Les pantalonnades du Cardinal Siri
page mise à jour le 15/02/2015


Giuseppe Siri (1906-1989), fut archevêque de Gênes, nommé cardinal par Pie XII. Conservateur et anticommuniste viscéral, Pie XII en avait fait son dauphin. On a prétendu qu'il avait obtenu la majorité des voix au conclave de 1958, qu'il aurait dans un premier temps accepté d'être pape sous le nom de Grégoire XVII pour ensuite se rétracter rapidement (sous pression ?) Cette rumeur trouve son origine dans un cafouillage dans la couleur des fumées pendant ce conclave. Bien que les délibérations des conclaves soient sous secret, tout finit par se savoir et aucun ouvrage sérieux consacré à leurs délibérations n'est venu confirmer cette thèse. Siri fut de nouveau battu aux conclaves de 1963, d'août 1978 et d'octobre 1978. En fait l'immense désespoir du Cardinal Siri a été de ne jamais être élu pape et il n'a jamais vraiment digéré ses défaites...

En 1960, il se fit remarquer par la publication d'un texte virulent où il fustigeait le port du pantalon chez les femmes, il fallait bien que ce petit chef d'oeuvre d'humour involontaire soit porté à la postérité :


Avertissement du Cardinal Siri à propos

du vêtement masculin porté par les femmes

  (Extraits d’une Instruction de S.E. le Cardinal Joseph Siri publiée dans la revue de son diocèse, le 12 juin 1960)

      « Cette année, les prémices d’un printemps qui se fait attendre nous offrent le spectacle de plus en plus fréquent de jeunes filles, de femmes, de mères de famille même, vêtues d’un habit masculin : le pantalon. […] La généralisation de cette pratique impose une sérieuse réflexion, et Nous prions les destinataires du présent Avertissement, parce qu’ils doivent être conscients de leur responsabilité devant Dieu, de bien vouloir prêter à ce problème l’attention nécessaire.

   1. L’aspect moral de cet usage ne peut que Nous inquiéter ; aussi Notre premier souci est-il de porter un jugement moral équitable sur le port de vêtements masculins par les femmes. Deux choses sont nécessaires à la modestie d’un vêtement : qu’il couvre le corps et qu’il en dissimule les formes. Un pantalon couvre le corps de façon moins insuffisante que la plupart des jupes de notre époque : c’est un fait certain, mais qui ne suffit pas à l’innocenter. Car, par nature, le pantalon moule le corps bien plus que ne le fait une jupe. C’est en tous cas ce qui arrive le plus souvent, même si nombre de vêtements féminins actuels serrent le corps autant ou davantage que certains pantalons […].

  2. […] …c’est une autre aspect du port du pantalon par les femmes qui nous semble le plus grave. En voici trois éléments, que nous exposerons avec soin. L’habit masculin employé par une femme : a) modifie la mentalité des femmes ; b) tend à vicier les rapports entre l’homme et la femme ; c) détruit facilement la dignité d’une mère face à ses enfants.  

  1. - Il altère la mentalité féminine. Le désir d’imiter l’homme, voire de rivaliser avec lui, parce qu’on le considère comme plus fort, comme plus décontracté, plus indépendant : voilà la raison qui pousse une femme à s’habiller comme lui, cherchant dans la tenue extérieure un point d’appui pour se persuader qu’elle est « comme un homme ». Même si ce motif n’est pas conscient, ce qui est inéluctable c’est qu’en retour, parce que la tenue vestimentaire a une très forte influence sur le comportement et sur l’état d’esprit, le changement du vêtement modifiera gestes et attitudes, la mentalité intérieure s’alignera sur la tenue extérieure ; il en est ainsi depuis les origines. Cela peut conduire au fait que le port d’un vêtement masculin sera chez une femme une sorte de refus de sa féminité, qu’elle en vient à considérer comme une infériorité – alors qu’il n’y a que diversité.
  2. - Il tend à vicier les rapports entre hommes et femmes. En effet, le rapport spontané dominant entre les deux sexes, quand chacun arrive à maturité, est l’attrait mutuel. Le fondement premier de cet attrait est la diversité, condition nécessaire de la complémentarité. Si cette diversité devient moins visible à cause de la disparition de son signe extérieur, et qu’ainsi le climat spirituel n’est plus sain, ce rapport est profondément bouleversé. Mais c’est bien davantage qu’il faut dire encore : cette attirance est naturellement précédée par la pudeur. Lorsque naît l’instinct poussant à des actes qui échappent à la raison, cette pudeur préexistante est un rempart qui réprime, qui impose le respect et qui tend à élever les relations vers le plan supérieur de l’estime mutuelle et de la crainte salutaire. Si la diversité des vêtements n’est plus là pour alerter et maintenir les défenses naturelles, la pudeur ne peut se soutenir et ce rempart même s’effondre. […] Lorsque la femme est assimilée à l’homme, ses défenses sont réduites et sa faiblesse s’accroît.
  3. - Une tenue masculine porte atteinte à la dignité d’une mère aux yeux de ses enfants. Tous les enfants possèdent instinctivement le sens de la dignité et de l’honneur de leur mère. C’est un point sur lequel ils sont très sensibles ; il revêt la plus grande importance pour la formation de leur âme et pour l’orientation de leur vie, et cela bien avant qu’ils n’atteignent l’adolescence. Si ce sens est déçu ou scandalisé, si la mère ne répond pas à l’image très haut placée et très exigeante que l’enfant s’en fait, ses réactions seront profondes et durables, parfois terribles. Même si parvenu à l’âge adulte on a oublié cela, le pli reste ; cette première crise peut être décisive – et de façon néfaste. […]

