" les déficits d'explications mais pas le ridicule de ces scènes ! (il y en a d'ailleurs d'autres). Allez : juste une étoile pour la photo et le minois de Kim Hunter.

Le corbeau  

Un film d'Henri Georges Clouzot (1943) avec Pierre Fresnay, Pierre Larquey, Ginette Leclerc, Micheline Francey. Un sommet de l'art cinématographique et à tout point de vue. Le scénario est très habile dans sa forme, multipliant les fausses pistes et les retournements de situations en étant d'une intelligence rare dans sa forme (critique du manichéisme, appel à la compassion). Sur le plan de la réalisation on atteint la perfection, les cadrages sont fabuleux, la photo magnifique, certains ont parlé d'expressionnisme, sans aller jusque-là l'esprit de M. le maudit n'est pas si loin. Le film possède un sens du rythme assez remarquable chaque scène ne durant que le temps nécessaires. La scène de l'enterrement est anthologique Quant à la direction d'acteur elle est fabuleuse, Fresnay est bon (ça nous change de son rôle dans Marius), Larquey trouve sans doute son meilleur rôle et Ginette Leclerc crève l'écran.

Sahara 

Un film de Zoltan Korda (1943) avec Humphrey Bogart. C'est un film de propagande, avec tout ce que ça implique de naïveté (le dialogue entre l'italien et l'allemand) et de schématisme. Mais il est permis de ne pas trop s'attarder sur cet aspect des choses et le voir comme un bon petit film de guerre dans lequel on ne s'ennuie pas quand l'action est là.

Sherlock Holmes et l'Arme secrète 

Un film de Roy W. Neill (1943) avec Basil Rathbone. Aussi soporifique et qu'inintéressant avev une mise en scène paresseuse, aucun rythme, aucun suspense, un méchant inconsistant, rien, rien absolument rien !. Qu'une série aussi insipide ait pu avoir un tel succès sans cesse renouvelé. (14 films entre 1939 et 1946) reste pour moi un mystère.

L'étrangleur 

Un film de William Wellman (1943) avec Barbara Stanwyck. Comme polar à énigme c'est vraiment pas terrible, mais il tombe sous l'évidence que l'intérêt du film est ailleurs, tout cela n'est que prétexte à montrer l'ambiance et les coulisses d'un spectacle de "burlesque" et là, il faut bien avouer qu'on est servi, c'est survolté, endiablé, dans une mise en scène qui donne le tournis, quant à Barbara Stanwyck son charme, son talent et sa beauté illuminent ce film trépident. Alors qu'importe cet improbable assassin pourvu que Barbara nous enchante !

La main du diable

Un film de Maurice Tourneur (1943) avec Pierre Fresnay, Josseline Gaël. De quoi être dubitatif ! Ce film à quoi pour lui ? Une incontestable maîtrise du cadrage et de la photographie, un Pierre Frenay qui crève l'écran, une Josseline Gaël bien agréable… Mais le scénario ? On a comme une impression de brouillon où les bons moments voisinent avec le bâclé. Le récit est débité sur l'air de "J'en veux, j'en veux pas, j'en veux, j'en veux plus… avec un diable agaçant et aussi inquiétant qu'un courant d'air, il trouve vite ses limites et finit par sombrer dans le grand n'importe quoi avec un dernier quart d'heure complètement raté. A noter la très courte apparition de Noël Roquevert (très mauvais en cuisto italien) et celle complètement incongrue de Pierre Larquey  

Tomorrow We live

Un film de George King (1943). Cette série B censé nous faire vivre le climat de l'occupation allemande dans une petite ville française imaginaire est aujourd'hui bien oublié. On comprend pourquoi, non seulement cst d'une naïveté assez confondante, mais c'est très mal raconté, il y a par exemple plusieurs jolies femmes et il faut attendre la dernière partie pour cesser de les confondre, ces quand même embêtant. Sinon pour les amateurs de second degré, la scène ou le héros s'évade de la Kommandantur John Clements est à pouffer de rire.

To be or not to be 

Un film d'Ernst Lubitsch (1942) avec Carole Lombard, Robert Stack. La "Lubitsch touch" a encore frappé. Le thème est simple : Pourquoi ceux dont la profession est d'être comédiens ne seraient-ils pas de vrais comédiens dans la vraie vie ? D'autant que la vie est une comédie (bien dramatique parfois, mais ça il le montre aussi). A partir de là tout devient possible, même de faire un film comique sur Hitler au plus fort de la guerre, et on s'en régale. L'un des meilleurs film de Lubitsch (avec Ninotchka)

Tueur à gages 

Un film de Frank Tuttle (1942) avec Veronica Lake et Alan Ladd. Ça se regarde mais il n'y a vraiment pas de quoi crier au miracle. Après un bon commencement, Veronika Lake arrive dans l'histoire et s'y comporte comme un cheveu sur la soupe (ce qui ne l'empêche pas d'être charmante et de porter le film) et en plus mademoiselle est fiancée avec un policier bellâtre particulièrement agaçant. Tout cela ne vole pas bien haut malgré quelques personnages secondaires assez bien croqués et une bonne scène d'action centrale. Les facilités de scénarios abondent, de plus le thème de "Oh, qu'il est beau le tueur à gages" est assez pénible (certains le qualifieront de Melvilien, ce qui n'est pas forcément un compliment)

Cinquième colonne 

Un film d'Alfred Hitchcock (1942) avec Priscilla Lane. Un plutôt bon Hitchcock en forme de course poursuite avec ce qu'il faut de suspense et sublimé par la présence magique de Priscilla Lane. Si le passage de l'aveugle excède quelque peu par son prêchi-prêcha, celui de la caravane du cirque est très bon et métaphorique en diable avec la femme à barbe humaniste, le nain qui se fait traiter de fasciste et Priscilla assise sur un nid de serpent. Le final au sommet de la Statue de la Liberté est prévisible mais il a de la gueule ! On regrettera quelques ellipses, surtout vers la fin nuisant à la linéarité du récit. Le casting masculin souffre de la prestation médiocre de Robert Cummings. Quand on voit la classe d'Otto Kruger à côté de lui, on se dit qu'il n'y a vraiment pas photo entre les deux acteurs

La splendeur des Amberson 

Un film d'Orson Welles (1942). Il n'est pas logique de dire qu'il s'agit de l'un des meilleurs Welles tout en sachant que le dernier a renier le film après les charcutages effectués par la RKO. Reste le plans, la mise en scène ingénieuse (le début est génial), la lumière, la direction d'acteurs. Cette fresque balzacienne (un peu confuse au niveau des liens entre les personnages secondaires) décrivant l'itinéraire d'un fils à papa trop gâté reste néanmoins très prenante (Ah, cette scène où son ex-fiancée se fout carrément de sa poire…)

Orchestra Wives (ce que femme veut) 

Un film de Archie Mayo (1942) avec l'orchestre de Glenn Miller. Ce petit film bien sympathique vaut surtout pour les numéros brillamment joués par les musiciens de l'orchestre de Glenn Miller. Quant à l'histoire, elle est certes un peu naïve, (d'autant que Le code Hays y a mis son nez empêchant toute allusion à des adultères explicites) hésitant entre l'eau de rose et une certaine lucidité. (Cesar Romero qui joue un peu dans cette affaire le moraliste de service ne dira-t-il pas "Se marier, c'est accepter les compromis") mais se laisse regarder sans déplaisir.

L'assassin habite au 21 

Un film d'Henri-Georges Clouzot (1942) avec Suzy Delair, Pierre Fresnay, Pierre Larquey, Noël Roquevert, Jean Tissier. Cet excellent film est victime d'un malentendu. On a tendance à le voir comme un film noir (voir par ex. les conneries sur la page wikipédia) alors qu'il s'agit à l'évidence d'une comédie policière. La réalisation est dynamique, les personnages sont bien campés, la distribution étant dominée par une Suzy Delair complètement déjantée dans son rôle de Mila Malou et par Jean Tissier toujours impeccable. Le ton est léger, les répliques souvent assassines et la musique de Maurice Yvain très efficace. Si l'intrigue policière est astucieuse (quoique un peu décevante comme souvent dans les polars à énigmes), il est juste dommage que le final soit lourd et cabotin. A noter pour l'anecdote que Fresnay joue le rôle du commissaire Wiens, mais c'est une abréviation, sur sa porte est indiqué "Wenceslas Vorobietchik" !

L'amant de Bornéo 

Un film de Jean-Pierre Feydeau (1942) avec Jean Tissier, Arletty, Pauline Carton, Pierre Larquey. Une petite comédie sans prétention mais qu'est-ce qu'on se régale, avec une Arletty fidèle à elle-même superbement habillée dans la première partie d'une robe ultra moulante et un Jean Tissier, extraordinaire (n'ayons pas peur des mots, pourquoi ce type n'est-il jamais devenu un acteur de premier plan avec le talent qu'il avait ?) Ce n'est pas seulement un film d'acteurs et certains détails sont proprement surréalistes : La décoration du pavillon, l'ours, le singe, le repas (au cours duquel on s'aperçoit au passage qu' Arletty ne savait pas manger avec des baguettes), Arletty jouant de l'ukulélé…

Uniformes et jupons courts   

Un film de Billy Wilder (1942) avec Ginger Rodgers et Ray Milland. Premier essai de Wlider sur le sol américain, le film est techniquement très bien réalisé avec une photographie magnifique, malheureusement le scénario est bancal. Après un très bon début, ça commence à se gâter avec la rencontre entre Rodgers et Milland (malgré une très bonne scène), puis avec l'arrivée dans le camp militaire, ça devient franchement n'importe quoi avec une intrigue pauvre et une ribambelle d'insupportables cadets têtes à claques, d'autant que la fin n'offre aucune surprise. Ray Milland étant transparent, on retiendra néanmoins la remarquable performance de Ginger Rodgers ainsi que la présence de la très jolie Rita Johnson. Le résultat est moyen, dommage l'ambigüité du thème aurait mérité un meilleur traitement mais nous étions en 1942 à la veille de l'entrée en guerre des Etats-Unis…

Casablanca 

Un film de Michael Curtiz (1942) avec Humphrey Bogart, Ingrid Bergman, Claude Rains,  Peter Lorre... Casablanca c'est le film où un chef de la résistance recherché entre tranquillou dans un cabaret avec sa dulcinée en se présentant sous son vrai nom. Dans une autre scène ce même chef de la résistance entraine les consommateurs du cabaret à chanter la Marseillaise alors que des officiers allemands braillaient des chants nazis ! Des énormités comme celle-ci (et il y en a d'autres) vous enverrait n'importe quel film dans la zone des notes infamantes. Or ici, chose rarissime, le film a tellement de qualités qu'on en "oublie" la collection d'invraisemblances dont il est truffé. C'est d'abord un excellent Bogart, une Bergman rayonnante et magnifiquement mise en valeur, des second rôles à la hauteur, une photo magnifique signée Arthur Edeson, la musique de Max Steiner et surtout une histoire d'amour qui elle n'a rien d'invraisemblable et qui est tout simplement sublime. La critique américaine classe ce film comme le troisième meilleur film de tous les temps derrière Citizen Kane et Le Parrain ! Faut tout de même pas pousser, mais on peut néanmoins parler de chef d'œuvre !

Les visiteurs du soir  

Un film de Marcel Carné (1942) avec Arletty, Alain Cuny, Marie Déa, Jules Berry. Que sauver de ce désastre ? Quelques trop rares sourires d'Arletty, l'arrivée de Jules Berry avant qu'il ne se mette à pérorer, quelques décors, quelques plans, les éclairages et deux trois idées à droite et à gauche. Mais sinon, l'interprétation de Marie Déa est ridicule, celle de Cuny une véritable honte pour quelqu'un qui se prétend acteur, c'est lent, peu intéressant, les dialogues sont artificiels et mièvres, les chansons soporifiques. Un ratage complet et incompréhensible de la part de Carné et de Prévert.

Ma femme est une sorcière 

Un film de René Clair (1942) avec Veronica Lake et Fredric March. Un enchantement, se déguste comme une friandise, à part une ou deux scènes un peu lourdes (on remarquera les contorsions pour contourner le code Hays), c'est quasiment parfait, le film trouve tout de suite son ton, et Veronika Lake est tout simplement exceptionnelle, laissant loin derrière les pourtant excellents Fredric March et Susan Hayward. La réalisation est soignée, le montage efficace, les dialogues savoureux, et si les effets spéciaux peuvent paraître ringards, cela n'a strictement aucune importance (au contraire, ça nous fait un côté "petit charme désuet"). Un film qui nous met de bonne humeur !

The Palm Beach story 

Un film de Preston Sturges (1942) avec Claudette Colbert et Joel McCrea. Le film est bizarrement construit, d'abord un générique incompréhensible mais drôle, puis ça commence en vaudeville, ça se continue en comédie de mœurs se posant la question de la nécessité du mariage, puis ça devient carrément burlesque avec les incroyables scènes dans le train, puis ça se calme retour au vaudeville avec encore des propos intéressants sur le mariage et sur la vénalité et ça se termine… comment voulez-vous que ça se termine, par du grand n'importe quoi complètement assumé. Cela aurait pu être très bien (on est parfois proche de Lubitsch) mais c'est trop décousu, trop inégal. Claudette Colbert est fabuleuse et illumine le film, Joel McCrea qui a un rôle assez ingrat dans cette affaire est très terne, certains personnages secondaires sont loufoques à souhait sans que ça ajoute grand-chose au film. Un bon moment quand même.

La féline 

Un film de Jacques Tourneur (1942) avec Simone Simon. Produit par Val Lewton. On est chez RKO et non pas chez Universal et en aucun cas Tourneur n'a voulu faire un film d'horreur (et d'ailleurs il n'en n'avait pas le budget). Tout est suggéré à ce point qu'on se figure un moment que c'est dans sa tête que cette pauvre fille n'est pas nette… et ce jusqu'au plan final. En fait Tourneur installe méthodiquement un climat d'angoisse en jouant avec les nerfs du spectateur notamment la scène où Alice est poursuivie dans la rue jusqu'à l'arrivée opportune et inattendu d'un autobus (scène si célèbre qu'on appellera ça l'effet bus, on en apprend tous les jours !) ou la magnifique scène de la piscine avec Jane Randolph. C'est bien filmé avec un travail intéressant sur la lumière. Simone Simon n'est pas spécialement glamour mais s'en sort très bien, en revanche Ken Smith est peu convaincant et la fin nous laisse un peu sur notre faim.

Le Voleur de cadavres (The Corpse Vanishes

Un film de Wallace Fox (1942) avec Béla Lugosi. Une petite série B vaguement inspirée du mythe d'Elisabeth Bathory. L'histoire assez délirante se suit sans déplaisir. On ne saura jamais pourquoi Lugosi cible exclusivement les jeunes femmes riches à deux doigts de se marier. (Une névrose dans doute ?) Elisabeth Russel est très bien en méchante et on la voit un moment donner une belle gifle à la charmante Luanna Watters dans une scène d'anthologie.

Le destin fabuleux de Desirée Clary  

Un film de Sacha Guitry (1942) avec Sacha Guitry, Jean-Louis Barrault, Gaby Morlaix... Un biopic de celle qui reviendra Reine de Suède et qui devrait servir de modèle à ceux qui pratiquent ce genre de film. Une relation millimétrée et élégante dans laquelle chaque plan ne dure que ce qu'il doit durer, le rôle de la voix off, les éclairages, la musique, la direction d'acteurs. Bref c'est du Guitry qui se permet tout et se moque des codes en allant jusqu'à placer son générique en plein milieu et en modifiant la distribution en cours de route. Sur le fond, Guitry règle ses comptes avec les serments péremptoires que personne ne sait tenir et avec l'arrivisme. Son interprétation de Napoléon, en dictateur machiavélique, mais tout en nuances est remarquable.

 Le Monstre de minuit (Bowery at Midnight

Un film de Wallace Fox (1942) avec Béla Lugosi. Une petite série B sur l'histoire d'un homme qui a une triple vie : éminent professeur d'université, directeur d'un refuge humanitaire et malfrat. Pour cela le refuge possède un réseau de pièces secrètes dont une sert de cimetière, en effet Lugosi fait enterrer ses victimes dans une cave avec une petite croix qui indique leur nom... Comme scénario improbable, c'est quand même pas mal ! Possède néanmoins un petit charme désuet

Les Petits Riens  

Un film de Raymond Leboursier (1942) avec Claude Dauphin, Andrex, Raimu, Fernandel, Jules Berry, Cécile Sorel. Sur les six sketches seul le dernier qui voit Raimu et la troublante Suzy Prim s'affronter est à la rigueur à retenir. Le reste n'a pratiquement aucun intérêt, la réalisation est paresseuse et la direction d'acteurs est inexistante. Le pire étant le sketch avec Fernandel qui ne peut s'empêcher d'en faire de trop jusqu'à l'excès à ce point que le pauvre Jules Berry ne trouve pas assez d'espace pour s'exprimer. Quant à la pauvre Cécile Sorel, ce n'est certainement pas ici que l'on trouvera le témoignage de son talent.

Le bienfaiteur  

Un film de Henri Decoin (1942) avec Raimu, Pierre Larquey, Yves Deniaud, Suzy Prim. Henri Decoin à la réalisation et Raimu en vedette, voici deux bonnes raisons de regarder ce film qui joue sur une palette de tableaux : Une description de la vue de province qu'on a le droit de trouver quelque peu trop lisse mais servi par des seconds rôles talentueux, une intrigue amoureuse dans laquelle le point de vue de Suzy Prim n'est jamais développé, un aspect film de gangsters plutôt bien rendu, mais une enquête policière imprégné de farfelu (depuis quand le Quai des Orfèvres s'occupe-t-il de billets disparus et réapparus dans une ville de province ? Un aspect "redresseur de tort" avec le "petit voleur" assez navrant. Et pour couronner le tout une scène finale aberrante. On peut donc penser qu'avec toutes ces casseroles, on peut se passer de la vision du film ! Eh bien pas du tout, laissons de côté les imperfections, et régalons-nous du spectacle que Raimu nous offre : sa prestation est impériale, savoureuse, un régal de tous les instants.

Le chevalier de la vengeance 

Un film de John Cromwell (1942) avec Tyrone Power, Gene Tiernay, George Sanders. Un film de cape et d'épée sans épées, mais avec des vahinés. L'histoire est assez plate, et très prévisible sauf peut-être le dernier quart d'heure. Malgré un Tyrone Power monolithique, ça se laisse volontiers regarder, Parmi les surprises du casting, George Sanders en gentleman boxeur, Elsa Manchester en prostituée au grand cœur, et surtout Gene Tiernay en vahiné (une merveille). Un bon petit film sympa sans prise de tête

La péniche de l'amour 

Un film d'Archi Mayo (1942) avec Jean Gabin, Ida Lupino, Claude Rains. De bons acteurs, de bons décors (quoi que fauchés) une excellente photographie, une réalisation correcte… Ce qui cloche, c'est le scénario d'une faiblesse à peine croyable, et quoiqu'en disent certains, rien ne pourra sauver un film si l'histoire ne fonctionne pas.

Mademoiselle Swing 

Un film de Richard Pottier (1942). Niais et strictement sans intérêt.

Griffes jaunes 

Un film de John Huston (1942) avec Humphrey Bogart. Il n'y aurait pas au générique les noms de John Huston et d'Humphrey Bogart, ce mauvais film d'espionnage serait tombé dans les oubliettes. Scénario sans surprises, méchant prévisible, histoire d'amour incongrue, peu de rythme, pas de suspense, peu d'intérêt et pas mal d'invraisemblances.

Pittsburgh (la fièvre de l'or noir) 

Un film de Lewis Seller (1942) avec Marlene Dietrich, Randolph Scott, John Wayne. Un film de propagande pour l'effort de guerre, particulièrement mal fagotée et doté d'un scénario neuneu et peu intéressant. Certaines scènes sont d'une stupidité affligeante (le boxeur, la bagarre au fond de la mine). La combine permettant à John Wayne de se sortir de sa condition de mineur est incompréhensible, on abuse d'ellipses, la psychologie des personnages est primaire et le dernier quart d'heure nous plonge carrément dans le grotesque. Du point de vue des acteurs, Wayne fait du Wayne, Scott n'arrive pas à se débarrasser de sa raideur et Marlène, ben Marlène, on l'a vue tellement plus belle dans tant d'autres films… A oublier !

Monsieur La souris 

Un film de Georges Lacombe (1942) avec Raimu. Lacombe est un réalisateur très inégal, ici on est dans le bon essentiellement grâce à Raimu qui tient le film à lui tout seul et qui nous fait un numéro aussi savoureux qu'époustouflant jusqu'à la tirade finale, véritable pièce d'anthologie. Les seconds rôles sont très inégaux mais les deux poulets sont plutôt bons et la petite hongroise amusante. Sinon il faut bien comprendre que c'est une comédie car sinon le coup de l'enveloppe n'a aucun sens. Quant à la résolution de l'énigme si vous avez saisi, envoyez-moi un mail, mais on aura compris que finalement elle n'a aucune importance.

Don Cesare di Bazan 

Un film de Riccardo Freda (1942) avec Gino Cervi. Le scénario n'a pas à rougir de la concurrence avec les Lagardère, les Capitan et les Zelda… d'ailleurs l'auteur du texte initial est français et Jules Massenet l'a utilisé comme livret d'Opéra. La mise en scène est excellente même si le réal abuse des plans rapprochés, et si on peut reprocher quelques ellipses malencontreuses. La scène de la poudre est quasiment une leçon de cinéma. Quant à la sulfureuse Annliese Uhlig elle est bien troublante. Que des bonnes choses, donc… sauf que le rôle principal a été confié à Gino Cervi et là ça ne va plus du tout, jamais crédible, limite ridicule, il finit par gâcher le film.

Private Buckaroo 

Un film de Edward F. Cline (1942) Un film de propagande de guerre dont l'objet n'a pas grand intérêt même en contextualisant. Le scénario est inexistant et la réalisation minimale, on appréciera quelques morceaux de plutôt bon jazz, et les pitreries de Mary Wickes. En revanche les rigolos de service et le crooner beau gosse sont assez pénibles. Rien de sensationnel, oui mais voilà : le film contient une pépite, la présence magique des Andrew Sisters complètement déchainées qui à elles seules méritent que le film ne soit pas oublié.

Six destins 

Un film de Julien Duvivier (1942). La distribution est impressionnante : Charles Boyer, Rita Hayworth, Henri Fonda, Ginger Rodgers, Charles Laughton, Edward G. Robinson, W.C. Fields, et dans les rôles secondaires : Elsa Lanchester (la fiancée de Frankenstein) George Sanders, et même Margaret Dumont, la souffre-douleur des Marx Brothers. Les six sketches sont très inégaux, le premier dans lequel Rita Hayworth est magnifiquement photographiée est peu intéressant, le niveau se relève avec Fonda et Rodgers dans une étonnante et amusante scène vaudevillesque. Le troisième épisode nous montre l'immense talent de Laughton dans un conte (inspiré d'un passage de la Vie Parisienne d'Offenbach) auquel on a envie de croire tellement c'est bien fait, ce qui n'est pas le cas avec le sketch de Robinson bien défendu par l'acteur mais trop artificiel. Le sketch de W.C. Field ne vole pas bien haut mais c'est toujours un plaisir de voir évoluer cet acteur, quand au dernier, n'ayons pas peur des mots, il est ridicule. Faisons les compte 2 + 4,5 + 5 + 2 + 3 + 0,5 = 17/6 = 3

Spitfire (The First of the Few)

Un film de Leslie Howard (1942) avec Leslie Howard, David Niven. Il s'agit d'un biopic de l'ingénieur en aviation Reginald Mitchell concepteur du Spitfire. C'est plutôt bien fait, un peu long peut-être, Leslie Howard étant bien dans son rôle en trouvant le ton juste alors que David Niven y ajoute un brin de fantaisie (et d'élégance). Ce n'est pas réellement passionnant mais c'est très intéressant.

Passez muscade 

Un film d'Edward F. Cline (1941) avec W.C. Fields. W.C. Fields avait été redécouvert dans les années 1970 (Goscinny lui avait même rendu hommage dans un Lucky Luke) , il semble qu'il soit de nouveau retombé dans un quasi oubli, et c'est une injustice. Ce film se déguste comme une gourmandise. Complètement foutraque, souvent drôle, (si certains gags tombent à plat, c'est le lot de tous les films comiques), on n'est pas près d'oublier cette incroyable scène de répétition dans les studios d'Esotériques Pictures, ou cette scène ou W.C. Fields apprend le jeu du bécot à la très jolie Ouliotta (Susan Miller), ou encore cette course finale absolument burlesque. On retrouve avec plaisir Margaret Dumont, la souffre-douleur de Groucho Marx. Et puis il y a aussi Gloria Jean, 15 ans au moment du film, donc un âge souvent énervant, mais qui là, rayonne de talent quand elle pousse la chansonnette. Un bijou, ce film !

Une nuit à Rio 

Un film d'Irving Cummings (1941) avec Carmen Miranda. Le film démarre à 100 à l'heure avec une Carmen Miranda absolument déchaînée, puis la mise en place d'un vaudeville prometteur. Tout cela fonctionne à merveille, sauf Alice Faye, qui ne fait vraiment pas le poids et les 20 dernières minutes qui se perdent dans un gloubi boulga qui voudrait à tout prix que la morale soit sauve et qui devient gavant.

Citizen Kane 

Un film d'Orson Welles (1941) : Comme disait quelqu'un : "Je ne sais pas si c'est le meilleur film de tous les temps, je ne les ai pas tous vu, mais c'est un chef d'œuvre". Si l'intrigue a son importance et est abordée avec une intelligence remarquable, elle n'a rien de fondamentale, en revanche la façon dont elle est filmée est une véritable leçon de cinéma. Tout est parfait, parfaitement maîtrisé, aucun temps mort, aucune longueur, des plans à couper le souffle, des scènes d'anthologie (l'installation dans les locaux du journal, la méga fête au journal avec les girls entraînant Welles dans la danse, les scènes à l'Opéra, la campagne électorale…) La direction d'acteur est un sans-faute, (Orson Welles est aussi un acteur exceptionnel, les actrices féminines sont parfaites) quant aux cadrages, ils donnent le vertige sans qu'aucun d'entre eux ne soit gratuit. Il faudrait aussi parler des éclairages, de cette caméra qui parfois donne le tournis, de la musique de Bernard Herrmann. Plaignons ceux qui aujourd'hui ne jugent les films qu'à l'aune de leurs effets spéciaux, qui ne sauront jamais que le cinéma est d'abord un art, et que les chefs d'œuvres ne vieillissent jamais !

L'homme de la rue 

Un film de Frank Capra (1941) avec Gary Cooper et Barbara Stanwyck. Il faut prendre ce film pour ce qu'il est : une fable sociale et vu de cette façon on peut sans doute parler de chef d'œuvre. Le genre "fable" permet d'appuyer les effets, de les rendre plus théâtraux et de se permettre toutes les facilités de scénario. Le film réalisé magistralement est très riche. Cooper n'a rien d'un héros, il se contente d'être beau (ce qui plait à Stanwick) et gentil, quand à cette dernière elle a sans doute un bon fond mais c'est une manipulatrice (qui se fait manipuler à son tour) on fait donc avec deux personnes qui n'ont rien d'exceptionnels mais que les circonstances vont transformer. La politique est montrée comme le côté obscur de la société, mais la foule n'est pas mieux traitée, manipulable et réversible à souhait. Côté acteurs, Cooper crève l'écran, Stanwyck joue très bien même si d'autres réalisateurs l'ont bien mieux mise en valeur… Mais peu importe le film est bluffant et grandiose et ce n'était pas gagné d'avance.

Soupçons 

Un film d'Alfred Hitchcock (1941) avec Cary Grant et Joan Fontaine : Deux mots sur les acteurs, si on pourra regretter que l'ami de la famille soit si caricatural, Grant est très bon, mais que dire de Joan Fontaine ! Oscar de l'interprétation féminine, elle l'a amplement mérité tellement elle éclaire le film de son talent et de sa beauté. Joan Fontaine avait une façon de jouer avec son visage en lui imprimant un très léger sourire créant ainsi une troublante fossette. C'est l'une des rares actrices que j'ai vu jouer ainsi (avec Naomie Watts).  Le film est très bien mené sans temps mort, la première partie nous fait faire connaissance avec les deux personnages principaux parfaits dans leurs rôles. Ils se marient et c'est parti, on se rend compte très vite que Grant est un joueur compulsif, couverts de dettes, menteur comme un arracheur de dents, mais qu'il n'a peut-être pas un si mauvais fond... Seulement comme sa situation que fait qu'empirer pendant le déroulement de l'intrique, qu'on apprend qu'il est sans doute prêt à aller jusqu'au meurtre pour s'acquitter de ses dettes... on a une idée de l'ambiance... Hitchcock voulait que Grant tue, la prod n'a pas voulu, alors on a, non pas un happy-end, comme on le lit parfois ici et là, mais une fin ouverte, car rien n'est réglé, on ne sait même pas si les révélations finales de Grant sont vraies ou fausses... et on ne voit pas comment il va s'en sortir, retravailler, ne plus jouer... allons donc ! Et il entraîne Joan Fontaine avec lui qui a tout gobé... Brrrr

Illusions perdues 

Un film d'Ernst Lubitsch (1941) avec Merle Oberon. Rendons grâce à Lubitsch d'avoir fait tout ce qu'il fallait pour tente de donner corps à ce film, car il faut bien constater que la réalisation est sans faille, que l'interprétation est excellente, que de voir jouer Merle Obéron est un enchantement. Le problème et il est de taille c'est que l'histoire originale est une pièce de Ferdinand Sardou lequel n'était point nul, mais n'était pas spécialement réputé pour la légèreté de son propos et la modernité de ses convictions. Un résultat moyen donc.

Le retour de Topper 

Un film de Roy del Ruth (1941) avec Joan Blondell. Que voici un petit bijou de bonne humeur et de fantaisie fantastique ! Si la mise en place est assez longue, elle a l'avantage de très bien décrire les protagonistes et d'éviter toute confusion dans la partie principale qui n'est qu'un fabuleux chassé-croisé où tout le monde se courre après en essayant en vain de comprendre ce qui se passe. C'est très bien joué et très amusant avec une bonne ambiance fantastique (tueur mystérieux, fantômes, passage secrets, souterrains glauques) Joan Blondell est fabuleuse et certains des personnages remarquables, notamment un Topper complètement largué et le chauffeur noir en manteau de fourrure doté d'un accent impossible (la scène avec le phoque est géniale). Soyons objectif il y a quand même un trou dans le scénario, pourquoi le fantôme de Gail a-t-il besoin de l'aide de Topper ? Mais est-ce si important ? Un perle à redécouvrir.

Dr Jekyll and Mr Hyde 

Un film de Victor Fleming (1941) avec Spencer Tracy, Ingrid Bergman et Lana Turner. Pourquoi ce remake de la version de 1931 (le scénario en reprend grosso-modo l'essentiel de la trame). puisque tout y est inférieur ?. Le début avec le troublion à l'église est mauvais. Le désir de Jekyll de ne pas vouloir respecter les convenances victoriennes est complètement édulcoré, la superbe scène érotique entre Jekyll et Ivy (jouée par Ingrid Bergman qui n'est plus prostituée mais serveuse) disparaît. La scène du miroir avant l'expérience humaine disparaît, le savant maquillage de Fredric March est remplacé par une coiffure en pétard de Spencer Tracy. La scène qui aboutit à la seconde rencontre entre Ivy et Jekyll si claire dans la version de 1931 devient ici tarabiscotée. La réflexion d'Ivy "la police ne se préoccupe pas des filles comme moi" a disparu. Et enfin Tracy est peut-être un excellent acteur, mais il n'a absolument pas la tête de l'emploi. Le film n'est pas mauvais pour autant, Lana Turner et Ingrid Bergman bénéficiant d'une photographie tout à fait remarquable, mais force est de constater qu'il n'arrive pas à la cheville du chef d'œuvre de Mamoulian.

Hellzapoppin 

Un film de H.C. Potter (1941). N'ayons pas peur des mots, nous tenons là le chef d'œuvre de l'absurde, arrivant même à supplanter les Marx Brothers (c'est dire !). Le rythme est effréné, les gags (souvent très inventifs) s'enchaînent comme s'il en pleuvait, le film ne s'essouffle pas, bien au contraire puisque la dernière partie est encore plus délirante que le reste. Martha Raye fait une prestation extraordinaire, Mischa Auer en exilé russe extravagant n'est pas mal non plus, la musique est excellente.. Bref 80 minutes de pur bonheur.

High Sierra 

Un film de Raoul Walsh (1941) avec Humphrey Bogart et Ida Lupino. Le scénario est de John Huston et ça se sent. L'intrigue policière simpliste quoique rendue embrouillée de par la multiplicité des personnages secondaires n'est en fait que le prétexte à nous raconter une étonnante valse-hésitation entre Bogart et deux jeunes femmes. A ce propos l'évolution psychologique des personnages est particulièrement bien vue (rare pour un polar) et surprend le spectateur. L'action n'est pas oubliée, Walsh nous filme une course poursuite en montagne digne d'anthologie, et la scène finale est grandiose. A noter le rôle, très important et fort bien joué du chien Zero. Un cocktail gagnant, un chef d'œuvre.

Le faucon maltais 

Un film de John Huston avec Humphrey Bogart (1941) : Que celui qui prétend avoir compris l'intrigue lève la main ! (Un scénario aussi complexe dans lequel Sam Spade a toujours une longueur d'avance dans ses réflexions par rapport au pauvre spectateur peut passer dans un roman qui nous laisse le temps de réfléchir, pas dans un film) Les personnages secondaires sont caricaturaux et Peter Lorre surjoue, quant à Mary Astor c'est carrément une erreur de casting.  Beaucoup de points négatifs donc, reste que la réalisation est impeccable, que malgré le fait d'être largué on ne s'ennuie pas une seconde, (on peut d'ailleurs très bien prendre le parti de certains film d'espionnage dans lesquels les fils de l'intrigue finissent par devenir secondaires) et puis il y a Bogart qui crève l'écran. Huston fera beaucoup mieux avec Key Largo (1948) ou Quand la ville dort (1950).

Le loup garou 

Un film de George Waggner (1941) avec Claude Rains  et Lon Chaney. Précision importante, ce n'est ni un film d'horreur ni un film d'épouvante, mais un film fantastique (les critiques "même pas peur" sont par conséquent non avenues). Cela dit le résultat est assez moyen : la réalisation est fade, Lon Chaney est peu crédible (surtout quand il joue au séducteur), il n'y a aucun humour, et le rôle de la gitane est peu clair. Se regarde quand même sans déplaisir.

Volpone 

Un film de Maurice Tourneur (1941) Adapté d'une pièce de théâtre de Jules Romains et Stefan Zweig, mise en scène par Charles Dullin (1928), elle-même adaptée d'une pièce anglaise de Ben Jonson (1606). C'est donc du théâtre filmé et si la réalisation n'a rien d'extraordinaire, le jeu des acteurs est époustouflant avec une mention spéciale pour Harry Baur en Volpone, une autre pour Charles Dulin en vieil usurier, mais ils sont tous bons. Jouvet qu'on a pas l'habitude de voir dans ce genre de rôle est aussi très bien ainsi que les actrices féminines dont Jacqueline Delubac. Le traitement n'exclut pas un certain humour plutôt efficace, Bref on passe un excellent moment, on se régale et on se dit s'il le fallait encore que le théâtre filmé peut être excellent, tout dépend de la façon dont on le film et on l'interprête. Il est symptomatique de constater que 400 après sa création l'intrigue n'a rien perdu de son actualité, la cupidité menant toujours le monde. On remarquera pour l'anecdote que tous les personnages ont des noms d'animaux les caractérisant, Volpone (le renard), Mosca (la mouche), Corbaccio (le corbeau charognard), Corvino (le corbeau), Voltore (le vautour), Canina (la chienne)…et Colomba.

Le défunt récalcitrant 

Un film d'Alexander Hall (1941). Il parait que cette insupportable niaiserie a beaucoup amusé les américains à sa sortie. Il n'y a pourtant pas de quoi s'affoler : exagérément bavard, lourdingue, inintéressant, (pour ne pas dire ridicule), et réalisé "à la paresseuse". Les personnages n'ont rien du tout d'attachants, Claude Rains joue de façon inconsistante un personnage débile, et Robert Montgomery semble constamment se demander ce qu'il doit dire ou faire. Au secours !

L'entraîneuse fatale 

Un film de Raoul Walsh (1941) avec Marlene Dietrich, Edward G. Robinson, George Raft. Beaucoup de bonnes choses : une réalisation brillante, des scènes spectaculaires, un montage nerveux, une histoire qui en vaut bien d'autres, l'interprétation sans faute de Robinson et de Marlène. Seulement il y a aussi les pitreries bien lourdes des ouvriers dont on se demande à quoi elles servent ? Et puis surtout, il y a George Raft, sa volonté de se mettre en avant et de se donner le beau rôle aboutit à faire de lui un personnage psychorigide et macho. . On aurait aimé un peu plus de finesse de sa part. Du coup le twist final (qu'on voyait arriver à 200 km/h) devient absurde. Pauvre Marlène, finir sa vie avec ce gars-là, elle n'a pas fini d'en baver !

