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Philippe Pétain
Maréchal collabo
(1856-1951)

Page mise à jour le 10/03/2019

 

De son vrai nom Henri Philippe Benoni Omer Joseph Pétain, Philippe Pétain (1856-1951) fit parler deux fois de lui dans l'histoire du XXème siècle.

Jeunesse


Enfant de chœur et admirateur de Napoléon (ça commence bien)

La guerre de 1914-1918.

Il a 58 ans et il veut prendre sa retraite, pas de bol, c'est la guerre. Il collectionne rapidement toutes les étoiles sur son képi de général, et en février 1916, il est à Verdun, ce sont les allemands qui attaquent, Pétain participa à la victoire mais à quel prix ! Côté français, 378.000 victimes (62 000 tués, 101 000 disparus, 215 000 sérieusement blessés) coté allemand : 337 000 victimes.
Curieusement, ce n'est qu'à partir de 1940 que Pétain s'attribuera le titre de "vainqueur de Verdun". Alors que des militaires aussi célèbres que Foch et Joffre attribuèrent de tout temps la victoire aux généraux Nangin et Nivelle. C'était aussi l'avis de Georges Clemenceau.

En 1917 des mutineries éclatent au sein de l'armée. Pétain n'aura aucun scrupule à faire passer les mutins par les armes. La guerre finie, il est nommé Maréchal.


Dessin de Philippe Geluck

Entre deux guerres

En 1925-1926, Pétain commande une expédition franco-espagnole (450.000 hommes) destinée à mater les troupes d’Abd el-Krim, leader de la République du Rif (Maroc). Abd el-Krim sera défait, en partie grâce à l'utilisation d'armes chimiques sur les populations civiles.

En 1929, il est élu à  l’Académie française (on ne rigole pas).

En 1934, à 78 ans, il est nommé ministre de la Guerre (poste qu'il occupera 9 mois) Il est à cette époque très populaire dans les milieux d'extrême-droite. Gustave Hervé, fasciste déclaré organisera une campagne intitulé : "C’est Pétain qu’il nous faut". Pétain est un lecteur assidu de "l'Action Française", journal d'extrême-droite. Il est un admirateur des régimes dictatoriaux de Franco en Espagne et de Salazar au Portugal.

La guerre de 1939-1945

Le 3 septembre 1939, suite à l'invasion de la Pologne, la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l'Allemagne.
Le 26 septembre 1939 : dissolution du Parti Communiste
Du 4 au 8 octobre 1939 : Arrestation des députés communistes.
Le 17 mai 1940, à 84 ans Pétain est nommé vice-président du Conseil dans le gouvernement de Paul Reynaud.
Le 14 juin 1940, Paris est occupé par les allemands. Le gouvernement se réfugie à Bordeaux
Le 16 juin 1940, Paul Reynaud démissionne. Le président de la république nomme Pétain chef du gouvernement
Le 17 juin 1940, Pétain annonce son intention de signer une armistice avec l'ennemi (elle sera signée le 20 et entrera en vigueur le 25)
Le 25 juin 1940, Pétain annonce les conditions de l'armistice. Il dira entre autres : Un ordre nouveau commence... Notre défaite est venue de nos relâchements. L'esprit de jouissance détruit ce que l'esprit de sacrifice a édifié....
Le 1er juillet 1940, le Gouvernement Pétain s'installe à Vichy.
Le 10 juillet 1940, les deux chambres attribuent les pleins pouvoirs à Pétain
Le 11 juillet 1940, Pétain s’autoproclame chef de l’État français et s’arroge tous les pouvoirs.


Pétain en 1944 à Nancy Place Stanislas

Il ajoute une petite francisque sur le drapeau français et modifie la devise de 1789 par le slogan "travail, famille patrie". le mot "république" n'apparaît plus nulle part. Les partis politiques et les syndicats sont interdits. Il a beau être vieux, il est autoritaire et vire tous ceux qui protestent (comme de nombreux maires, préfets et autres, dont le préfet d'Eure-et-Loir : Jean Moulin). Des juridictions d’exception sont mises en place. Des responsables politiques de gauche comme de droite sont condamnés à être internés avant d'être livrés aux allemands. Des prisonniers communistes sont guillotinés. La liberté de la presse n'existe plus. Pétain croit devoir préciser que son régime ne reposera plus sur "l’idée d’égalité entre les hommes".
On est en fait en pleine "contre-révolution" autoritaire, Pétain parle de "Révolution nationale", le régime est clairement xénophobe et antisémite.

