0101 - Juin 2005 - Suisse
écrivain
et prostituée genevoise, Grisélidis Réal est décédé, mardi
31 mai, dans une clinique de Genève, des suites d'un
cancer.
Née le 11 août 1929 à Lausanne, dans une famille
d'enseignants, Grisélidis Réal passe une partie de son
enfance à Alexandrie, puis à Athènes, où son père est en
poste. De retour en Suisse, elle poursuit sa scolarité,
puis entreprend des études aux Arts décoratifs de Zurich.
Elle se marie, a deux premiers fils, puis se sépare de son
mari. Griselidis Réal commence à se prostituer au début
des années 1960, en Allemagne, où elle est partie avec ses
enfants (elle en aura quatre) et son amant. Dans son
premier livre, Le noir est une couleur (Balland, 1974,
réédité chez Verticales en mars 2005), elle se raconte,
sans concessions ni misérabilisme, avec un lyrisme sombre
et âpre puisé au cœur de l'expérience vécue.
Dans la décennie suivante, Grisélidis Réal prend fait et
cause pour la lutte des prostituées, notamment lors de
l'occupation de la chapelle Saint-Bernard, à Paris, en
juin 1975. Elle balaye notamment l'argument de
l'aliénation par les proxénètes, soutenant que la
prostitution peut être un choix, un acte libre. La "catin
révolutionnaire" était née. Elle contribue alors à fonder
une association d'aide aux prostituées (Aspasi). Dans son
modeste domicile genevois, elle crée et accueille un
Centre international de documentation sur la prostitution.
Parallèlement à ce combat politique, Grisélidis Réal a
développé une pensée positive de ce qu'elle nomma en
janvier (dans la préface à Carnet de bal d'une courtisane,
Verticales, mars 2005), "un Art, un Humanisme et une
Science" . "La seule Prostitution authentique est celle
des grandes artistes techniciennes et perfectionnistes qui
pratiquent cet artisanat particulier avec intelligence,
respect, imagination, cœur, expérience et volontairement,
par une sorte de vocation innée (...), sachant se mettre
dans la peau de l'autre, déceler son attente, son
angoisse, son désir et comment l'en délivrer sans dommage
pour elle, ni pour lui."
Son "artisanat", Grisélidis Réal l'interrompra en 1995, à
l'âge de 66 ans. Trois ans plus tôt, elle avait publié La
Passe imaginaire (L'Aire/Manya), recueil de lettres
adressées à son ami Jean-Luc Hennig. Loin de toute
caricature comme de tout moralisme, avec son esprit vif et
révolté, avec surtout une vraie générosité, Grisélidis
Réal incarnait une forte idée de la dignité humaine.
L'ors
du débat en France sur les lois Sarkozy, elle nous avait
écris pour nous dire que ce projet de loi lui faisait
encore plus mal que son cancer, et avait apporté son
soutien aux articles publiés par Sonia Kubler sur notre
site. Ces articles lui avaient fait chaud au cœur et en ce
qui nous concerne le soutien d'une figure aussi généreuse
et intelligente fut un moment de grande émotion pour notre
site...
Merci à la presse helvétique d'avoir donné à la mémoire de
Griselidis la place qui lui revenait, la France à été plus
discrète puisque seule la presse " de gauche " en a parlé,
Libération et le Monde auquel sont emprunt la première
partie de cet article |
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