Labarthe et l'onanisme

Extraits du dictionnaire médical du docteur Labarthe, 1887
 
Voici un texte croustillant, on se demande si l'auteur est sincère ou s'il s'est royalement foutu du monde en écrivant son texte d'une seule main...

L'onanisme est une pratique qui consiste à provoquer l'orgasme vénérien en dehors du coït. Aussi ancien que le monde, l'onanisme vivra autant que lui, envers et contre les médecins et les moralistes. Les deux sexes s'y livrent à peu prés également.

L'onanisme chez la femme peut être comme chez l'homme, solitaire ou à deux, manuel ou non manuel. On distingue :

- L'onanisme vaginal consiste à introduire dans le vagin, le doigt, une chandelle, une carotte, un navet, un étui à aiguilles, un phallus artificiel, etc. et à lui imprimer des mouvements de va et vient.

- L'onanisme clitoridien consiste à exercer des frottements légers, des titillations délicates sur le clitoris avec le doigt ou à imprimer au capuchon qui recouvre le gland du clitoris, tenu entre le pouce et le médius, des mouvements de va et vient jusqu'à production du spasme voluptueux.

- L'onanisme clitoridien est beaucoup plus fréquent que l'onanisme vaginal, car le clitoris est de tous les organes génitaux féminins, celui qui est doué de la plus vive sensibilité. On le rencontre aussi bien chez les femmes que chez les jeunes filles. C'est celui qui domine dans les pensions de demoiselles.

Il est un autre mode d'onanisme clitoridien qui se pratique par le frottement des cuisses, la femme restant debout ou assise. Il s'accomplit par un mouvement particulier du bassin, par un balancement des hanches, grâce auquel les cuisses étant posées l'une sur l'autre et fortement croisées, la friction clitoridienne se produit par un frottement de la partie interne et supérieure des cuisses.

On rencontre cette variété d'onanisme chez les couturières, lingères, les femmes qui travaillent à la machine à coudre, les modistes ; il se pratique aussi dans les pensions et les couvents.

L'onanisme à deux, entre femmes, peut être manuel ou buccal, mais il est presque toujours Clitoridien

- dans l'onanisme manuel, les deux femmes se titillent réciproquement le clitoris avec le doigt

- L'onanisme buccal consiste à se servir des lèvres et de la langue, au lieu de la main, pour chatouiller et exciter le clitoris jusqu'à production du spasme voluptueux, la langue servant à frictionner le clitoris et les lèvres à pratiquer la succion de l'extrémité inférieure de cet organe.

- Cette variété d'onanisme a reçu le nom de saphisme depuis que l'illustre grecque Sapho l'éleva a la hauteur d'un culte avec les Lesbiennes comme prêtresses, ce qui prouve que de tout temps, la langue et les lèvres ont pris une large part aux plaisirs de l'amour contre nature.

Sans remonter à Sapho, on trouve dans l'histoire moderne des exemples authentiques de cette pratique, notamment chez les filles du Régent, l'une d'elles, l'abbesse de Chelles fut accusée de se livrer au saphisme avec les jeunes religieuses de son couvent qui lui accordaient des témoignages de la plus infâme complaisance. Sa sœur, la Reine d'Espagne, à peine âgée de 16 ans, attaquait toutes celles de ses caméristes qu'elle jugeait passionnées. Le Roi, prévenu, chassa les beautés lesbiennes qui s'étaient prêtées au goût de la Reine, mais après le pardon conjugal, elle reprit ses honteux divertissements.

Tout le monde se souvient du salon d'une princesse, qui sous l'Empire, réunissait chez elles des femmes de la Cour de Napoléon III, avec des chanteuses qui se saphisaient à l'envie.


L'affreux King-Charles en question  
Enfin les Parisiens n'ont pas oublié l'aventure de ce mari qui, en 1883, surprit dans l'arrière boutique d'un magasin interlope de parfumerie du quartier de la Madeleine, sa propre femme en train de se faire saphiser par la jolie parfumeuse.

Le saphisme est surtout fréquent dans les maisons de prostitution et entre prostituées libres.

