Le roi nu
Page mise à jour le
11/10/2012
Hans Christian Andersen
(1905-1975) est connu pour être l'auteur de "la petite sirène" ou de "la
petite marchande d'allumette"s. Mais il est aussi l'auteur d'un étonnant
conte intitulé "Les Habits neufs de l'empereur" publié en 1837 et
que l'on sous-titre souvent "Le roi nu"
Voilà un conte qui vole bien plus haut que son premier degré de lecture
!
On vous en offre une version light (ceux qui voudront lire la version intégrale peuvent se rendre ici)
Autrefois, dans un royaume imaginaire, vivait un roi, puissant et fier. Un jour, deux marchands se présentèrent à la cour, prétendant savoir tisser une étoffe d’une telle qualité, d’une telle finesse, d’une telle légèreté, que seules les personnes les plus distinguées, les plus nobles, les plus intelligentes sauraient la voir. Ils proposèrent au souverain de lui confectionner un habit si beau, si majestueux que seul un grand souverain, tel que lui, méritait d’en porter. Le roi se laissa convaincre que cet habit serait pour lui. Et se félicita de pouvoir bientôt arborer des tels atours, pour la fête du trône. Le roi les installa dans une aile du palais et leur fit donner moult mets délicats et pièces d’or. Et les deux marchands se mirent au travail. Quelques jours plus tard, le roi, curieux, vint voir où en était le tissage de cette fameuse étoffe. Mais… il ne vit rien du tout. Troublé, il décida de n’en parler à personne… Car personne – bien sûr – ne voulait d’un roi sot ! Il envoya plusieurs ministres inspecter l’avancement des travaux. Ils ne virent pas plus que le souverain, mais n’osèrent rien en dire. Cependant, la fête du trône approchait. Et tout le royaume parlait de cette étoffe extraordinaire. Le jour de la fête arriva et les deux compères aidèrent le roi à revêtir le magnifique habit. Le roi ne voyait toujours rien, des moirures incomparables et des magnifiques drapés que lui décrivaient les marchands – et maintenant les ministres en chœur – mais il était trop tard pour avouer ses doutes. Ainsi « vêtu » et accompagné de ses ministres, le souverain se présenta à son peuple, en haut de la cour d’honneur du palais royal. Le peuple retenait son souffle… Personne ne vit rien, bien sûr. Mais chacun inquiet de passer pour un sot, un ignorant ou un sujet indigne, prit le parti de s’émerveiller et surenchérit aux compliments affectés, de son voisin. Le roi traversa alors la cour d’honneur, du palais, paradant en caleçon, devant ses sujets, rouge de fierté. Les compliments fusaient autour de lui. Seul un petit garçon osa dire la vérité : « Mais… le roi est tout nu ! ». Certains étouffèrent alors une toux nerveuse. D’autres prirent le parti de continuer leurs flatteries. D’autres encore fixèrent le bout de leurs chausses, sans mot dire. Le roi comprit que son peuple avait raison… Mais il continua sa marche sans dire un mot. |
Transcrit dans la réalité contemporaine, ça donne quoi ?
1 - Le dirigeant politique, d'entreprise, ou de tout ce que vous voulez, bref un décideur, va prendre une décision absurde. Or il a nommé comme proches collaborateurs des gens qui n'oseront jamais le contrarier, des gens qui arrivé à ce poste et qui ne pour ne pas le perdre préfèrent l'allégeance à la collaboration critique. Les collaborateurs vont donc valider la décision absurde. Puis la décision absurde va être appliqué, certains (également par allégeance) la trouveront très bien, même s'ils ne sont pas attaché directement au pouvoir décisionnel, comme par exemple une certaine presse, certains médias...)
2 - le bureau d'étude à qui l'état ou l'entreprise va confier une mission aura toujours le choix théorique entre faire une étude objective au risque que ses conclusions déplaisent à son commanditaire, ou faire une étude suggestive qui ira dans le sens souhaité par le commanditaire. A votre avis que font-ils dans la majorité des cas ?
3 - Il en est de même dans l'art : Combien de fois avons nous vu un metteur en scène d'Opéra proposer des absurdités allant jusqu'à trahir l'oeuvre originale, mais où personne parmi son cercle rapproché ne s'est permis la moindre remarque critique (bien au contraire). La majorité des critiques valide par pure allégeance, par conformisme, par snobisme ou par paresse intellectuelle. Quant au public, il y en aura toujours une partie pour se mentir à lui-même et trouver ça très bien, et une autre partie pour culpabiliser de ne pas avoir le niveau pour apprécier à sa juste valeur cette mise en scène "de référence".
4 - L'art contemporain est dans le même cas, il n'est même plus besoin de leader. Une autoproclamée prestigieuse revue d'art au sommaire de laquelle Botticelli côtoiera Dugenoux, donnera à ce dernier l'argument d'autorité lui permettant d'entrer au Panthéon des valeurs sûres de l'art... les gogos goberont et les marchands encaisseront la monnaie !