The Lady Eve (un cœur pris au piège) 

Un film de Preston Sturges (1941) avec Barbara Stanwyck et Henry Fonda. On se prend à  rêver de ce que Lubitsch aurait pu faire de ce scénario s'il l'avait eu en main. Car si le film reste sympathique, de Lubitsch on est assez loin ! Les dialogues amoureux sont trop longs, figés et ennuyeux et les gags bien lourds. De plus le scénario souffre d'incohérences : comment Fonda fait-il pour ne pas reconnaitre Stanwyck dans la seconde partie ? Le faux chantage au divorce n'a aucun sens puisque Stanwyck s'est marié sous un faux nom. Pourtant tout cela n'est pas sans charme, Fonda joue très bien les grand benêts et Stanwyck pétille de beauté, de malice et de talent. On sent toute la pesanteur du Code Hays (on ne couche jamais ensemble avant le mariage), pourtant Sturges berne les censeurs avec la très belle dernière scène puisque Stanwyck se déclare mariée alors que son mariage n'a aucune valeur. A voir malgré ses imperfections.

La chanson du passé 

Un film de Georges Stevens (1941) avec Carry Grant. Un mauvais mélo sur le thème de l'adoption encombré de facilités de scénario grotesques. C'est inintéressant au sens propre du terme c’est-à-dire que ça ne suscite jamais l'intérêt, il n'y a aucune tension, en revanche côté longueurs bien pénibles, on est servi. Coté acteurs Cary Grant en fait des tonnes, mais en vain, Irene Dune a un joli minois mais son jeu est monolithique. Bref, circulez, il n'y a rien à voir.

49ème parallèle 

Un film de Michael Powell (1941). C'est un film de propagande. Le regarder aujourd'hui même en le contextualisant en  fait apparaître les lourdeurs. La scène ou le vilain nazi tient un discours halluciné à la cantine sombre dans le ridicule, celle de la rencontre avec l'intellectuel ermite n'est pas mieux. C'est trop didactique, trop bavard. Laurence Olivier en trappeur canadien n'est pas très bon. On peut aussi déplorer les allusions religieuses bien gavantes (la scène du chapelet) Reste malgré tout quelques scènes pas si mauvaises.

Le dernier de six 

Un film de Georges Lacombe (1941) avec Pierre Fresnay, Suzy Delair et Jean Tissier. On peut regretter une certaine confusion entre les personnages sinon l'enquête policière est remarquablement menée. Frenay nous fait une prestation exceptionnelle, Suzy Delair en gouailleuse est fabuleuse et Tissier nous fait du Tissier mais il le fait si bien. Plutôt bien réalisé, dialogué et photographié. A remarquer pour les curieux les statues vivantes et nues dans une scène de music-hall, la censure allemande était moins chatouilleuse sur ce plan que celle de Vichy !

La femme aux deux visages 

Un film de Georges Cukor (1941) avec Greta Garbo et Melvyn Douglas. On a souvent été "fine bouche" voire injuste avec ce film qui est une comédie pétillante et parfaitement huilée. Bien sûr Cukor n'est pas Lubitsch et "La femme aux deux visages" n'est pas Ninotchka. Mais ce film qui joue au poker menteur avec le détestable code Hayes et qui à sa sortie scandalisa les culs-bénis, séduit par son amoralité (presque) complètement assumée. Et puis voir Garbo jouer de la sorte a quelque chose de magique, elle en fait peut-être des tonnes mais à la limite on en redemande. Quant à la danse du Chica Choca elle est anthologique. Et puis rendons grée au réalisateur d'avoir terminé sur une fin complètement ouverte.

Hollywood Steps Out 

Un dessin animé de 8 minutes de Tex Avery (1941) Une curiosité puisque le cartoon met en scène les vedette d'Hollywood du moment, on ne reconnait pas tout le monde mais quand même Johny Weissmuller vêtu d'une peau de bête, fallait y penser, il y a aussi Peter Lorre, James Cagney, E.G. Robinson, Humphrey Bogart, Clark Gable, Buter Keaton et Harpo Marx. On a par contre du mal à reconnaitre ces dames même les très connues comme Greta Garbo. Une belle curiosité.

Texas

Un film de George Marshall (1941) avec William Holden, Glen Ford, Claire Trevor. Etrange western qui commence en burlesque, continue en foutraque et se termine de façon tragique et convenue. On reste pantois devant de tels ruptures de ton, pourtant on ne s'ennuie pas une seconde, il y a quelques plans splendides notamment cet impressionnant troupeaux de vaches. Et puis le trio de vedette fait plaisir à voir (Holden, 22 ans à l'époque) est méconnaissable. Le scénario est très classique est assez peu foulant, et l'intrigue amoureuse très faible n'est plaquée là pour placer l'actrice féminine (fabuleuse Claire Trevor) Mais ce qui restera après la vision c'est cet incroyable match de boxe entre Holden et un Lyle Latell complètement allumé. Ce n'est peut-être pas un grand western mais on passe un bon moment

Le fils de Monte Cristo  

Un film de Rowland V. Lee (1940) avec George Sanders et Joan Bennet. Invraisemblances, facilités de scénario et poncifs s'alignent à la pelle, et pourtant on se régale. On regarde ce film où tout est faux avec la même naïveté (et le même plaisir coupable) que quand on relit une aventure de Tintin (on ne peut s'empêcher de penser au Sceptre d'Ottokar), il faut dire que les ingrédients ne manquent pas, Joan Bennet, certes moins belle qu'avec Fritz Lang, mais quand même ! Georges Sanders, impeccable, et Louis Hayward, dans le rôle de Monte Cristo, excellente surprise, n'hésitant pas à ajouter du comique à son personnage, (son jeu fait penser à Johnny Depp), Et puis il y a l'ambiance, les souterrains, les trahisons....On apprécie aussi la rapidité des duels (on n'est pas dans Scaramouche !) Seule la fin est assez lourde, mais on s'en fout, c'est un bon film.

Swing romance 

Un film de Henry C. Potter (1940) avec Fred Astaire, Paulette Goddard, Burgess Meredith et Artie Shaw. Le scénario est complètement loufoque, la musique est excellente (c'est un plaisir de voir Artie Shaw dans son propre rôle), Paulette Goddard est ravissante, Fred Astaire ne fait pas sa diva et Burgess Meredith est amusant. Bref on passe un excellent moment. Une comédie musicale très distrayante à redécouvrir.

Le dictateur 

Un film de Charlie Chaplin (1940) Un film complètement hors norme qui se laisse regarder avec grand plaisir. Ce n'est pas un film comique, c'est un film satyrique émaillé de scènes comiques ce qui n'est pas la même chose. Outre le gag répétitif où l'on voit le dictateur éructer en charabia, les autres gags sont hérités du burlesque et si certains paraissent aujourd'hui éculés, d'autres fonctionnent à merveilles (la scène de rasage sur une danse hongroise de Brahms). Et puis, il y a cette fin, ou Chaplin trouve le moyen de réaliser une rupture de ton et de rythme en délivrant un message de paix et d'espoir qui aurait pu être déplacé ou ridicule, mais qui ici trouve le moyen d'être émouvant.

Double chance  

Un film de Lewis Milestone (1940) avec Ginger Rogers. Il s'agit d'un remake d'un film de Sacha Guitry et ça se sent (l'acteur Ronald Colman étant ici très guitryen). Le film commence en fanfare, puis devient confus avec une histoire de billet de loterie qu'on partage et qu'on revend, qu'on repartage (bref on ne comprend pas tout), la suite devient très intéressante avec le jeu de chat et de souris auquel se livre Ginger Rogers (fabuleuse dans le rôle) et son chevalier servant, tandis que le fiancé "officiel" ne cesse de se ridiculiser. A la fin on peut se poser pas mal de questions sur les motivations réelles de cet inconnu et son passé (pas très clair) ou choisir de ne retenir que d'avoir vu un bon petit moment de cinéma.

Correspondant 17 

Un film d'Alfred Hitchcock (1940) avec Joel McCrea, et George Sanders. (Pourquoi 17 ?) C'est un film d'espionnage et le film souffre des déficits d'explications et des invraisemblances du genre. (Pourquoi aller tuer un sosie ? Pourquoi l'homme du moulin se salit-il les mains volontairement ? Et puis l'interrogatoire de Van Meer n'est guère convaincant). De plus l'intrigue amoureuse manque cruellement de finesse, idem pour la confession gnangnan du père dans l'avion. La mise en scène offre en revanche quelques étonnants morceaux de bravoure, le tueur caché dans une foule de parapluies, la poursuite entre les tramways, la chute de Sanders (excellent) sur un paravent et bien sûr le crash de l'avion. Pour la distribution Laraine Day se débrouille plutôt bien mais c'est la rôle secondaire de George Sanders qui se remarque le plus.

Rebecca 

Un film d'Alfred Hitchcock (1940). Hitchcock dans ses entretiens avec François Truffaut en parlait de façon étrange : "Ce n'est pas un film d'Hitchcock. C'est une sorte de conte et l'histoire elle-même appartient à la fin du 19ème siècle. C'était une histoire assez vieux jeu, assez démodée. Rebecca est une histoire qui manque d'humour." Quoiqu'il en dise ce film est excellent. Joan Fontaine y est sublime (nominée pour l'Oscar), et Judtih Anderson campe une teigne anthologique en gouvernante tête à claques. Côté méssieurs si la prestation de Laurence Olivier est ans faute, la courte apparition de Georges Sanders est un vrai régal. Quant à cette immense bâtisse, elle est le centre du film, omniprésente angoissante à ce point que l'on s'attend parfois à en voir surgir les fantômes. L'intrigue adaptée d'un roman de Daphné du Maurier est bien ficelée et son adaptation au cinéma est réussie... Et puis il y a, quoi qu'il en dise, la patte d'Hitchcock, les enchainements, les cadrages, la photo…   On peut néanmoins regretter ce format de 120 minutes, dans lequel la mise en place semble parfois bien longue.

Rendez-vous 

Un film d'Ernst Lubtisch (1940) avec James Stewart et Margaret Sullavan. L'argument est farfelu, et son traitement à tendance à devenir poussif (au sens propre, surtout à la fin) mais bon, c'est une comédie sentimentale et heureusement que c'est Lubtisch qui est aux commandes. La vision en est agréable, mais si Stewart est très bon, Margaret Sullavan n'a rien de vraiment exceptionnel (malgré un jeu excellent) et certains passages tombent dans une quasi-mièvrerie (le patron devenu paternaliste qui invite le jeune coursier à réveillonner avec lui). La réalisation n'en reste pas moins maîtrisée et on retiendra deux personnages secondaires fort bien campés : "le brave collègue" et le "fayot de service". On est quand même très loin de "Ninotchka" ou de "To be or not to be".

Le retour de Frank James 

Un film de Fritz Lang (1940) avec Henri fonda et Gene Tierney. Très bien réalisé, belles images avec de superbes jeux d'ombres. Le scénario est assez faiblard, et même parfois un peu nunuche. Fritz Lang parvient néanmoins à ne pas rendre ennuyeuse la longue scène du procès qu'il transforme en spectacle selon une habitude des films américains. Fonda est très (trop ?) sobre, Tierney est superbe. A regarder en VO, le doublage français étant catastrophique (avec quelques perles du genre " Il a été tué par derrière pendant qu'il ne regardait pas."). Un assez bon western dira-t-on.

Go-West 

 Un film d'Edward Buzell (1940) avec les Marx Brothers. Un film assez inégal commençant par un gag poussif et interminable mais qui prend du tonus au fur et à mesure que ça avance pour se terminer en apothéose avec une course en locomotive d'anthologie. Quant à l'histoire, on n'y comprend pas grand-chose mais ça n'a aucune importance.

Indiscrétions 

Un film de Georges Cukor (1940) avec Katharine Hepburn, James Stewart et Cary Grant. Le trio d'acteurs est au top, à ce point que le film n'existe que grâce à eux. Car sinon, on a droit à des acteurs secondaires fadasses, (le comble étant cette insupportable gamine) et des bavardages qui n'en finissent pas. Et puis surtout le sujet n'a pas grand intérêt, l'intrigue est tirée par les cheveux et la fin prévisible. Sinon le fait que Katharine Hepburn incarne une personnage qui se nomme Tracy Lord évoquera à certains quelques souvenirs assez croustillants mais complètement hors sujet.

La dame du Vendredi 

Un film d'Howard Hawks (1940) avec Cary Grant et Rosalind Russel. Le script est intéressant, du moins après qu'on se soit farci les deux introductions successives, le fond qui dénonce le journalisme à sensation (dans le film les deux vedettes n'aident pas le fugitif à s'en sortir, mais se garde en réserve le scoop de son arrestation) et la politique clientéliste (et peut-être aussi la peine de mort) est tout à fait louable. En revanche il est souvent question de communistes sans qu'on sache trop ce qu'ils viennent faire dans cette histoire. C'est sur la forme que le film pèche, c'est excessivement bavard (les deux premières scènes sont interminables), et le film va ensuite à une telle vitesse avec un tel chassé-croisé de personnages (y compris des correspondants téléphoniques invisibles) qu'on a vraiment du mal à suivre. La conclusion manque cruellement de subtilité… Mais bon, c'est du Hawks, réalisateur surestimé. Quand on voit ensuite l'éblouissant remake de Billy Wilder (Spéciale première - 1974) on se rend compte de suite de la différence de niveau !

Mines de rien 

Un film de Edward F. Cline (1940) avec W. C. Fields. W. C. Fields dans toute sa splendeur, irrespectueux, poivrot, gaffeur, hâbleur, et si c'est parfois un peu lourd, la scène de la poursuite en voiture vaut à elle seule le détour

Christmas in July (Le gros lot) 

Un film de Preston Sturges (1940). L'idée de base n'est pas mauvaise mai elle est ici exploitée de façon primaire, tout devient prévisible et comme le pitch est trop simple on tire à la ligne (faut le faire pour un film de 67 minutes !). La fin de la fable (puisqu'on comprend alors que c'est de cela qu'il s'agit) fait sombrer le film dans le ridicule. Dommage c'est plutôt bien filmé et Ellen Drew est charmante mais tout cela n'est vraiment pas terrible.

La fièvre du pétrole 

Un film de Jack Conway (1940) avec Clark Gable, Spencer Tracy, Claudette Colbert, Hedy Lamarr. L'histoire est d'autant plus inintéressante qu'elle est ponctuée d'un moralisme pro familial qui en devient ridicule tellement il est claironné au pas de charge. La réalisation est flemmarde, sans punch, la distribution n'aide en rien avec Spencer Tracy horripilant en redresseur de tort bourrin et Gable mal dirigé qui cabotine à tout va. Reste la distribution féminine, la charmante Claudette Colbert et la divine Hedy Lamarr, mais elles ne sauraient sauver ce film de ces blablas, de ses longueurs et de ses scènes ridicules…

Tempête 

Un film de Dominique Bernard-Deschamps (1940) avec Erich Von Stroheim, Arletty, Dalio. Un petit polar sas prétention qui fonctionne plutôt bien grâce aux talents des acteurs. Dommage que la dernière scène bien prévisible soit si lourdement mélodramatique pour conclure un film qui ne l'est pas. Le personnage joué par Arletty, arborant des tenues les plus extravagantes les unes que les autres apporte d'ailleurs une teinte de loufoquerie dans ce film qui n'est pas si mal que ça !

Campement 13 

Un film de Jacques Constant (1940). Quelle surprise ! Un ovni dans le cinéma français de l'époque. Constant nous décrit un monde d'hommes aux caractères entiers, dur et virils, mais aussi versatiles, hypocrites, cancaniers, voire lâches, tournant autour du personnage central, une nymphomane compulsive interprétée avec brio et gouaille par la jolie Alice Field. Cet univers étouffant est magistralement décrit et si le rôle confié à Paul Azaïs peut surprendre, il s'en sort très bien, mais que dire de celui de Gabriel Gabri, habité par le rôle. Tout cela avec une photo qui cadre bien avec la noirceur du film, quant à la musiquette d'Henri Verdun, elle peut surprendre mais n'entache pas ce chef d'œuvre méconnu.

La piste de Santa- 

Un film de Michael Curtiz (1940) avec Eroll Flynn, Olivia de Havilland. Moi je veux bien, à la limite, qu'on me présente une thèse révisionniste débile expliquant que l'abolition de l'esclavage aurait pu se faire en douceur et que les antiesclavagistes n'ont fait que de mettre de l'huile sur le feu. Seulement le film commet l'erreur -que dis-je- la faute, de nous présenter tout ça de façon honteusement manichéiste, les esclavagistes étant tous propres sur eux, courageux, tandis que les antis ont tous les défauts (ils ont même des sales gueules), traîtres, cupides, sanguinaires, fanatiques et j'en passe. Le pire c'est qu'on regarde jusqu'au bout en espérant une évolution des mentalités des protagonistes. Même pas ! Alors évidemment on peut gloser sur la réalisation (d'ailleurs pas terrible sauf dans les scènes de combat) ou contextualiser… ben non, quand ça sent pas bon, ça sent mauvais ! Une belle perte de temps !

Monsieur Hector 

Un film de Maurice Cammage (1940) avec Fernandel et Denise Grey. Contre toute attente ce film tourné en zone libre pendant l'occupation est une bonne surprise. C'est un vaudeville, très inspiré de Marivaux, qui fonctionne parfaitement. Fernandel ne surjoue pas, Denise Grey s'amuse comme une folle, Madeleine Suffel et sa voix inimitable n'est pas mal non plus, de même que Jean Termerson en baron myope. Si certaines séquences sont un peu lourdes comme celle du ski, d'autres étonnent par leur dynamisme comme la danse tyrolienne ou la longue séquence du restaurant. On ne s'ennuie pas une seconde et on passe un bon moment.

L'Odyssée des mormons 

Un film de Henri Hathaway (1940) avec Tyrone Power, Linda Darnell, John Carradine, Vincent Price, Mary Astor. En voilà un film qu'il est bizarre et où le meilleur côtoie le moins bon. Le meilleur c'est une mise en scène de folie avec un début d'une cruauté et d'une violence très bien décrite, montrant jusqu'où peut aller l'intolérance et la bêtise crasse. Hélas ce début est plombé d'une belle invraisemblance quand Brigham Young se fend d'un prêche en plein tribunal sans que personne ne l'interrompe. Les bonnes scènes continuent néanmoins avec le lynchage de Joseph Smith, la fuite des caravanes et la traversé du lac gelé. Nous avons ensuite un bon coup de mou plombé par l'idylle entre Power et Darnell avant qu'Hathaway nous offre un final époustouflant d'abord avec l'invasion des grillons, puis le "miracle" des mouettes, Scène bien naïve mais qui a de la gueule. Nous avons donc là un film bien photographié et bien mis en scène. Côte interprétation, Power et la très belle Linda Darnell jouent les faire valoir, mais on appréciera la classe de Vincent Price et les petits rôles très honorables de John Carradine et de Mary Astor. Les deux gros soucis ce sont les scènes intimistes assez médiocres et le côté hagiographique entourant le personnage de Brigham Young qu'il aurait fallu rendre moins lisse, un personnage très ambigu ne serait ce que par son racisme, en revanche sa polygamie ne faisait de mal à personne.

Hanna en société 

Un film de Gunnar Olsson (1940). Encore une petite perle complétement méconnue du cinéma suédois, une comédie sur le ton de la fable, dominée par l'abatage enjoué de son actrice principale, Rut Holm, qui nous fait une prestation toute en fantaisie. On se passionne volontiers des péripéties de cette bonne qui se retrouve par surprise héritière d'une fortune, au grand dam des héritiers lésés qui vont intriguer contre elle. Certaines scènes sont carrément surréalistes comme la séance de photos ou la visite chez le psychiatre. Evidemment on pourra reprocher le côté manichéisme du film, mais que voulez-vous une fable est une fable, et l'important n'est il pas d'avoir passé un bon petit moment de bonne humeur cinématographique.

La Maison aux sept pignons

Un film de Joe May (1940) avec George Sanders, Vincent Price, Margaret Lindsay. S'il n'y avait cette légère impression de confusion vers la fin, nous tenions là un chef d'œuvre. Le scénario est très riche et intelligent, l'ambiance est anxiogène à souhait sans temps morts, la photo est excellente, mais c'est essentiellement le trio d'acteurs qui nous livre une prestation époustouflante : Sanders est magistral comme très souvent avec son élocution unique et campe ici un personnage d'un cynisme qui fait froid dans le dos, Price est excellent, démontrant une grande palette d'expression, qu'il pousse la chansonnette, se mette en colère ou qu'il fasse preuve d'émotion (la scène des retrouvailles avec Hepzibah est sublime) Quant à Margaret Lindsay quelle surprise de voir jouer une si bonne et si belle actrice, elle nous offre son magnifique sourire en début de film avant de le perdre mais en restant digne. Bref c'est un enchantement ce film.

Fantasia

Un dessin animé produit par Walt Disney (1940) C'est un film d'animation à sketches, ils ne sont donc pas tous égaux. Si l'abstraction de la Toccata peut décevoir, que dire de la Pastorale sinon que c'est un véritable enchantement ? Et cette Nuit sur le mont chauve à l'ambiance satanique terminée par l'Ave Maria de Schubert chanté par la voix cristalline de Julietta Novis. Et puis bien sûr l'apprenti sorcier devenu un classique à lui tout seul, la danse des heures avec ses hippopotames, et ses éléphants. Que du bon, l'inventivité et la poésie sont de tous les instants, et que de la bonne musique dirigée par le très grand chef que fut Leopold Stokowski. Au titre des curiosités, les petits coquins auront remarqués quelques brèves nudités dans "la Pastorale" et "dans le Mont Chauve", sacré Walt !

The Case of the Frightened Lady

Un film de George King (1940) Un film sortie de la naphtaline par Youtube, affublé de sous-titre approximatif. C'est tellement mal raconté qu'on y comprend pratiquement rien du tout et à la fin sauf si quelque chose m' échappé on n'a pas les réponses à toutes les questions, mais à ce stade de médiocrité on s'en fout pas mal

Ninotchka 

Un film d'Ernst Lubitsch (1939) avec Greta Garbo, Melvin Douglas, Bela Lugosi. Chaque film de Lubitsch est décidément une leçon de cinéma. Ça commence tambour battant et ça n'arrête pas ! Greta Garbo dans le rôle d'un commissaire du peuple soviétique venu à la rescousse de trois pieds nickelés, droite et sèche dans son rôle et qui finit par se laisser amadouer par le charme discret de la bourgeoisie en succombant à deux de ses armes : le rire et l'amour ! Etonnant et délicieux. Sous le couvert du rire le scénario montre son intelligence, ainsi si la critique du régime soviétique est féroce, il évite avec brio le piège grossier du "C'était mieux avant".. Garbo domine évidemment la distribution de son charme et de sa beauté, mais il faut souligner la classe de Melvin Douglas, et le rôle amusant de Bela Lugosi. Sans aucun doute ce film a sa juste place dans le top 5 des meilleurs Lubitsch !

Le magicien d'OZ 

Un film de Victor Fleming (1939) avec Judy Garland. Il faut faire la part des choses, si on est bien loin du chef d'œuvre, ce film ne mérite tout de même pas le mépris affiché par certains (Georges Sadoul par exemple ne le cite pas dans son dictionnaire des films !). Dans le premier tiers du film, on est quand même emporté par l'inventivité de l'histoire, par les décors, les chansons. Le problème c'est qu'après ça ne se renouvelle pas trop (ou pas trop bien) et que la mièvrerie (le film aurait sans doute pu s'appeler "Bienvenue à la sucrerie") pour ne pas dire la nunucherie prend le dessus. Remarquons au passage que dans le magicien d'Oz on tue les méchantes sorcières… dans la Grande Vadrouille, personne ne tue personne… en voilà un sujet de réflexion qu'il est original !

La règle du jeu 

Un film de Jean Renoir (1939) avec Jean Renoir, Dalio, Carette, Pauline Dubost… C'est disons-le d'emblée un énorme film… De là à le classer dans le top des meilleurs films de tous les temps, non ! Et notamment en raison de l'insupportable scène de chasse, mais aussi cette scène invraisemblable à la fin où Schumacher sympathise avec Marceau alors que c'est à cause de ce dernier qu'il a tout perdu.  Sinon on en a en a écrit des "vérités définitives" sur ce film qui annoncerait la seconde guerre mondiale (à cause de la scène de chasse), n'importe quoi ! Ce serait une critique de la bourgeoisie ? Non, les plus abjects là-dedans ce sont bien Schumacher et Marceau, non pas que les autres soient des saints, ils ont tous leurs travers.  Le marquis fait l'éloge d'un libertinage respectueux, il n'aime pas rendre les femmes malheureuses, ce qui ne l'empêchera pas de se bagarrer avec l'aviateur et de couvrir son assassinat. En fait c'est la société dans son ensemble qui est critiquée, bien plus que la bourgeoisie, une société où les règles font que le paraître est plus important que le réel, une société où tout le monde ment dira Octave, et qui finalement nous broie. Chassé-croisé amoureux, femmes légères ou passionnées on se croirait par moment chez Beaumarchais et ce n'est pas pour rien que Renoir a placé ses vers en exergue du film, car c'est bien là le sujet du film  : les règles que la société s'impose dans les rapports entre hommes et femmes et la façon dont on s'en acquitte ou pas. Deux mots pour le reste, pour ce qui fait que c'est du cinéma, une mise en scène maîtrisée de bout en bout, des plans de folies (le petit théâtre, la course poursuite) avec une utilisation géniale de la profondeur du champ,  une distribution fabuleuse dominée par Dialo, Pauline Dubost et Jean Renoir lui-même mais il faudrait les citer tous, et une bande son surprenante.

La chevauchée fantastique  

Un film de John Ford (1939) avec Claire Trevor, John Wayne, John Carradine. La chevauchée fantastique c'est Boule de suif au Far-West. La galerie de portraits est assez bien vue, la palme revenant à Claire Trevor, une prostituée chassée de la ville par un comité de dames patronnesses auxquelles Ford ne fait pas de cadeaux. Thomas Mitchell dans le rôle du docteur alcoolo est très bien. Carradine est odieux à souhait et le banquier exaspérant. En revanche John Wayne ne m'a pas paru extraordinaire.Le clou du spectacle reste l'attaque indienne d'une réalisation magistrale (bon évidemment la cavalerie arrive toujours à temps et ce ne sera pas la dernière fois, mais bon). Le duel final n'était peut-être pas nécessaire, mais comme il est réussi, on ne va pas s'en plaindre. Un classique qui mérite sa réputation.

Derrière la façade 

Un film de Georges Lacombe et Yves Mirande (1939) avec Jules Berry, Eric Von Stroheim, Gaby Morlay, Michel Simon, Elvire Popesco, Carette... "Quand l'affiche est trop pleine, le vide est sur l'écran" disait je ne sais plus qui. Alors effectivement on est content de voir les "gueules" de Jules Berry, Eric Von Stroheim, Michel Simon, Carette... sauf que vu la durée de leur prestation on a vraiment l'impression qu'ils ne viennent que pour cachetonner. Lucien Baroux, lui est présent pendant tout le film et fait une excellente composition. Et puis il y a ces dames : Elvire Popesco, Gaby Morlay, mais aussi Betty Stockfeld et Simone Berriau (qui pousse une jolie chansonnette) qui sont fort agréables dans leurs rôles de belles coquines. Et pourtant le film est mauvais, certains acteurs jouent de façon exécrables (les deux fils Bernier), certains sketches sont à la limite du compréhensible (Von Stroheim, Jules Berry), on se dit c'est pas grave, on comprendra plus tard, eh bien non on ne comprendra jamais. Et puis on s'attendait à une fin bien amenée, originale et non pas à ce dénouement en forme de cheveu sur la soupe ! (Tout ça pour ça, comme on dit). Mais le plus grave reste l'idéologie douteuse du film : Car après nous avoir montré des femmes légères, des prostituées, des gigolos sur l'air de la comédie, le film dégringole brusquement dans un moralisme absurde avec les dernières scènes impliquant Bernier, ses deux grands dadais et sa bonne-femme dans une espèce d'ode à l'ordre sexuel bourgeois, ces scènes sont tellement déconnectées de la réalité qu'elles en deviennent ridicules et finissent par casser le film.

La taverne de la Jamaïque  

Un film d'Alfred Hitchcock (1939) avec Charles Laughton et Maureen O'Hara. On aurait grand tort de considérer ce film comme mineur. Certes c'est davantage un film d'aventure qu'un film à suspense, et alors ? L'ambiance est bien rendue, les scènes nocturnes sont magnifiques, l'histoire est prenante, l'interprétation de Charles Laughton est fabuleuse, Maureen O'Hara est superbement photographié. Ajoutons quelques réflexions inattendues, comme celle de nous dire qu'après tout la vie n'est qu'un spectacle (le suicide de Laughton, et le cynisme de ce pirate se réjouissant que des femmes viendront assister à sa pendaison). Bien sûr Alfred a fait beaucoup mieux, mais ce film n'en reste pas moins un chef d'œuvre.

You Can't Cheat an Honest Man (le cirque en folie) 

Un film de Georges Marshall (1939) avec W.C. Fields. Ce film avec W.C. Fields est resté longtemps inédit en France, on comprend pourquoi. C'est médiocre, bavard; lourd, ennuyeux, ponctué de gags lamentables et affublé d'un ventriloque à marionnettes qui devient vite gavant, il faut attendre les toutes dernières minutes pour retrouver (un  tout petit peu) un W.C. Fields à la hauteur de sa réputation.

Le jour se lève   

Un film de Marcel Carné (1939) avec Jean Gabin, Arletty, Jules Berry, Jacqueline Laurent. Un des sommets de l'histoire du cinéma. Remarquablement filmé (ah, ces scènes de cages d'escaliers !), photographié avec talent, l'utilisation des flash-back est parfaitement réussie. Le film est très noir et aucun des personnages n'est vraiment complètement clair mais c'est ce qui fait la force du film ("Tout le monde ment", dira Jacqueline Laurent, "et si je disais le contraire ce serait un mensonge"), on remarquera aussi que les rapports entre hommes et femmes sont étonnamment libres et beaucoup moins codifiés que dans la plupart des films américains de la même époque. Côté interprétation, Gabin est tout simplement magistral, Arletty est toute de gouaille et de beauté, et Berry est excellent dans le rôle d'un salaud tragique. Les dialogues de Prévert sonnent justes et font souvent mouches. Il faut aussi souligner le rôle des objets, les médaillons, les photos qui jouent un peu le rôle de "madeleines de Proust". Dans le film tel qu'il fut sorti en 1939, il y avait une jolie scène de nu avec Arletty qui sortait de sa douche. La scène fut censurée par le gouvernement de Vichy mais il est scandaleux qu'elle n'ait jamais été rétablie depuis. C'est vrai que Carné a déclaré tardivement que ce plan aurait été tourné à son insu (ben voyons...)

Fric-Frac 

Un film de Maurice Lehmann (1939) avec Arletty, Michel Simon et Fernandel. Un régal ! Un petit chef d'œuvre de truculence mené tambour battant. Ce film n' pas eu la postérité qu'il mérite pourtant, il est supérieur à d'autre de la même époque (on pense notamment à Hôtel du Nord de Marcel Carné, pourtant excellent, mais parasité par les scènes entre J.P .Aumont et Annabella). Les acteurs sont très bien, Fernandel ne cabotine pas trop et Arletty est tout simplement rayonnante.

Tourbillon de Paris 

Un film de Henri Diamant-Berger (1939) avec Ray Ventura et son orchestre, Jean Tissier, Marguerite Pierry et Mona Goya. Quand le premier plan d'un film est mauvais ça ne présage rien de bon… et c'est bien le cas ici, à cause d'une direction d'acteur déficiante. De la distribution seuls Jean Tissier, Coco Aslan, Mona Goya et Marguerite Pierry savent jouer la comédie, les autres sont mauvais voire exécrables : André Dassary est ridicule, Charpin lamentable, quant aux musiciens de l'orchestre de Ray Ventura s'ils constituaient une formation musicale formidable, ils n'en étaient pas moins des comédiens médiocres.. Certains gags sont pitoyables (parler de niveau "maternelle" pour la scène de l'Opéra n'a rien d'exagéré),. A sauver : deux bonnes chansons de Ray Ventura et la présence de Jean Tissier (celui-ci, c'est toujours un plaisir de le voir jouer) quelques sourires féminins et une bagarre générale vers la fin. Une déception !

Une java 

Un film de Claude Orval (1939). Avec un scénario qui ne tient pas debout et un Berval complétement improbable en bourreau des cœurs, ce film était mal parti. Pourtant on se surprend à se prendre de sympathie pour ce petit film. Il y a une ambiance, il y a Mireille Perrrey, vedette féminine un peu atypique, il y a Raymond Aimos en mauvais garçon (mais quel talent !) et puis il y a la Java bleue…

Noix de coco 

Un film de Jean Boyer (1939) d'après une comédie de Marcel Achard avec Raimu et Michel Simon. Jean Boyer sans être génial fut un très bon réalisateur et ne mérite pas le qualificatif de tâcheron que certains lui collent. (il fut aussi un excellent parolier) et ici il nous livre une comédie savoureuse. Raimu n'est apparemment pas trop dirigé, alors il cabotine, mais voir cabotiner Raimu est un plaisir et là il s'en donne à cœur joie ! Le film aborde les éternels problèmes du couple, de la fidélité, de la jalousie en les traitant de façon intelligente, mais aussi celui de la vie de province et de son hypocrisie. Outre celle de Raimu l'interprétation est brillante avec un Michel Simon égal à lui-même c’est-à-dire très bien, quant à ces dames (Marie Bell et Suzet Maïs) elles s'en tirent excellemment bien.

Le veau gras 

Un film de Serge de Poligny (1939) avec Elvire Popesco et François Perrier. Ce film est idéologiquement très ambigu. Il nous explique en gros que se contenter de dénoncer l'argent n'est pas la bonne solution (le dénonciateur est par ailleurs ridicule et invincible puisque 30 bonhommes n'arrive pas à le maîtriser) car l'argent des riches peut aussi servir aux bonnes œuvres (et on classe dans les bonnes œuvres un dispensaire et… une chapelle miraculeuse). Autrement dit on nous prône une collaboration de classe mythique au service d'un ordre moral auquel doivent se soumettent les pauvres (les riches eux n'ont pas cette obligation). Et tout ça est lourd, ridicule, mal joué et même pas drôle. Poubelle.

Louise 

Un film d'Abel Gance (1939) avec Grace Moore et Georges Thill. Georges Thill donnant la réplique à Ginette Leclerc ? Ben oui, ça existe et c'est dans Louise, film inspiré de l'opéra (injustement oublié) de Gustave Charpentier. Le film n'a que le défaut de l'opéra, le rôle emphatique à l'extrême du paternel. Sinon nous tenons là un quasi chef d'œuvre, le film est une véritable leçon de cinéma, ça bouge, ça virevolte, ça se superpose, ça nous éblouit, ça nous enchante. Le scénario minimaliste (c'est le moins que l'on puisse dire) est transcendé. Les scènes de foule sont fabuleuses, véritables petits tableaux vivants. Quant à Grace Moore, l'entendre et la voir chanter est un bonheur sans pareil. Un enchantement vocal et visuel. (et tant pis pour ceux qui n'aiment pas l'Opéra !)

Beau geste 

Un film de William Wellman (1939) avec Gary Cooper, Ray Miland. Un tissu d'inepties incohérentes. D'abord l'argument, plus abracadabrant tu meurs, et quand on connait la clé en fin de film c'est encore pire, ensuite il faut se farcir cette insupportable et interminable niaiserie avec les mioches. Les invraisemblances en tout genre fusent comme s'il en pleuvait, on a droit à des poncifs bien lourds ("le lieutenant est une ordure, mais quel bon guerrier !") et il n'y a aucun enjeu. C'est sans doute bien joué, la réalisation est sans doute correcte mais tout cela est masqué par l'indigence sans borne du scénario.

Le mystère de Mr Wong 

Un film de Willaim Nigh (1939) avec Boris Karloff. Tous les acteurs sont médiocres à l'exception de Dorothy Tree, quand le scénario lui permet de s'exprimer (c’est-à-dire uniquement pendant le jeu de mimes) Karloff étant lui-même hyper décevant. Quant à l'histoire c'est du polar à énigmes, un genre casse gueule dans lequel le réalisateur n'arrive jamais à nous intéresser, tout cela est embrouillé, confus, plat, et quand ce gros malin de Wong nous sort le coupable de son panier, on s'en fiche complétement et on est heureux que ça finisse.

La fin du jour 

Un film de Julien Duvivier (1939) avec Louis Jouvet, Michel Simon. C'est sans doute techniquement irréprochable, les acteurs sont excellent même si ça cabotine un maximum, et Madeleine Ozeray apporte une note de fraicheur (à défaut de crédibilité), quelques scènes sont mémorables, notamment celle ou Simon tente une sorte de coup d'état dans la maison de retraite… mais sinon , les personnages sont exagérément caricaturaux (surtout Simon) et le scénario s'encombre de séquences incongrues voire ratées : les scènes avec les scouts sont d'un ridicule achevé, le mariage à l'église (pourquoi à l'église ?) est poussif, (que font d'ailleurs ces deux scènes dans un film qui se veut un hommage au théâtre ?) la scène avec François Perrier sonne faux comme ce n'est pas permis, quand à la tournure que prend l'amourette entre Jeanette et Jouvet on y croit pas une seconde. C'est sans doute le choix du sujet qui était casse gueule, allez savoir ? Je n'ai pas aimé.