Il se pratique aussi beaucoup dans les appartements particuliers tenus par des matrones, dans certains magasins de parfumerie, de gants, de mode, de papeterie même, où la clientèle se compose moins de femmes galantes que de femmes du monde qui, blasées, perverties et libidineuses, viennent là se faire saphiser pour satisfaire leurs excitations génésiques et payent les femmes qui leur procurent cette jouissance, mais sans jamais se lier de cœur avec elles, absolument comme les hommes vont dans les maisons de tolérance ou chez une fille.

Pour en finir, rappelons une dernière variété d'onanisme qui est bien le résultat de la plus horrible dépravation et la preuve d'une formidable aberration du sens génésique. Je veux parler de l'onanisme clitoridien que certaines femmes se font pratiquer par des chiens dressés à cet effet. Ces faits de bestialité sont moins rares qu'on ne croit, dans les grandes villes surtout. Méfiez-vous donc de ces femmes, en général des prostituées et des femmes galantes, que vous voyez toujours avec ces affreux "King-Charles" qu'elles portent sous leurs bras et qu'elles comblent de caresses.

(Labarthe, Paul. - Dictionnaire populaire de médecine usuelle. - Paris : Marpon et Flammarion, 1887.  Publié en 2 volumes)
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Bicyclette et organes génitaux
par Dr LUDOVIC O'FOLLOWELL

Depuis longtemps déjà, on a écrit que les mouvements des cuisses à bicyclette provoquaient des frottements, des frictions des lèvres et du clitoris et amenaient la femme à des pratiques vicieuses. Le grand argument de ceux qui appuyaient cette théorie était d’après eux la ressemblance entre les mouvements que fait l’ouvrière actionnant une machine à coudre et une touriste actionnant un cycle. Voici, découpées, dans un journal nullement médical, et qui, pour cette raison, tranche gravement les questions de médecine, quelques lignes parues au milieu de l’année 1894 :

« Pour les femmes, l’effet résultant de l’usage de la bicyclette est aussi très grave. Qu’on se souvienne des désordres, constatés médicalement, que causent les machines à coudre chez les ouvrières qui en font un usage constant et se livrent à cette fatigante occupation du matin au soir. Toutes sortes de maladies de genre spécial se sont révélées chez ces laborieuses, mais un fait particulier a été remarqué également, c’est le développement précoce dans ce milieu de travail de la nymphomanie et de l’hystérie caractérisée. La cyclomanie, en dehors de ses périls ordinaires, comporte pour les femmes les mêmes inconvénients que la machine à coudre. Elle amène les mêmes effervescences, les mêmes surexcitations lubriques, les mêmes accès de folie sensuelle. »

Belle tirade peut-être, mais combien fausse ; il va nous être facile de le démontrer, tant par les articles des maîtres qui ont écrit sur ce sujet que par les résultats de notre enquête et de notre expérience déjà ancienne.

Il est très difficile, au premier abord, pour les médecins, dit le docteur Martin, d’analyser les sensations ressenties par les femmes qui recherchent dans cet instrument une excitation génésique d’ordre particulier, et la délicatesse du sujet empêchera souvent de pousser jusque-là l’interrogatoire, sans compter les révélations sur la voie desquelles on mettrait, par cela même, des jeunes filles inconscientes du fait.

Les effets produits par la machine à coudre et la bicyclette ont été comparés. On sait combien l’emploi de la première peut avoir de dangers, car le mouvement de va-et-vient de la pédale n’est ni large, ni complet, il ébranle la partie inférieure du corps ; c’est une sorte de crispation des mollets qui n’est pas compensée par le balancement du corps et des bras, les grandes lèvres frottent sur les petites et la chaleur qui en résulte provoque fréquemment l’onanisme.

Une femme à la machine à coudre reste dans une atmosphère confinée et doit avoir les yeux sur son travail. La position occasionne une pression sur les organes pelviens. Avec son mouvement court, rapide, limité aux muscles de la cuisse et du jarret sans déplacement du sujet, la machine à coudre ne peut être comparée à la bicyclette, qui met en action tout le membre inférieur et qui est utilisée en plein air.

