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An 1315 : le Premier AUDIT…

Page mise à jour le 14/10/2015

Audit ! Audit ! Et puis d'abord qu'est ce que cela veut dire ?

L'AUDIT est une procédure de contrôle de la comptabilité et de la gestion d'une entité (ce peut être une entreprise, une association, une administration, une collectivité territoriale...) et de la réalisation de ses objectifs.

D'accord, d'accord ! Cela dit on n'en entendait jamais parler avant... et on ne s'en portait pas plus mal !

Erreur ! Car si le terme est nouveau, la méthode est fort ancienne; Qu'on en juge :

L'audit des comptes des prédécesseurs est une vieille tradition française, cette pratique s'est d'ailleurs considérablement adoucie au fil des ans.

En 1315 le premier Audit des comptes de la Nation s'était conclu par la pendaison haut et court d'Enguerrand de Marigny, puissant ministre de Philippe le Bel.

Lorsque Louis X, dit le Hutin, fils aîné de Philippe le Bel arriva au pouvoir fin 1314, l'une de ses premières initiatives fut de mettre en place une commission pour évaluer la sincérité des comptes. Louis X agissait sous la pression des féodaux, alors en pleine réaction.

Marigny, qui avait à la fois rogné les pièces de monnaie, accablé le peuple d'impôts et bâti une immense fortune personnelle était leur bête noire.

Le travail de la commission était d'autant plus aisé qu'Enguerrand de Marigny avait eu la bonne idée d'inventer le budget un an plus tôt. Pour la première fois, il existait donc un document faisant état des recettes et des dépenses. La commission décida qu'il n'était donc pas utile d'entendre le ministre et fit son rapport au roi. Marigny fut pendu au gibet de Montfaucon pour "péculat" (prévarication) et "sorcellerie". Cette dernière accusation fut ajoutée par soucis de "communication", comme on dirait aujourd'hui. La preuve, malgré cette terrible sentence, il eut la "chance" d'être pendu et non brûlé. (1)

Trois siècles et demi plus tard, pour faire condamner Fouquet, Colbert eut aussi recours à la technique de l'audit. Après l'arrestation du surintendant des finances à Nantes, le 5 septembre 1661, Colbert charge une commission spéciale de la Chambre des comptes de dresser un "état au vrai" des finances et prouver les détournements de son rival.

Dans un second temps le roi crée une Chambre de justice sur mesure qui engage le procès de Fouquet. Ce dernier sera condamné trois ans plus tard à la détention perpétuelle dans la forteresse de Pignerol. (Cette forteresse du Piémont connu ensuite une gloire posthume grâce à toute la littérature inspirée par l'homme au masque de fer, qui lui aussi y fut enfermé)

Plus proche de nous, il nous faut parler de Jacques Necker. Ce banquier parisien devint directeur général des finances en 1777, il souleva l'opposition des parlements et de la Cour en créant des assemblées provinciales chargées d'établir l'impôt et en recourant à l'emprunt. Ayant révélé l'étendue de la dette publique et les dépenses des privilégiés, il dut démissionner en 1781, se créant une immense popularité auprès du tiers état.

Rappelé aux finances en 1788 par Louis XVI, il commande aussitôt un audit des comptes de ses prédécesseurs Talonne et Brière. Le résultat fut sans appel et ne sachant comment rétablir une situation financière catastrophique il fit décider la convocation des Etats Généraux. Ces derniers à la surprise générale se proclament Assemblée Constituante au grand dam de la Cour qui renvoi Necker le 11 Juillet (il fallait bien un bouc émissaire...), provoquant la colère du peuple qui 3 jours plus tard pris la Bastille ! Louis XVI rappela Necker le 16 juillet, il était un peu tard...

L'audit deviendra une coutume après chaque révolution ou changement de régime : 1815, 1831, 1871, 1945, avant d'être une pratique en cas de simple alternance (1981, 1993, 1997).

Après la révolution de Juillet, Louis-Philippe charge le baron Charles Dupin, mathématicien et conseiller d'état, de dresser un état de la situation réelle des finances. C'est ce qui ressemble le plus aux audits d'aujourd'hui. On y trouve pour la première fois une estimation du produit intérieur brut, ce qui a permis à Dupin d'établir des ratios, comme le ratio de dette sur PIB.

Le baron Dupin, dont on savait déjà qu'il était l'inventeur des statistiques nationales serait donc également le grand-père... des critères maastrichtiens !

Et maintenant....

et bien justement maintenant on est passé ...

... du rationnel à l’absurde !

Nous publions ci-après un exemple pris, parmi tant d’autres, de rapport d’audit C’est celui qu’a fait la Société Mac brun et Kenty ASS ; après un concert symphonique au Royal Festival Hall de Londres.

Les conclusions sont sans appel :

 restructuration et annualisation

 meilleur amortissement du matériel

 rentabilité

 rationalisation

 normalisation des qualifications

 baisse des frais généraux

Et pourtant .ce qui peut apparaître comme des évidences n’est souvent qu’à priori et mauvaise foi

Pour que chacun puisse en juger...

Des spécialistes de l’organisation du travail ont assisté à un concert symphonique au Royal Festival Hall de Londres.

Après l’audition, ils se sont réunis et ont rédigé leur rapport dont voici quelques extraits !

 Pendant de longues périodes, les 4 joueurs de hautbois n’ont rien à faire : leur nombre doit être réduit et leurs interventions mieux réparties sur la durée du concert, de manière à éliminer les pointes d’activités.

 Les 12 premiers violons jouent à l’unisson, c’est à dire des notes identiques. Le personnel de cette section pourrait subir une réduction massive. L’investissement d’un amplificateur électronique de puissance approprié permettrait d’atteindre l’intensité " sonore requise et serait amorti en 4 mois

 Le coefficient d’utilisation du triangle est extrêmement faible, alors que son prix d’achat est peu élevé: un emploi plus large de cet instrument serait très rentable, l’investissement étant plus vite amorti.

 Le remplacement du piano à queue par un piano droit, tout comme celui de la contrebasse par un instrument moins encombrant, permettrait une utilisation plus rationnelle de l’espace réservé aux concertistes comme du stockage des instruments dans le magasin.

 Il serait fortement recommandé de normaliser la durée de toutes les notes, de façon à pouvoir faire appel à des exécutants de qualifications moins élevées.

 Il semble inutile de faire répéter aux instruments à vents des passages déjà exécutés par les instruments à cordes ; si tous les passages redondants étaient supprimés, la durée totale du concert pourrait être ramenée à 20 minutes. Ceci permettait de donner 3 concerts par soirées et donc de mieux répartir les frais généraux (chauffage, surveillance, usure des fauteuils...)

Avec les cabinets d’audits on vit vraiment une époque formidable !

une sorte de suite ici


Notes
(1) Enguerrand de Marigny fut pendu au gibet de Montfaucon et y resta accroché pendant deux ans...