"Oui,
très bien, je vous masse
du haut en
bas et de long en large sans oublier un seul muscle,
promet Rachel Wotton au téléphone. J’ai toute une
collection de lingerie que je peux porter selon vos
préférences." Rachel Wotton est une travailleuse du sexe
australienne. Elle se raconte sur France Ô, dans un
documentaire intitulé Scarlet Road,
toujours
visible sur Pluzz.
Pour être l'héroïne de ce film,
Rachel n'est pas une prostituée comme les autres. Elle exerce
par choix, à Sidney, en Nouvelle-Galles du Sud, où la
prostitution est légale et où elle s’est spécialisée dans le
service aux personnes handicapées. "Chacun a le droit
d'exprimer sa sexualité, y compris les handicapés." Cette
profession de foi est devenue sa cause, elle en est devenue
l'ambassadrice à travers le monde et a créé en Australie, avec
son collègue Saul, l’association Touching Base, un centre de
ressources destiné à faciliter l'accès des handicapés à la
sexualité. Ceux-ci y sont mis en relation avec des
travailleurs du sexe (femme ou homme) qui, eux-mêmes, peuvent
apprendre à travailler avec ce public particulier. Rachel leur
enseigne par exemple comment pratiquer une aide à la marche
sensuelle tout en maîtrisant la "chute sécurisée", leur
apprend à poser des questions dont la réponse doit être
« oui » ou « non », seul moyen de communiquer avec des
paralysés ne bougeant que les paupières…
Le
2 juin, à Sidney, c’est la Journée
internationale des catins. Rachel défile avec d'autres membres
de son association et quelques-uns de ses clients handicapés.»
"J'ai à nouveau l'impression
d'être un homme, témoigne John Blades, client de Rachel
paralysé par la sclérose en plaques. Mon neurologue n'en
revenait pas. C'est très rare que la fonction sexuelle marche
à nouveau. » Rachel n'est pas peu fière : "C'est un
honneur de faire partie de leur vie et de leur apporter un peu
de bonheur. Parfois, un bon orgasme vaut bien mieux que trois
séances chez l’ergothérapeute", s’amuse-t-elle, heureuse
de "redonner confiance aux gens, de
leur donner une meilleure opinion d'eux-mêmes".
La force du documentaire
est de nous
faire entrer dans l’intimité de Rachel et dans celle de ses
clients tout en conservant une grande pudeur. Catherine Scott,
la réalisatrice, filme les préparatifs des rendez-vous, les
moments de tendresse partagés, recueille les mots de chacun.
Il faut voir Elaine Manitta, mère de Mark, préparer son fils à
recevoir Rachel : toilettage, habillage, installation d'un
chouette plumard à la place du lit médicalisé et arrosage de
pétales de roses à travers toute la pièce. "Il a besoin que
je l'aide aussi pour sa vie sexuelle", dit-elle. Le
bonheur, le plaisir visibles sur le visage de Mark (il ne peut
pas parler), enlacé par Rachel, font chaud au cœur.
Avec son association Touching Base, elle lutte sans relâche
contre la discrimination et la stigmatisation, combat avec la
même force les stéréotypes dont souffrent les handicapés d'une
part et les travailleurs du sexe d'autre part. Pour asseoir sa
légitimité, elle a même entrepris des études à l’université de
Sidney, jusqu'à décrocher un doctorat de sexologie. "Je
sens que c'est un costume que vont me demander mes clients",
plaisante-t-elle en toge et coiffe de doctorante (et bas
résille en dessous).
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