« Le mouvement nécessaire au fonctionnement de la machine à coudre, disait le docteur Fauquez en 1897, ne met en jeu qu’une articulation, celle du pied sur la jambe (articulation tibio-tarsienne). Il exige un effort musculaire portant sur les muscles de la jambe et détermine une contraction presque continue de ces muscles, muscles de la région externe et de la région postérieure qui sont tous, excepté le muscle poplité, à des degrés divers, extenseurs du pied sur la jambe et qui entrent en fonction quand le pied appuie sur la pédale de la machine à coudre et muscles de la région antérieure qui sont fléchisseurs du pied sur la jambe et agissent dans le mouvement qui tend à relever le pied. Le droit antérieur de la cuisse se contracte aussi dans l’effort nécessaire à maintenir appuyé sur le sol le talon, qui forme le pivot autour duquel se meut le pied. Cet état de contraction entraîne dans les membres inférieurs une gêne de la circulation qui se répercute sur celle du bassin et produit des congestions dans l’appareil utéro-ovarien. C’est pour ces raisons que la machine à coudre est considérée comme un mauvais instrument pour les femmes, surtout pour celles qui souffrent d’affections de l’utérus et de ses annexes. »

Tandis qu’à bicyclette, le travail des membres inférieurs est décrit comme suit par le docteur Verchère dans La France médicale. « Les mouvements indépendants des cuisses physiologiquement n’amènent aucun frottement du côté de la vulve et la femme pourra exécuter le mouvement de flexion et d’extension de la cuisse aussi rapide qu’elle le voudra sans que les deux grandes lèvres subissent le moindre frottement réciproque. Tout le mouvement se fait au niveau des plis génito-cruraux, la région placée et fixée entre les branches ischio-pubiennes est immobile, fixe, indépendante et sans la volonté du sujet aucun mouvement ne se transmet aux replis vulvaires. S’il y a masturbation, c’est qu’il y a manœuvre de la femme, soit en se penchant en avant sur le pommeau de la selle, de façon à ce que la vulve vienne à frictionner sur ce pommeau, soit en serrant les cuisses pour actionner l’une contre l’autre les grandes lèvres et transmettre ainsi le mouvement aux petites lèvres et au clitoris. »

Ces lignes de l’éminent clinicien, nous tenons à les rapprocher de celles que nous avons publiées sur ce sujet au 5 décembre 1894, n’ayant pas encore à ce moment connaissance de l’article de La France médicale paru seulement à quelques jours d’intervalle. « D’abord, la machine à coudre est mue le plus souvent, sans interruption, pendant des heures, cela au moyen d’un mouvement des pieds et des mains, mouvement rapide et peu étendu, dans lequel les membres inférieurs restent rapprochés l’un de l’autre. À bicyclette, au contraire, chaque coup de pédale étend et fléchit largement les articulations du pied, du genou et de la jambe. Ajoutez à cela que l’exercice de la bicyclette chez les femmes n’est pas continuel, qu’elles pédalent sans descendre de machine pendant un temps relativement court, n’imitant pas ainsi les ouvrières qui font de leur machine un usage constant et se livrent à cette fatigante occupation du matin au soir. » Enfin, pensez-vous qu’il soit possible d’assimiler les résultats des deux exercices, dont l’un, pénible, est accompli par des jeunes filles le plus souvent faibles, anémiées et enfermées dans des chambres mal aérées, et dont l’autre, agréable et spontané, est fait en plein air, souvent en pleine campagne, par des femmes de position aisée et qui, à leur promenade, donnent comme limite le commencement de la fatigue.

Depuis le moment où fut rédigé par nous cet article, nous avons vu avec joie de savants médecins ou chirurgiens argumenter comme nous et faire surtout de ce que l’exercice de la bicyclette sa pratique en plein air, la raison majeure pour laquelle on ne saurait comparer la bicyclette et la machine à coudre.

Certes, pour une femme qui le veut bien, pédaler quelque peu suffit à procurer une satisfaction génitale. Voici des faits. M. Verchère connaît une jeune dame bicycliste qui lui a avoué s’offrir à volonté, sur sa bicyclette, deux ou trois séances, à intervalles voulus, de masturbation complète. Elle avoua aussi, il est vrai, qu’elle avait d’autres procédés pour remplacer sa bicyclette.