Un culte de la personnalité du Maréchal s'installe. Les photos du Maréchal sont partout (même sur les timbres postes). La Saint Philippe devient une fête nationale. Les fonctionnaires doivent prêter serment au Maréchal, ensuite il y aura les militaires et les magistrats, puis les policiers... et même les postiers et les gardes champêtres. La jeunesse est embrigadée, on chante "Maréchal, nous voilà !" dans les écoles.

Complètement mégalo, il promulgue des lois en les formulant ainsi "Nous, maréchal de France, le Conseil des ministres entendu, décidons…" il s'accorde quasiment tous les droits y compris celui de rédiger et de promulguer une nouvelle constitution ou de désigner son successeur. il a ainsi de fait, plus de pouvoirs qu'à l'époque de la monarchie absolue !

Il reçoit le soutien de la majorité de l'épiscopat français : Le 19 novembre 1940, le chef de l'Eglise de France, le cardinal Gerlier, déclare "Pétain, c'est la France et la France, aujourd'hui, c'est Pétain !"(1)  en 1941, l'Assemblée des cardinaux et archevêques de France assure Pétain de sa "vénération" !

Une dizaine de jours après avoir proclamé "l'Etat français", une commission révise et annule nombre de naturalisations effectués depuis 1927. En octobre 1940 (alors que les Allemands n'avaient rien demandé) le régime promulgue des lois d'exclusion à l'encontre des juifs et des francs-maçons. En mars 1941, est créé un "Commissariat général aux questions juives".

Le 24 Octobre 1940 Pétain et Hitler se remontrent et se serrent la paluche à Montoire (Loir et Cher)


Ça va ? Et toi, ça va ?

Le 30 Octobre 1940 Pétain annonce officiellement que le régime s'engage dans la collaboration avec l'ennemi.

L'ordre moral se porte bien : interdiction de fumer dans les salles de spectacle, instauration officielle de la fête des mères, pénalisation de l'homosexualité(2). Le divorce devient difficile et compliqué. Les juges s'acharnent contre les actes d'avortement (3) 

Une "Légion française des combattants" (LFC),  est créée, son objectif premier étant d'infiltrer la population, de dénoncer les déviants et les fautifs de "mauvais esprit ". Le service d'ordre de cette légion deviendra en 1943 la "Milice Française" (composé de 30.000 hommes, elle lutte contre la résistance et se rend responsable d'un nombre considérable d'exactions)

En juin 1942, le procès verbal du conseil des ministres au cours duquel Laval annonça l'organisation de la rafle du Vél d'Hiv, prouve que Pétain approuva l'opération et la qualifia de "juste". En Zone sud, des milliers de Juifs sont envoyés dans des camps de la mort, sans qu’aucun soldat allemand ne soit présent.(4)

En août 1942, un télégramme signé Pétain félicite Hitler d’avoir fait échec à la tentative de débarquement allié à Dieppe.
En septembre 1942, la création du STO (service du travail obligatoire) permet le départ forcé de plus de 600 000 travailleurs en Allemagne.

Jamais Pétain n'aura un mot pour condamner les déportations, les rafles et les massacres quasi-quotidiens, par contre en 1944 il ne manquera pas de dénoncer "les crimes terroristes" de la Résistance. Il encourage la Légion des volontaires français (LVF) qui combat en URSS sous l’uniforme allemand allant même jusqu'à leur déclarer qu'elle détient "une part de notre honneur militaire".

Conclusion


Pétain à Toulon en décembre 1940

En 1940, les français sont sonnés par la défaite alors qu'il croyait l'armée invincible. L'Armistice est considéré comme un soulagement. Pétain étant alors perçu par la majorité de la population comme capable de sauver l'honneur face à l'ennemi. Contre toute attente, le Maréchal est d'abord très populaire. Il n'est pour s'en rendre compte que d'observer les photos d'époque où il s'exprime devant des foules considérables. Son projet de révolution nationale est beaucoup moins populaire, la présence dans son gouvernement d'individus peu recommandables (notamment Laval) est également moins bien reçu, mais une grande majorité de français "fera avec". La collaboration est sans doute largement rejetée, mais beaucoup croient à la bonne foi du Maréchal qui veut protéger les Français, (la "face mauvaise "du personnage étant mis au compte de ses ministres ou des allemands)

Fin 1942, c'est à dire après les grandes rafles de juifs, l'invasion de la zone libre et l'instauration du STO, nous avons une situation paradoxale dans laquelle le régime de Vichy est détesté mais la popularité du Maréchal quasi intacte.