Un jour au cirque 

Un film d'Edward Buzzell (1939) avec les Marx Brothers et Margaret Dumont. Un Marx Brothers de bonne facture qui a le mérite d'être très peu parasité par le sempiternel épisode "sentimental". Si certains scènes n'évitent pas une relative lourdeur d'autres sont anthologiques comme celle où Groucho chante Lydia, la marche au plafond ou cette fin délirante avec gorille et trapèze volant. Un excellent moment

La charrette fantôme 

Un film de Julien Duvivier (1939) avec Louis Jouvet, Pierre Frenay. Une réalisation assez exceptionnelle notamment dans les scènes de foules, une direction d'acteurs très moyenne avec Jouvet et Fresnay en roue libre et une Micheline Francey, ravissante mais inexpressive. Mais c'est surtout au niveau du scénario que ça ne va pas du tout, on est carrément dans le pire sulpicien, c'en est même outrancier, avec des personnages manichéistes et tout cela sans que ce qui nous est raconté ne suscite un quelconque intérêt.

The Gorilla 

Un film de Allan Dwan (1939) avec Lionel Atwill, Bela Lugosi. Une pépite à découvrir d'urgence. Evidemment on a un peu peur quand on voit débarquer les Ritz Brothers, mais ils tiennent la route. Au début, Patsy Kelly qui joue le rôle de la bonne nous offre une séquence de panique d'une drôlerie inénarrable (c'est un plaisir de voir jouer cette actrice) tandis que Bela Lugosi nous la joue "inquiétant personnage". Les répliques fusent à tout va et après une période de suspense où l'on attend l'heure du crime, nous avons droit à un chassé-croisé entre toutes une série de personnages pittoresques qui passent par tout un tas de passages secrets. L'inventivité est de tout moment. Un régal, je vous dis même si la fin est incompréhensible, mais on s'en fiche

Autant en emporte le vent 

Un film signé Victor Fleming (1939) avec Clark Gable, Vivien Leigh, Olivia de Havilland. Le tâcheron Fleming n'est sans doute pas pour grand-chose dans la réussite de ce film auquel a participé Georges Cukor est qui est avant tout un film de producteur (David O. Selznick) Balayons déjà les critiques habituelles. Oui, c'est un film sudiste et le point de vue est donc sudiste, il est peut-être idéalisé mais il n'est pas révisionniste (la sanglante bataille de Gettysburg en 1863 et le rasage de d'Atlanta par les nordistes en 1864 sont des réalités historiques. De plus le film n'est raciste qu'aux yeux de chercheurs de petites bêtes. Quant à ceux qui critiquent le personnage de Scarlett en lui reprochant son inconsistance et tout ce qui s'en suit, il faudrait peut-être qu'ils comprennent que c'est le sujet du film  Alors qu'en est-il du film : une double histoire, celle de l'écroulement du Sud, c'est la partie la plus spectaculaire du film, au lieu de nous montrer des combats, le film nous montre les morts, les blessées, par centaines, par milliers, le feu, les destructions, la peur, le  désespoir, et ces images sont fortes et terrifiantes, l'autre volet est l'itinéraire d'une enfant gâtée, se fichant des convenances, mais capricieuse, manipulatrice , vénale, et aussi prisonnière de son amour fou et irraisonné pour le beau Ashley, mais ce qui ne l'empêche pas d'avoir des moments d'intense bonté. Eh oui personne n'est tout noir, personne n'est tout blanc. Le rôle est joué par une Vivien Leigh, fabuleuse, magnifiquement photographiée et éclatant l'écran de son talent et de sa beauté. Clark Gable lui aussi est un personnage complexe, pas trop clair mais attachant. Olivia de Havilland en second rôle nous joue une femme bien plus intelligente qu'elle ne veut bien le paraître, et si Leslie Howard est réduit à nous jouer les Droopy, c'est que c'est le personnage qui est ainsi. On ne peut parler de la distribution sans évoquer la présence d'Ona Munson, introduite avec des pincettes dans le récit puisque le Code Hays interdisait que l'on parle de prostitution. Un beau rôle, très digne, très classe. La réalisation est parfaitement maîtrisée, parfois une scène très courte suffit comme quand Scarlett dont la liaison avec Ashley alimente les cancans se rend à sa fête d'anniversaire et qu'elle est reçu par sa belle-sœur avec le sourire. A la fin du film quand les malheurs ne cessent de s'empiler, le film sait nous éviter de sombrer dans le pathos. Il y a aussi ces touches d'humour insolite comme quand la femme du docteur apprend que son mari revient du bordel, elle lui demande pas fâchée du tout comment est la décoration. On ne s'ennuie jamais pendant ces quatre heures de projection, il n'y a aucune longueur, les couleurs sont flamboyantes, la musique de Max Steiner est magique. Que du bonheur !

L’Homme au masque de fer

Un film de James Whale (1939) avec Louis Hayward et Joan Bennett. Que le scénario ne respecte ni le roman de Dumas ni la vérité historique est le moindre de mes soucis, le cinéma peut tout se permettre. On a quand même le droit de trouver l'histoire assez primaire, c'est le premier défaut, le second est la prestation de Louis Hayward qui hérite d'un double rôle difficile et s'il passe en Louis XIV, son autre rôle est beaucoup moins convaincant. Sinon ça se laisse regarder sans déplaisir, c'est très bien rythmé, bien photographié, bien mis en scène et le film bénéficie de la présence magique de la très belle Joan Bennett.

The Face at the Window

Un film de George King (1939) avec Tod Slaughter. Il est bien gentil Monsieur Netflix de nous ressortir des films tombés dans l'oubli, encore faudrait-il que la vision de ces films nous apporte quelque chose. Nous avons ici une histoire policière teintée de fantastique d'une naïveté confondante a tel point que l'on dirait un troupe de comédiens amateurs répétant sans y croire une mauvaise pièce. Dans cette pitrerie cousue de fil blanc, Tod Slaughter jour les "méchants-pas beau" sans nous impressionner un instant.

Ils étaient neuf célibataires

Un film de Sacha Guitry (1939) avec Sacha Guitry, Elvire Popesco, Saturnin Fabre, Betty Stockfeld, Marguerite Moreno, Marguerite Pierry. Du Guitry pur jus, peut-être légèrement inférieur à ses autres films en raison de la multiplicité des personnages et de la difficulté d'aller jusqu'au bout de leur gestion. N'empêche que ça se savoure, écoutez Guitry est en enchantement, voir jouer Elvire Popesco en est un autre, et puis Guitry n'hésite pas à donner dans le loufoque avec cette scène impayable où l'un des acteurs ne comprend pas qu'il est entré dans un bordel (dirigé par la sémillante Marguerite Pierry). Quant au fond, on peut trouver le film amoral, mais c'est ce qui fait son sel.

Dans la peau d'une domestique

Un film de Gunnar Olsson (1939) avec Britta Brunius. J'attends d'un film qu'il sache me raconter une histoire. Ici il faut attendre une heure avant que le scénario ressemble à quelque chose, en fait une amourette entre une domestique et le fils de la de maison raconté sur l'air de je t'aime, moi non plus. Autant dire que ça ne passionne pas du tout. Le film comporte un sous-texte social, hélas traité avec un sorte de désinvolture. Sinon Britta Brunius est une bien belle femme !

Les anges aux figures sales 

Un film de Michael Curtiz (1938) avec James Cagney Humphrey Bogart. J'ignorais que le grand Michael Curtiz avait réalisé un film pour patronage, car c'est bien de cela qu'il s'agit. Le remède à la délinquance serait donc l'encadrement de la jeunesse par la religion… Comme naïveté c'est assez gratiné !  Et si encore s'était fait avec subtilité mais la dernière partie du film est carrément à gerber. PS : Il est possible que le film possède des qualités cinématographiques mais quand le fond occulte la forme à ce point-là, cette dernière n'a plus aucune espèce d'importance.

Entrée des artistes 

Un film de Marc Allegret (1938) avec Louis Jouvet, Claude Dauphin, Odette Joyeux. C'est vraiment très bon et très fort. La structure du film peut surprendre car l'intrigue y est courte mais importante car elle constitue le sommet de la mise en abyme du film. Cette œuvre est une réflexion sur le spectacle; sur ce qu'il convient de montrer ou de ne pas montrer (la scène de la chambre d'amour est géniale), sur ce que la société accepte du bout des lèvres (la pratique de l'art dramatique), ce qu'elle refuse (les gigolos qui pourtant ne font de mal à personne, mais qui dérange car considérés comme hors-norme), ce qui l'impressionne (la légion d'honneur devenant une respectabilité portative), ce qui la manipule (la vanne de Jouvet sur les critiques), et puis surtout ce qui base les rapports entre individus, les mots que l'on dit à l'autre "en jouant" devant lui, comme un comédien sur sa scène et qui ne sont que des mots, consommables et périssables. Tout n'est que spectacle, tout n'est qu'apparence. Quelle lucidité ! Le happy-end est biaisé, Claude Dauphin et Janine Darcey vont s'aimer… mais combien de temps ? Le film réalisé très correctement mais sans génie puise sa force dans son extraordinaire scénario et dans les dialogues d'Henri Jeanson, mais aussi dans sa distribution dominée par un Louis Jouvet impérial, et avec une Odette Joyeux resplendissante. Chef d'œuvre !

Une femme disparaît 

Un film d'Alfred Hitchcock (1938) avec Michael Redgrave et Margaret Lockwood. Le film prend son temps pour s'installer dans un joyeux bordel qui permet de bien camper les protagonistes. C'est assez drôle et on en retiendra l'étrange tandem d'amateurs de cricket (homosexuels ?) la soubrette délurée qui aurait bien voulu… et le directeur du lieu, excentrique dans ses débordements. En revanche la séquence de danse folklorique dans la chambre est lourde. Le film démarre véritablement avec le départ du train, en fait un tout petit peu après, et la magie opère : on est scotché quasiment jusqu'à la fin. Beaucoup d'humour, de décontraction, les acteurs sont très bons et les personnages secondaires hauts en couleurs. Le sous texte est astucieux et distillé avec intelligence : le pacifisme ne sert à rien (l'amant de la dame) et l'indifférence non plus (les deux supporters). Curieusement l'image qui reste après la vision du film est celle de cette étrange nonne (Catherine Lacey) avec ses talons haut dévoilés par un plan superbe.

Les aventures de Robin des bois 

Un film de Michael Curtiz (1938) avec Errol Flynn, Olivia de Havilland, Basil Rathbone, Claude Rains. On comprend assez vite (et heureusement sinon le film serait irregardable) qu'il faut se débarrasser de la vision au premier degré et en accepter les incohérences (un peu comme quand on regarde certaines comédies musicales), et à ce moment-là ça devient parfait. La réalisation est extrêmement nerveuse et frise la perfection, les couleurs sont somptueuses, la musique de Korngold un enchantement, quant à la distribution si Errol Flynn (malgré son côté fanfaron) est bon, Basil Rathbone et Claude Rains campent d'excellents "méchants", Olivia de Havilland est rayonnante de beauté même si son rôle est simpliste. On ne s'ennuie pas une minute, C'est vraiment du cinéma spectacle et du bon

La huitième femme de Barbe-Bleue  

Un film d'Ernst Lubitsch (1938) avec Claudette Colbert et Gary Cooper. Il faut sans doute être Lubitsch pour rendre sympathiques ces personnages. Gary Cooper espèce de mufle mal embouché, et Claudette Colbert qui se marie pour pouvoir divorcer avec une bonne pension alimentaire (et ne parlons pas de son père qui est un escroc professionnel). C'est excellent, on est scotché dès la première minute et Claudette Colbert crève l'écran. Une très grande leçon de cinéma !

Casier judiciaire 

Un film de Fritz Lang (1938) avec Sylvia Sidney et George Raft. Une sorte de conte de fées pour taulards repentis ou truands en devenir. Alors comme c'est un conte de fée, c'est léger et ça fonctionne en tant que tel assez bien. Frit Lang réussit à caser de façon très naturelle des plans très expressionnistes, comme la superbe évocation de la prison, et aussi quelques vannes bien vues (à l'instar de cette logeuse qui de mégère se transforme en pot de miel uniquement à l'évocation d'un bout de papier ou de Sylvia Sidney expliquant aux truands qu'ils ne sont que des minables, les gros truands réussissant parce qu'ils font de la politique). On remarquera que Lang contourne fort habilement le code Hays (les deux protagonistes couchent ensemble sans être légalement mariées et font un enfant). Quant à l'impossible scène du tableau noir, il fallait vraiment s'appeler Frit Lang pour la réussir et la rendre crédible. De plus le film se garde de tout manichéisme, Raft incarne un personnage faible, très "beauf" dans ses réactions, Sylvia Sidney est forte mais manipulatrice. Evidemment Lang a fait et fera beaucoup mieux, mais ça se regarde avec plaisir d'autant que Sylvia Sidney y a fort bien sa place. Joli musique de Kurt Weil.

Alexandre Nevski 

Un film de Sergei Eisenstein (1938) avec Nikolaï Tcherkassov. Bien sûr que c'est un film de propagande (à force de l'entendre répéter, on va finir par le savoir !) et cela agace par moment, tout comme les scènes avec la jeune fille que l'on qualifiera suivant son humeur de mièvrerie ou de cucul la praline. Mais à côté de ça, c'est beau, c'est du grand art, c'est une leçon de cinéma, et la très longue scène de la bataille sur le lac Peïpous est grandiose par sa mise en scène, et son lyrisme. Ajoutons à cela la sublime musique d'Igor Prokofiev, on est pas passé loin du chef d'œuvre.

La bête humaine 

Un film de Jean Renoir (1938) avec Jean Gabin, Simone Simon, Fernand Ledoux. Ce film souffre de nombreux défauts, le principal étant de vouloir trop coller au roman de Zola, ce qui est un pari impossible (le roman fait 400 pages), sauf à en faire un digest, résultat l'enchaînement des séquences est problématique, des éléments de scénarios sont abandonnés en route (l'erreur judiciaire, l'idylle avec Flore). Il y a la musique qui n'est pas mauvaise mais dont l'utilisation est incongrue. Le rôle de Cabuche joué par Renoir lui-même est complètement raté. Certains dialogues sont trop littéraires et sonnent faux. Et puis reste le cas Simone Simon, qui dans ce film est mignonne comme tout, très chatte, magnifiquement photographiée, parfaite dans sa gestuelle mais mauvaise dans sa diction. Pourtant ça passe, parce qu'il y a Gabin, parce que les cadrages et la photo sont excellents, mais ce n'est pas du meilleur Renoir. Fritz Lang fera beaucoup mieux en 1954

Le quai des brumes 

Un film de Marcel Carné (1938) avec Jean Gabin, Michelle Morgan, Michel Simon, Pierre Brasseur. Un mélo flamboyant et complètement maîtrisé. Gabin au sommet de son art (à tel point que Morgan peine parfois à se mettre à son niveau). Des images splendides, une fabuleuse galerie de portraits avec pas mal de paumées et quelques salauds, les dialogues de Prévert, une musique envoûtante et efficace signée Maurice Jaubert, une réalisation sans faute, une photo superbe, une ambiance… Un chef d'œuvre !

Hôtel du Nord 

Un film de Marcel Carné (1938) avec Arletty, Louis Jouvet, Annabella, Jean-Pierre Aumont, Bernard Blier.... Le seul petit reproche que l'on pourrait faire à ce film serait le côté gnan-gnan des dialogues entre Amont et Annabella, sinon tout est bon, une musique de Maurice Jaubert bien adaptée, une photographie éblouissante, des dialogues et des répliques d'anthologie (signés Henri Jeanson et non pas Jacques Prévert comme on le croit généralement) Jouvet et Arletty au top niveau, un décor de studio tellement bien reconstitué qu'on se croirait vraiment au bord du canal Saint-Martin. A souligner le rôle incarné par Arletty, celui d'une prostituée de caractère, parfaitement intégrée et ne sombrant jamais dans le misérabilisme convenu. De ce point de vue Jouvet à moins de chance, mais le scénario à l'intelligence d'insister sur l'aspect humain du personnage. Chef d'œuvre !

La chaleur du sein  

Un film de Jean Boyer (1938) avec Arletty et Michel Simon. Rien d'érotique, hélas, malgré le titre équivoque. Jean Boyer n'est pas un mauvais réalisateur, mais comment voulez-vous faire un bon film avec une pièce aussi mauvaise (et ce n'est rien de le dire) ? Certains rôles sont exécrables, (le jeune homme, les deux mémères) seule Arletty s'en sort convenablement, Michel Simon est bon sauf à la fin quand on lui fait jouer des niaiseries. L'histoire est inintéressante et se termine en fable pour patronage, certaines scènes sont pitoyables (la restitution de la bague). A sauver, juste trois scènes : celle entre Arletty et le toujours excellent Pierre Larquey, les scènes sur le bateau avec Michel Simon et Marguerite Moreno et celle où Monique Joyce nous chante "qu'ils sont mignons les petits cochons avec leur queue en tirebouchon". Pas terrible tout ça !

J'étais une aventurière 

Un film de Raymond Bernard (1938) avec Edwige Feuillère et Jean Tissier. La réalisation est très correcte, l'histoire est amusante, le réalisateur tentant de jongler entre la leçon de morale et une certaine amoralité. Car le thème est bien celui de la vénalité (un peu édulcorée ici, puisque on fait comme si l'héroïne, "ne couchait pas" ce qui paraît bien invraisemblable), une vénalité qui n'exclue pas l'amour, tout le problème et c'est ce qui fait la force du film est de savoir si l'homme qui a été choisi acceptera le passé de la femme !L'interprétation est dominée de loin par une Edwige Feuillère excellente et par un Jean Tissier en pleine forme. Un bon moment de cinéma.

Un meurtre sans importance 

Une comédie de Lloyd Bacon (1938) avec Edward G. Robinson. Un peu poussif au départ, il faut vraiment attendre la fête dans la résidence de Saratoga pour que ça s'anime pas mal et que ça devienne relativement plus intéressant, avec l'utilisation d'un des ressort classiques du théâtre de boulevard : les gens qui se croisent et qui se décroisent sans arrêt, d'autant que si on ajoute des cadavres dans les placards et des trésors sous les sommiers, on a tous les ingrédients. Bonne prestation de Robinson, les seconds rôles sont plutôt bons à l'exception de Willard Parker exécrable dans le rôle du gendre.

L'impossible Monsieur Bébé 

Un film d'Howard Hawks (1938) avec Cary Grant et Katharine Hepburn. On a un peu peur au début, ça frise le lourd (le golf, la voiture, la réception), puis tout d'un coup tout s'emballe et le délire monte comme une mayonnaise sans jamais retomber. La prestation de Katharine Hepburn est exceptionnelle, et Cary Grant est très bon. La scène finale est archi téléphoné, mais ce n'est pas bien grave.

Panique à l'hôtel 

Un film de William A. Seiter (1938) avec les Marx Brothers. Même si on est loin de se taper les mains sur les cuisses, même si c'est très théâtral ; même s'il n'y a aucun intermède musical, même si c'est moyen : ce film des Marx Brothers reste assez distrayant.

Ange 

Un film d'Ernst Lubitsch (1938) avec Marlène Dietrich. C'est remarquablement filmé avec des trouvailles géniales (le travelling devant les fenêtres du "314", les yeux étonnées de la marchande de violettes…) La direction d'acteur est remarquable dominée par une Marlène Dietrich époustouflante. Le film est d'une finesse et d'une intelligence remarquable, c'est aussi une leçon de vie et de réalisme. La jalousie ne sert à rien et on ne sait vraiment si la fin est un choix amoureux ou un gentleman agrément. (Quand Marlène expose à expose à Herbert Marshall les raisons qui font qu'elle n'a aucune raison de le quitter, c'est d'abord des raisons matérielles qu'elle invoque). Quelques défauts, il faut vraiment avoir fini de voir le film pour comprendre ce que Marlène venait fabriquer au 314 de la Rue de la Tour, c'est évidemment parfaitement volontaire de la part de Lubitsch mais même rétrospectivement la scène d'entrée manque de clarté, ça gêne un peu. Par ailleurs la première partie aurait pu être abrégée d'une dizaine de minutes. Nous étions vraiment très près du chef d'œuvre.

Têtes de pioches 

Un film de John B. Blystone (1938) avec Laurel et Hardy. On a un peu peur au début parce que ça commence par de l'humour très très lourd, mais le film monte comme une mayonnaise, plus ça avance et plus le délire prend forme pour terminer dans une folie pure où tout est permis. A signaler le "réalisme" des scènes de ménage où tout le monde parle en même temps sans s'écouter. Un bon moment de détente.

Les montagnards sont là 

Un film de John B. Blystone (1938) avec Laurel et Hardy et Della Lind. Décousu mais agréable, la partie chantée concourant au kitch de l'entreprise avec la participation de la soprano autrichienne Della Lind qui illumine le film de son sourire. Sinon certains gags valent leur pesant de cacahuètes comme celui de Laurel avec le Saint-Bernard, ou cette traversé de passerelle avec un piano au-dessus d'un précipice, ou dans le genre poétique l'orgue qui fait des bulles.

Gibraltar 

Un film de Fedor Ozep (1938) avec Viviane Romance et Eric Von Stroheim. Un très mauvais film d'espionnage. Après un début faussement prometteur malgré son lot d'invraisemblances, le film bascule en plein milieu dans le convenu, l'inintéressant et le grotesque. Aucune tension, aucun suspense, rien. Côté acteur, Roger Duschesne qui tient le rôle principal est lamentable. Seules consolations : Von Stroheim cachetonne pas trop mal et Vivianne Romance est très photogénique.

Les femmes collantes 

Un film de Pierre Caron (1938) avec Henri Garat, Jean Tissier et Armand Bernard. Dommage que la réalisation soit assez pauvre (certaines scènes sont ratées en raison d'une direction d'acteurs déficiente) parce que le film possède de solides atouts, Côté distribution si Henri Garat fait ce qu'il peut, Jean Tissier et Armand Bernard s'en donnent à cœur joie et c'est toujours un plaisir de les voir jouer la comédie. Quand à ces dames, elles sont plus charmantes les unes que les autres et paraissent s'amuser énormément (Mona Goya en tête) Quand à l'histoire on est très proche du burlesque, mais bon, Henri Garat ce n'est pas Groucho Marx non plus…. Les quelques réticences signalées n'empêchent pas de passer un excellent moment à la vision de ce film complètement dingue.

Le puritain  

Un film de Jeff Musso (1938) avec Jean-Louis Barrault, Pierre Fresnay, Vivianne Romance. Interprétation exceptionnelle de Jean-Louis Barrault, Pierre Fresnay et également très bon et Vivianne Romance sémillante. La critique du puritanisme et de son hypocrisie est très bien vue. Tout irait donc très bien si les seconds rôles n'étaient pas si caricaturaux voire dans certains cas absurdes (même Jean Tissier n'est pas bon, c'est dire). On aura le choix de trouver la petite musiquette amusante ou consternante. Encore un film récompensé par le prix Louis Delluc, on se demande pourquoi, cela dit, le film reste estimable et mérite amplement d'être vu.

Café de Paris 

Un film d'Yves Mirande (1938) avec Jules Berry, Carette, Piere Brasseur. C'est un polar a énigme et contrairement à d'autres du même genre, il est possible de trouver la solution (bon courage !) Mais c'est aussi un fabuleux film choral avec une description sans complaisance de la haute bourgeoisie. Le film au montage nerveux agit par plan court donnant ne véritable impression d'immersion dans ce Café de Paris. L'interprétation est globalement excellente, dominé par un Jules Berry, impérial, Brasseur est très bon mais Carette cabotine un peu trop. La distribution féminine est remarquable, ces dames redoublant de beauté, d'élégance et de talent avec Vera Korene (la femme de Lambert et maîtresse de Berry), Florence Marly (la maîtresse de Lambert) et Simone Berriau dans le rôle d'une jolie fêtarde cynique. On est a deux doigts du chef d'œuvre.

Cheri-Bibi 

Un film de Léon Mathot (1938) avec Pierre Fresnay. Un film bancal qui comprend quelques très bons passages (l'élimination du donneur) qui ne saurait en compenser les faiblesses : introduction confuse dans laquelle on mélange tous les personnages, interminables blablas en plans fixes dans la seconde partie, décors de studio fauchés, évasion finale grotesque. Fresnay vraiment pas fait pour ce rôle est méconnaissable et peu à l'aise.

Les nouveaux riches 

Un film d'André Berthomieux (1938) avec Raimu, Michel Simon. Raimu et Michel Simon tentent de nous faire oublier l'indigence du scénario (en gros gentil nouveau riche versus méchant nouveau riche) La très belle Betty Stockfeld est honteusement sous-exploitée et le jeune premier est parfaitement ridicule. Quant à la conclusion débile le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle est d'une ambiguïté qui ne vaut mieux ne pas creuser

Retour à l'aube 

Un film d'Henri Decoin (1938) avec Danielle Darrieux. Le pari n'était pas évident, tourner une histoire somme toute classique de désillusion autour d'une seule vedette ! Seulement la vedette c'est Danielle Darrieux et elle est sublime de beauté et de talent dans ce film. Le ton est donné dès le début, on fait dans le kitch avec ce mariage impossible, mais Decoin en superforme transcende tout ça avec maestria pour notre plus grand plaisir. Et il ose recommencer ensuite avec l'inauguration de l'arrêt du train en appelant à la rescousse les oies et les vaches (un moment on se croirait dans Duck Soup). Les choses sérieuses commencent avec le voyage de Darrieux vers Budapest ce qui permet au réalisateur de nous montrer qu'il peut aussi faire dans l'humour (la scène de la couronne mortuaire). Dans ses tribulations dans la capitale Darrieux joue étonnamment juste altérant la naïveté, l'émotion, la passion, l'insouciance et dans les dernières scènes la culpabilité (c'est quand même quelque chose de voir Darrieux se rouler par terre). Le film se terminera par une fin ouverte entre le grand benêt qui refuse d'en savoir davantage et Darrieux en pleine confusion mentale. Chef d'œuvre !

Le Schpountz 

Un film de Marcel Pagnol (1938) avec Fernandel. Si le film renferme quelques rares bonnes choses et une prétendue scène culte, il faut aussi faire avec des bavardages interminables (et le mot est faible) en plan fixe, des acteurs horriblement mal dirigées (pauvre Orane Demazis), des scènes ridicules et même (Pagnol oblige) des pleurnicheries gavantes.

La patrouille de l'aube  

Un film de Edmund Goulding (1938) avec Errol Flynn, David Niven, Basil Rathbone. Un honnête film de guerre qui n'a rien de grandiose mais qui se regarde sans déplaisir. Les personnages principaux frisent parfois le cliché voire la caricature, Flynn et Niven sont bons mais sans plus, Rathbone est excellent… les avions aussi ! La critique de l'absurdité de la guerre, et de l'héroïsme guerrier est bien là mais reste faible dans sa démonstration. On s'étonnera tout de même que des aviateurs appelés à effectuer des missions très dangereuses de bon matin passe une partie avancée de la nuit à picoler comme des trous. A noter qu'il n'y a pas une seule femme dans le film, même au loin dans la brume. Le film reste sympa, ce n'est pas un grand film de guerre, mais on ne s'ennuie pas.

Vedettes du pavé 

Un film de Tom Whelan (1938) avec Charles Laughton, Vivien Leigh, Rex Harrison. Un petit bijou du cinéma britannique d'avant-guerre qui vaut bien mieux que tous les "une étoile est née" du monde. La force principale du film vient bien sûr de ses deux vedettes dont les prestations sont exceptionnelles, Laughton est fabuleux mais on en a l'habitude. Plus étonnant est la prestation de Vivien Leigh, belle, fragile, mutine, talentueuse. L'histoire n'est pas sotte décrivant une femme dont l'ambition peut nuire à son entourage mais qui au fond n'est pas méchante, et un homme qui a du mal à prendre conscience de ses limites. Des films comme celui-là, ça se déguste !

Les disparus de Saint Agil 

Un film de Christian-Jaque (1938) avec Michel Simon, Erich von Stroheim, Armand Bernard, Robert Le Vigan, Mouloudji. Nous faire retrouver l'ambiance de l'enfance sans tomber dans la mièvrerie, je dis chapeau ! Si les interprétations sont excellentes, il faut noter celle de Michel Simon en prof alcoolique et surtout celle complétement décalée d'Armand Bernard (un acteur qui n'a jamais eu la notoriété qu'il méritait), en comparaison von Strohem peut paraître un peu fade. Bonne photo, bonne réalisation, scénario intéressant mais fin un peu bâclée

Prison sans barreaux 

Un film de Leonide Moguy (1938). De bonnes intentions, de belles héroïnes, mais un scénario trop manichéen, sans subtilité. Peu de gens connus sauf dans les rôles secondaires comme Ginette Leclerc, très mal dirigée, Marguerite Pierry jouant en deçà de ses possibilités. Ça se regarde mais ce n'est pas trop passionnant même s'il y a un peu plus de tensions vers la fin. Sinon la bande son de la version proposée par René Château est catastrophique

Les trois valses 

Un film de Ludwig Berger (1938) avec Yvonne Printemps et Pierre Fresnay. Filmé dans la foulée de de l'adaptation française de l'opérette d'Oscar Straus (les paroles des chansons sont d'Albert Willemetz), le réalisateur allemand a su conserver dans son film l'ambiance débridée voir hystérique de l'opérette et cela pour notre plus grand plaisir. Yvonne Printemps est tout simplement radieuse et Pierre Frenay impose sa classe. Alors que le scénario propose dans ses deux premières valses une défense du milieu du spectacle face aux préjugés ambiants, la troisième s'égare gentiment afin de finir un peu dans l'eau de rose, mais après tout est-ce si grave après 100 minutes de bonheur ?

La présidente 

Un film de Fernand Rivers (1938) avec Elivire Popesco et Henri Garat. Au départ il s'agit d'une pièce de boulevard à succès crée en 1913 par Hennequin et Veber (reprise par Jean Poiret en 1988) en 1938, Fernand Rivers, cinéaste discret nous le filme. Alors théâtre filmé ? Quelle importance puisque ça fonctionne et on s'amuse même si comme le veut le genre on reste à la limite de la morale bourgeoise sans jamais la franchir. Le vaudeville est facile mais fonctionne parfaitement et si on a connu Henri Garat plus inspiré, la présence magique d'Elvire Popesco vaut à elle seule la découverte de ce film oublié. Cela dit Pietro Germi reprendre le scénario en 1952 pour "Mademoiselle la présidente" et en fera un chef d'œuvre.

Riding the rails 

Un dessin animé de Dave Fleischer (1938) Dans ce petit dessin animé de 6 minutes en noir et blanc, le petit chien de Betty Boop tente de suivre sa maîtresse dans le métro. Hilarant et plein d'inventions, on remarquera que l'attitude des voyageurs dans le métro n'a pas changé depuis tout ce temps. La chute est à tomber !

Quadrille

Un film de Sacha Guitry (1938) avec Sacha Guitry, Gaby Morlay, Jacqueline Delubac. Sacha Guitry c'est un genre à lui tout seul. Alors bien sûr que c'est théâtral, personne ne peut avoir un sens des répliques aussi aiguisé. N'empêche que le trio d'interprètes est fabuleux, Guitry en véritable bête de scène, Gaby Morlay usant d'un jeu d'une modernité étonnante et Jacquine Delubac démontrant son charme fou ! Quant au fond il est fabuleux, cela nous change des pensums moralistes, le mariage n'est considéré que comme une formalité anecdotique, on distingue l'amour physique des sentiments (du moins on essaie) Et tout cela avec un décontraction, une bonne humeur, un festival de mon mots et de bonnes phrases, et cerise sur le gâteau, Ray Ventura à la baguette ! Un régal !

La Coqueluche de Paris

Un film de Henry Koster (1938) avec Danielle Darrieux, Douglas Fairbanks Jr, Mischa Auer.  C'est très frais, très léger, souriant, avec un fond d'immoralité réjouissante (il n'est pas interdit de penser qu'un Lubitsch aux commandes auraient pu encore davantage détourner le code Hayes) Cela dit Henry Koster est loin d'être un manchot, il nous filme ça a 100 à l'heure en mettant parfaitement en lumière une Danielle Darrieux comme on l'aime, ici en femme espiègle, vénale mais lucide et absolument craquante. Si Douglas Fairbanks Jr fait ce qu'il peut (eh oui ce n'est pas Melvin Douglas) la prestation de Mischa Auer dans le genre loufoque n'est pas mal du tout. Un film tombé semble-t-il dans les oubliettes mais qui se déguste comme une petite friandise.

Tricoche et Cacolet

Un film de Pierre Colombier (1938) avec Fernandel, Duvales, Elvire Popesco, Ginette Leclerc, Saturin Fabre. Un vaudeville raté malgré son potentiel, la faute en incombant à Fernandel et à Duvales Cabotiant à tout va et ne nous faisant jamais esquisser le moindre sourire. C'est d'autant plus dommage que ces dames s'avèrent brillante, Elvire Popesco très classieuse, et Ginette Leclerc qui respire la sensualité et qui nous pousse la chansonnette.

Laurel et Hardy au Far West 

Un film de James W. Horne (1937) avec Laurel et Hardy. Comme dans tous les Laurel et Hardy, c'est très inégal et même parfois lourd, mais la longue scène dans l'hôtel entre Laurel, Hardy, la charmante Sharon Lynn dans le rôle de Lola Marcel, et le tenancier sauve tout, le sommet étant le moment où Laurel se fait chatouiller par Lola. Guili guili

La femme en cage 

Un film de Raoul Walsh (1937) avec Lily Pons. Cette comédie musicale méconnue et complètement loufoque de Raoul Walsh est un régal. La vedette en est Lily Pons, eh oui la grande cantatrice d'opéra (soprano colorature) des années 1930-1950 avait non seulement du talent et un charme fou mais elle savait brillamment jouer la comédie, il faut la voir dans le rôle de Oogahunga, la femme-oiseau, où elle gazouille dans un langage fantaisiste offrant une prestation absolument hilarante et délicieuse. Et puis la voir à l'écran chanter l'air de la folie de Lucia de Lamermoor de Donizetti et "l'air de Titiana" de Mignon (d'Ambroise Thomas), quel bonheur ! Mais quel bonheur !

On the avenue 

Une comédie musicale de Roy el Ruth (1937) avec Madeleine Caroll. Roy del Ruth n'est pas un grand réalisateur et dans ce film le meilleur côtoie le moins bon. Si les morceaux musicaux chorégraphiés sont plutôt bons, ceux qui ne le sont pas tombent dans le sirop ou dans le ridicule (les insupportables Ritz Brothers). Quant à l'histoire elle n'est qu'un prétexte, et est à deux doigts de se terminer en mièvrerie s'il n'y avait le plan ultime aussi imprévu que génial. Le film possède malgré ses défauts quelques atouts de chocs , la présence de Madeleine Caroll, certains seconds rôles bien campés et la musique d'Irving Berlin.

Drôle de drame 

Un film de Marcel Carné (1937) avec Louis Jouvet, Michel Simon, Françoise Rosay, Jean-Louis Barrault… Sans doute le meilleur Carné/Prévert (Hôtel du Nord est un Carné/Jeanson) parce que ça ne se prend pas au sérieux et que ce film pourtant parfaitement maitrisé ressemble à une longue partie de chamboule-tout dans laquelle personne ne reste à sa place, chacun confond tout le monde en croyant tromper tout le monde. Les acteurs sont exceptionnels, les répliques fusent et les situations burlesques s'enchaînent. "Mais ça ne tient pas debout !" s'écrie le chœur de ceux qui s'obstinent à prendre le film au premier degré. Ben non, mais justement c'est fait exprès, et ça n'empêche pas le film d'être intelligent. L'une des perles du cinéma français d'avant guerre.

François 1er  

Un film de Christian-Jaque (1937) avec Fernandel. Ce film n'a qu'un seul défaut, Fernandel ne peut s'empêcher d'en faire de trop. Sinon ce film est un joyeux bazar bourré d'anachronismes dont certains valent leur pesant de cacahuètes comme les courtisans de François 1er dansant la java et le charleston. Le film est bien réalisé et bien photographié, la direction d'acteurs assez bonne malgré quelques faiblesses, quelques gags tombent à plat, mais c'est là le lot de tous les films comiques. On notera l'hommage que rend Christian-Jaque au film d'Alexander Korda "Henri VIII", puisque Fernandel jouant un lapsus appelle ce dernier "Laughton", une brève mais très efficace critique de l'inquisition (costumée façon Ku Klux Klan) portant non seulement sur sa cruauté mais sur sa soif de pouvoir, et aussi un ode au libertinage fièrement revendiqué par la belle Ferronnière (la charmante Mona Goya) qui nous explique que coucher trop souvent avec le même amant finit par être lassant et qu'elle consent à aimer passionnément Honoré (Fernandel) pendant… quinze jours. Une morale qui semble fort bien convenir à Honoré puisqu'il demandera qu'on le renvoie de nouveau à cette époque. Excellent film.

Les Gangsters de l'expo 

Un film d'Emile-Georges De Meyst (1937) Des dialogues qui ne visent pas bien haut, des acteurs en roue libre où l'excellent (sublime Christiane Delyne !) côtoie le pire. Et pourtant le film est attachant, l'intrigue est simpliste mais fonctionne. Plusieurs scènes ont été tournées en réel dans le cadre de l'Exposition Universelle de Paris en 1937 ce qui ajoute un intéressant côté documentaire au film. A signaler deux scènes de cabaret avec la danseuse Betty Hoop (sic) des Concerts Mayol, qui dans le second numéro nous offre une petite danse, les seins à l'air. Ça n'a rien d'inoubliable, mais on passe un bon petit moment.