3. La modification de la mentalité féminine provoque un dommage fondamental – et à la longue irréparable – au préjudice de la famille, de la fidélité conjugale, de la sensibilité affective et de la société humaine. S’il faut concéder que les effets d’une tenue inconvenante ne se manifestent pas tous à brève échéance, il faut ne pas oublier l’action lente et sournoise qui affaiblit, qui détruit et qui corrompt petit à petit. […]  

4. La conséquence logique de ce que Nous venons d’exposer est que quiconque a charge d’âmes doit avoir l’esprit vraiment alarmé, avec une vigilance rigoureuse et suivie d’effet. […] L’homme peut aller et venir, parce que Dieu a laissé une grand latitude à sa liberté ; mais les caractères essentiels de sa nature et ceux, non moins essentiels, de la loi éternelle, n’ont jamais changé, ne changent pas et ne changeront jamais. Il existe des limites qu’on peut se croire autorisé à franchir, mais on y trouvera la mort ; il existe des limites que le verbiage philosophique peut railler ou mépriser, mais qui se dresseront comme un mur inviolable bâti de faits concrets et de loi naturelle, contre lequel les violateurs de ces limites se briseront. Et l’histoire nous apprend clairement, à la terrible lumière de l’expérience des peuples, que la transgression de la loi naturelle entraîne nécessairement, tôt ou tard, une suite de catastrophes. Le résultat des violations de la loi naturelle n’est pas un nouvel équilibre humain, mais bien le désordre, l’instabilité si nocive, l’effrayante stérilité des âmes, et l’accroissement ahurissant du nombre d’épaves humaines exclues de toute vie sociale et sombrant dans le dégoût, la tristesse, l’abandon. Sur les ruines de la loi divine prolifèrent les familles brisées, les vies anéanties, les foyers éteints, les vieillards rejetés, les enfants dégénérés et – pour finir – les désespoirs et les suicides. Toutes ces misères témoignent que l’ordre voulu pas Dieu demeure malgré tout et ne s’accommode pas des rêves délirants de prétendus philosophes !  

5. […] Nous sommes bien conscients que la vie moderne présente des problèmes et des exigences inconnues de nos grands-parents. Mais Nous déclarons qu’il existe des valeurs supérieures à maintenir, bien plus nécessaires que les commodités passagères ; Nous confessons aussi avec certitude qu’il existe pour chaque problème nouveau des solutions acceptables et dignes, que les personnes de bon sens et de bon goût trouveront. C’est par charité que Nous luttons contre le laminage du genre humain, contre l’écrasement produit par l’effacement des différences qui sont au fondement de l’équilibre de l’humanité. Quand on voit une femme en pantalon, ce n’est pas uniquement à telle personne qui s’habille de manière indigne qu’il faut penser, mais à l’humanité tout entière qui va vers un chaos qui sera atteint quand les femmes seront totalement assimilées aux hommes. Personne n’a intérêt à prêter la main à l’élaboration d’un avenir où règneront l’indéfini, l’ambigu, l’incomplet et, en définitive, le monstrueux


Amen !