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11/05/2013
HOMMAGE à Henri Michaux
(1899-1984)
Poète inclassable, il peignait aussi,
des choses très inégales parfois amusantes comme ci-dessous, parfois sans
intérêt.
Foules - 1952
J'ai choisi deux textes, l'un très paillard (rencontre dans la forêt), l'autre
surréaliste et macabre
Rencontre dans la forêt (1934)
D’abord il l’épie à travers les branches.
De loin, il la humine, en saligorons, en nalais.
Elle : une blonde rêveuse un peu vatte.
Ça le soursouille, ça le salave,
Ça le prend partout, en bas, en haute, en han, en hahan.
Il pâtemine. Il n’en peut plus.
Donc, il s’approche en subcul,
L’arrape et, par violence et par terreur la renverse
sur les feuilles sales et froides de la forêt silencieuse.
Il la déjupe ; puis à l’aise il la troulache,
la ziliche, la bourbouse et l’arronvesse,
(lui gridote sa trilite, la dilèche).
Ivre d’immonde, fou de son corps doux,
il l’envanule et la majalecte.
Ahanant éperdu à gouille et à gnouille
- gonilles et vogonilles -
il ranoule et l’embonchonne,
l’assalive, la bouzète, l’embrumanne et la goliphatte.
Enfin ! triomphant, il l’engangre !
Immense cuve d’un instant !
Forêt, femme, ciel animal des grands fonds !
Il bourbiote béatement.
Elle se redresse hagarde. Sale rêve et pis qu’un rêve !
"Mais plus de peur, voyons, il est parti maintenant le vagabond…
et léger comme une plume, Madame."
A la broche
En fronde les uns, à la broche les autres... et c'est si
naturel.
Difficile de garder sa chaise.
Les invités mangent.
Il y a de la place à faire.
Des nouveaux arrivent.
Où mettre les précédents.
Où les mettre?
On les met à la broche.
Refoulés de chaise en chaise, de place en place, ils se
retrouvent devant la cheminée.
On les y pousse et hop! à la broche!
Le naturel ne manque pas ici.
Il n'y a rien à redire du côté naturel.
C'est pourquoi personne ne résiste.
Happés avec douceur, mais happés irrésistiblement, ils glissent vers la chaude
ouverture.
L'idée de résistance ne s'offre pas véritablement à eux.
Ils se laissent faire, saisis par l'évidence.