J'ai le droit de vivre  

Un film de Fritz Lang (1937) avec Henry Fonda et Silvia Sidney. Un polar d'une noirceur absolue qui frôle le mélodrame, (jamais l'expression faire porter le chapeau n'a si bien été illustré) mais le savoir-faire du réalisateur fait que tout cela est parfaitement réalisé. Fonda incarne avec brio un type pas trop malin que lequel le destin s'acharne et Silvia Sidney une amoureuse tout à fait crédible. La mise en image est brillante, le scénario intelligent, bref un chef d'œuvre.

Un jour aux courses 

Un film de Sam Wood (1937) avec les Marx Brothers et Maureen O'Sullivan. On craint le pire au début avec la présence d'un bellâtre et un gag de Groucho et Chico ne brillant pas par sa finesse. Mais tout se refrappe très vite avec quelques morceaux de bravoures inoubliables comme la scène du bal (véritable festival ou les frères Marx montre chacun leur talents, et voir Groucho danser c'est quand même quelque chose !), la longue séquence de l'hippodrome, et le final délirant et endiablé. Alors bien sûr que ça a ni queue ni tête, mais puisque c'est la recette gagnante des Marx…

Au service de sa majesté 

Un film de Raoul Walsh (1937) Film de propagande pour l'armée britannique, sur le thème "l'armée fera de vous un homme" Raoul Walsh s'est bien amusé. Le film tournée en Angleterre bénéficie d'une liberté de ton étonnante et si on excepte l'interminable défilé militaire, il est agréable à regarder, l'acteur principal (Wallace Ford) est bon et l'interprétation féminine est très agréable (Grace Bradley et Anna Lee)

Pépé le Moko 

Un film de Julien Duvivier (1937) avec Jean Gabin, Dialo, Mireille Balin, Line Noro (Dialogues de Henri Jeanson). Si le pitch est relativement simple, un caïd planqué dans la casbah d'Alger qui se fait piéger par la police suite à un coup de foudre et ses complications... mais la réalisation est bluffante avec la reconstitution de la casbah en studio, l'ambiance est très bien rendue et certaines scènes sont de véritables morceaux d'anthologie (l'exécution du premier indic). Gabin est impérial, personnage complexe, macho, autoritaire fort en gueule mais sachant faire preuve de tendresse et même de fantaisie. Bref on est loin de tout manichéisme ! Luca Gridoux nous joue un personnage aussi complexe que retors et visqueux, quant à Charpin en traitre minable, on le prendrait presque en pitié tellement il est dans son rôle. Les femmes jouent un rôle important dans ce film puisque c'est le belle Mireille Balin qui sans le vouloir conduira Gabin à sa perte, et son rôle de demi-mondaine qui ne s'en laisse pas conter est bien rendue tout comme celui d'Inès (la trop rare Line Noro), très belle dans son rôle de femme amoureuse et soumise. Quant à Frehel qui vient nous pousser la chansonnette, elle réussit à nous émouvoir en jouant quasiment son propre rôle ! Evidemment on pourra s'étonner que Gabin meurt aussi vite après s'être ouvert les veines, mais on pardonne. Une interprétation efficace, de bonnes répliques (les textes sont de Jeanson), des personnages haut en couleur, un grand film !

La Grande Illusion  

Un film de Jean Renoir (1937) avec Jean Gabin, Pierre Fresnay, Erich von Stroheim, Marcel Dalio, Dita Parlo, Julien Carette. Considéré par certains comme l'un des 10 meilleurs films de tous les temps, il convient sans doute aujourd'hui de relativiser, tout en affirmant qu'il s'agit d'un excellent film. Le jeu de Pierre Fresnay dénote quelque peu (mais sans doute est-ce volontaire ?). L'évasion proprement dite (mais ce n'est pas le vrai sujet du film) est assez abracabrantesque et ce qui s'en suit est en rupture de ton totale avec le reste du film. Ces réticences mises à part, ce film fait preuve d'un humanisme militant traité avec beaucoup d'intelligence. Mais les deux sommets du film sont peut-être ailleurs : L'un quand les prisonniers déballent une caisse d'accessoires et de vêtements féminins qu'ils découvrent avec un plaisir fétichiste qui prend son point culminant quand l'un d'entre eux se travesti. L'autre est la scène où Carette fait son numéro sur scène (Marguerite, donne moi ton cœur) rejoint par une dizaine de prisonniers en travestis.

L'homme de nulle part 

Un film de Pierre Chenal (1937)  Le film partait avec un atout considérable : un excellent roman de Pirandello (Feu Mathias Pascal) , restait à savoir comme Chenal allait l'adapter et force est de constater qu'il n'a pas raté son coup, le ton très légèrement décalé donne à l'ensemble un ton savoureux renforcé par une excellente interprétation (Pierre Blanchar et Robert Le Vigan), par la beauté des actrices (Isa Mirande, Ginette Leclerc, Margo Lion), la qualité de la bande son (Jacques Ibert) et l'excellence de la photographie. Délicieux même si c'est un peu trop théâtral !

Pension d'artistes 

Un film de Gregory La Cava (1937) avec Katharine Hepburn et Ginger Rodgers. Tiré d'une pièce de théâtre, c'est choral et excessivement bavard à ce point qu'une partie des dialogues nous passent au-dessus de la tête. C'est très long à démarrer et l'intrigue est peu intéressante d'autant que le virage à la fin vers le mélodrame est carrément pénible. Côté actrice si Ginger Rodgers est bien (étonnante même), Katharine Hepburn qui a, il est vrai un rôle difficile (parce qu'improbable et limite ridicule), est assez peu convaincante. Une déception.

La joyeuse suicidée 

Un film de William Wellman (1937) avec Carole Lombard et Fredric Marsh. Il y a quelque chose de Lubitschien dans ce film en technicolor où l'intrigue savoureuse est basée sur le mensonge et l'hypocrisie. L'interprétation de Carole Lombard est fabuleuse. Nous avons là un film amusant, extravagant, intelligent et maniant l'humour noir avec efficacité (la scène des enfants chanteurs est un vraie morceau d'anthologie)

Le fauteuil 47 

Un film de Fernand Rivers (1937) avec Françoise Rosay, Raimu, Henri Garat. Les acteurs sont bons mais la pièce est mauvaise, d'une part parce que sa conclusion est prévisible mais surtout parce qu'elle abuse de ce procédé frisant la malhonnêteté de nous montrer des situations audacieuses sous un jour amusant pour ensuite les dénoncer en se livrant à une défense (ici grotesque) de l'ordre moral bourgeois… qui bien sûr triomphe… Nia-nia-nia

Prends la route 

Un film de Jean Boyer (1937) avec Jacques Pils et Georges Tabet. Une histoire complètement farfelue interprétée par des comédiens déchaînées (surtout Tabet), les chansons sont amusantes, les situations invraisemblables voire même surréalistes (l'épisode du passage à niveau), les filles sont jolies, (sublime Colette Darfeuil) la réalisation est correcte et même parfois inventive (les tableaux qui parlent), Bref on passe un bon moment.

Le porte veine 

Un film d'André Berthomieu (1937) avec Lucien Baroux. Une fable farfelue qui fonctionne à 100 à l'heure sans un moment de répit. C'est léger, agréable, rythmé. Baroux est excellent et ces jeunes filles sont charmantes. Même si ça n'a rien de sublime, (on peut en effet trouver la fin quelque peu bâclée) ce film rempli de trouvailles est injustement méconnu.

Gribouille  

Un film de Marc Allegret (1937) avec Raimu, Michèle Morgan, et Carette. Parlons d'abord des acteurs puisque dans ce film Raimu crève encore une fois l'écran de son talent. En revanche Michèle Morgan peine à être à la hauteur, (17 ans au moment du film mais elle en fait 10 de plus),  Carette est transparent et les seconds rôles sont dans l'ensemble assez fade mais les amateurs de chansons rétro auront reconnu la belle Lyne Clevers en prostituée, témoin au procès. La mise en scène est assurée sans temps mort et avec un bon sens de la progression dramatique. Le scénario est bancal, c'est du Marcel Achard, auteur doué mais peu méticuleux, ainsi nous n'aurons jamais la réponse à certaines questions laissées en suspens pendant le procès, ainsi la scène de l'église est malhabile (Carette n'avait nul raison de s'y rendre) et la situation de Morgan dans le magasin de Raimu n'est pas parfaitement exploitée. Passons aussi sur la fausse fin, Achard et Allegret n'ont pas voulu que ça finisse en drame, il n'aurait plus manqué que ça ! Malgré ses défauts le film se regarde sans déplaisir (grâce à Raimu) mais ça n'a rien de génial.

Abus de confiance 

Un film d'Henri Decoin (1937) avec Danielle Darrieux et Charles Vanel. Le film est imprégné d'une certaine morale catholique et d'un puritanisme assez naïf. Voilà qui pourrait plomber ce film, mais il tellement bien fait qu'on s'en fout. Darrieux y est exceptionnelle dans ce rôle difficile. La direction d'acteurs est impeccable et la réalisation soignée. Ce film est aussi un plaidoyer pour la compassion, une vertu trop souvent oubliée au cinéma

Une étoile est née 

Un film de William Welman (1937) avec Fredric March. Pas grand-chose à sauver de cette purge insipide tournée dans un affreux technicolor. Le début donne le ton, un interminable dialogue d'une grand-mère donneuse de leçons à la limite de l'insupportable. Quant à l'actrice principale Janet Gaynor, elle n'a pas grand-chose pour elle. Reste Fredric March, mais on est bien loin de ses prestations dans Mamoulian ou Lubitsch. Les scénaristes ont voulu faire un brin d'humour, ça tombe à plat, et puis on ne peut s'empêcher de penser au poids de l'autocensure en plein code Hayes. Une histoire sur Hollywood dans laquelle personne ne couche hors mariage ! On nous prend pour des imbéciles ! Je n'ai retenue qu'une seule scène celle du standard avec les petites lumières : c'est bien peu. Et pour finir de nous achever l'insupportable vieille peau du début vient conclure le film en dépassant les limites du ridicule.

Jeune et innocent 

Un film d'Alfred Hitchcock (1937). C'est très série B, eu égard aux moyens employés et au casting. De plus l'intrigue policière est farfelue (l'assassin vole une gabardine pour utiliser la ceinture comme arme du crime, puis refile le vêtement à un clochard qui collabore en se souvenant d'un indice miracle et du tic nerveux de son donateur). Ça aurait pu donner n'importe quoi, d'autant que les facilités de scénarios pleuvent ! Mais c'est du Hitchcock et c'est parfaitement maitrisé y compris dans la direction d'acteurs et dans la narration entrecoupée de coups de théâtre, de suspense mêlé d'humour (cf la scène de l'anniversaire chez la tata) jusqu'au dénouement complétement improbable mais qu'Hitchcock transcende dans un plan séquence de folie.

Mademoiselle ma mère 

Un film de Henri Decoin (1937) avec Danielle Darrieux, Pierre Brasseur, Pierre Larquey. Le film a le défaut de pas mal de comédies bourgeoises : d'un côté on montre du subversif et de l'amoral, et de l'autre on essaie de se raccrocher à la morale bourgeoise, Un numéro d'équilibriste pratiquement impossible et auquel personne ne croit, même avec le talent de Decoin qui se rattrape grâce à des scènes inventives (le lit tournant)  et en misant à fond  sur le talent de Danielle Darrieux qui se livre ici à un abattage qui fait plaisir à voir en gesticulant, en hurlant, en chantant, en dansant… et en nous charmant. Pas un grand film mais Darrieux le sauve malgré la fin idiote

Cinderella 

Un film de Pierre Caron (1937) avec Joan Warner, Christiane Delyne. En matière de comédie musicale française des années 1930, on a fait mieux (Dédé, Un soir de réveillon, Il est charmant, Un mauvais garçon…) mais celle-ci reste à un bon niveau, Joan Warner tout auréolée du scandale pour atteinte aux bonnes mœurs que lui infligea un triste sire, est une excellente danseuse mais une piètre comédienne à ce point quelle se fait voler la vedette par la très gouailleuse Christiane Delyne. Comme dans beaucoup de comédies musicales le scénario n'a pas grande importance mais l'atterrissage de nuit en parachute chez un astronome, il fallait le trouver. Il y a un zeste d'érotisme si on est attentif aux arrières plans où l'on découvre quelques femmes dénudées, il y a aussi le collant peu opaque de Christiane Delyne et les cuisses de Joan Warner en Vénus. Nous avons un peu d'humour avec un Paul Faivre complètement allumé. Les numéros musicaux sont inégaux et disparates mais le bon l'emporte, Joan Warner faisant bien son boulot et puis il y a Suzanne Dehelly qui nous chante "Il a mal aux reins, tintin", un grand moment de n'importe quoi ! Ne boudons pas notre plaisir, surtout pas !

A l'auberge du paradis

Un film suédois de Weyler Hildebrand (1937) un vaudeville assez lourdingue dans sa première partie, le film devient intéressant au début de la seconde moitié avec un rôle travesti classique mais qui le fait bien, pour ensuite retomber dans une certaine médiocrité… Sinon Greta Ericson est bien jolie et elle a un très beau maillot de bain !

Les Bonnes Manières de Sara

Un film suédois de Gustaf Molander (1937) avec Tutta Rolf. C'est excessivement bavard surtout dans sa première partie et pour tout dire c'est vraiment nunuche. N'empêche qu'en plein milieu du film nous avons droit à une scène chantée magnifiquement interprétée par la très belle Tutta Rolf suivi d'une séquence burlesque ou Tutta Rolf transforme une partie de l'appartement en station de sport d'hiver... Alors rien que pour ça....

Rendez-vous Champs-Élysées

Un film de Jacques Houssin (1937) avec Jules Berry, Pierre Larquey, Micheline Cheirel, Jean Témerson. Les années 30 eurent aussi leur navet. Ici rien ne fonctionne, malgré le cabotinage de Jules Berry et le charme de Micheline Cheirel. L'idée de base aurait pu fonctionner, mais son déroulé est d'une stupidité assez confondante (Et ne parlons même pas de la conclusion), on a droit à un Pierre Larqué en roue libre et mauvais comme cochon, quant à Jean Témerson si sa prestation est amusante au début elle devient débile en fin de parcours... Pas grand-chose à sauver.

7 hommes… une femme 

Un film d'Yves Mirande (1936) avec Vera Korene et Pierre Larquey. Le film vaut le déplacement rien que pour Vera Korene, actrice fabuleuse et femme magnifique. Sur le papier le pitch du film est prometteur, mais le film tombe trop dans la caricature grossière, là où il aurait fallu de la subtilité, ce qui fait que ni le député, ni le romancier, ni le musicien ne sont crédibles, Pierre Larquey malgré un excellente prestation ne l'est pas davantage et le film perd de son intérêt allant doucement jusqu'à sa fin attendue.

La révolte des zombies 

Un film de Victor Halperin (1936). Ici les zombies ne sont pas des morts vivants mais des personnes dont on a assujetti la volonté. Le scénario est peu intéressant et le réalisateur a dû en perdre des pages, tellement les ellipses sont nombreuses et obscurcissent le récit. Ajoutions à cela des personnages principaux à la mentalité douteuse, une direction d'acteur moyenne et une fin bâclée. A sauver le sourire de l'actrice principale et une bonne scène de filature de nuit dans les marais.

Les poupées du diable 

Un film de Tod Browning (1936) avec Lionel Barrymore et Maureen O'Sullivan. Le film se passe en France, l'un des banquiers se nomme Monsieur Radin et le petit ami d'O'Sullivan se prénomme Toto ! Voilà qui ne fait pas très sérieux, pourtant ce film est un vrai petit bijou du cinéma fantastique, simplement parasité par quelques scènes intimistes un peu lourdes. Mais sinon, Barrymore est parfait (ce qui n'est pas toujours le cas)Rafaela Ottiano qui a des faux airs de la fiancée de Frankenstein crève l'écran et Maureen O'Sullivan dans un petit rôle est mignonne comme tout, mais c'est surtout dans les effets spéciaux que le film excelle. Les deux séquences où les "poupées" s'en vont accomplir leur mission sont non seulement superbes du point de vue des trucages, mais elles sont tournées avec une inventivité jubilatoire et un sens du suspense très efficace.

Quatre de l'espionnage 

Un film d'Alfred Hitchcock (1936) avec Peter Lorre et Madeleine Caroll. Si on regarde ce film comme une histoire d'espionnage, on jugera l'intrigue vraiment faible, en revanche si on le regarde comme un film sur les milieux de l'espionnage (ce qui n'est pas la même chose) cela devient intéressant. (ce n'est pas si souvent qu'on nous montre des espions éliminant froidement un quidam par erreur) Mais comme au départ on ne sait pas trop, le film souffre de cette ambiguïté. L'autre défaut du film est le personnage incarné par Peter Lorre, sorte d'Ovni égaré dans l'univers d'Hitchcock et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il fait tâche, la touche comique qu'il est censé apporter manquant de subtilité. Sinon il faut souligner le rôle magistral tenu par la très belle Madeleine Caroll (qui domine la distribution) ainsi que la puissance de certaines scènes proprement hallucinantes (le montage parallèle entre le meurtre en montagne et le petit chien)

Le Crime de monsieur Lange  

Un film de Jean Renoir (1936) avec Jules Berry, Florelle. C'est une fable ! Elle est d'une naïveté désarmante et d'un manichéisme confondant. Pourtant le film a des côtés attachants, la réalisation est excellente, la direction d'acteurs également. Jules Berry est grandiose (Il sauve le film à lui tout seul) et les femmes sont jolies (Florelle en tête), Certaines scènes sont assez drôles (le pépé qui chante "C'est la nuit de Noël") voire surréaliste (le dialogue entre Berry et le curé). Donc au final une impression mitigée : ça se laisse voir mais comparé à ce que fera Renoirdans les années suivantes, il n'y a pas photo.

La voie lactée (la soupe au lait)  

 Un film de Leo McCarey (1936) avec Harold Llyod. De très bon dialogues avec une grivoiserie pas si courante à cette époque, quelques scènes fabuleuses comme l'arrivée de Llyod a une réception précédé d'une fanfare d'écossais en kilt avec cornemuse, pas mal de situations joyeusement absurdes. Tout cela est assez amusant mais malheureusement plombé par quelques dialogues bien trop longs (on sent qu'il s'agit de l'adaptation d'une pièce de théâtre)

Un mauvais garçon 

Un film de Jean Boyer (1936) avec Danielle Darrieux et Henry Garat. Jean Boyer n'est pas un grand nom du cinéma, mais ce qu'il faisait, il le faisait bien, ce film bénéficie donc d'une réalisation très honnête, d'une excellente photographie et d'une direction d'acteurs sans faute. Henry Garat est excellent, mais c'est surtout Danielle Darrieux, remarquablement mise en valeur et absolument craquante qui crève l'écran. L'histoire est gentillette et donne lieu à des scènes mémorables comme le bal musette ou cette partie de cartes avec Darrieux coiffée d'une casquette, cigarette au bec et demandant qu'on "ferme la lourde". Et puis il y a la musique de Georges Van Parys (qu'on aperçoit dans un petit rôle de simplet). Bref ce film est un enchantement sauf qu'il y a un hic : le twist final, où on atteint les sommets de l'imbécillité. Mais cette fin paraît tellement artificielle et décalée qu'elle ne gâche ni le film ni le plaisir de s'en être régalé.

Sur les ailes de la danse (Swing Time) 

Un film de George Stevens (1936) avec Fred Astaire et Ginger Rogers. On excusera facilement le scénario manifestement écrit sur un coin de table à 4 heures du matin, mais plus difficilement le rôle idiot du second rôle masculin. Fred Astaire reste bon même en dehors des numéros de danse (où là, il n'est pas bon, il est excellent !) et puis il y a Ginger Rogers, tout simplement fabuleuse, sexy, éblouissante. A noter la fabuleuse scène dans la neige (malgré son final simplet), et la chorégraphie qui frise le vertige et puis il y a la musique, c'est du Jerome Kern (l'auteur de Show Boat quand même !). Avec un scénario un peu plus élaboré et quelques danses en plus on aurait tenu là un chef d'œuvre.

Marie Stuart  

Un film de John Ford (1936) avec Katharine Hepburn. Une belle photographie, de beaux cadrages et surtout une interprétation magistrale de Katharine Hepburn, et si Florence Eldridge, ne démérite pas, le casting masculin déçoit notamment March et Caradine qui se croient au théâtre (et ne parlons pas du type qui joue le prêcheur…). Pas mal de longueurs et de blablas auraient pu être évités et puis Ford ne peut s'empêcher de filmer des défilés militaires, c'est une manie. Le final ne manque pas de panache, il faut bien l'avouer. Beaucoup de défauts mais ça reste un bon film, intéressant si l'on s'intéresse à l'Histoire et à … Katharine Hepburn.

Faisons un rêve 

Un film de Sacha Guitry (1936) avec Lui-même, Raimu et Jacqueline Delubac. Ça se déguste comme une friandise ! Voir jouer Sacha Guitry avec autant d'aisance est un authentique moment de bonheur et la scène centrale où il est seul (avec son téléphone) est véritable morceau d'anthologie. Jacqueline Delubac lui donne la réplique avec énormément de talent, quant à Raimu, il est égal à lui-même c'est à dire excellent. Théâtre filmé ? Sans doute, mais c'est quand même du cinéma (même si on peut reprocher quelques plans figés au début). Le scénario est un vaudeville adapté d'une pièce que Guitry avait créé en 1916, il est bien sûr aussi jubilatoire que délicieusement immoral jusque dans sa dernière réplique : "C'est vrai nous avons toute la vie ?"  "Mieux nous avons 2 jours !" A remarquer dans le prologue la présence d'une véritable brochette de guest-stars parmi lesquelles Arletty et Michel Simon.

J'ai gagné un million ! 

Un film d'Og Calster (1936). Film 100 % bruxellois qui peut éventuellement se regarder comme un documentaire d'époque sur les rues de Bruxelles, car c'est bien son seul intérêt, car si le film bénéficie d'une prises de vues correctes, du point de vue de la mise en scène, du scénario, de l'intérêt qu'il suscite et "de l'humour" qu'il dégage on touche le fonds.

Le général est mort à l'aube  

Un film de Lewis Milestone (1936) avec Gary Cooper et Madeleine Carroll. Les amateurs de vraisemblance risquent de manger leur chapeau, cette bonne série B est aussi réaliste que Tintin et le Lotus bleu ! On a ainsi droit à une scène de "haut les mains" en cascade" complètement burlesque (même s'il y a un mort) et ne parlons pas de la fin, qui n'est qu'un grand n'importe quoi complètement assumé. Vu de cette façon, c'est très bon, Gary Cooper est excellent en "aventurier démocrate" (un concept intéressant !) et d'une décontraction désarmante, Madeleine Caroll est parfaite en femme fatale superbement photographiée, quant aux chinois ce sont de vrais chinois de bande dessinée (je vous dis, c'est le Lotus bleu). Cette fantaisie n'empêche pas Milestone de nous tourner tout ça avec un talent fou et de nous livrer quelques innovations complètement étonnantes à l'instar d'un nouveau type de fondu (le fondu poignée de porte qui se transforme en boule de billard) ou d'un split screen en 5 morceaux avec actions sur les coins des écrans. Délectable !

Mon père avait raison 

Un film de Sacha Guitry (1936) avec lui-même et Jacqueline Delubac. On est ici réellement dans le théâtre (bien) filmé avec une caméra assez paresseuse. Le film adapté d'une pièce de l'auteur de 1919 vaut surtout par le jeu de Sacha Guitry dont l'aisance est proprement stupéfiante, à tel point que le reste de la distribution semble écrasé. Le scénario est constitué d'une série de dialogues dont les propos sont intéressants pourvu que l'on partage l'épicurisme de Guitry, mais ont tendance à tirer à longueur.

La fille du bois maudit  

Un film en technicolor de Henry Hathaway (1936) avec Henry Fonda, Fred McMuray et Silvia Sidney. Quand on comprend ce qu'est le sujet (une querelle de clocher qui tourne en vendetta), on se dit que ça va être du téléphoné. Or force est de constater qu'Hathaway maitrise globalement son affaire. De plus le film nous offre des scènes assez rares (le gosse dans l'engin de chantier). L'interprétation est bonne et tout particulièrement celle de Silvia Sidney dont le rôle est assez complexe. Bien sûr, on pourra regretter la fin, demi happy-end puisqu'accompagné d'un drame, mais un peu trop sucré quand même. Globalement c'est une plutôt une bonne surprise ! De plus ce premier film tourné en extérieur en couleur est esthétiquement pas mal du tout. (PS : Le film inclus quelques passages musicaux, qui sont franchement mauvais)

La Charge de la brigade légère  

Un film de Michael Curtiz (1936) avec Errol Flynn et Olivia de Havilland. Que la vérité historique soit plus que romancée n'a aucune importance, le cinéma a tous les droits pourvu qu'il ne tombe pas dans l'imposture. Ici le triangle amoureux s'intègre parfaitement à cette aventure militaire à la mise en scène magistrale par les moyens mis en œuvre et géniale par l'utilisation de ces moyens. Du grand spectacle, une interprétation tout à fait à la hauteur d'Errol Flynn et une Olivia de Havilland au ton très juste. Un chef d'œuvre !

San Francisco 

Un film de W. S. Van Dyke (1936) avec Clark Gable et Jeannette MacDonald. J'adore Jeannette MacDonald et la voir et l'entendre chanter est en enchantement. Le souci c'est que la propagande religieuse et moralisatrice nauséabonde distillée au pas de charge par un Spencer Tracy en curé de choc "exalté et fier de l'être" devient assommante et ridicule et finit par tuer le film.

La légion des damnés 

Un film de King Vidor (1936) avec Fred Mac Murray. Lamentable et insupportable, ce film n'a rien pour lui. Après un préambule pompeux de suffisance et patriotard, il faut se farcir les clowneries de Jack Oakie, on y ajoute un sale gosse tête à claque, un racisme anti-indien puant, des personnages psychologiquement plats… une scène de tribunal d'une bêtise à peine croyable, on n'en finirait pas mais citons tout de même cette scène où les indiens font dégringoler des blocs de pierre d'un mètre cube sur les yankees. Parce que c'est bien connu en haut des pentes il y a une réserve inépuisable de blocs de pierre ayant tous la même dimension. L'un des plus mauvais westerns que j'ai eu l'occasion de voir

Toi, c'est moi 

Un film de René Guissart (1936) avec Jacques Pills, Georges Tabet, Pauline Carton. Les rabat-joie y verront du colonialisme voire du racisme et auront tout faux. Ce film n'est rien d'autre qu'un vaudeville farfelu au rythme endiablé, inspiré de l'opérette éponyme crée en 1934 par Moyses Simon et comportant plusieurs morceaux de bravoure musicaux comme "Toi, c'est moi" ou "Sous les palétuviers". Pauline Carton trouve là un de ses meilleurs rôles et montre qu'elle pouvait jouer autre chose que la bonne de service. Les deux jeunes filles Claude May et Junie Astor sont tout à fait à la hauteur de Simone Simon et Lyne Clevers qui avaient créé les rôles à la scène. Le film fait preuve d'une décontraction sexuelle assez étonnante, Claude May se baigne nue, Carton se marie mais déclare qu'elle n'aurait rien contre un mariage à trois, il y a deux flirts interraciaux, et quand Tabet répond à Astor qu'il lui faut attendre les formalités d'usage avant de consommer celle-ci se met à chanter "Pourquoi faut-il lorsque l'on s'aime, remettre au lendemain…" La réalisation n'a rien de géniale mais Guissart connait néanmoins son boulot. Tout juste faut-il déplorer la post synchronisation défaillante de la première chanson. Finalement ce film qui affiche clairement le second degré avec un crocodile en caoutchouc est un concentré de bonne humeur.

Aventure à Paris 

Un film de Marc Allegret (1936) avec Jules Berry, Lucien Barroux. Du bon et du moins bon dans ce film un peu bancal. Ça commence très mal avec cette mauvaise et interminable scène de sonneur de trompette. De plus le film est excessivement bavard et l'histoire ne vole pas bien haut, malgré quelques situations cocasses. A retenir le jeu des acteurs, Berry est une fois de plus grandiose, Barroux se débrouille plutôt bien, mais la surprise vient de la très jolie Danielle Parola qui joue un personnage fort et dont l'interprétation est étonnante. Quant à Arletty, elle n’apparaît pas au mieux de sa forme. On notera une trop courte mais jolie scène de cabaret au début et l'apparition d'Arletty dans l'orchestre de Ray Venture, scène écourtée, on se demande bien pourquoi. Moyen.

Monsieur Personne 

Un film de Christian-Jaque (1936) avec Jules Berry. Jules Berry cabotine mais il le fait si bien qu'il en devient un spectacle à lui tout seul, la mise en scène est très correcte ainsi que la direction d'acteurs, Josseline Gaël est charmante et se révèle une excellente comédienne. Le scénario est passionnant avec cependant une certaine confusion pour ce qui concerne la dernière partie. Pas parfait donc mais on passe un excellent moment.

Les chemins de la gloire 

Un film d'Howard Hawks (1936) avec Fredric Marsh et Lionel Barrymore. Certes les scènes d'action ne sont pas si mal, mais c'est le scénario qui est d'une indigence assez rare. On croit que le film va se baser sur la rivalité entre deux officiers, d'autant qu'ils en pincent tous les deux pour la même donzelle. Admettons, mais voilà que se pointe Lionel Barrymore, et c'est pitié de voir ce grand acteur jouer ici un rôle d'une débilité absolu, à ce point que les séquences avec lui en deviennent insupportables. Et comme si ça ne suffisait pas on nous ajoute une longue prière à la "vierge Marie". Pour ceux qui considèrent Hawks comme un grand réalisateur, je leur conseille de visionner la scène du papier qui brule. On a donc un papier que Barrymore aimerait voir brulé, c'est idiot mais la question n'est pas là, Hawks commence par nous montrer le feu de la cheminée en gros plan, il suffisait par exemple d'un courant d'air opportun et l'affaire était pliée de suite, ben non Hawks ne fait pas ça, le courant d'air emporte le papier à un mètre de la cheminée, et s'en suit un bavardage nunuche de cinq minutes sur le pourquoi du comment de la chose complétement inutile, avant que je vous le donne en mille, le papier finisse par bruler. L'un des films de guerre les plus lamentable que j'ai eu l'occasion de regarder.

Not Now (Betty Boop

Un DA de 7 minutes de Dave Fleischer (1936) Le chat est très amusant, sinon pas de quoi en fouetter un, d'autant qu'on voit très peu Betty dans cette animation

Les temps modernes 

Un film de Charlie Chaplin (1936) avec Charlie Chaplin et Paulette Goddard. Parfait d'un bout à l'autre avec des gags et des séquences millimétrées, on a un peu peur avec l'apparition de Paulette Godard, que le film tombe dans le mélo, mais Chaplin évite le piège et l'actrice est rayonnante. Le film est un catalogue d'inventivité dont certaines à la limite du surréalisme comme la machine à manger. Le sommet de film reste la chanson en yaourt, mais il y en a tellement d'autres, la grande scène du plateau avec le canard rôti, la manif qu'il dirige sans le savoir, mais l'une de mes préférés restera le gruyère avec les trous au vilebrequin.

Le mort en fuite 

Un film d'André Berthomieu (1936) avec Jules Berry et Michel Simon. Pour que Berthomieu réussisse un film il lui faut un bon scénario et de bons acteurs. Et c'est le cas pour cette comédie au rythme trépidant plutôt bien écrite et portée par Berry et Simon, deux monstres sacrés du cinéma français de l'époque, quand à dire comme le font les esprits chagrins qu'ils cabotinent, quelle affaire puisqu'ils le font si bien et sans jamais se moquer de leur public. A noter une bonne musique de Marcel Lattes.

Mister Flow 

Un film de Robert Siodmak (1936) avec Edwige Feuillère, Fernand Gravey, Louis Jouvet. Un petit bijou de fantaisie loufoque sous prétexte d'intrigue policière dialogué par Henri Jeanson en pleine forme (certaines répliques sont à tomber !) et mis en scène au pas de charge par Siodmak. Le montage est nerveux, l'action pétillante comme du champagne, on ne s'ennuie pas une seule seconde et les interprètes sont formidables, Edwige Feuillère nous fait un numéro extraordinaire à ce point que Gravey a du mal à suivre (mais il s'en sort) Jouvet n'a pas un grand rôle mais quel prestation ! On a vraiment l'impression que toute l'équipe s'est follement amusé pendant le tournage. Et l'intrigue ? Je ne connais pas l'œuvre originale de Gaston Leroux, mais Jeanson a choisi de la rendre volontairement incompréhensible et farfelue, d'ailleurs dans la séquence du procès, il se moque de son propre scénario par la voie du président du tribunal. Un film injustement méconnu qu'il est grand temps de (re) découvrir.

Annie du Klondike 

Un film de Raoul Walsh (1936) avec Mae West et Victor McLaglen. Raoul Walsh n'est pour rien dans cette cuterie, Mae West ayant écrit le scénario et les dialogues, elle aurait mieux fait de s'abstenir tant le résultat est catastrophique. Outre le fait que l'histoire ne passionne jamais, et que Mae West n'y est pas à son avantage, c'est bien une œuvre de propagande religieuse où se mêle salutisme et moralisme de catéchisme, le tout chaussé de gros sabots, qu'on veut nous imposer. Alors non merci ! Quant à ceux qui y ont vu une comédie, grand bien leur fasse.

Sweeney Todd: The Demon Barber of Fleet Street

Un film de George King (1936) avec Tod Slaughter. Evidemment quand on a vu les versions de Davide Moore et de Tim Burton, on ne peut être que déçu que ce dépouillement. D'autant que le film est mal raconté avec beaucoup trop de déficit d'explications (de plus a quoi rime cet épisode africain grotesque ?). Pourtant le film n'est pas sans charme ne serait-ce que de par le rôle fort bien tenu et assez inquiétant de Tod Slaughter dans celui du barbier

Le Roman d'un tricheur

Un film de Sacha Guitry (1936) avec Sacha Guitry, Jacqueline Delubac Marguerite Moreno Pauline Carton Rosine Deréan, Fréhel. Un film qui se déguste comme un délicieuse friandise, Guitry se permet de réaliser presque tout son film en voix off (et n'allez pas nous raconter que c'est l'héritage du muet, à cette époque le parlant a déjà 7 ans et Guitry a déjà réalisé "Bonne Chance" en 1935) Non c'est un choix assuré et il fonctionne fort bien (alors que parfois dans des films bien plus modernes les voix off peuvent agacer) Guitry c'est un genre à lui tout seul, sa voix, son phrasé, son jeu de comédien tout en petites touches, son cynisme complétement assuré, et puis ses audaces, déjà l'entrée en matière, petit bijou d'humour macabre, nous présenter un café-bordel tenue par une mère et ses deux filles, se moquer de la relève de la garde monégasque en la faisant défiler à reculons. Et puis comment oublier la beauté rayonnante de Rosine Deréan. ?

La femme et le pantin 

Un film de Josef von Sternberg (1935) avec Marlene Dietrich. Une photographie fabuleuse, des plans de folie, (le début pendant le carnaval est anthologique) une leçon de cinéma et puis Marlène qui n'a jamais sans doute été aussi belle dans ce rôle de chipie manipulatrice. (mais dont on s'aperçoit que son personnage est beaucoup plus complexe qu'on ne pourrait le supposer). S'il manque quelques scènes essentielles par rapport au chef d'œuvre de Pierre Louÿs, notamment l'épisode du théâtre privé (la censure…) l'esprit en est parfaitement respecté… jusqu'à la scène finale qui s'abstient volontairement de tout moralisme. Un grand, un très et un très beau grand film .

Sylvia Scarlett  

Un film de George Cukor (1935) avec Katharine Hepburn et Cary Grant. Un film qui se regarde avec grand plaisir mais dont il faut déplorer la rupture de ton et le passage dans le mélo vers la fin. Les acteurs sont très bons y compris Cary Grant (dont ce n'est pas toujours le cas dans ce registre) Les second rôles féminins sont pas mal non plus, Dennie Moore campant une  Maudie assez foldingue et Natalie Paley une énigmatique Lily. Le thème de la confusion des genres n'est traité qu'en filigrane mais il est bien là. En fait ça ne se prend pas trop au sérieux et le sommet du film restera le quatuor vocal exécuté au pied d'un escalier dans lequel Cary Grant se déchaîne comme jamais.

Dédé 

Un film de René Guissart (1935) avec Mireille Perrey, Claude Dauphin, Danielle Darrieux et Albert Préjean. Le matériel est celui de l'opérette de Christiné et Willemetz, mais le film ne se contente pas d'être une opérette filmée et bénéficie d'un rythme effréné, de bons morceaux musicaux, de quelques bon délires (l'apparition de Danielle Darrieux en nuisette transparente, les grévistes "livrés" aux Blue Bell Girls, la reconversion du notaire), et d'un final qui est un bon pied de nez à la morale bourgeoise. La distribution est dominée par une Danielle Darrieux rayonnante, mais la prestation de Mirelle Perrey toute en sensualité ne passe pas inaperçue, quant à Claude Dauphin et Albert Préjean, s'ils ne déméritent pas on aurait peut-être préféré Garat ou Chevalier. Malgré cette petite réserve, ce film est un régal.