Dire que la France était majoritairement pétainiste et qu'elle s'est réveillé majoritairement gaulliste et résistante en 1944 est presque devenu un cliché, mais ce n'est pas entièrement faux.

Il apparaît aujourd'hui clairement aux yeux des historiens, (se fondant sur les archives franco-allemandes) que la collaboration a été recherchée par Pétain, et qu'elle ne lui donc pas été imposée. (Hitler n’y croyait pas). La dualité entre Pétain et ses ministres n'a jamais existé. Laval déclarera pendant le procès de Pétain sans ambiguïté qu’il n’agissait qu’après approbation préalable du Maréchal.

Pétain n'a pas protégé les français, il a aidé les allemands avec sa police(5), sa milice et ses fonctionnaires en les déchargeant des tâches qu'ils auraient été obligés d'accomplir eux-mêmes (arrestation et livraison de juifs, combat contre la résistance, fourniture de main d'œuvre et de denrées alimentaires)

Pétain et les femmes.

Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il ne s'embarrassait pas de contradictions, ainsi il déclara que "les femmes sont responsables de l'esprit de jouissance qui a nui à la France" (?) mais était partisan du droit de vote des femmes(6). Dans la sphère privée, Pétain, chantre de l'ordre moral (et pas qu'un peu, voir plus haut) pratiquait le triolisme (avec deux femmes) (7)
Pétain se maria civilement en 1920 avec sa maîtresse, Annie Hardon (1877-1962). Devenu chef de l'état, le pape Pie XII s'inquiéta de la situation conjugale du Maréchal (il ne devait avoir que ça à faire !), des tractations secrètes eurent lieu entre l'Etat Français et le Vatican aux termes desquelles, Pétain se maria religieusement (mais secrètement) en Mars 1942.

Epilogue

Au cours de son procès Pétain dira n'importe quoi comme par exemple "qu’il avait toujours été un allié caché du général de Gaulle"
Pétain est déclaré coupable d’intelligence avec l’ennemi et de haute trahison. Il est condamné à mort et à la dégradation nationale. (son titre de Maréchal lui est donc retiré)
De Gaulle le gracie et commue sa peine en réclusion perpétuelle.

Postérité :

Bizarrement tous les présidents de la Vème république se crurent obligés d'aller faire fleurir la tombe de l'ex maréchal au moins une fois. La justification étant qu'ils voulaient honorer par là le vainqueur de Verdun et non l'homme de la collaboration. Cette pratique cessa après 1992.
Seuls aujourd'hui quelques attardés mentaux bien ancrés dans l'extrême-droite (pléonasme) continuent de vénérer la mémoire de cette vieille baderne et organisent régulièrement des campagnes pour réclamer que ses restes soient transférés à Verdun (ça les occupe).

Pensées profondes :

- Je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur.
- L'état issu de la révolution nationale devra être autoritaire et hiérarchique.


Notes
(1)
Gerlier changera d'avis ensuite en adoptant une attitude tout à fait honorable...
(2) qui ne sera dépénalisé qu'en 1981
(3) 1939 : Code de la famille. Création de brigades policières chargées de traquer les "faiseuses d'anges". La répression s'accroît.
- 1941 : Les personnes suspectées d'avoir participé à un avortement peuvent être déférées devant le tribunal d'État.
- 1942 : L'avortement est un crime d'état puni de mort.
- 1943 : Une "avorteuse" est guillotinée après que Pétain lui ait refusé sa grâce !

(4) En tout, 76 000 Juifs parmi lesquels 11 000 enfants, non réclamés au départ par les Allemands, ont été déportés de France sous l’Occupation, 80 % d'entre eux après avoir été arrêtés par la seule police française. Seuls 3 % survivront aux déportations.
(5) Curieusement, on nous parle beaucoup du ralliement (de dernière minute) de la police parisienne à la résistance mais beaucoup moins de ces choses là....
(6) Dans un projet de constitution qui ne vit jamais le jour.
(7)
cité dans un documentaire de Serge de Sampigny diffusé le 15 novembre 2010 sur France 3, qui a pour source la correspondance privée de Pétain