D’autre part, M. Dickinson, dans The American Journal of Obstetrics (1895), écrit qu’une jeune femme, possédant une expérience très grande des plaisirs sexuels, ne pouvait pas obtenir de jouissances plus intenses que celles produites par l’usage de la bicyclette.

M. Wance a vu une jeune fille de 15 ans, cycliste assidue, devenue pâle, surmenée, quelque peu émaciée. Le bec de la selle faisait un angle de 35 degrés, s’abaissait et se relevait d’une manière sensible pendant la course. Il était facile de comprendre la cause de l’état de fatigue générale de la malade.

M. Martin a interrogé un grand nombre de femmes au sujet des sensations voluptueuses ressenties à bicyclette, et elles lui ont répondu affirmativement. Il est des cas où cette sorte de masturbation sportive les excite à tel point qu’elles augmentent progressivement leur vitesse, filent souvent avec une grande rapidité dans les descentes, sans apercevoir les obstacles placés sur leur chemin. C’est ainsi que l’une d’elles monta sur un trottoir et ne s’arrêta que par une chute heureusement peu grave dans un fossé. Une autre, dans les premières séances d’apprentissage, était tellement excitée qu’elle se précipita pâmée dans les bras du jeune homme qui la guidait dans ses exercices. Un ami de Monsieur le docteur Martin lui raconta qu’il était arrivé à être jaloux de la bicyclette. Sa maîtresse le délaissait chaque jour pour courir à son sport favori et arrivait au logis lassata, sed etiam satiata.

Il nous serait possible de multiplier ce genre d’observations. Ces faits ne sont pas rares, mais, hâtons-nous de le dire, ils appartiennent presque tous à cette classe de femmes désœuvrées, qui dépensent le temps de la manière la plus joyeuse et la plus futile et dont la recherche d’émotions et de plaisirs est la principale occupation ; cependant nous les avons aussi rencontrés chez les femmes honnêtes. Les femmes qui recherchent l’excitation sexuelle et pour qui, suivant l’expression de Donnay, l’oxygène est presque un amant, trouveraient donc dans la bicyclette le moyen de satisfaire leur passion.

« La chose ne doit pas nous surprendre, mais pour nous il n’est pas besoin d’être perverti sexuel pour arriver à cette masturbation d’un nouveau genre. La femme grisée par le grand air, la vitesse, s’abandonne peu à peu à l’excitation ressentie, à la sensation de jouissance spéciale qui est peut-être la cause du plaisir éprouvé par elle sur une balançoire, sur les montagnes russes, plaisir qui souvent la conduit jusqu’à la volupté. Aussi faudra-t-il prescrire avec prudence l’usage du cyclisme chez les jeunes filles de 12 à 13 ans, au moment où la puberté s’établit. Il pourrait y avoir des inconvénients au point de vue de l’éveil de l’instinct génésique. »

Certes, il y a des femmes qui éprouvent plus ou moins facilement des sensations voluptueuses, et il y a surtout des femmes qui les éprouvent dans des circonstances à elles propres et souvent bizarres. Ne connaissons-nous pas le cas d’une de nos clientes qui éprouve un réel plaisir à faire une promenade dans une voiture dont les roues sont munies de bandages pneumatiques ? M. Verchère ne dit-il pas lui aussi : « Je connais une fort honnête dame, qui ne peut traverser la place du Carrousel, si mal pavée, dans l’omnibus Batignolles-Clichy-Odéon, sans éprouver l’orgasme vénérien. » S’ensuit-il que l’on doive interdire à toutes les femmes l’omnibus et la voiture munie de pneumatiques ?

Et si, par hasard, une promenade à bicyclette révèle à une cycliste novice une satisfaction génitale, il ne faut pas conclure que la bicyclette crée des dépravées.

Du reste, dans l’enquête ouverte par nous en vue de ce travail, toutes les réponses ont été négatives à cette question : Éprouvez-vous quelque plaisir d’ordre intime lorsque vous pédalez ? Il ne faut donc pas accuser la bicyclette, mais la bicycliste.

Dr Ludovic O'Followell, Bicyclette et organes génitaux (J.-B. Baillière et fils, 1900, pp. 63-72)