La Marque du vampire 

Un film de Tod Browning (1935) avec Bela lugosi et Lionel Barrymore. Ça blablate énormément, Lionel Barrymore cabotine comme ça ne devrait pas être permis, Bela Lugosi en service minimum est figé comme une statue de cire, seule Elisabeth Allan parvient à sortir du lot. Le twist final est extrêmement décevant. (Tout ça pour ça, a-t-on envie de dire !) A sauver la dernière scène où Lugosi fait ses valises et au début la scène du petit chat coincé dans une armure. Pas terrible.

La fiancée de Frankenstein 

Un film de James Whale (1935) avec Boris Karloff et Elsa Manchester. Efficacement mis en scène, ce film est une mine de bonnes surprises, on va du "touchant" avec l'humanisation du monstre génialement incarné par Karloff, au cabotinage contrôlé avec les cris de Minnie (Una O'Connor), au savant fou au jeu théâtral (le dr Prétorius) sans que cela gêne en quoi que ce soit (la scène des petits personnages dans les bocaux qui arrive comme un cheveu sur la soupe passe aussi très bien). On notera des très belle scènes de foules (de meutes devrait-on dire !) une utilisation étonnante de la profondeur du champ, des plans quasi-expressionnistes (la course parmi la forêt dont on ne voit que les troncs, le chateau), une photographie mettant la très belle Valerie Hobson et bien sûr Elsa Manchester (qu'on voit trop peu). Le dernier quart d'heure est sublime.

Les trois lanciers du Bengale  

Un film de Henry Hathaway (1935) avec Gary Cooper. La direction d'acteurs ne semble pas être le souci premier du réalisateur car si Gary Cooper est excellent, on se serait volontiers passé de Richard Cromwell, véritable tête à claques, (et ne parlons pas du rôle du colonel) et il y a aussi quelques bavardages assez pénibles. Mais ce film est d'abord un film d'aventure et malgré ces quelques réserves, il arrive à tenir la route grâce à une réalisation efficace.

Les révoltés du Bounty 

Un film de Frank Llyod (1935) avec Charles Laughton et Clark Gable. Une merveille ! Il faut bien sûr parler de l'interprétation car si Franchot Tone et surtout Gable sont très bons que dire de la prestation absolument magistrale de Charles Laughton ! Quant à la réalisation elle est parfaite, non seulement c'est très bien filmé mais chaque plan ne dure que le temps qu'il faut, les ellipses sont nombreuses et efficaces, ainsi les passages "durs" fonctionnent sans voyeurisme excessifs de même que les séances tahitiennes (avec de fort charmantes vahinés) ne tombent jamais dans la mièvrerie. Bref, c'est un chef d'œuvre.

Capitaine Blood 

Un film de Michael Curtiz (1935) avec Errol Flynn et Olivia de Havilland. Superbement mis en scène, le film souffre néanmoins de plusieurs handicaps, le côté primaire (pour ne pas dire cucul la praline) de son scénario, le cabotinage d'Errol Flynn, et le typage grossier des personnages secondaires (un peu comme dans Ford). Sinon les qualités ne manquent pas, superbe photo, musique fabuleuse (Korngold), la superbe Olivia de Havilland dans un rôle bien plus complexe qu'on pourrait le penser, des scènes de batailles navales prodigieuses, un doigt d'humour.

Les 39 marches  

Un film d'Alfred Hitchcock (1935) avec Robert Donat et Madeleine Caroll. C'est très fort, et c'est déjà du très grand Hitchcock. L'histoire d'un type tranquille embarqué contre son gré dans une sombre affaire qui ne le concerne pas est un thème classiques et Hitchcock s'en servira plusieurs fois. Idem pour les meurtres en plein théâtre ! Reste donc la manière : et là on est servi : coups de théâtre, rebondissements, suspense, tout est là, y compris la belle blonde sortie de nulle part. de l'humour aussi avec cette scène surréaliste où Donat intervient dans une soirée électorale en racontant n'importe quoi (et sous les applaudissements en plus !). Le must du film restant la partie où Richard Donat-et la belle Madeleine Caroll sont menottés l'un à l'autre. On remarquera qu'il n'y a aucune scène gratuite, tout ce qui paraît anecdotique dans la première partie trouve sa signification in fine, du grand art, et puis nous pondre un thriller à la fois dramatique et décontracté, fallait le faire !

Top Hat 

Un film de Mark Sandrich (1935) avec Fred Astaire et Ginger Rogers. Encore un film qui jouit d'une réputation largement surestimée, il faut attendre 45 minutes (pendant lesquelles l'ennui n'est pas loin) avant que ça devienne (un peu) intéressant. L'intrique est un vaudeville traité de façon poussive avec un final grotesque. Les numéros musicaux sont rares et non rien d'exceptionnels sauf le ballet final, grandiose. Reste la musique d'Irving Berlin, Venise reconstituée en studio, la grâce de Ginger Rogers et la présence amusante d'Helen Broderick. Swing Time réalisé l'année suivante avec le même couple Astaire/Rogers sera infiniment supérieur.

Bonne chance   

Un film de Sacha Guitry (1935) avec lui-même et Jacqueline Delubac. Petit bijou d'élégance, Guitry manie les bons mots avec un naturel confondant que l'on savoure, le scénario est simple mais original, c'est une fable, elle est savoureuse avec un zeste de pied de nez aux conventions bourgeoises. Jacqueline Delubac qui donne la réplique à Guitry est pétillante de charme et de talent. Le film est parsemé de digressions farfelues (quand il présente sa sœur à son frère), surréaliste (le client du coiffeur) et que n'aurait pas renié WC Field (quand il envoi promener le gosse du Jardin des Plantes et sa question idiote). Des imperfections ? On le les perçoit même pas et on ne s'ennuie pas une seconde ! Mineur ? Et alors ? C'est très frais, ça dégage une sensualité à la fois discrète et omniprésente, ça rend heureux et ça se déguste comme une délicieuse friandise.

Pension Mimosa 

Un film de Jacques Feyder (1935) avec Françoise Rosay et Lise Delamare. Arletty est bien créditée au générique mais son rôle est hélas anodin, nous sommes quand même gâtés par la distribution féminine avec une Françoise Rosay qui crève l'écran et qui porte le film et avec une Lise Delamare très bien en canaille vénale. Le film est fort parce qu'il montre des personnages très complexes, il n'est que de voir les rapports de Rosay avec son fils adoptif. Dommage que la distribution masculine soit un niveau au-dessous. Dommage aussi cette fin bâclée avec une facilité de scénario tirant le film vers l'incroyable et une scène finale où le trait mélodramatique est exagéré à l'excès. Malgré tout un bon film qu'on pend plaisir à regarder.

Le comte Obligado 

Un film de Léon Mathot (1935) avec Georges Miton et Paulette Dubost. Le gros problème de ce film c'est Georges Milton, cet excellent fantaisiste et homme de scène n'est tout simplement pas un acteur de cinéma (alors que quand il chante et danse il est fabuleux). Sorti de ce qu'il sait faire, il n'est pas bon. Mais heureusement l'histoire possède d'autre atouts, notamment Pauline Dubost véritablement étonnante, mais aussi Germaine Aussey et le chanteur d'opéra Jean Aquistapace qui jouent le couple Miranda. C'est assez inégal, mais souvent assez déluré (il y a même une scène de théâtre nu). Au final le meilleur l'emporte nettement sur le moins bon.

L'extravagant Mr Ruggles 

Un film de Leo MacCarey (1935) avec Charles Laughton. Heureusement que Charles Laughton fait une prestation extraordinaire parce que tout ça est cousu de fil blanc et devient même franchement lourdingue (le passage avec le discours de Lincoln est raté). La dernière partie du film est la plus intéressante. Ça se regarde comme un film d'acteurs, mais sinon, il n'y a vraiment pas de quoi crier au miracle. PS : On remarquera toutefois la présence de la belle Leila Hyams dans un petit rôle assez pétillant.

Un oiseau rare 

Un film de Richard Pottier (1935) avec Pierre Brasseur, Pierre Larquey, Jean Tissier. Le thème est classique, c'est même l'un des plus ancien classique de la comédie, mais on peut le traiter des 1001 façons et il est ici traité à la sauce Prévert (en fait c'est l'adaptation d'un roman allemand) . La critique de la servilité y est permanente, multiple et assez bien vue. Si on peut regretter quelques incohérences de scénario (de que droit l'hôtel fait-il travailler Malleville ?) il n'en reste pas moins que le film est souriant et très inventif : le perroquet grossier Ravaillac, la jeune mariée nymphomane et son mari ridicule, l'inénarrable Jean Tissier. La direction d'acteur est excellente avec un jeune Pierre Brasseur déjà étonnant et une Monique Rolland fort mignonne. Un bon moment de cinéma sans prise de tête.

Le Contrôleur des wagons-lits 

Un film de Richard Eichberg (1935) avec Danielle Darrieux et Albert Préjean. Un vaudeville d'une loufoquerie remarquable servie par une Danielle Darrieux qui non seulement est radieuse mais à l'air de s'amuser comme une folle (et même qu'elle chante) . Albert Préjean et Lucien Barroux s'en sortent très bien, on regrettera simplement quelques seconds rôles un peu lourds. C'est léger, charmant, drôle et pétillant comme du champagne !

Baccara 

Un film d'Yves Mirande (1935) avec Jules Berry. On se demande pourquoi ça s'appelle Baccara, mais peu importe ! La mise en place est intéressante, quelques plans suffisent pour cadrer l'héroïne de l'histoire, puis une scène très étonnante nous décrit les relations ambigües entre Berry et Baroux. Tout est en place pour que ça se passe très bien d'autant que Berry pète la forme et que Marcelle Chantal qui nous joue ça à la Marlène Dietrich est très glamour. La seconde partie contient son lot d'incohérences, Berry qui ne semblait pas intéressé par les femmes change d'avis et son copain laisse faire. Pire nos deux éternels fauchés deviennent riches on ne sait pas pourquoi. Quant à la troisième partie constituée d'un interminable procès à l'américaine, plus poussif tu meurs. Heureusement le tout dernier plan nous rendra indulgent, mais ça reste moyen.

Quelle drôle de gosse 

Un film de Léo Joannon (1935) avec Danielle Darrieux, Albert Prejean, Lucien Baroux. C'est un film "chamboule-tout" dans lequel Darrieux provoque des catastrophes en série avec un naturel époustouflant, c'est d'ailleurs un festival Darrieux qui crève l'écran de son charme et de son talent. La mise en scène est très correcte et la direction d'acteurs excellente (fabuleux Lucien Baroux en majordome). On sent la patte d'Yves Mirande dans le scénario dans lequel une certaine critique sociale est bien présente. Un petit bijou et un excellent moment de cinoche malgré un fin prévisible et quelque peu rapide (mais puisqu'on est dans le délire…).

Crime et Châtiment 

Un film de Pierre Chenal (1935) avec Pierre Blanchar et Harry Baur. Mieux vaut ne pas regarder ce film si vous avez le cafard, parce que c'est noir de chez noir. Réalisation impeccable avec une caméra qui bouge tout le temps, décors inspirés par l'expressionnisme allemand, photographie très réussie (il n'est qu'à voir ce plan magnifique du profil de Madeleine Ozeray). Interprétations magistrales de Pierre Blanchar et d'Harry Baur dans des registres complétement différents. Présence lumineuse de la très belle Madeleine Ozeray, musique d'Honegger. Bref un chef d'œuvre !

Becky Sharp 

Un film en couleur de Rouben Mamoulian (1935) avec Miriam Hopkins. Le premier "vrai" film couleur ? L'histoire d'une jeune arriviste qui joue de ses charmes pour monter dans la société est toujours intéressante, d'autant qu'ici Miriam Hopkins nous fait une composition tout à fait remarquable. Hélas le code Hays dans sa grande débilité fait que Mamoulian est obligé de nous montrer une aventurière qui ne couche pas (et qui n'embrasse pas non plus). C'eut été Lubitsch il aurait su nous suggérer des choses, mais Mamoulian n'est pas Lubitsch. En revanche les charges contre l'hypocrisie victorienne sont très bien passées (ainsi que la fin, surprenante), Les américains n'ont jamais supporté l'aristocratie anglaise. Un bon film malgré l'autocensure

Le domino vert 

Un film d'Henri Decoin (1935) avec Danielle Darrieux, Charles Vanel, Maurice Escande, Jenny Holt. On a un peu peur au début d'avoir droit à un drame bourgeois bien convenu, mais c'est Henri Decoin qui est aux manettes et il y a Danielle Darrieux qui nous scotche avec son sourire et son talent. Et très vite tout cela prend forme grâce à une interprétation et une direction d'acteurs sans faute, dominée par Darrieux, mais n'oublions pas la belle Jenny Holt, Charles Vanel, Maurice Escande et même Jeanne Perez dans le petit rôle de la bonne. La réalisation est parfaite, Decoin allant toujours à l'essentiel aidé pour cela par des dialogues de Marcel Aymé. Le sommet du film étant cette longue et magnifique scène du carnaval où tout le monde se croise, s'entrecroise, triche et ment. La scène du cabaret est également très réussie. Quant à la dernière partie, le film nous offre un twist remarquable, Decoin arrivant à nous bluffer jusqu'au bout. Du travail d'orfèvre.

Betty Boop and Grampy 

Un DA de 7 minutes de Dave Fleischer (1935). Amusant et inventif, mais on préfère Betty dans des rôles plus délurés

La rosière des halles 

Un film de Jean de Limur (1935) avec Paulette Dubost, Pierre Larquey, Alice Field. Cela m'a toujours stupéfié ces gens qui se pincent le nez dès qu'un film ressemble à un vaudeville. Le vaudeville est un genre, comme le western ou le slasher, il y en a des bons et des mauvais. Or il se trouve que celui-ci est excellent puisqu'il parvient non seulement à nous amuser mais à nous faire rire ! Comme le disait la bande annonce d'époque : "C'est un film plein d'esprit, de charme de fantaisie et de folle gaîté". L'histoire est abracadabrante mais on s'en fiche, elle fonctionne très bien, Larquey est excellent, Alice Field a beaucoup de classe, mais c'est Paulette Dubost qui nous fait une prestation exceptionnelle, crevant l'écran de son talent, de son charme et de sa fantaisie. On déplorera juste le rôle un peu débile confié à Paul Azaïs, mais sinon c'est 90 minutes qu'on ne voit pas passer et qui rendent joyeux.

Amants et voleurs 

Un film de Raymond Bernard (1935) avec Pierre BlancharFlorelle, Michel Simon, Arletty. Le très inégal Raymond Bernard nous signe là un produit bien moyen. Le scénario est plutôt maladroit et sans réelle surprise. Les acteurs sont inégaux, Florelle sauve en partie le film, Michel Simon est en petite forme, mais c'est surtout Pierre Blanchar qui déçoit, et force est de constater que ce grand acteur n'est pas fait du tout pour ce registre dans lequel il patauge. Quant à Arletty, elle ne fait que passer et hélas sans briller. Moyen de chez moyen..

Une nuit à l'opéra 

Un film de Sam Wood (1935) avec les Marx Brothers. Comme souvent dans les films des Marx, le meilleur côtoie le moins bon, ainsi on pourra trouver les joutes verbales lourdes et interminables, mais le film est largement sauvé par la bande sonore, car une fois n'est pas coutume nous n'avons pas affaire à du sirop mais à une musique de qualité emportée par une jolie chorégraphie et à quelques numéro de bravoures comme la séquence de la cabine trop petite (15 personnes dans 6 m²) ou encore les mufleries de Groucho, on se souviendra longtemps de la scène au restaurant ou il jette la note à son invitée en lui disant : "9,40£, c'est scandaleux, ne payez pas !" . Quant au délire final, c'est une pépite d'humour burlesque et ravageur.

Jim la houlette 

Un film d'André Berthomieu (1935) avec Fernandel. Berthomieu n'est pas un mauvais réalisateur, tout le problème est au niveau du scénario, s'il est bon il réussit le film et vice-versa. Ici nous avons un scénario indigent, mais en plus un Fernandel qui cabotine comme ça ne devrait pas être permis, se croyant drôle, mais ne faisant rire personne sauf les figurants. Et comme si ça ne suffisait pas on nous inflige une fin "morale" qui n' a aucun sens. Seule petite consolation la présence de la très belle Mireille Perrey.

Maria Marten, or The Murder in the Red Barn

Un film de Milton Rosmer (1935) avec Tod Slaughter. Déjà le titre nous met sur la voie, mais en plus nous avons droit à une scène d'introduction où sont présentés les protagonistes de façon explicite quant à leur rôles. Du coup il n'y a plus de suspense et ce qui à l'origine devait se regarder comme un mélodrame se regarde comme du grand guignol d'autant que Tod Slaughter en fait des caisses et que tout cela manque de subtilité. Vu de cette façon, nous dirons qu'il s'agit d'une curiosité

Le chant du Danube  

Un film d'Alfred Hitchcock (1934) Atypique dans la carrière du maître, ce film est non pas une comédie musicale mais une comédie sur la musique. Tout cela a un petit côté opérette viennoise tout à fait charmant. C'est en plus assez intelligent, les trois personnages principaux ayant des personnalités bien typés mais non exempt de travers. Hitchcock de par une réalisation habile arrive à nous passionner pour ce qui n'aurait pu être qu'une bluette. Là il nous ravit. A noter la très bonne distribution féminine, avec la troublante Fay Compton dans le rôle de la Comtesse Helga von Stahl, une femme mature amoureuse mais lucide, et la toute à fait charmante Jessie Matthews dans le rôle de la fille du pâtissier.

Ce n'est pas un péché 

Un film de Léo McCarey (1934) avec Mae West. Le film a été écrit et supervisée par Mae West dont la présence constitue l'intérêt principal de ce film. Une présence magnétique, tout dans de très légères expressions du visage et dans un déhanchement assez particulier et bien sûr dans ses répliques très ambiguës. La bande son à laquelle a contribué l'orchestre de Duke Ellington est excellente (il faut aussi écouter les paroles des chansons, ce n'est pas triste). Le scénario est minimaliste et déçoit par son final comme si Mae West excédée par les exigences du code Hayes (qui venait juste de se mettre en place) avait décidé de faire une conclusion contredisant tout le film en épousant un abruti)

Poker Party (Six of a kinds

Un film de Leo McCarey avec W.C Fields.(1934). Le titre du film reste un mystère complet mais nous avons là un road movie vaudevillesque et foutraque impliquant trois couples dont les rencontres vont provoquer catastrophes et quiproquos. C'est mené tambour battant, c'est très souriant et pas mal daté (mais ça participe au charme). Certaines trouvailles sont géniales comme le balai mal posé qui ouvre tout seul la porte du placard, les réparties surréalistes de Gracie Allen et le clou du spectacle : l'interminable partie de billard de W.C Field. Ça n'a aucune prétention, mais ça occupe agréablement les yeux.

L'homme qui en savait trop (version 34) 

Un film d'Alfred Hitchcock (1934) avec Peter Lorre. Une continuelle impression de brouillon et de confusion. Des invraisemblances à la pelle : Le tireur d'élite trop fort qui choisit de tuer sa cible pendant qu'elle danse, mais qui ensuite n'atteindra le héros du film qu'au poignet. Le père du gosse qui arrive juste au bon moment chez le dentiste, qui entend Peter Lorre dévoiler ses petits secrets, qui n'est pas reconnu, mais dont on nous dit plus tard qu'il l'avait été (?). Certaines scènes comme celles du combat de chaises qui se veulent comiques tournent au ridicule, la scène dans la secte tourne à l'absurde et la fusillade finale est lourde. Ajoutons qu'étant donné que nous n'avons pas le temps d'éprouver de l'empathie pour les personnages, le suspense fonctionne mal. Côté casting les acteurs sont bons (mis à part l'insupportable gamine), mais au début ils se ressemblent tous et on a du mal à savoir qui est qui. Côté positif, bien sûr la présence Peter Lorre, et une maîtrise technique de la réalisation. En 1956 ce brouillon sera mis au propre et deviendra le chef d'œuvre que l'on sait.

Les joyeux garçons 

Un film de Grigori Aleksandrov (1934). Le titre est débile, mais quelle surprise ! Un OVNI dans la production soviétique stalinienne. Car c'est c'est bien d'une comédie musicale complétement loufoque dont il s'agit : Un mélange déjanté de burlesque à la Duck Soup, de surréalisme et de Ray Ventura. C'est très efficace et les deux actrices féminines la brune Maria Strelkova et la blonde Lioubov Orlova (dont on chuchote que Staline lui-même, mais ce sont des choses qui ne nous regarde pas…). Un régal, une perle rare !

New York-Miami 

Un film de Frank Capra (1934) avec Clark Gable et Claudette Colbert. Une histoire sans intérêt qui se traîne lamentablement et où Gable cabotine, seule Claudette Colbert nous empêche de fuir cette ennuyeuse niaiserie.

Gai, gai, marions-nous 

Un court métrage de 27 minutes de Lloyd French (1934) avec Laurel et Hardy. Introduction du fantastique et de la folie dans Laurel et Hardy, on y mange de la soupe sans soupe et on y joue aux cartes sans cartes. Mae Bush en tueuse en série n'est pas mal du tout. Amusant

L'école des contribuables 

Un film de René Guissart (1934) avec Armand Bernard, Mireille Perrey, Pierre Larquay. Le cinéma des années 1930 regorge de pépites dont on se demande bien pourquoi elles s'obstinent à rester dans l'oubli. Cette comédie loufoque est remarquablement bien interprétée (entre autres) par le génial Armand Bernard et par la sémillante Mireille Perrey. Dans ce film brillant et sans aucun temps mort, on relève quelques séquences étonnantes comme la séance de signature où la revue des dactylos. Quant au fond, puisqu'il y en a un, on aurait tort de n'y voir qu'une critique du fonctionnarisme et il nous confirme que nul ne saurait refuser une opportunité qui lui rapporte (la dernière scène est à ce propos édifiante). Ce  film d'une immoralité lucide et rafraîchissante est un pur régal.

Anna Karenine 

Un film de Clarence Brown (1934) avec Greta Garbo, Fredric March, Basile Rathbone, Maureen O'Sullivan. Le roman de Tolstoï dit beaucoup de choses et pèse 900 pages ! Le résumer en 90 minutes est impossible, l'illustrer ne sert à rien, alors puisqu'il ne s'agit ni d'un condensé, ni d'une illustration on va dire que c'est une évocation et que ce n'est pas si mal parce que la réalisation est brillante (les premiers plans sont fabuleux) et parce qu'il y a Garbo qui porte le film sur ses épaules et aussi parce que que on a quand même évité le gros mélodrame. Sinon le sujet reste juste effleuré, il aurait sans doute fallu un Buñuel pour traiter cette histoire d'amour fou.

Compartiment de dames seules 

Un film de Christian-Jaque (1934) avec Armand Bernard et Ginette Leclerc. Voilà un court film (il ne dure que 65 minutes) complètement oublié et qui mérite vraiment d'être redécouvert. Bien sûr c'est du théâtre filmé (mais quel réalisateur n'en a pas fait ?) et la pièce est un vaudeville, mais c'est très bon, les situations s'enchaînent à toute vitesse et les acteurs sont excellent. On remarquera aussi qu passage une belle critique de l'hypocrisie bourgeoise. Et puis cerise sur le gâteau, le personnage d'Isabella des Folies Bergères incarné par une sémillante Ginette Leclerc en pleine forme !

Zouzou 

Un film de Marc Allegret (1934) avec Joséphine Baker, Jena Gabin, Pierre Larquey. Ce film a deux gros problèmes. Joséphine Baker était une chanteuse et une danseuse extraordinaire mais comme actrice, ce n'était pas vraiment ça et Allegret n'a pas su la diriger. L'autre problème c'est le scénario qui part dans tous les sens et qui ne nous épargne ni lourdeurs, ni mauvais dialogues, ni grosses ficelles. Reste la chorégraphie d'une inventivité qu'il convient de signaler. Ce n'est pas un grand film.

L'impératrice rouge  

Un film de Josef Von Sternberg (1934) avec Marlène Dietrich. Une mise en scène baroque qui tient du génie, certaines scènes sont tout simplement anthologiques comme la messe de mariage et le final époustouflant avec la cavalerie escaladant les escaliers du palais impérial constituant l'une des plus belles scènes de l'histoire du cinéma. La distribution est étincelante avec une Marlène sublime dans le rôle de Catherine II qui joue avec ses yeux et un étonnant Sam Jaffe dans celui de Pierre II. Un chef d'œuvre du cinéma ponctué par la musique de Tchaïkovski

La Banque Nemo 

Un film de Marguerite Viel (1934) avec Victor Boucher et Mona Goya. Ce film était tombé dans l'oubli d'une part parce qu'il n'y a aucun "grand nom" au générique et surtout parce que sa carrière fut courte, sa scène clé où l'on voit le conseil des ministres décider à l'unanimité d'étouffer l'affaire ayant été censuré ! Aujourd'hui ce film se regarde comme un petit bijou ancien, une excellente et savoureuse fable sur l'arrivisme. Si le film souffre quelque peu d'être une adaptation d'une pièce de théâtre (Louis Verneuil, 1931), mais la réalisatrice s'en sort plutôt bien. Victor Boucher est très bon et Mona Goya tout à fait charmante. Quant à René Bergeron dans le rôle du pauvre type, il nous fait une composition tout à fait étonnante.

Une riche affaire 

Un film de Norman Z. McLeod (1934) avec W.C. Fields. Soyons justes, on est loin d'être écroulé de rire mais c'est néanmoins assez amusant. Mais par delà les gags aussi savoureux qu'ils soient dans leur absurdité, on retiendra surtout une peinture iconoclaste assez réjouissante de la petite famille américaine.

Wonder bar 

Un film de Llyod Bacon (1934) avec Francis Kay et Dolores del Rio. Dolorès de Rio est trop belle mais les intermèdes de cabaret sont très inégaux, la première grande valse orchestrée par Busdy Berkeley est géniale, la scène du fouet fascinante, les plaisanteries d'Al Wonder assez gavantes et le reste bof. L'intrigue en revanche est d'un cynisme assez plaisant et d'un amoralisme plutôt jouissif.

Paquebot Tenacity 

Un film de Julien Duvivier (1934) avec Albert Préjean. La pauvreté et la banalité de l'intrigue (qui n'existe qu'en fin de film) font pitié, sinon le film n'a rien à dire, c'est un film d'ambiance, mal joué (même si Préjean se défend un peu) et ennuyeux, le sujet aurait pu convenir à un court-métrage de 20 minutes mais là, on trouve le temps très long. La fin est d'un gnangnan impossible, elle a peut-être inspiré Jacques Brel pour sa chanson "Je vous ai apporté des bonbons"

L'Emprise 

Un film de John Cromwell (1934) avec Bette Davis. Tromperie sur la marchandise puisque je me suis farci un mélo alors que je m'attendais à un film noir et il vrai que la première partie du film aurait pu en fournir le prologue, tout étant en place, malgré le rythme assez lent, Leslie Howard arrive à nous toucher devant tant de malheur et de désillusion. Le souci c'est que le scénariste a voulu en faire de trop et que les situations deviennent de plus en plus improbables jusqu'à ce que l'on sombre dans le pire mélo, à peine sauvé par un happy end artificiel. C'est donc très moyen, mais on sauvera tout de même la jolie crise de nerf de Bette Davis

Cléopâtre 

Un film de Cecil B. DeMille (1934) avec Claudette Colbert. Les défenseurs de la vérité historique risque d'avaler leur chapeau, mais qu'importe, il est clair que Cecil B. DeMille n'a jamais eu l'intention de nous pondre un biopic criant de réalisme, mais d'illustrer les amours de Cléopâtre en version kitch. Et de ce point de vue on peut dire qu'on est servi, entre Claudette Colbert, extraordinaire et magnifique dans le rôle, en petite tenue et minaudant avec un charme fou et une chorégraphie d'une inventivité de folie. On sort de cette projection, enchanté, subjugué, charmé, les deux ou trois petits défauts de mise en scène ne parvenant pas à entacher ce chef d'œuvre du cinéma. PS : il est tentant de comparer ce film avec celui de Mankiewicz avec Liz Taylor qui est certes excellent mais souffre de dialogues peu naturels. A ce titre je préfère la concision de la version de 1934

Arlette et ses papas 

Un film d'Henry Roussel (1934) avec Jules Berry, Renée Saint-Cyr, Christiane Delyne. Encore une pépite tombée dans les oubliettes et on se demande bien pourquoi. Certes la réalisation n'a rien de grandiose, mais le scénario vaudevillesque en diable est parfaitement huilé, et les acteurs nous font une prestation pétillante avec un Jules Berry en super forme qui joue avec un naturel saisissant, Renée Saint-Cyr qui crève l'écran de son charme et de son talent, sans oublier Christiane Delyne en poule de luxe. Un véritable régal avec un parfum d'amoralité quasiment revendiquée.

Poor Cinderalla 

Un dessin animé de 11 minutes de Dave Fleischer (1934) Ce dessin animé faisant jouer Cendrillon par Betty Boop vaut surtout pour l'utilisation des couleurs rendant un aspect sépia non dénué de charme. Pour le reste, c'est charmant mais on est très loin des folies et audaces d'autres cartoons de Betty

Ces messieurs de la santé 

Un film de Pierre Colombier (1934) avec Raimu, Lucien Baroux, Pauline Carton, Edwige Feuillère. Inspiré de l'affaire Stavinski et de ses placements toxiques, le film a le défaut de ses qualités. Au positif une interprétation magistrale, avec des seconds rôles parfaitement impliqués, mais dominée par Raimu qui nous fait un véritable festival dont on se délecte. On peut même penser que ça tout cela va trop vite, les répliques de Raimu sont trop écrites, l'action va si vite qu'elle donne le tournis, on est loin de ces films qui n'avancent pas et dont les contemplatifs se délectent en disant qu'il faut savoir prendre son temps. Quelques petits défauts, donc mais le film est bon. A noter que sur exactement le même thème, "La Banque Némo" sorti quelques mois plus tard, allait encore plus loin.

La vie privée d'Henri VIII 

Un film d'Alexander Korda (1933) avec Charles Laughton, Elsa Manchester, Merle Oberon. Pas d'histoire mais de l'Histoire. Cette chronique intimiste étonne à plus d'un chef, d'abord par l'interprétation absolument stupéfiante de Charles Laugthon qui campe un personnage crédible et complexe. Le casting féminin est très réussi et si Merle Obéron n'a pas l'occasion vraiment de s'exprimer, la prestation d'Elsa Lanchester est tout à fait étonnante. Certaines scènes sont remarquables : le rire "communicatif" du roi, son impossibilité d'aller incognito chez Catherine, les scènes avec la princesse de Cleves, les exécutions toute en suggestion mais où est souligné le côté voyeuriste de la foule, l'utilisation du personnel de service pour commenter les évènements de la cour. Brillant et intéressant.

Le cantique des cantiques 

Un film de Rouben Mamoulian (1933) avec Marlène Dietrich. Juste avant l'instauration du code Hays, Mamoulian fit très fort en sublimant et en érotisant cette bluette. La scène de finition de la sculpture est un exercice d'érotisme suggéré assez fabuleux, le sculpteur regardant le corps nu de Marlène (que le spectateur ne voit pas) et prodiguant des caresses suggestives cette fois bien visibles sur la statue nue. Marlène est sublime de beauté dans ce film avec un regard que l'on peut qualifier de coquin (du moins dans la première partie). Elle incarne une femme forte, malheureuse dans le luxe et capable d'actes surprenants (ses escapades chez le sculpteur, ou mieux quand elle va d'autorité rendre une visite nocturne au palefrenier devant les yeux ébahis de son ancien amant) La référence biblique y compris dans le titre est ambiguë puisqu'on s'est toujours demandé ce que le cantique des cantiques faisait dans ce livre "sacré." Un film à re(découvir).

Hard to handle 

Un film de Mervyn Leroy (1933) avec James Cagney. Décidément la production américaine d'avant 1934 regorge de pépites. Nous avons ici un James Cagney toujours aussi agité qui empile les escroqueries comme d'autres les assiettes, une femme mature qui coache sa fille afin de lui trouver le meilleur milliardaire possible, qu'il soit escroc ou photographe, la charmante Marian Brian qui n'écoute pas toujours sa mère et tout un lot de personnages secondaires aussi pittoresques que savoureux. Le rythme est endiablé, la morale n'est pas vraiment sauve mais l'amour triomphe. Que du bonheur !

Mademoiselle Volcan (Bonbshell 

Un film de Victor Flemming (1933) avec Jean Harlow. Si on ne peut être qu'admiratif devant l'énergie dépensée par Jean Harlow tout au long ce film il n'en reste pas moins que ça cause de trop, que ça gesticule, que ça braille, que les personnages se bousculent, à ce point qu'on ne sait plus qui est qui, qu'on s'emmerde à mourir et qu'on se demande quand le film va commencer. Gavant.

Sérénade à trois 

Un film d'Ernst Lubitsch (1933) avec Gary Cooper, Fredric Marsh, Miriam Hopkins. C'est un chef d'œuvre et pourtant ce n'est pas le meilleur Lubitsch. Le réalisateur réussit l'exploit de mener à bien une sorte de défense et illustration de la vie de bohème et du ménage à trois en restant constamment dans l'implicite. La distribution est dominée par Miriam Hopkins éclipsant ses deux partenaires (pourtant très bons) de par son naturel, sa grâce, son insouciance et sa décontraction. Son personnage ne se contente pas de vivre comme elle l'entend mais théorise avec humour son comportement ("chez le chapelier, on peut très bien choisir deux chapeaux") Certaines répliques sont savoureuses ("Nous avons fait un gentleman agrément, mais je ne suis pas un gentleman"), les situations comiques dites théâtrales (comme si c'était une injure ?), fonctionnent parfaitement, et le plan final est fabuleux. Tout est en élégance et en finesse. Un régal !

Un soir de réveillon 

Un film de Karl Anton (1933) avec Meg Lemonnier, Henri Garat, Dranem et Arletty. Encore une perle des années 1930 injustement oubliée. Il s'agit d'une adaptation d'une opérette à succès de Raoul Moretti et Albert Willemetz, créée un an plus tôt au Théâtre des Bouffes Parisiens avec les mêmes acteurs. Ce film est d'abord pétillant de joie et de malice. L'action se passe dans ce qu'on appelait alors le demi-monde (autrement dit les prostituées de luxe, leurs clients et protecteurs) et plus précisément dans l'hôtel particulier d'Arletty. Sa sœur interprétée par Meg Lemonnier se rend chez elle un soir de réveillon et lui demande de rester. C'est à ce moment qu'elle interprétera l'étonnante chanson "Être une poule". Parce qu'en fait ce demi-monde ne la dérange pas tant que ça, d'autant qu'elle y rencontre Henri Garat dont elle tombe amoureux et réciproquement. On a donc là une fable très osée, car même si la fin se termine (morale oblige) par une promesse de mariage, l'institution du mariage est sévèrement brocardée à plusieurs reprises dans le film. Certes, il s'agit d'un vaudeville facile, mais c'est bien fait et on rentre volontiers dans le jeu. L'interprétation est excellente, Meg Lemonnier est aussi charmante qu'étonnante et possède une fort jolie voix, Henri Garat s'en sort très bien (malgré quelques soucis de postsynchronisation), Dranem est à la fois énervant (mais c'est son rôle) et génial. Arletty n'a qu'un second rôle mais le réalisateur l'a placé au centre d'une incroyable scène de salle de bain, permettant à celle-ci de nous montrer plusieurs fois de suite sa jolie petite poitrine, son sourire et sa gouaille forment déjà la promesse d'une grande vedette. Les seconds rôles sont également très bons (comme souvent à l'époque) et tout cela se passe dans une ambiance joyeusement décontractée. La musique de Raoul Moretti est excellente et entraînante. Et puis il y a ce final, en forme de bal costumé vénitien qui ne mérite qu'un qualificatif : Grandiose. Un régal de fin gourmet à découvrir d'urgence.

The Mind Reader 

Un film de Roy del Ruth (1933). Attention : chef d'œuvre. Cette comédie dramatique commence par une irrésistible scène burlesque ou un arracheur de dents se livre à son activité pendant qu'une fanfare couvre les cris du patient au son du refrain de la "marche américaine" (The Stars and Stripes Forever de JP Sousa). Le ton est très léger et le restera jusqu'au bout malgré l'introduction de séquences tragiques (il y aura quand même un suicide par désespoir, une blessure mortelle par balle, et un procès impliquant une innocente). Si le film n'est pas tendre avec la crédulité publique et en dénonce les dérives, il prend le parti de ne pas enfoncer l'escroc et de croire à sa rédemption par amour alors que lui-même défend son business (je dis aux gens ce qu'ils espèrent entendre, le chiffre d'affaire du marché de la divination est fabuleux, s'il n'y avait pas de demande, il n'y aurait pas d'escrocs). Le ton reste juste jusqu'au bout, l'interprétation est remarquable, il n'y a rien à jeter dans ce film. Il est beau !

Masques de cire

Un film de Michael Curtiz (1933) avec Lionel Atwill, Glenda Farell et Fay Wray. Ce film en couleur considéré comme perdu de 1946 à 1969 et qui a bénéficié d'un remake à succès en est pourtant largement supérieur. L'action très rapide tourne autour du personnage très fort de Glenda Farell, incarnant une journaliste dynamique (rien à voir avec la nunuche du remake). Lionel Atwill est très convaincant et Fay Wray (qui n'avait pas encore tournée King Kong) qui n'a que le second rôle féminin, fort jolie. De très beaux décors, parfois proches de l'expressionnisme, des rebondissements, des fausses pistes, des bagarres, de la tension, Glenda Farell et Fay Wray en couleurs, un peu d'humour et une petite touche d'horreur. Ce film Warner dont seule l'ultime scène est faible, n'a rien à envier aux films d'horreur de l'Universal sorti à la même époque.

King-Kong 

Un film de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack avec Fay Wray (1933). Les chefs d'œuvres sont intemporels et ce film en est la preuve. Mené tambour battant, on ne s'ennuie jamais. Si les combats de bestioles ont un petit côté suranné, si les transparences sont parfois trop visibles, ce ne sont là que des détails, tant la mise en scène est maîtrisée (et oui, on se casse la gueule quand on fuit en pleine forêt vierge, on l'avait oublié)Fay Wray est sublime, la musique de Max Steiner est une référence et la dernière partie dure juste le temps qu'il faut, quand à la conclusion elle tient en une phrase loin des guimauves convenus. Un coup de génie. Il y aura deux remake, on rendra gré à John Guillermin d'avoir su érotiser le sien, quant à Peter Jackson, sa version lourdingue n'a absolument rien apporté au mythe !

42ème rue  

Un film de Llyod Bacon (1933). Une comédie musicale curieusement construite puisque toutes les chorégraphies (réglées de façon fabuleuse par Busdy Berkekeysont concentrés à la fin du film, le reste n'étant qu'une longue répétition. Cette première partie est néanmoins intéressante car si l'histoire peut paraître classique, le comportement des personnages l'est beaucoup moins. Nous sommes avant l'instauration du code Hays, et tout le monde drague plus ou moins avec tout le monde, les protagonistes ont tous leurs petits travers à l'instar de l'acteur jouant le metteur en scène qui s'il ne s'embarrasse pas de moyens pour arriver à ses fins n'est pas le mauvais bougre. Les deux actrices principales sont au top (Bebe Daniels et Ruby Keeler) c'est bien fait, bien dirigé… bref un bon moment de cinéma dont on regrettera juste la fin légèrement sucrée.

La reine Christine 

Un film de Rouben Mamoulian (1933) avec Greta Garbo. L'histoire très romancée du règne de la reine Christine de Suède dominée de bout en bout par une Greta Garbo absolument sublime. On pourra considérer avec raison que certaines scènes sont un peu naïves, mais qu'importe, c'est très bon et très fort (choisir comme héroïne une femme qui refuse de se marier pour pouvoir aimer librement, fallait le faire). A noter quelques allusions à la bisexualité de la reine que ne peuvent comprendre que ceux qui connaissent la véritable histoire. Merveilleux film qui se termine par l'un plus beaux plans de l'histoire du cinéma.

Picture snatcher 

Un film de Llyod Bacon (1933) avec James Cagney. Avant l'instauration du code Hays, les studios de productions s'en sont donnée à cœur joie, et la morale bourgeoise y a été longtemps bousculée, et cela pour notre plus grand plaisir. Le souci c'est que toute immoralité n'est pas défendable, et ici on a l'histoire d'un type qui en sortant de tôle, se rachète une conduite en mettant ses services à la disposition de la presse de caniveau. Inutile de dire qu'avec un tel sujet le personnage de Cagney n'attire pas l'empathie, et s'il se rattrape à la fin, il est trop tard. Un sujet mal maîtrisé, donc ! Reste l'interprétation étonnante, quelques belles actrices, une ambiance… et cette scène dans l'imprimerie, complètement improbable, mais si belle dans laquelle toute parole devient impossible.

Chercheuses d'or 1933 

Un film de Mervyn LeRoy (1933) avec Alice MacMahon , Joan Blondell et Ginger Rogers. Un enchantement, la chorégraphie de Busby Berkeley est non seulement visuellement fabuleuse mais elle n'est pas neutre (ce n'est pas tous les jours qu'un spectacle de revue nous montre un défilé militaire avec le retour des éclopés !) Quand à l'intrique, elle est certes simpliste, mais néanmoins tout à fait émoustillante par son coté non conventionnel, si les film se termine par trois mariages dont un mariage d'amour obligé, un autre est un mariage d'argent nettement affirmé, le troisième restant très ambigu. La vraie vedette du film est Aline MacMahon, truculente et éblouissante. Chef d'œuvre.

Prologue  

Un film de Llyod Bacon (1933) avec James Cagney et Joan Blondell. Il est dommage que la première partie soit si longue et ne donne pas l'impression d'avancer, cela malgré l'incroyable énergie dépensée par James Cagney (ce n'est pas possible, il est monté sur piles, ce mec !) et la beauté troublante de Joan Blondell. Mais quand dans la dernière demi-heure Bacon passe la main à Busby Berkeley, on est complétement subjugué par ce qu'on voit à l'écran que ce soit sur le fond (c'est assez osé, les allusions sexuelles sont nombreuses et le spectateur attentif pourra même apercevoir quelques tétons furtifs) mais surtout sur la forme, la chorégraphie aquatique du prologue "By a waterfall" atteignant un niveau d'inventivité et de technicité sans doute jamais égalé à ce jour (300 chorus-girls, vues aériennes démentes)

L'homme invisible 

Un film de James Whale (1933) avec Claude Rains dans le rôle titre. C'est vraiment très bon et très agréable à regarder d'autant que l'humour ne manque pas (ah, les vociférations hystériques de la patronne de l'hôtel) et que le réalisateur s'amuse des possibilités du scénario. La seconde partie (la traque) est menée tambour battant, la police en prenant pour son grade. Je n'ai pas eu l'impression que le réalisateur ait voulu nous faire un film inquiétant agrémenté de réflexions philosophiques sur les dangers de la science, il s'agit juste d'un divertissement fort efficace.

Duck Soup 

Un film des Marx Brothers et de Leo MacCarey (1933). Un sommet de loufoquerie. Truffée de jeux de mots certains gags ont du mal à franchir la barrière de la langue. Mais l'irrésistible dernier quart d'heure (à partir de la déclaration de guerre) est là pour nous démontrer combien les Marx avaient du talent.

Le mystère de la chambre close (Meurtre au chenil)  

Un film de Michael Curtiz (1933). C'est du polar à énigme avec son lot de suspects qui ont tous une raison d'avoir fait le coup (air connu). Ici ça se complique car non seulement on cherche le coupable, mais on cherche aussi le mode opératoire. Comme le film va très vite et qu'on s'y perd un peu entre tous ces personnages, on ne risque pas de trouver et quand vient la révélation finale on peut dire chapeau pour le mode opératoire un peu tiré par les cheveux mais astucieux, quant à l'identité du coupable… bof ! La réalisation est très correcte, ainsi que le casting même si l'acteur principal William Powell énerve son monde. Mais tout cela est très froid malgré les quelques tentatives d'humour d'autant qu'on ne voit pas beaucoup ces dames

Baby-face 

Un film d'Alfred E. Green (1933) avec Barbara Stanwick. Barbara Stanwick magnifiquement photographiée crève l'écran dans ce rôle de garce sublime et le film est d'un cynisme assez remarquable. Bien que réalisé avant le code Hays, on sent les prémices de l'autocensure : beaucoup de scènes ne sont que suggérées et la fin est malheureusement complètement ratée. Ça reste néanmoins très bon. (Pour l'anecdote on aperçoit John Wayne en employé de bureau pendant quelques secondes.)

Le testament du Dr Mabuse 

Un film de Fritz Lang (1933). Une atmosphère vraiment spéciale très proche du sérial fantastique. C'est bien réalisé et le montage est intéressant avec des personnages bien typés (même si on ressent bien plus que dans les films américains de la même date, l'influence encore présente du muet) On peut peut-être reprocher une certaine lenteur dans le développement du film et une fin trop abrupte. En revanche certaines scènes sont géniales  : la longue séance d'ouverture, le meurtre en voiture, la fusillade dans l'appartement des truands avec "Anna les bijoux", le couple emprisonné dans le repaire du Dr Mabuse, la poursuite nocturne finale sur la route. Tout cela participe a constituer un très bon film. PS : Il y a une scène incompréhensible : un moment le commissaire Lohmann découvre une inscription illisible gravé sur la vitre, or on a nettement l'impression que c'est lui-même qui vient de la tracer avec sa main cachée dans son dos !

Chotard et Cie 

Un film de Jean Renoir (1933) Une pitrerie lamentable, mal interprétée (seul Charpin complètement en roue libre parvient un peu à se détacher) et mal photographiée (quand on à sa disposition cette très belle femme qu'était Jeanne Boitel, la moindre des choses aurait été de la mettre en valeur). Sinon Renoir s'amuse, il fait joujou avec sa caméra et veut montrer qu'il connait le langage cinématographique, mais à quoi ça sert quand on a un scénario nul et de mauvais acteurs ?

Blondie Johnson 

Un film de Ray Enright (1933) avec Joan Blondell. Inversion des "rôles", c'est une femme qui partie de rien gravit les échelons de l'arnaque et du rançonnage pour en devenir la chef. Joan Blondel tient le rôle et elle crève l'écran de son charme et de son talent. L'histoire n'est pas très originale mais l'actrice s'y implique tellement et avec une telle aisance qu'elle la rend délicieuse. Dommage que ce soit si court (il y a pas mal d’ellipses) et que ça se termine par un demi happy-end peu crédible.

Carioca 

Un film de Thornton Freeland (1933) avec Dolores del Rio, Fred Astaire, et Ginger Rodgers. Ce film à trois atouts, la présence magique de la très belle Dolores del Rio (qui se fait donner une fessée), L'immense intermède musical "Carioca" et le clou du spectacle : le faux mais fabuleux ballet sur les ailes des avions. Sinon, ben sinon rien, l'histoire est débile et à peine compréhensible et le jeune premier est ringard. Quant à Fred Astaire…bof

Les invités de huit heures  

Un film de George Culor (1933) avec Lionel Barrymore, Jean Harlow, Billie Burke. Un très bon film choral qui fustige les faux semblants et les hypocrisies de la haute société. Cependant le film n'est pas parfait, il est excessivement bavard, beaucoup de scènes sont trop longues et puis dans quel registre est-on puisqu'on passe directement du tragique (la scène du suicide) au burlesque (l'épisode de la cuisine des domestiques) ? Et puis qu'on nous explique pour quelle raison Kitty se mêle de sauver Jordan de la faillite ? Enfin on regrettera la fin bâclée et un peu gnangnan. Côté acteurs rien à dire, ils sont tous bons, Jean Harlow est exceptionnelle et Billie Burke n'est pas mal non plus dans son genre. On pourra déplorer la présence de Marie Dressler, non pas qu'elle joue mal, mais sa présence devint vite une vraie purge.

Tarzan l'intrépide 

Un film de Robert F. Hill (1933) avec Buster Crabbe et Julie Bishop. L'histoire est décousue, voir primaire et fourmille d'invraisemblances : on peut ainsi voir un éléphant d'Asie en pleine jungle africaine, ou Tarzan qui pourtant tue des lions et des crocodiles en deux temps, trois mouvements, avoir un mal fou à venir à bout d'un quinquagénaire ventripotent. Mais ça se regarde sans déplaisir, un peu comme on lit une BD, Buster Crabbe passe plutôt bien et puis Julie Bishop est bien mignonne, on la voit même nue, mais de dos et très loin.

Du haut en bas 

Un film de G.W. Pabst (1933) avec Jean Gabin, Michel Simon, Pauline Carton, Peter Lorre. Pourquoi ce petit bijou dont l'action se passe à Vienne en Autriche n'est-il pas plus connu ? Non pas que ce soit un grand film mais c'est un vrai plaisir de la regarder et puis c'est du Pabst, le monsieur sait filmer. Ce n'est pas à proprement parler un film choral, puisqu'il y a une intrique principale, celle des mésaventures de Janine Crispin dont son flirt entre Gabin. A l'exception de Lorre et de Carton qui apportent au récit une sympathique touche d'absurdité, tous les personnages secondaires vont graviter autour d'eux. Le film fonctionne par pâtîtes touches, avec des personnages très typés mais souvent truculents. C'est aussi un film acide, la bourgeoisie et les concierges en prenant pour leur grade, et la fin est fabuleuse, le mariage farfelu entre Michel Simon et la bonne servant de contrepoint à l'annonce des fiançailles de Gabin. Les dialogues sont souvent savoureux, la bande son est amusante, bref, on passe un bon moment.

Blonde Venus 

Un film de Josef Von Sternberg (1932) avec Marlene Dietrich et Cary Grant. La réalisation est superbe, Sternberg utilisant des plans de folies, dont le plus beau reste la scène des naïades au tout début. C'est donc l'histoire d'une femme qui se donne à un autre (et en devient amoureuse) pour sauver son mari, lequel mari est tellement con qu'il lui en fait reproche. Du coup Marlène se sauve avec le gosse et le mari l'a fait poursuivre. La critique disant que l'attitude du mari est débile n'est pas recevable, puisque l'histoire c'est justement celle d'une femme dont le mari a une réaction débile. C'est mélo mais sans être larmoyant, Marlène est magnifique et les morceaux de Music-hall sont superbes (la scène du gorille est exceptionnelle) Certaines scènes sont remarquables notamment celle où elle bluffe le détective privé (en revanche celle du dortoir pour femmes est outrée). Le problème c'est comment finir un tel film ? La seule fin réaliste (rester avec Carry Grant et obtenir un droit de visite du gosse) n'étant pas politiquement correcte, restait la fin morale (on se remet ensemble à cause du gosse… mais ça ne marche jamais ce truc- là !). Mais, oublions la fin, le film reste grand.

L'homme que j'ai tué 

Un film d'Ernst Lubitsch (1932) avec Lionel Barrymore. Lubitsh nous pond un mélo. Alors évidemment c'est du Lubitsh avec ce qu'il faut de savoir-faire, d'humanisme et d'élégance, n'empêche que c'est un mélo avec un acteur principal qui en fait des tonnes. Et puis malgré le fait qu'il ne se passe pas grand-chose, le film est elliptique. Reste quelques plans magnifiques (l'ouverture), des scènes magistrales (l'entretien avec le curé, le banquet des anciens, la rumeur qui se propage…)

The Half Naked Truth  

Un film de Gregory La Cava (1932) avec Lupe Velez. Encore une perle du début du parlant à redécouvrir d'urgence. Une fable déjantée où tout y passe, le monde du spectacle, la manipulation, l'escroquerie, ça crie, ça hurle, ça gesticule, c'est bordélique à souhait, presque burlesque, et on se régale, et quand Lupe Velez se met à chanter une chanson suggestive à double sens en se trémoussant avec une gouaille qui fait plaisir à voir c'est un véritable enchantement. 77 minutes de folie et de pur bonheur. Un bijou !

Jewel Robbery  

Un film de William Dieterle (1932) avec Kay Francis. Le côté théâtral s'efface rapidement tant la prestation de la très belle Kay Francis nous coupe le souffle. Ce film de 1932 aurait été impossible à tourner deux ans plus tard avec l'instauration du code Hays. Imaginez un peu, une femme vénale ne restant avec son mari qu'en raison des bijoux qui lui offre, mais collectionnant les amants… Et la voilà qu'elle a un coup de foudre pour un gentleman cambrioleur qu'elle rejoindra à la fin du film dans sa retraire niçoise en prétextant à son mari une grande fatigue. Tout cela est délicieusement immoral et absolument charmant. Il est beaucoup question de bijoux dans ce film… qui en est un !

La Momie 

Un film de Karl Freund (1932). On peut être un chef opérateur génial sans pour ça être un grand metteur en scène, car si ce film bénéficie d'une excellente prise de vue, ainsi que des maquillages de Jack Pierce et de la beauté troublante de Zita Johann, il n'est pas pour autant une grande réussite. Le prologue est très bien avec Karloff dans son sarcophage, puis on passe au film, et là on a droit à pas mal de parlottes débitées par des acteurs peu convaincants, Karloff qui avance à 2 à l'heure, tandis que le film qui n'a aucun rythme ne décolle pas, on ne s'attache pas aux personnages, on s'ennuie et on ne se réveille un peu pour une fin bien décevante. Un Universal bien en deçà des Dracula et des Frankenstein mythiques de la même époque.

Double assassinat dans la rue Morgue  

Un film de Robert Florey (1932) avec Bela Lugosi et Sidney Fox. Une photographie particulièrement soignée, des éclairages de folie (Karl Freund quand même !) L'action se passe à Paris sous le règne de Louis-Philippe (un Paris assez fantaisiste mais qui passe bien, avec une profusion de personnages en costumes) L'interprétation est correcte avec un Lugosi qui se retient et une Sidney Fox ravissante. Notons quelques prouesses techniques comme la scène de la balançoire, ou les plans séquences de la fin, une fin assez grandiose sur les toits de Paris avec la foule en contre plongée. Le dosage est parfait, il n'y a ni angoisse, ni suspense, ce n'était pas le but mais une pointe de sadisme (sinon qu'on nous explique pourquoi Lugosi attache sa victime à une crois de St André, alors qu'il aurait pu la ligoter sur un siège), et pas mal d'humour (la scène des faux polyglottes est très réussie).  Assurément il s'agit bien là de l'un des bijoux de la grande époque d'Universal Picture.

Grand Hôtel 

Un film d'Edmund Goulding (1932) avec John Crawford et Greta Garbo… Une comédie mélodramatique chorale plutôt bien réalisée, mais comportant quelques longueurs. L'interprétation est magistrale même si Lionel Barrymore et Greta Garbo ne peuvent s'empêcher de surjouer. En revanche, Joan Crawford crève l'écran de sa beauté de son charme et de son talent ! Elle incarne une femme très libre, se prostituant occasionnellement par nécessité sans que ça lui pose trop de problèmes (nous sommes en 1932, avant le code Hays) A noter que le film développe un côté social assez intéressant entre le patron et son employé condamné par la médecine.

Haute pègre 

Un film d'Ernst Lubitsch (1932) avec Miriam Hopkins, Kay Francis, Herbert Marshall. Ce sera une constante chez ce réalisateur, tout le monde ment à tout le monde, comme ici où il nous sert une histoire gentiment immorale (et qui le restera jusqu'à la fin) servie par un trio d'acteur époustouflant. (La blonde Miriam Hopkins nous fait une prestation extraordinaire, mais la superbe brune Kay Francis parvient à la dépasser sans se forcer, jouant de l'expression de son visage). La réalisation est sans faille, et donne parfois le tournis (on descend les escaliers, on les remonte… et en musique en plus). L'utilisation de l'ellipse est géniale (un simple réveil, qui devient une horloge quand le cadre change, ou cette scène sur le palier des chambres, où Marshall et Kay Francis n'arrêtent pas d'entrer et de sortir en donnant des ordres contradictoires au majordome.) Le ton est léger, souriant, élégant, distingué, mais il est surtout charmant au sens propre. Du très grand Lubitsch ! Un chef d'œuvre !

Une heure près de toi  

Un film d'Ernst Lutbitsch (1932) avec Jeanette McDonald, Genevieve Tobin et Maurice Chevalier. Œuvre mineure et légère, elle n'en reste pas moins plaisante et élégante grâce aux talents conjugués de Lubitsch et de Jeanette McDonald qui font véritablement pétiller ce gentil marivaudage qui sait si bien relativiser les choses avec le sourire.

Scarface 

Un film de Howard Hawks (1932) avec Paul Muni. Il faut savoir que nous avons là une œuvre mutilée. Howard Hugues, le producteur voulait une sorte de transposition des Borgia à Chicago dans lequel le thème de l'inceste entre Scarface et sa sœur serait explicite. Les censeurs ont édulcoré tout ça, et y ont fait ajouter une scène de prêchi-prêcha assez pénible. Mais ce qu'il reste du film n'en est pas moins remarquable. Le montage est est nerveux, sans temps morts. C'est très bien réalisé, l'interprétation de Paul Muni est remarquable, les deux rôles féminins (la brune Ann Dvorak et la blonde Karen Morley) sont très bons, on ne s'ennuie pas une seconde.  Bref du bon cinéma même si on ne peut s'empêcher de comparer cette version avec le chef d'œuvre absolu que réalisera De Palma en 1984

Le masque d'or 

Un film de Charles Brabin (1932) avec Boris Karlof et Mirna Loy. Tout ce qui fera le charme des grands films d'aventures exotiques est déjà là ! Personnages inquiétants voire sadique (il faut voir Mirna Loy se pâmer devant le type qu'on flagelle), enlèvements, tortures, sale bêtes, rebondissements, une touche d'humour (à la fin) et puis il y a Karen Morley (bien qu'elle ne fasse pas le poids devant Mirna Loy) et Karloff évidemment !

White Zombie 

Un film de Victor Halperin (1932) acec Bela Lugosi et Madge Bellamy. Esthétiquement le film n'a pas assimilé le fait qu'en 1932 les acteurs devaient jouer autrement qu'à l'époque du muet. Mais on peut faire avec, d'autant qu'on semble percevoir l'influence de l'expressionnisme allemand. Le scénario est original, certaines scènes sont remarquables (le travail des zombies au moulin) même si c'est parfois un peu longuet. Côté interprétation Lugosi cabotine un max et Magde Bellamy éclaire le film d'une beauté quasi poétique. La bande son est assez démente. On n'est pas chez Universal mais le résultat est tout à fait honorable.

Boudu sauvé des eaux 

Un film de Jean Renoir (1932) avec Michel Simon. Formellement c'est très bien réalisé, le cadrage, les éclairages et la photo, tout cela est parfait. Michel Simon joue très bien et on apprécie le rôle de la mystérieuse Sévérine Lerczinska dans le rôle de la petite bonne délurée. Sinon, la mise en scène comprend des lourdeurs et des maladresses (Quand Boudu met une pagaille monstre dans l'appartement sous prétexte de cirer ses chaussures, était-ce la peine de force le trait à ce point que ça en devient ridicule ? Lestingois qui ne réagit pas quand Boudu lui barre l'accès à la chambre de la bonne). Maintenant parlons du propos, on nous répète à foison qu'il s'agit d'une satire de la bourgeoisie, si cela était bien l'intention de l'auteur, c'est complètement raté. Après nous avoir expliqué en version gros sabots que la société était injuste parce que personne n'aidait Boudu à retrouver son chien alors que tout le monde se met en quatre pour retrouver le pékinois d'une bourgeoise, on s'intéresse aux Lestingois dont le mari vient de sauver Boudu de la noyade. Qu'est-ce qu'on leur reproche à ces bourgeois là ? D'être conformistes parce qu'ils ont un piano pour épater la galerie (tu parles d'une critique !) De s'époumoner parce qu'un j'menfoutiste et fier de l'être fout le bordel chez eux ? D'avoir des relations extra-conjugales ? Mais à ce propos Renoir se plante complètement : La scène où chacun s'aperçoit des coucheries de l'autre se termine de façon abrupte et absurde par le mariage de la bonne et de Boudu (Renoir veut sans doute nous dire que les petits bourgeois sont hypocrites) et à la fin quand Boudu a disparu on voit Lestingois tenir dans ses bras à la fois sa femme et sa bonne, prémices d'un ménage à trois que Renoir semble critiquer. Ce film correspond à une vision anarchiste désuète (pléonasme) de la société, par laquelle les bourgeois seraient tous des salauds, même quand ils se montrent libéraux, et ceux qui emmerdent les bourgeois seraient forcément des gens admirables ! Finalement dans ce film les Lestingois et leur bonne me paraissent bien sympathiques, tandis que Boudu m'apparaît comme un parfait connard ! Je ne pense pas que c'est ce que voulait nous dire Renoir !

Les chasses du comte Zaroff 

Un film de Shoedsack et Pichel (1932) avec Fay Wray et Joel McCrea. ! Le film est surtout resté célèbre de par son pitch qui peut donner lieu à bien des réflexions philosophiques… comme si Zaroff avait lu Nietzsche ! Le film dure 60 minutes : une demi-heure de préliminaires (peut-être un petit peu longuets), une demi-heure de poursuite à laquelle on ne croit pas une seconde (la désinvolture avec laquelle il échappe à la meute de chiens affamés, fallait le faire !) mais on ça n'en reste pas moins fascinant si on veut bien "jouer le jeu". Et puis Fray Wray est si belle. On savait faire du bon cinoche en 1932… sans numérique.

Un chien qui rapporte 

Un film de Jean Choux (1932) avec Arletty. Une histoire légère et complètement farfelue. On se serait bien passé du rôle assez lourd (c'est le cas de le dire) de Madame Gras, mais sinon cette galerie de jeunes filles décontractées qui font la fête, qui lèvent la jambe, qui fument et qui boivent fait plaisir à voir. Arletty se détache du lot avec ses tenues excentriques parmi lesquelles du très moulant et du transparent (on lui voit même un sein nu, un très court instant). La mise en scène est inventive. Une charmante surprise !

Treize femmes 

Un film de George Archainbaud (1932) avec Myrna Loy. 73 minutes c'est bien court pour étoffer cet inquiétant thriller qui en aurait eu bien besoin. Alors et c'est dommage, le non-dit est omniprésent là où il aurait fallu développer, c'est le gros défaut du film, sinon, on ne peut nier qu'il y a une ambiance, du suspense efficace, une bonne musique (Max Steiner) de très belles scènes, une belle photographie, de très belles actrices (l'envoutante Myrna Loy en tête) et qu'on ne s'ennuie pas une seconde.

Numéro 17 

Un film d'Alfred Hitchcock (1932). Une curiosité. La première partie se passe entièrement dans une cage d'escalier, c'est très bien filmé, il y a une belle scène choc, le problème c'est qu'il y a beaucoup de monde et on n'arrive jamais à savoir qui est qui et ce que veulent vraiment tous ces gens. La seconde partie se passe dans un train de marchandise, ça gambade, ça s'attrape, ça s'échappe, ça joue au chat et à la souris, et ça finit mal (mais pas pour tout le monde). Encore une fois c'est excellemment filmé mais on est toujours autant paumé, et quand après l'improbable happy end vient le twist final, on a envie de dire "tout ça pour ça ! Mais ça se laisse regarder sans déplaisir. La patte d'Hitchcock est quand même bel et bien là.

Il est charmant 

Un film de Louis Mercanton (1932) avec Meg Lemonnier et Henri Garat. Un joyeux délire plein d'entrain et de bonne humeur emmené par une Meg Lemonnier absolument craquante et un Henri Garat en pleine forme. Très bonne musique de Raoul Moretti, mise en scène inventive. On n'est pas près d'oublier le monôme d'ouverture, Martine de Breteuil s'invitant dans le lit d'un bourgeois, la même, Martine de Breteuil en danseuse miniature quasiment nue sortant du livre de cours de Garat, ou encore cette impensable prière orientale. Bref que du bonheur ! PS : Le petit commentaire de présentation ose une comparaison avec les films de Jacques Demy. N'en croyez pas un mot, ça n'a rien à voir et c'est bien plus marrant.

La nuit du carrefour 

Un film de Jean Renoir (1932) avec Pierre Renoir. On dirait un brouillon. Parce qu'il y a des bonnes choses, une caméra très vivante, des plans de grisailles donnant au film un aspect irréel, des trouvailles purement cinématographiques (le kiosque à journaux), une description assez noire de la mentalité provinciale... Mais à côté de ça des longueurs à faire bailler, des plans incompréhensibles, de la publicité clandestine pour Castrol et puis surtout une intrigue inintéressante à la conclusion nébuleuse. On retiendra néanmoins une chose assez rare, c'est le personnage interprété par l'énigmatique Winna Winfried, faisant des minauderies à Maigret, lequel ne s'en laisse pas compter, mais on sent qu'il n'aurait pas fallu grand-chose…

La fille aux cheveux rouges (Red-Headed woman

Un film de Jack Conway (1932) avec Jean Harlow. Jean Harlow n'est ni Barbara Stanwyck ni Norma Shearer, et c'est bien dommage, car son côté glamour est terriblement artificiel. Mais faisons avec. On nous montre une femme beaucoup plus complexe que la manipulatrice qu'elle joue à être, et son impulsivité la pousse à commettre des actes regrettables, elle peut même être jalouse… Le film n'oublie pas d'évoquer l'hypocrisie de tout ce petit monde (dans la bonne société, il n'est pas bien vu de "monter" avec ses charmes"). Le film est parfois maladroit à l'instar de son héroïne mais quel pied de nez à la morale bourgeoise magnifié par l'un des derniers plans les plus "gonflés" de l'histoire du cinéma.

Si j'avais un million  

Un film collectif de Norman Z. McLeod, Ernst Lubitsch… (1932) avec Gary Cooper, Charles Laughton, WC Fields, Georges Raft… Tout cela est vraiment très inégal, le meilleur étant les deux sketches de Norman Z. McLeod, très proche du burlesque et iconoclastes. Le pire étant cette pitoyable histoire de condamné à mort et cette ridicule histoire de maison de retraite. Et entre le pire et le meilleur il y a l'insignifiant et le moyen. Mention spéciale tout de même à Ernst Lubitsch qui ne s'est pas trop foulé, mais qui s'est fait plaisir. Globalement ça ne passe pas la moyenne.

Le chien jaune 

Un film de Jean Tarride (1932). C'est du Simenon et si c'est l'intrique policière que vous cherchez à élucider avant Maigret, c'est tout simplement impossible, du point de vue polar, c'est donc médiocre. En revanche comme film d'ambiance c'est assez fabuleux, la reconstitution d'un petit port de Bretagne où tout le monde s'excite suite à des meurtres bizarres est remarquable. Coté interprétation le père du réalisateur interprète un Maigret bourru mais plausible, Le Vigan a tendance à en faire un peu trop mais il est bon. A remarquer aussi la jolie Rosine Deréan. Finalement on passe un bon moment

L'affaire est dans le sac 

Un film de Pierre Prevert (1932, métrage de 45 mn) avec Carette. Une farce courte et volontairement absurde qui contient des passages un peu bébêtes mais d'autres assez cocasses comme le voleur de chapeau ou l'homme qui voulait un béret. ce n'est pas du grand cinéma mais on passe un bon moment

La belle de Saïgon 

Un film de Victor Fleming (1932) avec Clark Gable, Jean Harlow, Mary Astor. Un marivaudage sous fond d'exotisme colonial qui est avant tout un film d'acteurs. Jean Harlow en prostituée exubérante crève l'écran, Mary Astor commence timidement mais monte en puissance en même temps que nait sa liaison avec un Gable bourru mais charmeur. Le dénouement est très théâtral, mais le dernier plan où Gable se fait chouchouter par Harlow est savoureux. En 1953 John Ford réalisera un remake, quelque peu édulcoré (code Hayes oblige) mais sauvé par la présence d'Ava Gardner. L'original est mieux.

Tarzan l'homme singe 

Un film de W. S. Van Dyke (1932) avec Maureen O'Sullivan et Johnny Weissmuller. Balayons d'abord quelques critiques déplacées, Tarzan ce n'est pas le "Voleur de bicyclettes" et ce gausser ici d'incohérence comportementales n'a aucun sens. Idem pour le trapèze volant dont on nous rabâche les oreilles, les éléphants qui ne sont pas d'Afrique et les transparences malheureuses… On est dans un film d'aventures, c'est de la série B et il faut faire avec. Plus gênant est le personnage de Harry Holt, non pas parce qu'il est raciste et abruti mais parce que malgré qu'il le soit, le scénario finit contre toute attente par vouloir le rendre sympathique. Sinon, c'est pas mal du tout, c'est un bon petit film d'aventures avec tous les ingrédients qui vont bien, Maureen O'Sullivan et rayonnante de beauté et de sensualité, et Cheeta est craquante.

Topaze 

Un film de Louis Gasnier (1932) D'après la pièce de Pagnol avec Louis Jouvet et Edwige Feuilllère. Un petit bijou d'interprétation et de cynisme. Topaze est probablement le chef d'œuvre de Pagnol, avant qu'il imprègne ses œuvres suivantes de moralisme et de pleurnicheries. Ici Pagnol jette un regard lucide sur la nature humaine, lucide mais tellement vrai et quasiment universel quoiqu'en dise la foule des "pas moi" ! Gasnier a eu l'intelligence de raccourcir la pièce sans en édulcorer quoique ce soit et de la rendre cinématographique. Aux côtés de Jouvet débutant au cinéma mais déjà grand, nous avons une sémillante Edwige Feuillère, le trop rare et talentueux Paul Pauley et dans un petit rôle le toujours bienvenu Pierre Larquey et on se régale et on en redemande !

Le bidon d'or 

Un film de Christian-Jaque (1932) avec Pierre Dac. Difficile de reconnaître la patte du grand réalisateur que sera Christian-Jaque dans ce premier film dans lequel rien ne va: l'histoire est inintéressante et poussive, Raymond Cordy énerve son monde et comme si ça ne suffisait pas la course de la seconde partie est quasiment illisible. A sauver éventuellement de ce ratage, Pierre Dac et la jeune dame à l'accent étranger

L'adieu aux armes 

Un film de Franck Borzage (1932). Il ne se passe pas grand-chose dans ce film ou le réalisateur transforme un livre de 300 pages en bluette et se croit obligé de faire du mélodrame lacrymogène en guise de conclusion. A part la prestation remarquable (le mot n'est pas vain) de Gary Cooper, pas grand-chose à se mettre sous la dent (et je ne parle même pas de cet insupportable curé). Un film complètement surestimé.

Aidons-nous  

Un court métrage de James Parrot (1932) avec Laurel et Hardy. Parfois drôle mais surtout sans surprise faute à un scénario qui 'en est pas un. Et vingt minutes comme ça, c'est long !

Stan boxeur 

Un court métrage de 20 minutes de James W. Horne (1932) avec Laurel et Hardy. Deux sketches collés artificiellement, dans le premier nos deux duettistes jouent les redresseurs de tort en volant au secours d'une jeune fille avec qui son patron veut se marier de force et qui l'enferme à clé en attendant la cérémonie, s'en suit une partie de lance-clé assez réjouissante, suivie d'un match de boxe bien burlesque.

Tumultes 

Un film de Robert Siodmak (1932) avec Charles Boyer et Florelle. C'est d'abord un film d'ambiance magnifiquement photographié et à la mise en scène soignée (la scène de la fête est grandiose). Si Charles Boyer est étonnant dans son rôle de macho, Florelle crève l'écran de son charme et de son talent (et en plus elle chante !) Nous avons là un bon petit film sur le milieu de la pègre berlinoise  (et le fait qu'ils aient tous l'accent de Paris n'a aucune espèce d'importance). La fin est malheureusement complétement ratée, le commissaire semblant approuver la pseudo philosophie misogyne du mauvais garçon.  

Le rosier de Madame Husson 

Un film de Bernard Deschamps (1932) avec Fernandel et Françoise Rosay. Un petit bijou, nonobstant quelque longueurs "municipales" et une scène peu claire (d'où sort cette première rosière ?), le réalisateur a vraiment respecté l'esprit de Maupassant en faisant de cette nouvelle un film d'ambiance, très inventif, très bien réalisé avec une caméra très mobile et des astuces de tournage étonnantes pour l'époque (les affaires de Fernandel dans la chambre du bordel). Le jeune Fernandel (28 ans) est très bon et n'en fais pas trop, Françoise Rosay n'a pas grand-chose à faire mais quelle classe, et Marguerite Pierry est désopilante comme toujours. Les scènes sont longues mais fortes (le banquet, le bordel). On, a droit a un bel épisode burlesque avec les pompiers et quelques chansonnettes amusantes. Et comme toujours chez Maupassant (quand il n'est pas trahi) la morale n'est pas sauve ! Un régal.

Une soirée étrange (La Maison de la mort)

Un film de James Whale (1932) avec Boris Karloff, Melvyn Douglas, Charles Laughton, Raymond Massey, Gloria Stuart, Lillian Bond, une comédie noire et chorale magnifiquement interprétée et réalisée de main de maître par James Whale. L'atmosphère anxiogène du château est perceptible de suite avec les prestations étonnantes d'Ernest Thesiger en aristo déphasé et d'Eva Moore en bigote pudibonde acariâtre. Nous sommes avant l'instauration du code Hayes, et Whale s'en donne à cœur joie dans une critique de la pudibonderie qui prend son point culminant quand Eva Moore agresse verbalement la jolie Gloria Stuart. Certaines séquences doivent beaucoup à l'expressionnisme (le miroir déformant dans lequel Gloria Stuart se regarde, ou le jeu d'ombres chinoises)  Quant à la scène d'amour et que d'aucuns ont décrié, il faut peut-être assimiler le fait qu'on est en plein dans le second degré. Tout cela est mené à un train d'enfer avec des acteurs au top qu'il faudrait citer tous, mais on peut avoir un faible pour la classe de Melvyn Douglas et la beauté de Gloria Stuart, un vrai plaisir !.

Fantômas  

Un film de Pál Fejös  (1932) Un film très bancal divisé en deux partie. La première est un petit bijou de réalisation, une belle photographie contribue à créer un climat inquiétant qui ne se dément pas jusqu'à au crime. On se dit que l'on va assister à un chef d'œuvre si cette qualité perdure ! Il nous faut hélas déchanter avec une seconde partie en forme de wodunit, exercice périlleux s'il en est et qui change complétement le film, des personnages pittoresques disparaissent de la distribution, des crimes ont lieu, l'inspecteur très futé arrive et résolut l'affaire alors qu'on y a rien compris. Résultat on a failli déterrer une pépite, mais il en manquait la moitié.

Marius 

Un film d'Alexandre Korda (1931) avec Raimu, Pierre Fresnais, Orane Demazis. Ce film reste gravé dans la mémoire du cinéma à cause de deux extraordinaires scènes cultes (les quatre tiers et la partie de cartes) ainsi que pour l'interprétation fabuleuse du rôle de César par Raimu. Mais à y regarder de plus près tout n'est pas si bon que ça, côté interprétation le gros souci c'est Orane Demazis (Madame Pagnol) qui disons le carrément ne sait pas jouer. Il aussi un problème de dialogues, autant ils sont excellents et incisifs quand on reste dans le domaine comique, autant les dialogues sérieux ont du mal à passer, trop longs, manquant de concisions et surtout virant dans le mélo. Enfin le film ne se démarque pas d'un certain moralisme parfois assez lourdingue, certes le personnage de Fanny se veut fort et libre mais se noie dans l'ambiguïté. Un film surestimé ce qui ne veut pas dire qu'il soit mauvais !

Monkey Business 

Un film de Norman Z. McLeod,(1931) avec les Marx Brothers. Il faut se rendre à l'évidence, tous les films des Marx Brothers ne sont pas bons. La faute en incombant à des réalisateurs médiocres. Ici c'est juste moyen : les seconds rôles masculins sont mauvais y compris Zeppo, ça part dans tous les sens et on plutôt l'impression d'avoir affaire à une série de sketches enfilés n'importe comment qu'à un véritable film. Il a trop de jeu de mots qui passent mal la barrière de la langue et pas assez de bon burlesque. A sauver la scène des tonneaux et surtout celle du théâtre de marionnettes. On est bien loin de Duck soup ou de une nuit à Casablanca !

Dr Jekyll and Mr Hyde 

Un film de Rouben Mamoulian (1931) avec Fredric March, Miriam Hopkins et Rose Hobart. Librement inspirée de la nouvelle de Stevenson (dans laquelle Jekyll n'a pas d'aventures féminines), ce film est un chef d'œuvre, le trio d'interprétation principal exécute un véritable sans faute, les vedettes féminines sont au top et magnifiquement photographiées, March mérite amplement l'oscar du meilleur acteur qu'il a obtenu en 1932. Le film commence en caméra subjective et adopte parfois des plans extrêmement rapprochés tout à fait surprenants. La scène dans la chambre d'Ivy (Miriam Hopkins) est un petit bijou d'érotisme contenu. En filigrane, le film critique les conventions sociales (ici celle de la bourgeoisie victorienne) mais pose la question "peut-on se libérer de tous les carcans sociaux au risque d'aller trop loin ?" …comme Mr Hyde.

Illicite  

Un film d'Archie Mayo (1931) avec Barbara Stanwick, Joan Blondel. Film étonnant complètement dominé par la beauté et le talent de Barbara Stanwick qui crève l'écran en interprétant un personnage de femme libérée et forte. Qu'on ne s'y trompe pas cette comédie reste un surprenant plaidoyer anti-mariage, même si la fin et l'absurde et incohérente dernière scène semble nous dire le contraire. (mais, que voulez-vous, il fallait bien une fin un peu "morale"). A voir !

Dracula 

Un film de Tod Browning (1931) avec Bela Lugosi et Helen Chandler. Il est nécessaire de savoir que le film n'est pas l'adaptation directe du roman de Bram Stoker, mais une adaptation de sa version théâtrale créée par Hamilton Deane et J.L. Balderston en 1924 (et joué sur scène par Bela Bugosi à partir de 1927). Si cet aspect théâtral contribue à alourdir le film, c'est le seul défaut de cet oeuvre qui n'est ni un film d'horreur ni un film d'angoisse mais un film fantastique qui vaut surtout pour sa magnifique et envoûtante atmosphère gothique.

Frankenstein  

Un film de James Whale (1931) avec Boris Karloff. Court mais remarquablement réalisé et photographié, avec des décors de folies, des scènes cultes (la noyade de la gamine, le père qui traverse la fête avec son cadavre, le final dans le moulin en flamme). Même si Whale fera encore mieux avec la fiancée de Frankenstein en 1935, ce film fondateur du mythe reste un chef d'œuvre.

The bad sister   

Un film de Hobart Henley (1931) avec Sidney Fox, Bette Davis, Humphrey Bogart. C'est assez astucieux, l'auteur met en place tout ce qu'il faut pour plonger dans le mélodrame le plus noir : l'aigrefin dont on devine la nature à 10 km, la femme qui meurt en couche, le malaise du père, le désarroi de Marianne), mais miracle, il nous évite le pire avec un twist semi-moral. A noter en seconds rôles, les prestations prometteuses de Bette Davis et d'Humphrey Bogart, et celle d'un sale gosse étonnamment bien dirigé. Une bonne petite surprise.

Shanghai express 

Un film de Josef Von Sternberg (1931) avec Marlène Dietrich. Le film n'est pas sans défaut : L'intrigue est très faible (et peu crédible), Clive Brook qui tient le premier rôle masculin n'est pas à la hauteur. La galerie de personnages secondaires (les voyageurs) ne vole vraiment pas très haut. On ne peut par ailleurs s'empêcher de penser à "Boule de Suif" de Maupassant, mais ce dernier contrairement à Sternberg ne s'encombrait pas d'une "morale chrétienne" lourdingue et pénible. D'un autre côté, le film est un hommage à Marlène, rayonnante, impériale, superbement photographiée et faisant preuve d'un professionnalisme étonnant. Et puis il y a aussi ces travellings de folie qui donnent le tournis avec l'utilisation judicieuse de la géométrie des trains de voyageurs et cette reconstitution des mouvements de foule qui est magistrale. (quoique la scène où les soldats sont fusillés, soit ratée). Un assez bon film possédant des qualités certaines, mais qu'il convient de ne pas surestimer.

L'ennemi public 

Un film de William Wellman (1931) avec James Cagney. Difficile de ne pas faire la comparaison avec "Le petit César" De Mervyn LeRoy sortit quelques mois avant. Le Wellman le dépasse de par sa démonstration plus claire, de par l'interprétation de Cagney supérieur à celle de Robinson et par l'introduction de scènes chocs (Cagney tirant sur un une peau d'ours, tuant un cheval, écrasant un pamplemousse sur le visage de sa copine, pataugeant dans le caniveau, et surtout le dernier plan, quasi fantastique). Les seconds rôles sont assez bons (Magnifique Joan Blondell) sauf Jean Harlow qui semble complètement larguée. On regrettera cependant le côté moralisateur trop appuyé ainsi que l'aspect mélodramatique qui devient pénible en fin de film.

Le petit César 

Un film de Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson. Contrairement à ce qui est reporté parfois, ce film n'est en rien le fondateur des films de gangsters parlants, puisque "Au seuil de l'enfer" d'Archie Mayo fut réalisé avant et lui est supérieur par son scénario et par sa réalisation. Ici l'histoire n'est pas inintéressante mais elle reste trop simpliste, trop schématique même si ça s'améliore dans la partie finale. Par ailleurs LeRoy a un certain mal à s'affranchir des tics du cinéma muet, ainsi certaines gestuelles sont exagérées et il y a même des "cartons". Un film globalement décevant malgré la prestation de Robinson.

Fascination 

Un film de Clarence Brown (1931) avec Joan Crawford et Clark Gable. Le cinéma américain d'avant 1934 regorge décidément de pépites qu'on ne se lasse pas (re) découvrir. Ainsi ce film de Clarence Brown qui nous dépeint une femme qui se fait entretenir par unique choix personnel, et qui l'assume complétement (merveilleuse Joan Crawfod). Le film dénonce aussi l'hypocrisie américaine qui assimile les écarts sexuels à de la malhonnêteté. Propos et situation impossible après l'instauration du code Hays… et 85 ans plus tard le sujet reste d'actualité. L'interprétation de Joan Crawford est éclatante (et ce n'est rien de l'écrire), Clark Gable est déjà très élégant malgré son absence de moustache. Bonne réalisation, belle image, bonne musique… chef d'œuvre.

Five star final  

Un film de Mervyn LeRoy (1931) avec Edward G. Robinson et Boris Karloff. Un chef d'œuvre qui malgré le sujet mélodramatique reste très pudique. Le personnage interprété excellemment par Robinson est vraiment intéressant, acceptant une campagne de presse allant contre ses convictions, il la met malgré tout en œuvre "parce que c'est son boulot", et s'il est le seul à regretter les conséquences de ses actes, il ne se cherche pas non plus d'excuses et ira se consoler avec sa secrétaire. Il est aussi le seul à dire en filigrane une vérité trop souvent cachée : si la presse est pourrie, c'est que ses lecteurs le sont aussi. Karloff en infâme salopard n'est pas mal non plus mais d'une façon générale toute la distribution de ce film fort et intelligent est excellente. Et une mention spéciale pour la standardiste gouailleuse.

M. Le Maudit 

Un film de Fritz Lang (1931) avec Peter Lorre. Les chef-d'œuvres ne vieillissent jamais, car s'en est assurément un. Bien sûr, c'est expressionniste, mais il s'agit d'un choix esthétique assumé, bien sûr certaines postures du cinéma muet sont encore là... Et alors ? Sinon la maîtrise de la forme est extraordinaire, un montage génial, des plans séquences insensés, l'utilisation de la caméra subjective et du leitmotiv, les éclairages, la direction d'acteur (Le meilleur rôle de Peter Lorre), des séquences de folie (l'introduction, la fouille de l'immeuble, le tribunal des malfrats). Quant au fond, il est très fort, le film ne contient aucun héros positif, mais on s'identifie à la meute qui veut la peau de M. jusqu'à ce que le malfrat jouant le rôle de l'avocat, puis M. lui-même nous fasse basculer dans la compassion. Lang ne juge rien mais pose les bonnes questions sur la justice, la vengeance, l'opinion publique. Si ce film reflète l'état de délabrement de l'Allemagne de 1930, il est erroné de dire qu'il critique la montée du nazisme, doit-on rappeler que la femme de Fritz Lang (lequel ne partageait pas ses opinions)  dont les sympathies nazis étaient connues participa au scénario. Mais ce nécessaire aparté n'enlève rien au fait que ce film soit un chef d'œuvre.

Vies privées 

Un film de Sidney Franklin (1931). Décidément, avant l'instauration du code Hays, les films américains osaient tout ! Car enfin quelle est la "morale" de cette brillante comédie sinon de nous expliquer que l'amour vache dans un couple est une relation parfaitement viable pourvu que l'on en édicte les règles et les limites et qu'on fait en sorte de les respecter. Norma Shearer domine de loin la distribution en illuminant le film de sa beauté et de son talent. Un petit bijou pétillant comme du champagne à découvrir d'urgence.

Les Carottiers 

Un film de par James W. Horne (1931) avec Laurel et Hardy. En fait version française (Laurel et Hardy parlent vraiment français, du moins ils s'y efforcent et le résultat n'est pas toujours évident) de la réunion artificielle de deux courts métrage (Drôles de bottes et Le Bon filon) pour en faire un film de 63 minutes. Tout cela souffre d'un mauvais rythme, quand un gag est trop long, il devient lassant et vingt minutes pour retirer une paire de bottes ça devient soulant, la seconde partie souffre également de sa longueur et sa dernière scène qui se voudrait un chantage à l'amitié, est consternante de platitude.

Les deux légionnaires  

Un court métrage de 35 minutes de James W. Horne, (1931) avec Laurel et Hardy. Plutôt bon puisque le délire va crescendo pour atteindre son paroxysme dans la mythique scène de l'attaque du fort.

Toute la vérité 

Un court métrage de 20 minutes de James W. Horne (1931) avec Laurel et Hardy et Mae Bush. Un Laurel et Hardy hystérique, mais ce n'est pas pour nous déplaire d'autant que tout cela est fort bien rythmé, la prestation de Mae Bush dans un rôle complètement dingue (c'est le cas de le dire) est savoureuse.

Ames libres   

Un film de Clarence Brown (1931) avec Norma Shearer, Lionel Barrymore, Clack Gable. On comprend clairement qu'on est avant le code Hays, après 1934 ce genre de film aurait été impossible même en censurant. Le film vaut surtout pour son interprétation, on sort juste du muet et ça se voit parfois, et si Barrymore est excellent (malgré son cabotinage), la belle Norma Shearer y est sublime ! La photo est excellente, en revanche c'est souvent excessivement bavard et ça frôle de près le mélodrame. L'histoire est intéressante et se concentre autour du personnage de Jan, une femme que son père a appris à vivre librement sans se préoccuper des conventions sociales. Un bon film.

Svengali 

Un film de Archie Mayo (1931) avec John Barrymore. On sort du muet et ça se voit ce qui est paradoxal dans ce film ou la voix revêt une importance considérable. C'est lent, ça prend des pauses et John Barrymore cabotine à fond les manettes. Les décors sont impressionnants, à ce point qu'on se croirait dans un film expressionniste allemand. Quant à Marian Marsh elle est mignonne comme un cœur et possède un joli filet de voix. Tout cela est quand même un peu poussif malgré la fin inattendue

Agent X 27 

Un film de Josef von Sternberg (1931) avec Marlene Dietrich. On sort du muet, ça se voit et il faut s'y habituer ce qui ne pose d'ailleurs aucun problème. Ce film intelligent est un festival de scènes rendant grâce au charme immense et à la beauté diabolique de Marlene. On n'est pas près d'oublier sa prestation au carnaval, celle en servante d'hôtel en Russie, ses face-à-face avec ses partenaires masculins et cerise sur le gâteau la préparation de son exécution, probablement la scène de mise à mort la plus folle et la plus magnifique de l'histoire du cinéma. Sublime !

Mary 

Un film d"Alfred Hitchcock (1931). Version allemande de Meurtre (1930), on ne peut pas dire que ce film casse des briques, Aucun rythme, aucun suspense, intrigue peu captivante, acteurs sans charisme, et si la scène finale fait exception dans cette réalisation mollassonne par sa très belle mise en scène ce qu'on nous montre est archi téléphoné.

Les berceaux 

Un court métrage de 6 minutes de Jean Epstein (1931).Epstein se contente de coller des plans sur le texte de Prudhomme mis en musique par Gabriel Fauré. Le moins qu'on puise dire c'est que ça ne laisse pas un souvenir impérissable. Faut dire que le texte n'a rien d'extraordinaire et que Fauré a fait tellement mieux

Bric à brac et compagnie 

Un moyen métrage de 39 minutes de André E. Chotin (1931) avec Fernandel. Une pochade plutôt agréable à regarder avec une mise en scène plutôt correcte et qui se permet même d'être inventive comme la puce qui fait se gratter un couple de statues nues, Zina qui s'ennuie en, dansant avec Fernandel, ou l'ambiance festive du mariage. On a même droit à une jolie séance de cabaret avec une belle blonde en bikini. Sinon il y a des lourdeurs mais on fait avec. Une bonne curiosité, donc.

A l'est de Shanghai 

Un film d'Alfred Hitchcock (1931) .Le film commence en fanfare visuellement et techniquement avec notamment cette incroyable scène de l'ouvertures des parapluies. Ensuite et sans doute parce que l'intrigue est simple, Alfred nous ballade, puis les choses se complique et le ton jusqu'ici léger va devenir plus grave. En fait il s'agit d'adultères mais de deux adultères traités bien différemment. Pas de suspense disent certains, auraient-ils oublié la scène dans la cabine de l'épave du bateau ? Quant à la fin elle est plus désabusée que morale, manifestement l'homme fait des efforts, les disputes recommencent. Hitchcock est-il sincère en croyant qu'un bébé arrangera tout ? Allez savoir ! Ce film est une curiosité, il en a d'autres dans sa filmo, mais on ne s'ennuie pas une seconde, Joan Barry et Betty Amman sont charmantes, il y a juste une petite longueur, un bon film!

Le Blanc et le Noir 

Un film de Robert Florey et Marc Allégret (1931) sur un scénario de Sacha Guitry. On a dit beaucoup de vilaines choses sur ce film. Ainsi la réalisation serait défaillante ? Non elle n'a rien d'exceptionnelle mais elle ne nuit pas à la vision du film. Le film serait raciste ? Non, parce que le propos est ailleurs. Une critique de la bourgeoisie ? Au début sans doute puisque Raimu tient à sa respectabilité, mais ensuite il se montre humaniste en renonçant au divorce et en acceptant de continuer à vivre avec sa femme adultère ! Connaissant Guitry une telle attitude n'a rien de critique, bien au contraire ! L'interprétation un tant soit peu théâtrale et cabotine reste excellente, Raimu la survolant en nous offrant une prestation remarquable.

La Fine Combine 

Un moyen métrage de 30 minutes de André E. Chotin (1931) avec Fernandel, Edwige Feuillère, Suzanne Dehelly. Une petite farce un peu poussive mais qui peu séduire par son amoralité assumée et surtout par la prestation délurée d' Edwige Feuillère dans le rôle d'une femme entretenue. Quant a ceux qui s'extasient devant le rôle de Fernandel, je ne les comprends pas.

Morocco 

Un film de Josef Von Sternberg (1930) avec Marlene Dietrich et Gary Cooper. Un film sur l'amour fou entre un légionnaire sorti de nulle part et une chanteuse de beuglant. Voilà qui pourrait donner n'importe quoi, sauf qu'ici c'est complètement transcendé. Une photographie magnifique, il faut voir ces jeu d'ombres au début, de longs travelling comme Sternberg les adorait, une belle musique (Marlene chantant "Lorsque tout est fini…"), Et puis les acteurs sont fabuleux, Marlène bien sûr, mais aussi Gary Cooper jouant un jeu inhabituel et désinvolte. L'histoire est moins schématique qu'on ne pourrait le penser : si la jalousie de Cooper l'égare, on notera que Marlène respecte son richissime bienfaiteur, lequel n'hésite pas par amour pour elle à la rapprocher de Cooper. Notons aussi Le baiser sur la bouche que donne Marlène à une spectatrice du cabaret et qui est probablement le premier baiser lesbien public montré au cinéma. Des situations complexes, intelligentes et osées qui disparaîtront pendant 30 ans du cinéma américain avec le Code Hays. Quant à la fin, on peut en penser ce qu'on n'en veut mais qu'on ne vienne pas me dire que ce n'est pas sublime !

The Office Wife 

Un film de Llyod Bacon (1930). Il ne se passe pas grand-chose dans ce film d'à peine une heure et les mauvais esprits pourront n'y voir qu'un éloge de la vénalité et de la promotion canapé, alors qu'au contraire on pourra s'amuser de cet aspect amoral et politiquement incorrect. Mais le film a le mérite de dépeindre des attitudes que le Code Hays supprimera des écrans américains. Ainsi le mari soupçonnant que sa femme le trompe, choisira de ne pas vouloir le savoir, ainsi le même apprenant de la bouche de sa femme qu'elle a une liaison et qu'elle va demander le divorce, se contente de faire profil bas, sa femme quant à elle refusant de voir son mari malheureux l'embrasse tendrement et se propose même de l'aider à reconquérir sa secrétaire. Et puis il a cette scène au clair de lune sur la plage où la petite secrétaire écoute son premier fiancé évoquer ce que sera leur vie, et où elle n'en peut plus. Eh oui entre la médiocrité et la vénalité, le choix est clair. On regrettera juste que la fin trop vaudevillesque (dans le mauvais sens du terme car il y a d'excellent vaudevilles), mais cette petite perle reste délicieuse.

Junon et le Paon  

Un film d'Alfred Hitchcock (1930) C'est théâtral à l'excès, bavard, lent et lourd, ce qui fait déjà beaucoup, mais en plus il faut que le film sombre dans le mélo le plus noir : victime d'un héritage bidon, la famille doit rendre tout ce qu'elle a acheté, la fille de la famille est mise enceinte par le notaire en fuite et le fils de la famille se révélé être une balance qui est emmené par deux hommes pour être abattu… Plus mélo tu meurs ! De plus le scénario n'est pas clair et n'explique pas pourquoi le notaire à fait ce coup tordu (juste pour pouvoir coucher avec la fille ?) Enfin, bref, c'est mauvais.

L'ange bleu 

Un film de Josef Von Sternberg (1930) avec Marlene Dietrich et Emil Jannings. Merveilleusement mis en scène, et porté par deux immenses acteurs, si différents dans leur registre, ce film mérite amplement son statut de classique du cinéma. Des scènes cultes, Marlène et ses jambes bien sûr, mais aussi, la carte postale à système sur laquelle on souffle, le repas de noce ou Jannings fait le coq… Le fond est intéressant et beaucoup moins primaire qu'on ne pourrait le penser. Lola (Marlène Dietrich) est-elle véritablement responsable de la déchéance de Jannings ? A aucun moment elle n'a essayé de le dépouiller, sa seule faiblesse est de ne pas avoir refusé de l'épouser. Jannings a cru pouvoir l'acheter croyant que le bonheur était négociable, Lola a voulu rester elle-même, d'une telle situation le drame ne pouvait qu'éclater. Lola n'est pas vraiment méchante, elle le prouve plusieurs fois, (un peu manipulatrice quand même) mais comme elle le chante si bien, elle est faite pour l'amour. Quant à Jannings, le pauvre, on a mal pour lui.

Animal Crackers (l'explorateur en folie) 

Un film de Victor Heerman (1930) avec les Marx Brothers. Ça commence en trombe, façon comédie musicale, on se dit que si tout le film est comme ça on va se régaler. Il y a hélas ensuite une baisse de rythme avec des dialogues un peu long dont les subtilités ont du mal à franchir les barrières de la langue, et puis il y a cette partie de bridge assez mauvaise. Malgré tout cette histoire de substitution de tableau fonctionne plutôt bien avec quelques répliques bien senties, un Harpo déchaîné, un Groucho en pleine forme, et une distribution féminine absolument charmante dominée bien sûr par Margaret Dumont. L'un des meilleurs Marx malgré quelques réserves.

Les anges de l'enfer 

Un film de Howard Hugues (1930) avec Jean Harlow. Eh ben, il a dû coûter bonbon, celui-là ! Entre les séquences couleur, les combats aériens et le zeppelin ! Mais le résultat est à la hauteur. Non seulement il y a des scènes spectaculaires (et ce n'est rien de le dire) comme les séquences de guerre dans les airs, les scènes chocs qui restent longtemps gravés en mémoire comme les types qui sautent du zeppelin, mais il s'agit d'un film d'action exceptionnel, l'œuvre d'un visionnaire. Evidemment les scènes intimistes ne sont pas au niveau, mais cela est dû au casting masculin, parce que côté féminin, la Jean Harlow, il faut la voir rayonner dans ce film pour le croire. Une nymphomane n'ayant pas peur des décolletés… Certains y ont vu la description d'une garce alors que qu'elle assume avec sincérité son statut de femme émancipée refusant de suivre les codes moraux en usages (et tant pis pour ses petits amis incapables de la comprendre sur ce point). Le film nous montre aussi sans discours inutiles que ce qu'on appelle le courage n'est bien souvent rien d'autre que de la bravade. Chapeau !

Au seuil de l'enfer 

Un film d'Archie Mayo (1930) avec James Cagney. Important dans l'histoire du cinéma puisque ce film fixe les codes du film de gangsters qui seront repris par la suite notamment par l'excellent Scarface d'Howard Hawks. Par exemple le fameux tic de Georges Raft qui joue à faire sauter une pièce de monnaie dans sa main à son origine dans ce film. Coté Casting si Cagney passe bien, Lew Ayres paraît un peu frêle pour un chef mafieux, mais Dorothy Mathews est mignonne comme tout. Le scénario est assez simpliste mais nous offre quelques pépites : l'annonce de la mort du gosse, Cagney qui pelote (très softement) la femme de Lew Ayrès pratiquement sous le nez de celui-ci, les camions qui pétaradent pour couvrir les bruits d'un meurtre. Rien n'est édulcoré, on était avant le code Hays, ça se voit et ça fait du bien.

A l'ouest, rien de nouveau 

Un film de Lewis Milestone (1930) Disons-le d'emblée le film souffre de quelques imperfections : quelques longueurs auraient pu être évité (la scène avec la maman) et le côté didactique paraît parfois artificiel. Mais cela mis à part, quel claque ! Les scènes de batailles sont grandioses, d'autres scènes sont marquantes (le prof et sa propagande, le retour de Paul qui se fait traiter le lâche par des gamins, la gestion des blessés, et cette fin…) Mettre moins de 4 étoiles serait une faute de goût.

La divorcée 

Un film de Robert Z Leonard  (1930) avec Norma Shearer. Le problème de ce film c'est son incohérence. Tout se passe comme s'il y avait deux films différents qu'on essaie péniblement d'enchainer. Car enfin le personnage de Norma Shearer de la première partie n'a rien à voir avec celui de la seconde ! Au début Shearer se brouille avec son mari, non pas à cause de son écart (même si ça la contrarie) mais à cause de l'aveu de sa liaison. Elle se venge, et quand devant son mari elle lui dit que maintenant ils sont quittes, celui se révèle dans toute sa médiocrité. Elle le quitte pour de bon et décide de vivre sa vie. Première partie impeccable donc. La transition vers la seconde partie n'a aucun sens, Shearer allume tout un tas d'homme mais refuse de consommer ! Passons. Quant à la dernière partie, ce n'est ni plus ni moins qu'une défense bien poussive du mariage au sens religieux du terme (et donc de ses liens indissolubles quel que soit les circonstances). A ce titre la scène où apparait la femme défigurée est grotesque. La transformation de Shearer en femme soumise en devient inepte et ce qui est présenté comme un happy end est incongrue :  elle va se remettre avec son beauf, médiocre, violent et alcoolique ! On aurait voulu aimer ce film ne serait-ce que pour la prestation de Norm Shearer, fabuleuse. On va donc dire 5 pour la première partie et zéro pour la seconde ce qui nous fait une moyenne.

La piste des géants 

Un film de Raoul Walsh (1930) avec John Wayne. Sans doute la première superproduction western du parlant. Walsh a su y imprimer un véritable souffle épique à ce point que les deux sous-intrigues y paraissent anecdotiques. Il y a d'énormes moments de mise en scène, notamment le passage de la rivière, mais aussi un souci du réalisme qui disparaîtra du western que pour renaître a la fin des années 1960, on y meurt beaucoup y compris des enfants. Les indiens sont présentés sans trop de manichéisme, on regrettera juste quelques prêchi-prêcha, mais que voilà un grand film !

L'âge d'or 

Un film de Luis Buñuel (1930). L'un de films préférés de coupeurs de cheveux en quatre, je n'entrerais pas dans ce petit jeu qui consiste à analyser chaque scène, j'ai autre chose à faire. La bonne question est de de se demander si la vision de film fonctionne encore aujourd'hui. La réponse est oui mais avec de grosses réserves. Le film n'a aucun sens mais puisqu'il s'agit de surréalisme on ne lui fera pas ce procès. L'histoire n'existe pour ainsi dire pas et nous avons là un catalogue des scènes avec un vague fil rouge amoureux. Alors évidemment il y a des choses surprenantes, la vache sur le lit, les évêques transformés en squelette, un autre évêque défenestré, Mais la plus belle séquence reste cette scène de flirt entre Gaston Modot et la délicieuse Lya Lys sur fond de musique de Tristan et Isolde, comportant deux passages culte, le léchage mutuel des doigts et Lya Lys faisant pratiquement une fellation à l'orteil d'une statue. Reste qu'à côté de ces surprises, nous avons des scènes incompréhensible ou pire ; volontairement méchantes et dont on se demande l'utilité comme quand Modot s'en prend à un chien ou à un aveugle ou quand il gifle la jolie marquise Et puis il y a ce final hors sujet (si toutefois il y a un sujet) formaté pour faire scandale et qui se réfère au marquis de Sade, comme si c'était une référence !. Bref ça se regarde comme une curiosité, mais ça ne vaut guère sa réputation et ma note vaut surtout pour la magnifique séquence de flirt décrite plus avant.

A propos de Nice 

Un film de Jean Vigo (1930). Il ait des films qu'il est de mauvais ton de critiquer, alors si on n'a pas aimé il vaut mieux faire semblant ou alors se taire. Eh bien moi, en vérité je vous le dis, ce film m'a profondément ennuyé. Evidemment d'un point de vue formel il peut être intéressant pour ceux qui justement ne s'intéressent qu'à la technique, mais le reste, Vigo semble découvrir qu'il y a des riches et qu'il y a des pauvres ! Trop fort ! Vigo semble découvrir que la chose militaire peut conduire au cimetière ! Trop fort ! Et encore plus fort Vigo découvre qu'après la vie, il y a la mort ! Si certains se sont dit bouleversés par la "poésie" du film grand bien leur fasse, mais cela n'a pas été mon cas ! Et puis d'abord ce film n'est pas un documentaire, la fille qui se retrouve à poil sur sa chaise, elle a bien été mise en scène, non ? Idem pour le cireur qui cire des pieds nus, Bref tout cela n'a rien de passionnant, heureusement on a droit à la fin à une bande de nanas complètement déchainées qui se mettent à danser et nous montrer leur culotte Sacré Vigo, va !

Polissons et galipettes 

Une compilation de films anonymes porno de 1905 à 1930
- La Coiffeuse. (1905) Très soft, très court mais très joli
- Atelier Faiminette. (1921) Lesbos, fessée et arrivé du patron
Abott Bitt au couvent. (1925) Nonnes, lesbos, bisex masculine
- La Fessée à l’école. (1925) Lesbos, fessées, party
- Mousquetaire au restaurant. (1920) Trio
- La Voyeuse. (1924) Voyeurisme et trio
- Miss Butterfly. (1925) bisex féminine et masculine
Agenor fait un levage. (1925) On chuchote que Renoir aurait participé au tournage, en tous les cas c'est assurément un travail de professionnel. Le thème c'est l'impuissance Qui ferait ça aujourd'hui ?
- Devoirs de vacances. (1920) Party avec nonnes et la participation d'un petit toutou
- L'Heure du thé. (1925) Quatuor avec bisexualité masculine
- Massages. (1930) A quatre mains, Très bien réalisé et très réaliste
Buried Treasure. (1925) Un dessin animé intéressant techniquement mais décevant sur le plan de l'érotisme.
On va vous dire qu'on a rien inventé, que la porno c'est toujours de la porno et certains vont rouspéter qu'il y a trop de poils. Pourtant il a une dominante dans ces petits films c'est le plaisir de voir jouer les participants, c'est rigolard et décontracté, on ose tout dans la plus grande décontraction, en fait ces années-là seront le premier âge d'or du porno mais réservé à une clientèle aisée, le second viendra bien plus tard dans les années 70-80 avec les français Claude Bernard-Aubert, Michel Ricaud, Gerard Kikoïne, Claude Mulot, Francis Leroy…le danois Werner Hedman, les américains Gerard Damiano et Ann Perry. Période d'humour et de star system et démocratisation du porno. Après ce ne sera plus la même chose, quelques italiens dans les années 1990 peut-être mais aujourd'hui, ce porno là est mort, non pas comme le répète les perroquets à cause du gonzo qui reste marginal, mais à cause du cloisonnement et d'Internet, on ne consomme plus le porno de la même façon, le porno standard reste de l'hétéro matinée de lesbos mais surtout rien d'autre, pour voir du SM, du trans, ou d'autres spécialités, et bien il faut aller sur les sites spécialisés, on ne mélange plus rien, on catégorise à mort et humour et décontraction se font rares ! Ce n'est pas aujourd'hui que l'on verrait comme dans "heure du thé", un monsieur se pointer et faire des choses avec un autre monsieur. Et c'est bien dommage...

Drôles de locataires 

Un court métrage de 28 minutes de James Parrott  (1930) avec Laurel et Hardy et Thelma Todd.  Quiproquos et comiques de situation pas toujours très finauds mais sauvés par cette incroyable scène où Laurel travesti en soubrette se fait pratiquement draguer par Thema Todd. Etonnant

Nudist-bar 

Un court métrage anonyme de 1930. Au-dela de l'aspect anecdotique de la chose, il est remarquable que la fonction érotique de ce petit film de 7 minutes fonctionne encore (je parle pour moi, évidemment) La situation n'a pourtant rien de bien originale si ce n'est cette idée d'aller se déshabiller au comptoir d'un bistrot ! Mais il y a un charme , une naïveté, une décontraction, de jolies actrices, bref un cocktail gagnant…

Rien que pour elle (För Hennes Skull)

Un film suédois de Paul Merzbach (1930) avec Inga Tidblad. On a un peu peur au début parce que c'est un peu lourd, avant de se laisser entrainer par ce film délicieux qui emboite toute une série de genre : comique, vaudeville, marivaudage, music-hall, mélodrame… Et à propos de ce dernier genre on craint un moment que le film nous fasse une leçon de moralisme,, mais loin de ça, car si tout s'arrange à la fin, pour une fois la morale bourgeoise n'est pas sauve. La partie de music-hall centrale assortie d'une belle antienne n'a rien de géniale mais est d'une joyeuseté réjouissante. Quant aux interprètes on a droit à un excellent Gösta Ekman: et à une pétillante Inga Tidblad au sourire charmeur. (dommage que la scène de la baignoire soit si pudique !)  un film à découvrir (resté inédit en France pendant 92 ans !)

Un chien andalou 

Un film de Luis Buñuel (1929). Ce film a tellement été cité, analysé, disséqué qu'il est difficile d'y apporter un jugement serein. Contrairement au mouvement dada qui assumait complètement les foutoirs qui s'en réclamaient (voir l'excellent Entr'acte de René Clair), le surréalisme est censé ne jamais être gratuit. On pourra être pris de fou rire par le symbolisme de l'homme traînant derrière lui comme un fardeau tout le poids de son éducation bourgeoise (séminaristes inclus gratuitement), alors que d'autres hurleront au sacrilège ou à la lourdeur. (Buñuel reprendra cette thématique dans l'excellent le fantôme de la liberté en 1974). Globalement le film reste intéressant et agréable à regarder, même si certains délires de Dali qui a co-signé le scénario restent abscons.

On n'a pas l'habitude 

Un court métrage de 20 minutes de Lewis R. Foster (1929) avec Laurel et Hardy. Ce film est le premier parlant du tandem Laurel et Hardy. Sur un thème a la Feydeau conjuguant scène de ménage, voisinage, mari hypocrite et autre quiproquos . La trame sera reprise en 1938 pour "Tête de pioches", mais tout était déjà là ! A noter que le film a été retritré par erreur " Une nuit extravagante" par Universal vidéo

Un animal encombrant (entre la chèvre et le chou) 

Un court métrage muet de 20 mn de Lewis R. Foster (1929) avec Laurel et Hardy. Un peu poussif mais la chèvre est amusante (la pauvre, le tournage n'a pas dû être forcément une partie de plaisir pour elle)

Y'a erreur 

Un court métrage muet de 20 mn de Leo McCarey (1929) avec Laurel et Hardy. Tout le talent de Mc Carey dans ce film à la limite du surréalisme où Laurel et Hardy vont livrer un cheval au lieu et place d'un tableau de maitre. Bien dosée, très inventif, et assez drôle

Son altesse royale  

Un court métrage muet de 20 mn de Lewis R. Foster (1929) avec Laurel et Hardy et Jean Harlow. Du bon et du moins mon, mais quelques séquences mémorables comme la présence de ce prince européen aux allures d'Eric Von Stroheim ou encore Jean Harlow qui rentre sans sa robe dans le hall de l'hôtel.

The manxman 

Un film d'Alfred Hitchcock (1929). Un mélo bien lourdingue sur un scénario aussi simpliste que convenu et comme l'intrigue peine à se développer c'est tiré à la ligne (110 minutes quand même !). alors que certains rôles secondaires auraient gagnés à être davantage développés comme ce père, moralisateur rigide mais qui refuse que sa fille se marie avec un "sans le sous". Heureusement, les derniers plans ne sauvent pas le film mais nous permettent d'éviter le pire. Sinon les photos d'extérieurs sont très belles, quant à Anny Ondra, la première blonde hitchcockienne, dit-on, elle est craquante. Un Hitchcock dispensable..

Svensson l'Artificiel 

Un film de Gustaf Edgren (1929). Oh ! Que ça commençait mal ! Présenté comme le premier film sonore suédois, après nous avoir présenté un fleuve muet, l'acteur Fridolf Rhudin, vient pérorer en plan fixe pour nous expliquer en sonore que le son au cinéma ne sert à rien. Et après cette intro le film sera muet sauf le temps de quelques chansonnettes. Or après un début hésitant le film se révèle bien plus riche que prévu, certains gags sont excellents, notamment la cage magique pour attraper les souris, l'amoureux transi qui confond derrière la porte les paroles adressées à une souris avec ceux destinés à sa dulcinée (où as-tu été te salir le derrière ?) La séance aérienne dont on pouvait douter de l'efficacité se révèle très intéressante. Et puis ce film contient sans doute la première mise en scène d'un playback ! La photo est excellente, les femmes sont jolies et la souris qui se prenomme Mary est craquante. Finalement c'est une assez bonne surprise.

Les espions 

Un film de Fritz Lang (1928). Bien sûr c'est du Fritz Lang en pleine possession de ses moyens, et certaines scènes sont spectaculaires, comme les suicides du russe et du japonais, les fantômes des agents japonais, la liaison du japonais avec l'espionne, l'accident du train et bien sûr le superbe final, mais d'autres sont incompréhensibles ! Voilà qui prouve que les histoires d'espionnages tarabiscotées ne datent pas d'hier, car si on comprend les grosses lignes de l'intrigue, le reste est complètement abscons et le scénario de Thea von Harbou n'a rien d'exceptionnel ni de passionnant. Qu'on nous explique par exemple ces histoires de contrats japonais… Malgré l'embrouillamini ambiant, ça reste cependant très visible, ne serait-ce que pour le rôle de de Gerda Maurus (laquelle s'envoya l'ami Fritz pendant le tournage) ou celui de l'Hollandaise Lien Deyers (qui joue le rôle Kitty)

Cadet d'eau douce 

Un film de Buster Keaton (1928) Le début fait craindre le pire, c'est en effet très lourd (même lourdingue par moment) et puis soudain la seconde partie nous laisse scotché devant notre écran avec un déluge de gags surréalistes qui s'enchaînent sans nous laisser aucun répit et nous rendant sans voix devant tant d'inventivités. Jamais catastrophe naturelle n'a été aussi réjouissante !

La coquille et le clergyman 

Un film de Germaine Dulac (1928). Un film surréaliste sur une idée d'Antonin Artaud. Comme c'est du surréalisme, faut pas trop chercher à comprendre même s'il y a une trame, celle d'un curé amoureux d'une femme. Chacun y va donc de son interprétation farfelue, certains y ont même vu un film féministe, ils sont très forts ! Alors c'est vrai qu'il y a des images surprenantes comme le curé déambulant à quatre pattes dans les rues de Paris, le joli visage de Genica Athanasiou, un soupçon d'érotisme avec une paire de seins en gros plan, une danseuse qui dévoile un téton ou Génica qui nous fait des mouvements de langues. Tout cela c'est dans la première partie, la seconde étant soporifique..

Laquelle des trois ? 

Un film d'Alfred Hitchcock (1928) Bravo au type qui a trouvé le titre français, parce qu'elles ne sont pas trois mais quatre ! Pendant près d'une demi-heure on est très proche de l'ennui, il ne se passe pratiquement rien et puis tout d'un coup ça démarre et le film tourne au comique, au burlesque avec une dose de cynisme assez incroyable. La photographie est sublime, les acteurs sont extrêmement bien dirigés, notamment un étonnant Jameson Thomas et la très douce Lilian Hole-Davis. Mais bon sang pourquoi cette première partie trop longue ?

Downhill 

Un film d'Alfred Hitchcock (1927). Ne cherchez pas le suspense ! Il s'agit de l'adaptation d'une pièce de théâtre d'Ivor Novello lequel tient le rôle principal dans le film. Plutôt misogyne  (l'auteur de la pièce était homosexuel) mais on s'en fout un peu, le film ose des scènes pas si courante, deux étudiants qui flirtent avec la même fille en même temps, un sorte d'étrange ménage à trois qui finit mal, une boite à gigolo. La mise en scène est excellente, souvent métaphorique mais la fin complètement cucul. Gros souci : Il y a très peu de "cartons" ce qui nuit à la bonne compréhension du film. (que reproche exactement la serveuse aux garçons ? Comment "fonctionne vraiment le "ménage à trois ?) A voir comme une étonnante curiosité avec comme toujours chez Hitchcock de fort belles actrices féminines.

Métropolis 

Un film de Fritz Lang (1927) avec Brigitte Helm. Le film est muet mais un accompagnement musical avec orchestres symphonique était prévu ce qui donne à l'œuvre une toute autre dimension. On est subjugué par la beauté des images et par la maîtrise de la réalisation face aux énormes moyens mis en œuvre. Cette œuvre est vraiment celle d'un visionnaire qui nous fait entrer dans son rêve. La prestation de l'énigmatique Brigitte Helm est quant à elle remarquable. Si certains aspects du fond sont critiquables (le prêchi-prêcha de Maria, le dernier plan très neuneu) d'autres sont très intéressants (la manipulation et l'aveuglement de la foule). Un chef d'œuvre bien sûr !

Collège  

Un film de Buster Keaton (1927). La légende tenace voudrait que le film soit basé sur son seul gag final, là où Buster réussit en cinq minutes tout ce qu'il avait échoué avant. Malheureusement c'est faux, la vérité c'est que des gags il y en a plein mais qu'aucun fonctionne (ils fonctionnaient peut-être à l'époque, mais la question n'est pas là, aujourd'hui, ils ne fonctionnent plus et un film qui vieillit mal n'est pas un bon film). Supporter cette interminable partie de base-ball est une véritable purge

Les deux détectives   

Un court métrage de 20 minutes de Fred Guiol (1927) avec Laurel et Hardy. Du burlesque à l'état pur, c'est très rythmé, sans vraies lourdeurs. Assez grandguignolesque par moment.

La glace à trois faces 

Un film de Jean Epstein (1927). Formellement ce film de 38 minutes est très joli, photographie magnifique, caméra en folie, jolies femmes… Il manque juste un scénario digne de ce nom pour nous sortir de l'ennui, alors de-ci de-là quelques idées nous surprennent comme ce petit singe qui grimpe aux arbres ou ce manche à balai qui semble animé d'une vie propre à l'entrée d'un immeuble.

Le mécano de la General  

Un film de Buster Keaton (1926). Tourné 50 ans après la fin de la guerre de sécession, le film a du cartonner dans les états du Sud. Car en bon réac qu'il est (voir "Seven Chances") Keaton prend le parti des sudistes (et sans dentelles) ça c'est la première casserole. La seconde c'est que le foultitude de gags tombe intégralement à l'eau  (j'aime bien rigoler mais ceux qui se forcent à rire au ciné me font pitié). Un mauvais film donc ? Et bien pas du tout, malgré tout ça, c'est super agréable à regarder, c'est ingénieusement réalisé et on passe un super bon moment, parce que ça n'arrête pas, ça bouge tout le temps, c'est un vrai catalogue d'inventivité, et comme disait ma voisine, c'est pas drôle, mais c'est marrant. Ce doit être ça, la magie du cinéma.

Alice's balloon race (la courses aux ballons) 

Un dessin animé de 6 minutes de Walt Disney (1926) avec Julius le chat et quelques courtes incrustations de la petite Alice en personnage réel. C'est inventif, rigolo, depuis on a vu ce genre de trucs des centaines de fois mais c'est bien fait, ça fait toujours plaisir et ça ne sent même pas la poussière..

Camille 

Un court métrage de 33 minutes de Ralph Barton (1926) Une bizarrerie, d’abord une galerie de portraits plus ou moins intéressants avec quelques jolies femmes et un défilé de guest-stars dont Sacha Guitry et Yvonne Printemps qui font les zouaves. On a ensuite une version résumée de "La dame aux camélias" entrecoupée de singeries et se terminant en bondieuserie. A regarder en tant que curiosité.

Le fantôme de l'opéra 

Un film de Rupert Julian (1925) avec Lon Chaney. Voilà l'un des trésors du cinéma muet longtemps oublié des spécialistes "autorisés". Plus qu'un film de terreur, il s'agit d'un film d'ambiance et là on est gâté, des souterrains, des passages secrets, des repères cachés, des mécanismes infernaux… le travail sur la photographie est remarquable, les plans incluant des mouvements de foules (voir la fin) sont assez impressionnants. L'utilisation des décors naturels parisiens s'incorpore parfaitement dans le film. Côté acteurs, Lon Chaney cabotine mais ce n'est pas bien grave, quant à Mary Philibin, quelle jolie femme ! Réalisé seulement 15 ans après la sortie du roman de Gaston Leroux, le film reflète parfaitement l'esprit de son auteur (sinon la lettre).

La ruée vers l'or 

Un film de Charlie Chaplin (1925) S'il est vrai que les films comiques vieillissent plus vite que les autres parce que les bons gags sont repris et repris, n'empêche qu'on ne peut que souligner l'inventivité du scénario : la danse des petits pains, le poulet géant, la danse avec le chien et sa ficelle, et bien sûr la longue scène avec la cabane en équilibre. A remarquer la présence de la très jolie Georgia Hale. Certains passages ne sont cependant pas exempt d'une certaine niaiserie.

Le cuirassé Potemkine  

Un film de Serge Eisenstein (1925). Bien sûr qu'on peut le voir comme un film de propagande (et même que c'en est un). Mais quelle importance ? Potemkine c'est l'histoire d'une révolte qui a vraiment eu lieu et même si l'auteur prend pas mal de liberté avec les faits, cette façon de la mettre en image est sublime. Un montage au millimètre, des mouvements de foule parfaitement maîtrisés, (la réputation de la scène de la fusillades des escaliers d'Odessa n'a rien de surfaite), un sens aigu de l'ellipse, l'alternance des temps calmes et de la violence. Une leçon de cinéma !

Le monde perdu 

Un film de Harry O. Hoyt (1925) Vraiment étonnant. Le film vaut surtout par ses trucages fabuleux, le dinosaure semant la panique dans les rues de Londres est un morceau d'anthologie. Evidemment les protagonistes n'ont pas vraiment à jouer des rôles de composition mais ils s'en sortent bien. Le film existe avec plusieurs longueurs et montages différents, dans celle que j'ai vue j'ai eu l'impression qu'il manquait des morceaux mais on ne s'ennuie pas une seconde.

La fièvre des échecs  

Un court-métrage de Vsevolod Poudovkine (1925). 14 minutes de pur délire nous montrant un type dévoré par la passion des échecs (avec la participation du champion du monde de l'époque, Capablanca). Comme quoi on peut faire court et excellent.

Aelita 

Un film de Jacob Protozanov (1924). Une excellente surprise, ce film où le ton léger prédomine et où l'humour n'est pas absent se déguste telle une friandise. Evacuons déjà les conneries débitées en boucle sur ce film. Non ce n'est pas un film de science-fiction, mais un film dans lequel le héros fantasme sur la planète Mars ! Non, ça n'a pas grand chose à voir avec Métropolis et s'il est exact que c'est tiré d'un roman de Tolstoï, ce Tolstoï-là s'appelait Alexis et non pas Léon. Ce qui charme dans ce film c'est son côté farfelu complètement assumé (déjà la clé du film, le message mystérieux, mais ne dévoilons rien). Ensuite, et c'est un véritable tour de force, le réalisateur parvient à faire sans en avoir l'air une critique des conditions de vie dans l'URSS, et même mieux, de ridiculiser les mouchards de la police politique. Les actrices sont très belles, Yuliya Solntseva dans le rôle d'Alita et Valentina Kuindzhi dans celui de Natasha. Les passages martiens sont très réussis graphiquement avec des décors et des costumes dans un pur style constructiviste qui aura une influence durable sur le genre (voir Flash Gordon). Evidemment la prod (ou plutôt les commissaires du peuple) sont passés par là et ont imposé une fin de rêve martien d'un ridicule achevé : "Suivez notre exemple, camarades et fondez l'Union des Républiques Socialistes de Mars !" mais qui au second degré est à se rouler par terre. Quant à la fin terrienne, l'ordre soviétique est sauf et le (vrai) méchant est arrêté par les flics. Mais qu'importe cette fin, elle est tellement artificielle qu'elle apparaît extérieur au film qui n'en reste pas moins magnifique !
Il est intéressant de savoir ce qu'en disait la presse officielle soviétique (les Izvestia) "La montagne a accouché d'une souris, c'est beaucoup de bruit pour rien. Un an de travail, des dépenses considérables pour la mise en scène et de la publicité, la meilleure organisation technique, un célèbre réalisateur, des acteurs intéressants, un roman célèbre, un vol dans un autre monde, la révolution sur la planète Mars, la Russie soviétique en 1921…. et le résultat : un rêve idiot de petit bourgeois."

La Croisière du Navigator 

Un film de Buster Keaton et Donald Crisp (1924). Le début est souriant sans plus, même parfois limite poussif et puis tout d'un coup ça se déchaîne, c'est drôle, inventif, poétique et ne nous laisse aucun répit. La partie ou Keaton est en scaphandre est particulièrement fabuleuse.

Entr'acte  

Un film de René Clair (1924) Un joyeux délire parfaitement assumé dont on retiendra la danseuse filmée en contre-plongée à travers un plancher de verre (et qui se révèlera être une femme à barbe) et cet étrange cortège funèbre filmé au pas de course mais au ralenti, puis avec une caméra qui donne le tournis et enfin la chute finale. C'était en 1924, à l'époque on rigolait avec le mouvement Dada, aujourd'hui on n'en rigole plus et on se prosterne religieusement devant la pissotière de Duchamp. Pauvre Dada, il ne méritait pas ça !

Comédiennes 

Un film d'Ernst Lubitsch (1924) Un début surprenant, c'est le moins que l'on puisse dire puisqu'il s'agit de chaussette trouée, il y a ensuite et c'est sans doute le seul défaut du film un sentiment de confusion, mais ça ne persiste pas, la machine était juste en rodage et ensuite le vaudeville se met en place avec une maestria surprenante. La direction d'acteurs est surprenante, même si on peut penser que Monte Blue en fait parfois un peu de trop. Quant à ces dames elles sont affriolantes, des plans surprenants, une inventivité de tous les instants. Du travail d'orfèvre

.Monte là-dessus 

Un film de Fred Newmeuer et Sam Taylor (1923) avec Harold Llyod. On a un peu oublié Harold Llyod et c'est bien dommage. L'histoire est toute simple (et tout bête, mais quelle importance puisque c'est du burlesque !) Le clou du film, l'ascension du building reste encore aujourd'hui un exploit remarquable à ce point qu'on en oublie que le trucage ne peut être qu'évident et que le suspense fonctionne (chapeau !). Dans un tout autre registre, la scène de la quasi émeute au magasin est également savoureuse.

 Paris qui dort 

Un film de René Clair (1923) avec Albert Préjean. Un savant fou fige le cours du temps. Seuls en réchappent le gardien de la tour Eiffel et les passagers d'un avion. Une bonne idée de départ, exploité de façon sans doute parfois maladroite, mais néanmoins cocasse et poétique. Les prises de vue sur la Tour Eiffel sont superbes.

Notre dame de Paris 

Un film de Wallace Worsley (1923) avec Lon Chaney. 2000 figurants, dix hectares de décors…C'est grandiose, la réalisation est impeccable notamment dans les mouvements de foules complètement maîtrisées. Lon Chaney nous fait une prestation exceptionnelle (il en rajoute peut-être un peu néanmoins) Patsy Ruth Miller campe une Esmeralda très crédible. La seule réserve vient du scénario, certes on peut adapter tout récit à sa convenance, mais transformer l'archidiacre Claude Frollo en saint homme n'était pas vraiment une bonne idée.

L'opinion publique 

Un film de Charlie Chaplin (1923) avec Edna Purviance. Qualifié de mélodrame, ce film n'en est pourtant pas un. Dramatique de par son récit, oui, mais sans effet lacrymal, Chaplin se permettant même quelques touches d'humour comme la visite des cuisines ou cet étrange striptease qu'on ne voit pas mais très suggestif. L'histoire est banale et ne montre rien d'autre que l'inexorabilité du destin transcendée par une réalisation parfaitement maîtrisée sans aucun temps morts, très inventive et avec une photographie à l'avenant, Chaplin ne juge pas ses personnages, il montre . Il est remarquable qu'Adolphe Menjou, certes cynique, ne suscite à aucun moment l'antipathie. La direction d'acteur est impeccable survolée par la belle Edna Purviance et par Menjou. Seul bémol, cette fin bisounours, mais quand on y pense quelle fin aurait été possible ? Entre sombrer dans le vrai mélodrame ou oser l'amoralité, il fallait bien trouver autre chose, mais bon...

Les trois âges 

Un film de Buster Keaton (1923). Trois histoires parallèles qui se ressemblent : la préhistoire, Rome antique et 1923. Très inventif avec des anachronismes comme s'il en pleuvait (la montre-cadran solaire restera dans les annales) de bons gags, d'autres ratés ou peu lisible (à l'instar de la partie de foot américain) mais l'inégalité des gags n'est-elle pas le propre de tout film comique ? La superposition narrative des trois histoires crée une certaine cassure de rythme, et puis osons le dire, le film a vieilli, alors bien sûr, on va me dire qu'il faut contextualiser, je suis désolé mais je ne sais pas me forcer de rire en essayant de contextualiser… Mais ne retenons que les côtés positifs, ce film reste souriant et agréable.

Folies de femmes 

Un film d'Erich Von Stroheim (1922). Un mélo flamboyant souffrant de deux ou trois longueurs qui ne sont pas imputables au réalisateur, le film ayant été charcuté par les producteurs. Le film est astucieux car la narration est faite du point de vue du personnage incarné par Von Stroheim, personnage sans scrupules qui se croit tout permis. A la limite on pourrait s'identifier à lui s'il se limitait à escroquer les riches, mais on s'aperçoit rapidement qu'il est capable de bien pire et il finit par le faire.  Outre l'interprétation magistrale de Von Stroheim, quelques scènes sont fabuleuses notamment celle de l'orage ainsi que la fin. Von Stroheim a aussi une façon bien à lui de dépeindre la misère, point de longs plans, une simple image de soldat éclopé ou d'un gosse jouant avec un casque suffit, du grand art.

Nosferatu 

Un film de F.W. Murnau (1922) avec Max Schreck et Greta Schröder. Donc le méchant Murnau qui ne voulait pas payer de droits d'auteurs a pillé le Bram Stoker et a changé tous les noms. C'est lent, c'est très épuré. Pas de crucifix, pas d'ail, pas de pieu dans le cœur. Non l'histoire est toute simple, Dracula (Nosferatu, pardon !) tombe amoureux d'une nana en en voyant sa photo sur un médaillon. "Votre épouse a un cou magnifique !" s'exclamera-t-il provoquant le seul moment d'humour (involontaire) du film. Du coup il en oubliera que le chant du coq peut le tuer (un peu lourdingue l'apparition de ce coq depuis longtemps passé à la casserole !). L'histoire qui manque de rythme ne parvint ni à décoller ni à passionner. Il y a quand même une séquence assez fabuleuse où l'on voit une foule haineuse (et en définitive plus terrifiante que le vampire) poursuivre le marchand de biens désigné comme bouc émissaire de leur infortune. En fait il faut regarder le film "autrement", s'intéresser aux cadrages, aux lumières, aux plans… et là il faut bien dire qu'on est magnifiquement servi.
Il existe plusieurs accompagnements musicaux du film, dont un de Galeshka Moravioff qui est une horreur !

Cops

Un film de Buster Keaton et Edward F. Cline (1922). On pouvait craindre le pire au début vu la lourdeur des certains gags (le vase dans la valise, non, mais allô quoi !) Mais on est récompensé dans la seconde partie avec cette incroyable poursuite impliquant des centaines de figurants, véritable chorégraphie de ouf qui nous surprend autant qu'elle nous ébloui… Superbe restauration de l'image ! (18 minutes)

Dr Jekyll et Mr Hyde   

Un film de John S. Robertson (1920) avec John Barrymore. Certains films muets sont devenus des classiques de leur thème dans le domaine du fantastique (Nosfératu, le fantôme de l'Opéra), ce n'est pas le cas du film de Robertson qui sera complètement surclassé par l'éblouissante version parlante de Mamoulian en 1931. Cela dit le film reste estimable et John Barymore incarne un Mister Hyde supérieur par exemple à Spencer Tracy (dans la version de Flemming). Mais le film est trop illustratif, se prive de l'érotisme qui sous-tend le thème, va trop vite et paraît bien bavard (ce qui est quand même paradoxal pour un film muet) et surtout manque cruellement de punch.

Le cabinet du docteur Caligari 

Un film de Robert Wiene (1920). Ce qui est remarquable c'est qu'une fois qu'on est entré dans le film, c’est-à-dire qu'on s'est adapté au jeu "exagéré" des acteurs du muet et aux décors en cartons, le film fonctionne parfaitement, on le regarde comme "un vrai film" et pas seulement comme un objet culturel. Certes le scénario est tenu, mais ça reste bien ficelé. Le décor a évidemment une importance prépondérante, chaque plan est un tableau expressionniste (sauf l'asile de fou et ce n'est pas par hasard). L'œuvre d'un visionnaire, l'un des monuments du cinéma muet. A noter l'excellente musique de Giuseppe Becce, très Berliozienne.

La maison démontable 

Un court métrage de 20 minutes de Buster Keaton (1920) Buster Keaton possédait un sens aigue de la progression comique. Après un début assez planplan, le film s'emballe de plus en plus pour nous offrir un véritable catalogue d'inventivité et se terminer dans un tourbillon de folie (dans tous les sens du terme) A noter une très émoustillante scène un peu érotique dans la salle de bain où avec un peu d'attention on peut apercevoir le téton de Miss Sybil Seely. Un petit bijou.

Erotikon – Vers le bonheur 

Un film de Mauritz Stiller (1920) avec Tora Teje. Il y a des films que l'on apprécie moyennement au début et beaucoup lus au fur et à mesure qu'il avance. Il faut dire qu'il a des atouts, déjà une photographie magnifique et puis il y a Tora Teje dans le rôle d'Irène, actrice principale du film qui crève l'écran de sa grâce et de sa beauté, c'est un vrai régal que de la voir jouer. Il y a ensuite une amoralité tout à fait jouissive, Passé les mouvements de colère, on s'adapte aux situations, on n'est pas fâchés, on reste copains, A ce titre la scène où Irène fait ses adieux à son mari et sa nièce est un petit bijou. Il y a malheureusement quelques ombres au tableau, la première partie se traine, l'économie de cartons rend parfois les choses confuses et la scène de l'Opéra, certes bien mises en scène est trop longue et mal intégré à l'intrigue, mais ne boudons pas notre plaisir, ce film mérite qu'on s'y arrête

La Quatrième Alliance de dame Marguerite 

Un film de Carl Dreyer (1920) Il paraît que Carl Dreyer a voulu faire un film comique, et c'est vrai que le scénario avait un potentiel énorme. Le résultat est un film d'une lenteur incroyable, qui ne distille que l'ennui, les gags, si on peut les appeler ainsi, sont lamentable, l'apprenti prêtre qui fait son exposé avec une plume de mouette dans les cheveux, qu'est-ce qu'on rigole, quel boute-en-train ce Dreyer ! On a parlé d'une critique de la religion, je n'ai rien vu de tel. Et à la fin on nous fait une pirouette sur la bonté intérieure et ça se termine de la façon la plus gnangnan possible. Si l'on veut sauver quelque chose il restera la marionnette diabolique qui arrive à nous décrocher un sourire.

Maris aveugles 

Un film d'Eric Von Stroheim (1919) avec lui-même. Certains ont qualifié le film de "moral", ce n'est pas entièrement faux mais c'est réducteur. En fait le Docteur Armstrong, comme beaucoup d'autres, néglige sa femme (D'où le titre !) Madame Armstrong n'est donc pas insensible aux assiduités que lui prodigue Von Stroheim, jusqu'à ce qu'elle lui écrive ne souhaitant pas aller jusqu'au bout. Morale ou poids social ? Von Stroheim n'était pas spécialement moraliste. Et la noirceur de sa disparition dans le film n'avait rien d'indispensable. Quant à la dernière parole du film "Occupez-vous de votre femme" elle sonne un peu comme un vœu pieux. Cela dit ce n'est pas un grand Von Stroheim, la scène des chambres est interminable et puis ce guide de montagne, quel repoussoir ! C'est Francelia Billington qui joue le rôle de Madame Armstrong et elle le fait très bien.

Le Trésor d'Arne

Un film de Mauritz Stiller (1919) avec Mary Johnson. Esthétiquement c'est une vraie claque, la beauté de ces images vieilles de plus d'un siècle est un émerveillement. Contrairement à ce qui se passe dans de nombreux films muets, les acteurs ne forcent pas le trait à outrance. Le récit est cornélien , sauf qu'il ne tombe pas (ou à peine) dans le cliché de l'assassin repentit. Être amoureuse d'un assassin est sans issue, au moins c'est clair. Reste un problème avec la multiplicité des personnages et des lieux, on s'y perd parfois et quelques cartons supplémentaires n'auraient pas été de trop

Une vie de chien 

Un moyen métrage de 33 minutes de Charlie Chaplin (1918) avec Edna Purviance. Faisons la part des choses, d'une part tout cela n'a pas trop bien vieilli et on est parfois très proche du poussif, d'autre part on a quand même droit à quelques gags assez inventifs qui s'ils ne nous font pas tordre de rire sont tout de même des petits bijoux d'inventivité, comme la scène du comptoir ou celle ou Chaplin bluffe les deux voleurs. Enfin, il faut souligner le fond, Chaplin n'est pas naïf et tient à nous montrer que la loi de la jungle règne aussi parmi les pauvres. Quant à considérer de petit film comme un chef d'œuvre du burlesque, faut pas charrier, non plus, il n'est que de visionner l'excellent "Charlot joue Carmen" pour se rendre compte que "cette "vie de chien" ne joue pas dans la même catégorie

A 14 millions de lieues de la Terre (le vaisseau dans le ciel) 

Un film danois de Holger-Madsen  (1918) Probablement la première superproduction de SF de l'histoire du cinéma, le film surprend par sa forme, des plan d'ensemble avec une foule de figurants que ce soit sur Mars avec son assemblée de gretchens en robes blanches ou sur Terre avec l'arrivée du vaisseau, très réussie avec en prime des plans aériens de Copenhague. Il y a quelques bonnes astuces de mise en scène comme par exemple le fait de décrire l'atelier de construction du vaisseau en ne filmant que des échelles, des chaines et des poulies. Mais s'il convient de louer la forme, que dire du fond. On a parlé de propagande pacifiste, l'intention est louable, encore faut-il savoir de quel pacifisme on nous parle, ici on a surtout l'impression d'un film de propagande pour une secte : ces gens-là sont pacifistes mais aussi végétariens, antialcoolique, eugénistes, et s'habillent tous de la même façon avec des crosses pour les messieurs comme les pasteurs de l'antiquité, ils associent le plaisir au désordre et s'il prônent l'amour, ils glorifient la chasteté (à ce sujet la scène de flirt sur Mars est d'un ridicule achevé). Quant à nos terriens, ils prient tous les cinq minutes, invoquent le seigneur à tout bout de champ, il faut voir la façon dont le capitaine mate une mutinerie, en levant les bras au ciel et en faisant mettre toute le monde à genoux. Dans ce film les terriens et les martiens ont au moins un point commun, ils ne connaissent pas l'humour ! Sinon, la restauration est un véritable sans-faute.

20.000 lieues sous les mers 

Un film de Stuart Paton (1916). Si tous les films muets étaient des chefs d'œuvres, ça se saurait, et celui-là est loin d'en être un. Evidemment ça a dû faire son petit effet à l'époque avec les vues sous-marines… mais ça ne suffit pas à faire un film, un peu comme aujourd'hui, ceux qui misent tout sur les effets spéciaux. Alors qu'est ce qui ne va pas dans le film ? Déjà c'est très embrouillé, le scénariste a cru bon de mélanger "20.000 lieues sous les mers" avec des bouts de "l'ile mystérieuse". Et comme si ça ne suffisait pas on nous ajoute à la fin une préquelle aussi stupide qu'inutile. Le scénario est incohérent, on passe du coq à l'âne, les personnages n'ont aucune consistance, Aronax et sa fille ne servent à rien, le harponneur non plus, Némo affublé d'une tenue de Père Noël est très méchant puisqu'il fait couler des bateaux, mais il est très gentil, et passe son temps à sauver les naufragés, faudrait savoir ? On ne s'attache à personne, même pas à Jane Gail, la fille sauvage qui a oublié d'être sexy. Bref c'est pas terrible.

Charlot chef de rayon 

Un court métrage de 24 minutes de Charlie Chaplin (1916). Tous les "charlots" ne sont pas bons et celui-ci ne l'est pas trop, poussif, confus, trop répétitif et limite ennuyeux

Embrasse-moi idiot 

Un film de Frank Powell (1915) avec Theda Bara. Rien à sauver dans ce très mauvais film. L'histoire est embrouillée et sans rythme, il y a trop peu de cartons ce qui fait qu'on en arrive à confondre les personnages, l'histoire est ennuyeuse et mal racontée s'encombrant de scènes inutiles, alors que la descente aux enfers de Schuyler est bâclée. On ne se raccroche à rien, même pas à Theda Bara, vraiment peu convaincante dans ce récit pourfendant l'infidélité conjugale avec des gros sabots. On pourra s'amuser éventuellement à regarder cette étonnante courte séquence d'embouteillage de rue.

Charlot joue Carmen 

Un court métrage d'une 31 minutes de Charlie Chaplin (1915) avec Edna Purviance. Un véritable bijou, Vu dans la version superbement restaurée de 2015 avec musique additionnelle sur des thèmes de Georges Bizet. Chaplin et Edna Purviance sont complètement déchainés pour notre plus grand plaisir. A noter un Escamillo volontairement ridicule. Il faut savoir que l'intention est parodique, plus que la nouvelle de Mérimée et l'Opéra de Bizet, le film se réfère à deux Carmen sorties la même années par Walsh et par DeMille. Mais bon, c'est la même histoire et c'est un bijou vous dis-je !

Charlot boxeur

Un court métrage de Charlie Chaplin (1915) C'est toujours amusant et plaisant, même si c'est parfois quelque peu répétitif, la séquence avec le parieur a moustache est la moins réussi, le match lui-même bénéficie d'une mise en scène quasi chorégraphique dont le point culminant sera l'intervention du chien. Ce n'est pas encore du grand Chaplin mais on ne va bouder 30 minutes de folie !

Mam'zelle Charlot

Un film de et avec Charlie Chaplin (1915) et avec Edna Purviance. (23 minutes) Du burlesque plus souriant que drôle. Pas désagréable mais un peu répétitif. Mais voilà que Charlot se travesti et le miracle s'accomplit, une transformation hallucinante et n'hésitons pas à l'écrire, troublante de chez troublante, car ce n'est pas tant l'habit qui le fait femme, mais sa gestuelle et l'expression de son visage

A Free Ride

Un court-métrage porno de 10 minutes de A. Wise Guy.(1915) Visible sur le site du petit rongeur, ce film surprend par sa franche décontraction... et pour ceux qui auraient encore des doutes, on n'a rien inventé" depuis. Ce n'est pas le premier film porno de l'histoire du cinéma. Pour information le film argentin "El Sartorio" date de 1907. Quant au premier porno français, "A l'écu d'or ou la bonne auberge" il date de 1908 !

His Prehistoric Past (Charlot nudiste) 

Un court métrage d'une 35 minutes de Charlie Chaplin (1914). Charlot s'endort et se réveille à l'âge des cavernes, amusant, mais le problème c'est qu'il ne sait pas trop quoi faire de son idée et que ça tourne en rond pendant 35 minutes sans faire bouger les zygomatiques. Les petits curieux pourront remarquer un téton furtif chez une dame des cavernes à 6:50 et à 7:55.

Charlot dentiste  

Un film de 13 minutes de Charlie Chaplin (1914).Ça donne le tournis, il n'y a pas un seul mouvement calme pendant ces 13 minutes, ça s'agite, ça court, ça entre, ça sort, ça envoie des coups de pieds, ça jette des briques en pleine figure et quand sa flirte c'est avec une pince de dentiste…

Charlot et le mannequin (Mabel's Married Life) 

Un court métrage de 17 minutes de Charlie Chaplin et Mabel Normand  (1914) avec Mabel Normand. Il faut attendre 9 minutes pour que ça devienne enfin intéressant quand Charlot vire les piliers de comptoir puis arrive torché dans sa chambre d'hôtel où il affronte un mannequin de boxe qu'il prend pour l'amant de sa femme. Mais, bon c'est juste souriant. J'ai vu une version colorisée avec des couleurs dégueulasses mais Charlot n'y est pour rien.

Une nuit agitée 

Un court métrage de 7 minutes de Max LInder (1912). Le ressort comique est tout simple, il est basé sur l'exagération des moyens employés face au but a attendre… et non seulement ça fonctionne, mais je ne cois pas que ces gags aient été repris ultérieurement (du moins dans des films connus).

A trip to Mars 

Un court métrage de 4 minutes de Ashley Miller (1910).L'histoire d'un savant qui découvre l'antigravité, il se retrouve sur Mars; mais ça ressemble plus à de l'onirique nimportnawak qu'à de la science-fiction. Et ce n'est pas parce que c'est muet ancien et fantastique que c'est bon. Le réalisateur a voulu imiter Mélies, il n'en arrive pas à la cheville.

Le baromètre de la fidélité 

Un film de Max Linder (1909). ou comment faire en 9,30 minutes un vaudeville qui soit en même temps une défense et illustration du libertinage, puisque la morale est "péché caché est à moitié pardonné.", le fameux baromètre ne sert donc à rien !

A l'écu d'or ou la bonne auberge 

(1908) Ce court métrage anonyme de 4 minutes est un peu pour le cinéma porno ce que "l'arrivée du train en gare de La Ciotat" est au cinéma en général, autant dire que son intérêt est principalement historique et documentaire. Il y règne malgré tout une certaine décontraction même si on est loin des pépites que Michel Reilhac a compilé dans son anthologie "Polissons et galipettes".

El Sartorio 

(1907) Un court métrage argentin de 4,30 minutes qui est considéré le premier film porno de l'histoire du cinéma, il y en a sans doute eu avant mais ils n'ont pas été retrouvé. Le film est relativement inventif en raison de son scénario où se mêle naturisme et fantastique et même un doigt de féminisme puisque ces demoiselles n'hésitent pas à chasser le méchant satyre

20.000 lieues sous les mers 

Un film de 10 minutes de Georges Mélies (1907) Ce film aurait besoin d'une sérieuse restauration (mais est-ce seulement possible ?) d'autant que les demoiselles du corps de ballet du Chatelet ont l'air affriolantes. Sinon c'est du gros délire assumé, on a même droit à un joli gag avec un hippocampe.

La sirène 

Un film de Georges Méliès  (1904)  . C'est très mignon, c'est déjà ça, mais intervenant deux ans après le voyage dans la Lune on est forcément un peu déçu. (3,58 minutes)

Le royaume des fées 

Un film de 16 minutes de Georges Méliès (1903) colorisé au pochoir. Une friandise ! Chaque plan est d'une inventivité qu'on croirait inépuisable, les décors sont magnifiques, les trucages sont excellents, l'humour est là aussi là où on ne l'attend pas à l'instar de ce garde qu'il faut pousser au derrière pour qu'il aille au combat. Evidemment on pourra trouver que ça gesticule beaucoup, mais qu'importe les acteurs et les actrices ont dû s'amuser comme des petits fous. Du meilleur Méliès !

Le voyage dans la Lune 

Un film de Georges Méliès (1902). On aurait grand tort de regarder ce film uniquement comme une curiosité culturelle sur les débuts du cinéma. Parce que l'œuvre étonne par son côté "complètement barré" :  Les astronomes et les physiciens qui sont tous coiffés de chapeaux pointus et gesticulent sans arrêt. La pompe du départ des cosmonautes. L'extravagant symbole phallique de l'obus qui entre dans le fut. Les savants qui ne quittent jamais leur parapluie, les champignonnières lunaires, le plan final, les girls… Bref du gros délire bien assumé et qui a conservé la force de nous éblouir. Chapeau l'artiste ! (14 minutes)

Barbe Bleue 

Un film de Georges Méliès (1901). Une adaptation loufoque du conte de Perrault. Au début on ne comprend pas très bien où Mélies veut nous embarquer avec ce plan fixe et ce défilé d'un tas de choses, mais plus ça avance, plus ça devient inventif avec des changements de plans, des images étonnantes, des surimpressions, des trucages, tout ce qu'on aime… Méliès a le sens de l'ellipse et de la métaphore. Le film est inégal mais la découverte de la chambre mortuaire et l'épisode la clé valent le détour. A remarquer que la restauration est impeccable.(10 minutes)

La lune à un mètre 

Un film de 3 minutes de Georges Mélies. (1898) Quel imagination débordante il avait, Georges Méliès, capable de nous éblouir et de nous étonner avec une histoire complètement farfelue et bourré de surprise en tous genres. Quelques accortes jeunes femmes viennent égayer le propos dont Jeanne d'Arcy évidemment (sa muse et future madame Méliès) !

La tentation de Saint-Antoine 

Un film de Georges Méliès (1898). Ultra-court mais iconoclaste et réjouissant (même si censure oblige, la fin reste politiquement correcte (56 secondes)

Après le bal

Un court métrage de Georges Melies (1897). Un petit moment coquin qui a du émoustiller ces messieurs à l'époque, mais que les encyclopédistes autoproclamés arrêtent de dire n'importe quoi : Il n'y a pas de nudité dans ce film, Jehanne d'Alcy se fait simplement doucher en collant chair… et de dos ! Un document d'époque dira-t-on !  (76 secondes)

Entrevue de Napoléon et du pape

Un court métrage de 1 minute de Georges Hatot (1897) Certes, l'intérêt est purement documentaire mais quand même... chapeau !

Le manoir du diable

Un film de Georges Méliès (1896). Sans doute le premier film d'épouvante de l'histoire du cinéma. Ça ne dure que 3 minutes et demie mais tout est déjà là : La vilaine chauve-souris, le diable, des gnomes, des fantômes, des vamps, des squelettes et des sorcières et même le chasseur de vampires qui se fait bouler avec son crucifix. On est là devant ce film comme devant la vitrine d'un bijoutier ancien en se disant, c'est complètement désuet mais c'est bien !

L'arroseur arrosé  

Un film de Louis Lumière (1895) Probablement le premier gag de l’histoire du cinéma. A regarder avec le prisme de la nostalgie, comme quand on feuillette de vieilles cartes postales.(49 secondes)

 

 

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